[34,4] IV. <1> Εἰ δέ τινα μὴ συμφωνεῖ, μεταβολὰς αἰτιᾶσθαι δεῖν ἢ ἄγνοιαν ἢ καὶ ποιητικὴν ἐξουσίαν, ἣ συνέστηκεν ἐξ ἱστορίας καὶ διαθέσεως καὶ μύθου. <2> Τῆς μὲν οὖν ἱστορίας ἀλήθειαν εἶναι τέλος, ὡς ἐν Νεῶν καταλόγῳ τὰ ἑκάστοις τόποις συμβεβηκότα λέγοντος τοῦ ποιητοῦ, τὴν μὲν πετρήεσσαν, τὴν δὲ ἐσχατόωσαν πόλιν, ἄλλην δὲ πολυτρήρωνα, τὴν δ᾽ ἀγχίαλον· <3> τῆς δὲ διαθέσεως ἐνέργειαν εἶναι τὸ τέλος, ὡς ὅταν μαχομένους εἰσάγῃ, μύθου δὲ ἡδονὴν καὶ ἔκπληξιν. <4> Τὸ δὲ πάντα πλάττειν οὐ πιθανὸν οὐδ᾽ Ὁμηρικόν· τὴν γὰρ ἐκείνου ποίησιν φιλοσόφημα πάντας νομίζειν, οὐχ ὡς Ἐρατοσθένης φησί, κελεύων μὴ κρίνειν πρὸς τὴν διάνοιαν τὰ ποιήματα μηδ᾽ ἱστορίαν ἀπ᾽ αὐτῶν ζητεῖν.
<5> Πιθανώτερόν τε τὸ ἔνθεν δ᾽ ἐννῆμαρ φερόμην ὀλοοῖς ἀνέμοισιν
ἐν βραχεῖ διαστήματι δέχεσθαι — οἱ γὰρ ὀλοοὶ οὐκ εὐθύδρομοι — ἢ ἐξωκεανίζειν, ὡς ἂν οὐρίων πνεόντων συνεχῶς. <6> Συνθεὶς δὲ τὸ διάστημα τὸ ἐκ Μαλεῶν ἐπὶ στήλας σταδίων δισμυρίων καὶ δισχιλίων πεντακοσίων, εἰ, φησί, τοῦτο θείημεν ἐν ταῖς ἐννέα ἡμέραις διηνύσθαι ἰσοταχῶς, ἑκάστης ἂν ἡμέρας ὁ πλοῦς συμβαίνοι σταδίων δισχιλίων πεντακοσίων. <7> Τίς οὖν ἱστόρηκεν ἐκ Λυκίας ἢ Ῥόδου δευτεραῖόν τινα ἀφιγμένον εἰς Ἀλεξάνδρειαν, ὄντος τοῦ διαστήματος σταδίων τετρακισχιλίων; <8> πρὸς δὲ τοὺς ἐπιζητοῦντας πῶς τρὶς εἰς Σικελίαν ἐλθὼν οὐδ᾽ ἅπαξ διὰ τοῦ πορθμοῦ πέπλευκεν Ὀδυσσεύς, ἀπολογεῖται διότι καὶ οἱ ὕστερον ἔφευγον ἅπαντες τὸν πλοῦν τοῦτον. Τοιαῦτα μὲν εἴρηκεν.
| [34,4] IV. <1> S'il existe quelque différence entre la vérité et la fiction, il faut en accuser, soit les changements nécessairement survenus dans les choses, soit l'ignorance de l'auteur, soit la liberté particulière à la poésie. La poésie comprend à la fois trois parties : l'histoire, la fable et l'art de disposer les matériaux. <2> Dans ce qui est historique, le poète a pour but la vérité, comme par exemple, dans le catalogue de la flotte grecque, où Homère désigne chaque lieu par un trait caractéristique, où il dit que telle ville s'élève sur un rocher, que telle autre est placée sur la frontière, où il appelle celle-ci féconde en colombes, et celle-là voisine de la mer. <3> Dans la disposition, il se propose la clarté, comme lorsqu'il s'agit d'introduire des combattants sur la scène. Enfin, dans la fiction, il ne veut que plaire à l'imagination et la charmer. <4> Mais, encore une fois, tout inventer dans la fiction même est chose invraisemblablé, et n'est pas d'ailleurs conforme aux habitudes d'Homère. On regarde ses ouvrages comme philosophiques, bien contrairement à l'opinion d'Ératosthène, qui établit en principe, de ne point juger un poème d'après la raison, et de n'y chercher jamais de l'histoire. >5> Voyez ce vers, dit encore Polybe :
« De là, pendant neuf jours, je fus emporté par des vents impétueux. »
Il est bien plus vraisemblable de l'appliquer à des courses incertaines sur un étroit espace (et jamais, en effet, des vents déchaînés ne poussent en ligne droite) qu'à une course continue vers l'Océan, comme si toujours Ulysse eût eu un vent favorable. <6> Si on mesure la distance du cap Malée aux colonnes d'Hercule, on trouve vingt-deux mille cinq cents stades. En supposant que le trajet ait été fait par Ulysse, en neuf jours, avec une égale vitesse, on doit compter par jour deux mille cinq cents stades. <7> Or, qui jamais a entendu dire que quelqu'un fût allé de Lycie ou de Rhodes, en deux jours, à Alexandrie, bien que la distance ne dépasse pas quatre mille stades? <8> Quant à ceux qui demandent comment Ulysse, ayant fait trois voyages en Sicile, n'a pas une seule fois franchi le détroit, on peut leur répondre que beaucoup de voyageurs postérieurs ont évité cette traversée.
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