[3,89] Ἀννίβας δὲ συνεὶς τὴν παρουσίαν τοῦ Φαβίου
καὶ βουλόμενος ἐξ ἐφόδου καταπλήξασθαι
τοὺς ὑπεναντίους, ἐξαγαγὼν τὴν δύναμιν καὶ συνεγγίσας
τῷ τῶν Ῥωμαίων χάρακι παρετάξατο. χρόνον
δέ τινα μείνας, οὐδενὸς ἐπεξιόντος αὖθις ἀνεχώρησεν
εἰς τὴν ἑαυτοῦ παρεμβολήν. ὁ γὰρ Φάβιος
διεγνωκὼς μήτε παραβάλλεσθαι μήτε διακινδυνεύειν,
στοχάζεσθαι δὲ πρῶτον καὶ μάλιστα τῆς ἀσφαλείας
τῶν ὑποταττομένων, ἔμενε βεβαίως ἐπὶ τῆς διαλήψεως
ταύτης. τὰς μὲν οὖν ἀρχὰς κατεφρονεῖτο καὶ
παρεῖχε λόγον ὡς ἀποδεδειλιακὼς καὶ καταπεπληγμένος
τὸν κίνδυνον, τῷ δὲ χρόνῳ πάντας ἠνάγκασε
παρομολογῆσαι καὶ συγχωρεῖν ὡς οὔτε νουνεχέστερον
οὔτε φρονιμώτερον οὐδένα δυνατὸν ἦν χρῆσθαι
τοῖς τότε περιεστῶσι καιροῖς. ταχὺ δὲ καὶ τὰ πράγματα
προσεμαρτύρησε τοῖς λογισμοῖς αὐτοῦ. καὶ τοῦτ´
εἰκότως ἐγένετο. τὰς μὲν γὰρ τῶν ὑπεναντίων δυνάμεις
συνέβαινε γεγυμνάσθαι μὲν ἐκ τῆς πρώτης ἡλικίας
συνεχῶς ἐν τοῖς πολεμικοῖς, ἡγεμόνι δὲ χρῆσθαι
συντεθραμμένῳ σφίσι καὶ παιδομαθεῖ περὶ τὰς ἐν
τοῖς ὑπαίθροις χρείας, νενικηκέναι δὲ πολλὰς μὲν
ἐν Ἰβηρίᾳ μάχας, δὶς δὲ Ῥωμαίους ἑξῆς καὶ τοὺς
συμμάχους αὐτῶν, τὸ δὲ μέγιστον, ἀπεγνωκότας πάντα
μίαν ἔχειν ἐλπίδα τῆς σωτηρίας τὴν ἐν τῷ νικᾶν·
περὶ δὲ τὴν τῶν Ῥωμαίων στρατιὰν τἀναντία τούτοις
ὑπῆρχε. διόπερ εἰς μὲν τὸν ὑπὲρ τῶν ὅλων
κίνδυνον οὐχ οἷός τ´ ἦν συγκαταβαίνειν, προδήλου
τῆς ἐλαττώσεως ὑπαρχούσης· εἰς δὲ τὰ σφέτερα προτερήματα
τοῖς λογισμοῖς ἀναχωρήσας ἐν τούτοις
διέτριβε καὶ διὰ τούτων ἐχείριζε τὸν πόλεμον. ἦν
δὲ τὰ προτερήματα Ῥωμαίων ἀκατάτριπτα χορήγια
καὶ χειρῶν πλῆθος.
| [3,89] Quand Hannibal se vit en présence
de Fabius, il voulut jeter tout de suite l'épouvante
dans les rangs ennemis ; il fit donc sortir son armée,
approcha des retranchements romains et se rangea en
bataille. Il attendit quelque temps, puis, comme personne
ne venait à sa rencontre, il rentra dans son camp.
C'est que Fabius était résolu à ne rien risquer et à ne
pas courir les chances d'une bataille ; sa première,
sa principale préoccupation était de ne pas exposer
ses troupes ; et rien ne put le faire dévier de cette ligne
de conduite. Dans les premiers temps, cette méthode
ne lui valut que du mépris : on prétendait qu'il était
lâche, qu'il avait peur du danger ; mais plus tard tout
le monde fut obligé de reconnaître et d'avouer que
dans les circonstances où l'on se trouvait il était impossible
de prendre un parti plus prudent ou plus sensé;
il ne fallut pas longtemps pour que sa tactique fût
justifiée par les événements. Et il ne pouvait manquer
d'en être ainsi : l'armée ennemie était composée de
soldats qui, depuis leur plus jeune âge, ne cessaient
de s'exercer à la guerre ; ils étaient commandés par
un général élevé au milieu d'eux et habitué dès son
enfance à vivre dans les camps ; ils avaient gagné
bien des batailles en Espagne, ils avaient vaincu deux
fois de suite les Romains et leurs alliés ; mais surtout
ils luttaient en désespérés et n'avaient de salut possible
que dans la victoire. Pour les Romains, la situation
était tout opposée ; si Fabius avait eu l'imprudence
d'engager une action générale, la défaite était
certaine; mais il eut l'habileté de transporter la lutte
sur un terrain où tous les avantages étaient de son
côté et la fermeté de s'y tenir. Or ces avantages qu'avaient
les Romains, c'étaient des approvisionnements
inépuisables et une grande réserve d'hommes.
|