[8] Μαρτυρεῖ δὲ καὶ τὸ λεχθὲν ὑπ´ Ἐπαμεινώνδα
τοῦ μεγάλου πρὸς τοὺς Θηβαίους, ὅτε χειμῶνος
ὄντος οἱ Ἀρκάδες παρεκάλουν αὐτοὺς ἐν ταῖς οἰκίαις
διαιτᾶσθαι παρελθόντας εἰς τὴν πόλιν· οὐ γὰρ
εἴασεν, ἀλλὰ "νῦν μέν," ἔφη, "θαυμάζουσιν ὑμᾶς
καὶ θεῶνται πρὸς τὰ ὅπλα γυμναζομένους καὶ
παλαίοντας· ἂν δὲ πρὸς τῷ πυρὶ καθημένους ὁρῶσι
τὸν κύαμον κάπτοντας, οὐδὲν αὑτῶν ἡγήσονται
διαφέρειν." οὕτω δὴ σεμνόν ἐστι θέαμα πρεσβύτης
λέγων τι καὶ πράττων καὶ τιμώμενος, ὁ δ´ ἐν κλίνῃ
διημερεύων ἢ καθήμενος ἐν γωνίᾳ στοᾶς φλυαρῶν
καὶ ἀπομυττόμενος εὐκαταφρόνητος. τοῦτο δ´
ἀμέλει καὶ Ὅμηρος διδάσκει τοὺς ὀρθῶς ἀκούοντας·
ὁ μὲν γὰρ Νέστωρ στρατευόμενος ἐν Τροίᾳ σεμνὸς
ἦν καὶ πολυτίμητος, ὁ δὲ Πηλεὺς καὶ ὁ Λαέρτης
οἰκουροῦντες ἀπερρίφησαν καὶ κατεφρονήθησαν.
οὐδὲ γὰρ ἡ τοῦ φρονεῖν ἕξις ὁμοίως παραμένει τοῖς
μεθεῖσιν αὑτούς, ἀλλ´ ὑπ´ ἀργίας ἐξανιεμένη καὶ
ἀναλυομένη κατὰ μικρὸν ἀεί τινα ποθεῖ φροντίδος
μελέτην, τὸ λογιστικὸν καὶ πρακτικὸν ἐγειρούσης
καὶ διακαθαιρούσης·
"λάμπει γὰρ ἐν χρείαισιν, ὥσπερ εὐπρεπὴς χαλκός."
οὐ γὰρ τόσον σώματος ἀσθένεια κακὸν πρόσεστι
ταῖς πολιτείαις τῶν παρ´ ἡλικίαν ἐπὶ τὸ βῆμα καὶ
τὸ στρατήγιον βαδιζόντων, ὅσον ἔχουσιν ἀγαθὸν
τὴν εὐλάβειαν καὶ τὴν φρόνησιν, καὶ τὸ μὴ φερόμενον,
ἄλλοτε μὲν δι´ ἐσφαλμένα ὅτε δ´ ὑπὸ δόξης
κενῆς, προσπίπτειν πρὸς τὰ κοινὰ καὶ συνεφέλκεσθαι
τὸν ὄχλον, ὥσπερ θάλατταν ὑπὸ πνευμάτων ἐκταραττόμενον,
ἀλλὰ πράως τε χρῆσθαι καὶ μετρίως
τοῖς ἐντυγχάνουσιν. ὅθεν αἱ πόλεις, ὅταν πταίσωσιν
ἢ φοβηθῶσι, πρεσβυτέρων ποθοῦσιν ἀρχὴν
ἀνθρώπων· καὶ πολλάκις ἐξ ἀγροῦ κατάγουσαι
γέροντα μὴ δεόμενον μηδὲ βουλόμενον ἠνάγκασαν
ὥσπερ οἰάκων ἐφαψάμενον εἰς ἀσφαλὲς καταστῆσαι
τὰ πράγματα, παρωσάμεναί τε στρατηγοὺς καὶ
δημαγωγοὺς βοᾶν μέγα καὶ λέγειν ἀπνευστὶ καὶ νὴ
Δία τοῖς πολεμίοις διαβάντας εὖ μάχεσθαι δυναμένους·
οἷον οἱ ῥήτορες Ἀθήνησι Τιμοθέῳ καὶ
Ἰφικράτει Χάρητα τὸν Θεοχάρους ἐπαποδύοντες
ἀκμάζοντα τῷ σώματι καὶ ῥωμαλέον ἠξίουν τοιοῦτον
εἶναι τὸν τῶν Ἀθηναίων στρατηγόν, ὁ
δὲ Τιμόθεος "οὐ μὰ τοὺς θεούς," εἶπεν, "ἀλλὰ
τοιοῦτον μὲν εἶναι τὸν μέλλοντα τῷ στρατηγῷ τὰ
στρώματα κομίζειν, τὸν δὲ στρατηγόν ’ἅμα πρόσω
καὶ ὀπίσω‘ τῶν πραγμάτων ὁρῶντα καὶ μηδενὶ
πάθει τοὺς περὶ τῶν συμφερόντων λογισμοὺς ἐπιταραττόμενον."
ὁ γὰρ Σοφοκλῆς ἄσμενος ἔφη τὰ
ἀφροδίσια γεγηρακὼς ἀποπεφευγέναι καθάπερ ἄγριον
καὶ λυσσῶντα δεσπότην· ἐν δὲ ταῖς πολιτείαις
οὐχ ἕνα δεῖ δεσπότην, ἔρωτα παίδων ἢ γυναικῶν,
: ἀποφεύγειν, ἀλλὰ πολλοὺς μανικωτέρους τούτου,
: φιλονεικίαν, φιλοδοξίαν, τὴν τοῦ πρῶτον εἶναι καὶ
: μέγιστον ἐπιθυμίαν, γονιμώτατον φθόνου νόσημα
καὶ ζηλοτυπίας καὶ διχοστασίας· ὧν τὰ μὲν ἀνίησι
καὶ παραμβλύνει, τὰ δ´ ὅλως ἀποσβέννυσι καὶ
καταψύχει τὸ γῆρας, οὐ τοσοῦτον τῆς πρακτικῆς
ὁρμῆς παραιρούμενον, ὅσον τῶν ἀκρατῶν καὶ διαπύρων
ἀπερύκει παθῶν, ὥστε νήφοντα καὶ καθεστηκότα
τὸν λογισμὸν ἐπάγειν ταῖς φροντίσιν.
| [8] C'est ce qu'attestent les paroles du grand Epaminondas
aux Thébains, lorsque, pendant un hiver, les Arcadiens les
engageaient à entrer dans la ville et à se cantonner dans les
maisons. Il ne le permit pas : «Maintenant, dit-il à ses soldats,
ils nous admirent quand sous leurs yeux nous nous exerçons
revêtus de nos armes et que nous nous escrimons à la lutte,
mais s'ils nous voient assis devant le feu et écossant des
fèves, ils estimeront que nous ne valons pas plus qu'eux.»
Ainsi, c'est un spectacle imposant qu'un vieillard qui parle,
qui agit et qui est révéré. Mais un homme âgé passant la
journée entière sur un lit, ou bien assis dans un coin du
portique où il dit des balivernes et a la roupie au nez, est
tout ce qu'il y a de plus méprisable.
C'est ce qu'enseigne parfaitement Homère à ceux qui savent
entendre ce poète. Nestor, prenant part à l'expédition
dirigée contre Troie, était respecté et entouré d'hommages ;
mais Pélée et Laërte, restés au logis, furent l'objet du mépris
et des rebuts. D'ailleurs la vigueur de la prudence ne
persiste pas à un degré égal chez ceux qui s'abandonnent
eux-mêmes : le désoeuvrement l'énerve et la détruit insensiblement.
Elle a toujours besoin de quelque exercice qui
occupe sa méditation ; et cette méditation maintient les facultés
de l'intelligence et l'aptitude aux affaires dans un état
de vigilance et de lucidité,
"Comme l'usage donne à l'acier son brillant".
La faiblesse du corps n'est pas un aussi grave obstacle
aux succès politiques pour ceux qui chargés d'ans montent à
la tribune ou commandent les armées, que la circonspection
et la prudence ne leur donne de supériorité. Comme ils ne
se dirigent point d'après les apparences, ils ne s'exposent
pas à des chutes. Ce n'est pas une vaine ambition qui les jette
au milieu des affaires publiques pour entraîner avec eux la
multitude et en bouleverser les flots comme le vent bouleverse
la mer. Ils se montrent toujours pleins de douceur et
de modération envers ceux à qui ils ont affaire. Aussi les
républiques, quand elles chancellent ou qu'elles craignent un
danger, demandent-elles à être commandées par des hommes
d'âge. Que de fois tira-t-on de son champ un vieillard sans
qu'il le demandât ou le voulût, et l'obligea-t-on de prendre
en quelque sorte le gouvernail en main, afin qu'il remît à flot
le vaisseau de l'Etat! Et l'on repoussait des généraux et des
orateurs populaires, qui pourtant savaient crier bien fort,
parler sans reprendre haleine, et aussi, il faut en convenir,
s'élancer au milieu des ennemis pour combattre vaillamment.
Ainsi, lorsque les orateurs d'Athènes qui voulaient
déposséder du commandement Timothée et Iphicrate en faveur
de Charès, fils de Théocharès, vantaient la jeunesse et
la vigueur de ce Charès et prétendaient que tel devait être
le général des Athéniens, Timothée répondit à ces orateurs :
«Non, de par les Dieux, mais tel doit être celui qui portera
les couvertures du général. Le vrai général est celui qui voit
à la fois par devant et par derrière, celui qu'aucune passion
ne trouble quand il s'agit de songer aux intérêts communs.»
Écoutons Sophocle : «C'est avec joie, dit-il, que je me
vois, grâce à la vieillesse, échappé aux entraînements des plaisirs
de l'amour, comme à un maître farouche et enragé.» Or,
dans la carrière politique, ce n'est pas un maître seulement
qu'il s'agit de fuir, à savoir l'amour des garçons ou des femmes.
Il y en a bien d'autres plus furieux que celui-là : la jalousie,
l'ambition, le désir d'être le premier et le plus influent.
Ce sont là autant de maladies qui traînent à leur suite la
haine, l'envie et la discorde. Or de ces maladies, les unes
se ralentissent et s'émoussent, les autres sont éteintes et refroidies
complétement au contact de la vieillesse. Cette dernière
n'enlève pas tant à nos facultés l'action proprement
dite, qu'elle ne nous écarte des passions déréglées et brûlantes :
de sorte qu'elle met au service de l'homme qui veut
s'occuper des affaires un esprit sobre et parfaitement rassis.
|