[23] XXIII. Καλὰ μὲν οὖν εἰκὸς εἶναι καὶ τὰ γινόμενα παρὰ τῶν
θεῶν· τὸ δὲ γίνεσθαι διὰ τῶν θεῶν ταῦτ´ αὐτὸ μεγάλην
ἡδονὴν ποιεῖ καὶ θάρσος ἀμήχανον καὶ φρόνημα καὶ χαρὰν
οἷον αὐγὴν ἐπιγελῶσαν τοῖς ἀγαθοῖς. οἱ δ´ ἄλλως ἔχοντες
τῆς μὲν εὐτυχίας τὸ ἥδιστον κολούουσι, ταῖς δὲ δυστυχίαις
ἀποστροφὴν οὐκ ἀπολείπουσιν, ἀλλ´ εἰς μίαν καταφυγὴν
καὶ λιμένα πράττοντες κακῶς τὴν διάλυσιν καὶ τὴν ἀναισθησίαν
ἀποβλέπουσιν· ὥσπερ εἴ τις ἐν πελάγει καὶ χειμῶνι
θαρρυνῶν ἐπιστὰς λέγοι μήτε τινὰ τὴν ναῦν ἔχειν
κυβερνήτην μήτε τοὺς Διοσκόρους αὐτοῖς ἀφίξεσθαι ’ἐπερχόμενόν
τε μαλάξοντας βίαιον πόντον ὠκείας τ´ ἀνέμων
ῥιπάς‘, οὐδὲν δ´ ὅμως εἶναι δεινόν, ἀλλ´ ὅσον οὐδέπω
καταποθήσεσθαι τὴν ναῦν ὑπὸ τῆς θαλάττης ἢ συντριβήσεσθαι
ταχὺ πρὸς πέτρας ἐκπεσοῦσαν. οὗτος γάρ ἐστιν ὁ
Ἐπικούρειος λόγος ἐν νόσοις δειναῖς καὶ πόνοις ὑπερβάλλουσιν·
’ἐλπίζεις τι χρηστὸν παρὰ θεῶν δι´ εὐσέβειαν;
τετύφωσαι· τὸ γὰρ μακάριον καὶ ἄφθαρτον οὔτ´ ὀργαῖς
οὔτε χάρισι συνέχεται. βέλτιόν τι τῶν ἐν τῷ βίῳ μετὰ τὸν
βίον ἐπινοεῖς; ἐξηπάτησαι· τὸ γὰρ διαλυθὲν ἀναισθητεῖ
τὸ δ´ ἀναισθητοῦν οὐδὲν πρὸς ἡμᾶς.‘ πῶς οὖν, ἄνθρωπε,
φαγεῖν με καὶ χαίρειν κελεύεις; ὅτι νὴ Δία χειμαζομένῳ
τὸ ναυάγιον ἐγγύς ἐστιν· ’ὁ γὰρ πόνος ὁ ὑπερβάλλων συνάψει
θανάτῳ.‘ καίτοι νεὼς μὲν ἐκπεσὼν ἐπιβάτης διαλυθείσης
ἐπ´ ἐλπίδος ὀχεῖταί τινος ὡς γῇ προσέξων τὸ
σῶμα καὶ διανηξόμενος, τῆς δὲ τούτων φιλοσοφίας ’ἔκβασις
οὔπη φαίνεθ´ ἁλὸς πολιοῖο θύραζε‘ τῇ ψυχῇ,
ἀλλ´ εὐθὺς ἠφάνισται καὶ διέσπαρται καὶ προαπόλωλε τοῦ
σώματος· ὥσθ´ ὑπερχαίρειν τὸ πάνσοφον τοῦτο δόγμα καὶ
θεῖον παραλαβοῦσαν, ὅτι τοῦ κακῶς πράττειν πέρας ἐστὶν
αὐτῇ τὸ ἀπολέσθαι καὶ φθαρῆναι καὶ μηδὲν εἶναι.
| [23] Ce sont de belles choses, rien n'est plus naturel,
que celles qui viennent aussi des Dieux; mais que ces choses
nous soient données par les Dieux mêmes, voilà qui
inspire une grande joie, une confiance inexprimable, une
fierté, une allégresse, qui rayonne comme une riante splendeur
au-dessus du front des mortels vertueux. Malheur aux
hommes qui vivent dans une opinion contraire ! Au bonheur
ils enlèvent son charme le plus doux, à l'infortune ils
ne laissent aucun refuge. Il n'y a pour eux qu'un seul asile,
qu'un seul port sur lequel, s'ils sont dans l'adversité, ils
puissent porter leurs regards : c'est le néant et l'insensibilité.
Il me semble voir un passager qui sur mer, dans une
tempête, se lève pour rassurer l'équipage, et dit :
«Le vaisseau n'a pas de pilote, les Dioscures se garderont bien
de venir eux-mêmes en personne
"Pour adoucir la mer et pour calmer les vents".
Il n'y a pourtant là rien qui soit fâcheux. Dans un
moment le navire sera englouti par les vagues, ou bien il se
brisera en allant échouer contre les rochers." Oui : tel
est le langage des Épicuriens au milieu des plus graves
maladies et des fatigues excessives."Tu espères, disent-ils,
quelque chose de bon de la part des Dieux, à cause de
leur bienveillance? Tu t'aveugles. Des êtres bienheureux
et impérissables ne sont capables ni de s'irriter ni de faire
du bien. Tu présumes entrer après la vie dans une condition
meilleure que cette vie même? Erreur : ce qui est
tombé en dissolution n'a plus de sentiment, et ce qui est
privé de sentiment n'est rien pour nous." Comment donc
se fait-il, ô philosophe, que tu m'engages à manger et à
me réjouir? C'est, sans doute, parce que dans la tempête on
est près du naufrage, et l'excessive souffrance te conduira
prochainement à la mort. Pourtant, même quand le navire
est brisé, le passager qui s'en échappe est soutenu par quelque
espérance : il abordera peut-être la côte à la nage, il pourra être
sauvé. Mais dans la philosophie d'Epicure, il n'est pour l'âme
"Nul moyen d'échapper aux vagues blanchissantes".
L'âme disparaît aussitôt : elle se dissipe, et sa dissolution précède
celle du corps. En sorte qu'elle éprouve une joie incomparable
à s'être pénétrée de cette croyance souverainement
sage et toute divine : "que tous ses malheurs sont
terminés par la mort, la destruction, le néant".
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