[4,20] Ἐπειδὴ δὲ κοινῇ τὸ τῶν Ἀρκάδων ἔθνος ἔχει
τινὰ παρὰ πᾶσι τοῖς Ἕλλησιν ἐπ´ ἀρετῇ φήμην, οὐ
μόνον διὰ τὴν ἐν τοῖς ἤθεσι καὶ βίοις φιλοξενίαν
καὶ φιλανθρωπίαν, μάλιστα δὲ διὰ τὴν εἰς τὸ θεῖον
εὐσέβειαν, ἄξιον βραχὺ διαπορῆσαι περὶ τῆς Κυναιθέων
ἀγριότητος, πῶς ὄντες ὁμολογουμένως Ἀρκάδες
τοσοῦτο κατ´ ἐκείνους τοὺς καιροὺς διήνεγκαν
τῶν ἄλλων Ἑλλήνων ὠμότητι καὶ παρανομίᾳ. δοκοῦσι
δέ μοι, διότι τὰ καλῶς ὑπὸ τῶν ἀρχαίων
ἐπινενοημένα καὶ φυσικῶς συντεθεωρημένα περὶ
πάντας τοὺς κατοικοῦντας τὴν Ἀρκαδίαν, ταῦτα
δὴ πρῶτοι καὶ μόνοι τῶν Ἀρκάδων ἐγκατέλιπον.
μουσικὴν γάρ, τήν γ´ ἀληθῶς μουσικήν, πᾶσι μὲν
ἀνθρώποις ὄφελος ἀσκεῖν, Ἀρκάσι δὲ καὶ ἀναγκαῖον.
οὐ γὰρ ἡγητέον μουσικήν, ὡς Ἔφορός φησιν ἐν τῷ
προοιμίῳ τῆς ὅλης πραγματείας, οὐδαμῶς ἁρμόζοντα
λόγον αὑτῷ ῥίψας, ἐπ´ ἀπάτῃ καὶ γοητείᾳ παρεισῆχθαι
τοῖς ἀνθρώποις, οὐδὲ τοὺς παλαιοὺς Κρητῶν
καὶ Λακεδαιμονίων αὐλὸν καὶ ῥυθμὸν εἰς τὸν πόλεμον
ἀντὶ σάλπιγγος εἰκῇ νομιστέον εἰσαγαγεῖν,
οὐδὲ τοὺς πρώτους Ἀρκάδων εἰς τὴν ὅλην πολιτείαν
τὴν μουσικὴν παραλαβεῖν ἐπὶ τοσοῦτον ὥστε
μὴ μόνον παισὶν οὖσιν, ἀλλὰ καὶ νεανίσκοις γενομένοις
ἕως τριάκοντ´ ἐτῶν κατ´ ἀνάγκην σύντροφον
ποιεῖν αὐτήν, τἄλλα τοῖς βίοις ὄντας αὐστηροτάτους.
ταῦτα γὰρ πᾶσίν ἐστι γνώριμα καὶ συνήθη,
διότι σχεδὸν παρὰ μόνοις Ἀρκάσι πρῶτον μὲν οἱ
παῖδες ἐκ νηπίων ᾄδειν ἐθίζονται κατὰ νόμους τοὺς
ὕμνους καὶ παιᾶνας, οἷς ἕκαστοι κατὰ τὰ πάτρια
τοὺς ἐπιχωρίους ἥρωας καὶ θεοὺς ὑμνοῦσι· μετὰ
δὲ ταῦτα τοὺς Φιλοξένου καὶ Τιμοθέου νόμους μανθάνοντες
πολλῇ φιλοτιμίᾳ χορεύουσι κατ´ ἐνιαυτὸν
τοῖς Διονυσιακοῖς αὐληταῖς ἐν τοῖς θεάτροις, οἱ μὲν
παῖδες τοὺς παιδικοὺς ἀγῶνας, οἱ δὲ νεανίσκοι τοὺς
τῶν ἀνδρῶν λεγομένους. ὁμοίως γε μὴν καὶ παρ´
ὅλον τὸν βίον τὰς ἀγωγὰς τὰς ἐν ταῖς συνουσίαις
οὐχ οὕτως ποιοῦνται διὰ τῶν ἐπεισάκτων ἀκροαμάτων
ὡς δι´ αὑτῶν, ἀνὰ μέρος ᾄδειν ἀλλήλοις προστάττοντες.
καὶ τῶν μὲν ἄλλων μαθημάτων ἀρνηθῆναί
τι μὴ γινώσκειν οὐδὲν αἰσχρὸν ἡγοῦνται,
τήν γε μὴν ᾠδὴν οὔτ´ ἀρνηθῆναι δύνανται διὰ τὸ
κατ´ ἀνάγκην πάντας μανθάνειν, οὔθ´ ὁμολογοῦντες
ἀποτρίβεσθαι διὰ τὸ τῶν αἰσχρῶν παρ´ αὐτοῖς
νομίζεσθαι τοῦτο. καὶ μὴν ἐμβατήρια μετ´ αὐλοῦ
καὶ τάξεως ἀσκοῦντες, ἔτι δ´ ὀρχήσεις ἐκπονοῦντες
μετὰ κοινῆς ἐπιστροφῆς καὶ δαπάνης κατ´ ἐνιαυτὸν
ἐν τοῖς θεάτροις ἐπιδείκνυνται τοῖς αὑτῶν πολίταις οἱ νέοι.
| [4,20] Comme les Arcadiens, en général, jouissent
dans toute la Grèce d'une grande réputation de vertu
pour leur habitude de pratiquer l'hospitalité, pour
leurs sentiments d'humanité et surtout pour leur piété
envers les dieux, il ne sera pas inutile d'expliquer en
quelques mots comment les Cynéthéens, qui étaient
incontestablement des Arcadiens, ont pu dépasser de
loin, en cruauté et en scélératesse, tous les autres Grecs
de cette époque. Cela provient, à mon avis, de ce qu'ils
ont été les premiers — et les seuls — dans toute l'Arcadie
à abandonner une excellente institution de leurs
ancêtres, admirablement appropriée au caractère de
tous les habitants du pays : l'étude de la musique —
j'entends, de la vraie musique — chose utile à tous les
hommes, mais absolument indispensable aux Arcadiens.
Il ne faut pas croire, comme l'avance Éphore dans un
passage de l'introduction de son traité d'histoire universelle,
où l'on ne retrouve pas sa sagacité ordinaire,
que la musique n'a été inventée que pour éblouir et
abuser les hommes ; il ne faut pas s'imaginer que ce
soit sans raison que les Crétois et les Lacédémoniens
ont dès les temps anciens adopté, pour accompagner
les marches militaires, la flûte et le chant rythmé au
lieu de la trompette, ni que les premiers Arcadiens
aient attribué dans la vie publique une place si importante
à la musique. En effet, ce n'est pas seulement
pour les enfants, mais aussi pour les jeunes gens jusqu'à
trente ans que chez ce peuple, par ailleurs si austère
dans ses moeurs, l'étude en est obligatoire. Ce n'est
guère qu'en Arcadie — tout le monde le sait par expérience
— que les enfants sont exercés dès leur plus
jeune âge à chanter des hymnes et des péans en
l'honneur des dieux et des héros de leur pays : c'est
une loi nationale qui l'exige. Ils apprennent les nomes
de Philoxène et de Timothée, et chaque année, aux
Dionysies, c'est avec une égale ardeur que les enfants
exécutent en choeur, sur la scène, au son des flûtes, les
jeux qu'on appelle enfantins, tandis que les jeunes gens
y célèbrent les jeux dits des hommes. De même, au
cours de toute leur vie, quand ils veulent donner de
l'agrément à une réunion, ils ne font pas appel à des
virtuoses étrangers, mais ce sont les conviés eux-mêmes
qui doivent chanter chacun à son tour. Ils croient pouvoir,
sans honte, se refuser à apprendre aucune des autres
sciences ; mais personne ne peut se soustraire à l'obligation
d'étudier le chant ; il ne leur est même pas
possible de se défendre de chanter tout en reconnaissant
qu'ils savent, car ce serait considéré chez eux
comme une inconvenance. Et quand les jeunes gens
défilent au pas en chantant des airs de marche au son
de la flûte ou qu'ils exécutent leurs choeurs sur la scène
dans des fêtes que l'État organise et dont il fait les frais,
ces cérémonies annuelles permettent à tous leurs compatriotes
de juger de leurs talents.
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