HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales - S'il est vrai qu'il faille mener une vie cachée

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[1130] ὥσπερ οὐδ´ φθορὰ τοῦ ὄντος ἄρσις εἰς τὸ μὴ ὄν ἐστιν, ἀλλὰ μᾶλλον εἰς τὸ ἄδηλον ἀπαγωγὴ τοῦ διαλυθέντος. Ὅθεν δὴ τὸν μὲν ἥλιον Ἀπόλλωνα κατὰ τοὺς πατρίους καὶ παλαιοὺς θεσμοὺς νομίζοντες Δήλιον καὶ Πύθιον προσαγορεύουσι· τὸν δὲ τῆς ἐναντίας κύριον μοίρας, εἴτε θεὸς εἴτε δαίμων ἐστίν, ὀνομάζουσιν, ὡς ἂν εἰς ἀειδὲς καὶ ἀόρατον ἡμῶν, ὅταν διαλυθῶμεν, βαδιζόντων, ‘Νυκτὸς ἀιδνᾶς ἀεργηλοῖό θ´ ὕπνου κοίρανον’. Οἶμαι δὲ καὶ τὸν ἄνθρωπον αὐτὸν οὑτωσὶ φῶτα καλεῖν τοὺς παλαιούς, ὅτι τοῦ γινώσκεσθαι καὶ γινώσκειν ἑκάστῳ διὰ συγγένειαν ἔρως ἰσχυρὸς ἐμπέφυκεν. Αὐτήν τε τὴν ψυχὴν ἔνιοι τῶν φιλοσόφων φῶς εἶναι τῇ οὐσίᾳ νομίζουσιν, ἄλλοις τε χρώμενοι τεκμηρίοις καὶ ὅτι τῶν ὄντων μάλιστα τὴν μὲν ἄγνοιαν ψυχὴ δυσανασχετεῖ καὶ πᾶν τὸ ἀφεγγὲς ἐχθαίρει καὶ ταράττεται πρὸς τὰ σκοτεινά, φόβου καὶ ὑποψίας ὄντα πλήρη πρὸς αὐτήν· ἡδὺ δ´ αὐτῇ καὶ ποθεινὸν οὕτω τὸ φῶς ἐστιν, ὥστε μηδ´ ἄλλῳ τινὶ τῶν φύσει τερπνῶν ἄνευ φωτὸς ὑπὸ σκότους χαίρειν, ἀλλὰ τοῦτο πᾶσαν ἡδονὴν καὶ πᾶσαν διατριβὴν καὶ ἀπόλαυσιν, ὥσπερ τι κοινὸν ἥδυσμα καταμιγνύμενον, ἱλαρὰν ποιεῖ καὶ φιλάνθρωπον. δ´ εἰς τὴν ἄγνοιαν αὑτὸν ἐμβάλλων καὶ σκότος περιαμπισχόμενος καὶ κενοταφῶν τὸν βίον ἔοικεν αὐτὴν βαρύνεσθαι τὴν γένεσιν καὶ ἀπαυδᾶν πρὸς τὸ εἶναι. Καίτοι τῆς γε δόξης καὶ τοῦ εἶναι φύσιν εὐσεβῶν χῶρον, ‘Τοῖσι λάμπει μένος ἀελίου τὰν ἐνθάδε νύκτα κάτω, φοινικορόδοις ἐνὶ λειμώνεσσι’, καὶ {τοῖσιν} ἀκάρπων μὲν ἀνθηρῶν καὶ σκυθίων δένδρων ἄνθεσι τεθηλὸς ἀναπέπταται πεδίον, καὶ ποταμοί τινες ἄκλυστοι καὶ λεῖοι διαρρέουσι, καὶ διατριβὰς ἔχουσιν ἐν μνήμαις καὶ λόγοις τῶν γεγονότων καὶ ὄντων παραπέμποντες αὑτοὺς καὶ συνόντες. δὲ τρίτη τῶν ἀνοσίως βεβιωκότων καὶ παρανόμως ὁδός ἐστιν, εἰς ἔρεβός τι καὶ βάραθρον ὠθοῦσα τὰς ψυχάς, ‘ἔνθεν τὸν ἄπειρον ἐρεύγονται σκότον βληχροὶ δνοφερᾶς νυκτὸς ποταμοί’, δεχόμενοι καὶ ἀποκρύπτοντες ἀγνοίᾳ καὶ λήθῃ τοὺς κολαζομένους. Οὐ γὰρ οὔτε γῦπες κειμένων ἐν γῇ τῶν πονηρῶν κείρουσιν ἀεὶ τὸ ἧπαρ (κατακέκαυται γὰρ κατασέσηπεν), οὔτε βαρῶν τινων ἀχθοφορίαι θλίβουσι καὶ καταπονοῦσι τὰ σώματα τῶν κολαζομένων (‘οὐ γὰρ ἔτι σάρκας τε καὶ ὀστέα ἶνες ἔχουσιν’, οὐδ´ ἔστιν ὑπόλειμμα σώματος τοῖς τεθνηκόσι τιμωρίας ἀπέρεισιν ἀντιτύπου δέξασθαι δυνάμενονἀλλ´ ἓν κολαστήριον ὡς ἀληθῶς τῶν κακῶς βιωσάντων, ἀδοξία καὶ ἄγνοια καὶ παντελῶς ἀφανισμός, αἴρων εἰς τὸν ἀμειδῆ ποταμὸν {ἀπὸ} τῆς Λήθης καὶ καταποντίζων εἰς ἄβυσσον καὶ ἀχανὲς πέλαγος, ἀχρηστίαν καὶ ἀπραξίαν πᾶσάν τ´ ἄγνοιαν καὶ ἀδοξίαν συνεφελκόμενον. [1130] ainsi la corruption n'est pas l'anéantissement de l'être, mais le passage de la substance dissoute à un état d'obscurité totale. Voilà pourquoi Apollon, qui, d'après les plus anciennes traditions de nos pères, est le même dieu que le soleil, se nomme Delius et Pythius ; au lieu que le souverain du monde inférieur, soit dieu, soit génie, porte le nom d'Adès, parce que après notre dissolution, nous allons dans un lieu obscur et invisible. "C'est le roi du sommeil, de la nuit ténébreuse". Je crois que les anciens ont donné à l'homme le même nom qu'à la lumière, parce que la consanguinité qui lie tous les hommes leur donne un ardent désir de se connaître les uns les autres. Il y a même des philosophes qui croient que la lumière forme la substance de l'âme ; et entre plusieurs autres motifs, ce qui les porte surtout à le penser, c'est l'aversion extrême qu'elle a pour l'ignorance, le soin avec lequel elle évite tout ce qui est obscur, le trouble qu'elle éprouve quand elle est dans des lieux ténébreux, où tout excite ses craintes et ses soupçons. La lumière lui est si douce, elle la désire si vivement, qu'elle ne veut pas avoir dans les ténèbres les choses qui lui plaisent le plus ; que la lumière lui rend plus agréables et plus purs tous les plaisirs, tous les amusements, toutes les jouissances, et que la clarté en est comme l'assaisonnement. Mais celui qui se plonge volontairement dans l'obscurité, qui s'enveloppe de ténèbres et s'enterre tout vivant, semble avoir regret à son existence, et être dégoûté de la vie. C'est une opinion généralement reçue qu'il y a un séjour où vivent les ames des justes. "Là jamais le soleil n'interrompant son cours, Au sein même des nuits leur donne de beaux jours. Ils respirent l'odeur de la rose fleurie Qui mêle son éclat au vert de la prairie. D'arbres chargés de fruit le feuillage immortel Fait régner dans ces lieux un printemps éternel". Là coulent des fleuves paisibles dont les ondes tranquilles ne franchissent jamais leurs rives. Les habitants de ce séjour fortuné charment leurs loisirs par le souvenir du passé et par de doux entretiens sur leur bonheur présent. Il est un autre chemin beaucoup plus fréquenté : c'est celui par où les ames des méchants qui ont transgressé les lois sont poussées dans un abîme ténébreux, "Où de l'affreuse nuit les fleuves redoutables Les couvrent pour jamais de ténèbres palpables", et les retiennent dans leurs eaux; où leur partage éternel est l'obscurité et l'oubli. Ce ne sont pas des vautours cruels qui déchirent sans cesse les entrailles des scélérats étendus sur la terre : elles ont été consumées par le feu ou sont tombées en pourriture. Leurs corps ne sont pas accablés sous le poids de masses énormes qu'ils soient obligés de traîner. "Les morts sont dépouillés de chairs et d'ossements". Il ne leur reste plus rien de corporel qui soit susceptible d'un châtiment, lequel ne peut s'exercer que sur des substances solides et capables de résistance. La seule punition des méchants sera donc l'obscurité et l'oubli ; totalement ignorés, ils disparaîtront pour jamais dans le fleuve odieux du Léthé; ils seront plongés dans une vaste mer sans rivage et sans fond, et ils y seront condamnés à une lâche inaction, à un oubli général, à l'obscurité la plus profonde.


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Dernière mise à jour : 4/12/2008