[7] ΜΗΛΙΑΙ.
Μήλιοι γῆς χρῄζοντες ἀμφιλαφοῦς Νυμφαῖον ἡγεμόνα
τῆς ἀποικίας ἐποιήσαντο, νέον ἄνδρα καὶ κάλλει διαφέροντα·
τοῦ δὲ θεοῦ πλεῖν κελεύσαντος αὐτούς, ὅπου
δ´ ἂν ἀποβάλωσι τοὺς κομιστῆρας, ἐκεῖ κατοικεῖν, συνέπεσε
τῇ Καρίᾳ προσβαλοῦσιν αὐτοῖς καὶ ἀποβᾶσι τὰς
ναῦς ὑπὸ χειμῶνος διαφθαρῆναι. τῶν δὲ Καρῶν οἱ
Κρύασσαν οἰκοῦντες, εἴτε τὴν ἀπορίαν οἰκτείραντες εἴτε
δείσαντες αὐτῶν τὴν τόλμαν, ἐκέλευον οἰκεῖν παρ´ αὐτοῖς
καὶ τῆς χώρας μετέδωκαν· εἶτα πολλὴν ἐν ὀλίγῳ χρόνῳ
λαμβάνοντας αὔξησιν ὁρῶντες, ἐπεβούλευον ἀνελεῖν εὐωχίαν
τινὰ καὶ θοίνην παρασκευάσαντες. ἔτυχε δὲ Καρίνη
παρθένος ἐρῶσα τοῦ Νυμφαίου καὶ λανθάνουσα τοὺς
ἄλλους· ἐκαλεῖτο δὲ Καφένη· πραττομένων δὲ τούτων
οὐ δυναμένη τὸν Νυμφαῖον περιορᾶν ἀπολλύμενον ἐξήγγειλε
τὴν διάνοιαν αὐτῷ τῶν πολιτῶν. ὡς οὖν ἧκον οἱ
Κρυασσεῖς καλοῦντες αὐτούς, οὐκ ἔφη νόμον ὁ Νυμφαῖος
Ἕλλησιν εἶναι βαδίζειν ἐπὶ δεῖπνον ἄνευ γυναικῶν·
ἀκούσαντες δ´ οἱ Κᾶρες ἐκέλευον ἄγειν καὶ τὰς γυναῖκας.
οὕτω δὴ φράσας τὰ πεπραγμένα Μηλίοις ἐκέλευσεν
αὐτοὺς μὲν ἀνόπλους ἐν ἱματίοις βαδίζειν, τῶν δὲ γυναικῶν
ἑκάστην ξίφος ἐν τῷ κόλπῳ κομίζειν καὶ καθέζεσθαι
παρὰ τὸν αὑτῆς. ἐπεὶ δὲ τοῦ δείπνου μεσοῦντος
ἐδόθη τὸ σύνθημα τοῖς Καρσὶ καὶ συνῄσθοντο τὸν καιρὸν
οἱ Ἕλληνες, αἱ μὲν γυναῖκες ἅμα πᾶσαι τοὺς κόλπους
διέσχον, οἱ δὲ τὰ ξίφη λαβόντες ἐπέθεντο τοῖς βαρβάροις
καὶ διέφθειραν αὐτοὺς ἅμα πάντας· κτησάμενοι δὲ τὴν
χώραν καὶ τὴν πόλιν ἐκείνην καταβαλόντες ᾤκισαν ἑτέραν,
ἣν Νέαν Κρύασσαν ὠνόμασαν. ἡ δὲ Καφένη τῷ
Νυμφαίῳ γαμηθεῖσα τιμὴν καὶ χάριν ἔσχε ταῖς εὐεργεσίαις
πρέπουσαν. ἄξιον οὖν ἄγασθαι τῶν γυναικῶν
καὶ τὴν σιωπὴν καὶ τὸ θάρσος καὶ τὸ μηδεμίαν ἐν πολλαῖς
μηδ´ ἄκουσαν ὑπὸ δειλίας κακὴν γενέσθαι.
| [7] MÉLIENNES.
Les Méliens, sentant le besoin d'un territoire plus étendu,
se donnèrent pour chef de la colonie qui partait un jeune
homme d'une beauté remarquable, nommé Nymphée. Le
Dieu leur ordonna de prendre la voie de mer et de s'établir
dans l'endroit «où ils auraient perdu leurs porteurs.» Il
arriva qu'au moment où ils abordaient en Carie et y débarquaient,
leurs vaisseaux furent détruits par une tempête.
Les Cariens qui habitaient Cryasse les invitèrent, soit par
compassion pour leur manque de ressources, soit par crainte
de leur audace, à s'établir auprès d'eux, et leur cédèrent une
portion de leur territoire. Plus tard, comme on vit qu'en peu
de temps ils avaient pris un accroissement considérable, on
résolut de les faire périr par embûches dans un banquet et
une fête que l'on prépara. Le hasard voulut qu'une jeune Carienne
nommée Caphène fût, à l'insu de tous, amoureuse de
Nymphée; et pendant que ce complot s'organisait elle lui
révéla, ne pouvant de sang-froid se résigner à le voir périr,
ce que méditaient les habitants de la ville. Les Cryassiens
viennent donc faire leur invitation, Nymphée déclare qu'une
loi défend à des Grecs de se rendre à un festin sans leurs femmes;
ce qu'ayant entendu, les Cariens les autorisent à mener
aussi leurs moitiés. Nymphée, qui avait instruit ses Méliens
du complot, voulut qu'ils vinssent en simple tunique et sans
armes; mais il fut convenu que leurs femmes porteraient
toutes une épée sous leur robe, et que chacune d'elles prendrait
place auprès de son mari. Au milieu du repas les Cariens
reçoivent le signal convenu. Les Grecs ont compris que
le moment est arrivé. Leurs femmes ayant toutes à la fois
entr'ouvert leurs robes, ils saisissent les épées, se jettent
sur les Barbares, et les massacrent tous sans exception.
Devenus maîtres du territoire ils détruisirent la ville, et ils
en fondèrent une autre, qu'ils nommèrent la nouvelle Cryasse.
Pour Caphène, elle épousa Nymphée, et reçut les témoignages
d'honneur et de reconnaissance qui convenaient à
ses éminents services. Combien ne doit-on pas admirer chez
ces femmes leur silence, leur sang-froid, et l'unanimité
qu'elles montrèrent! Pas une seule d'entr'elles, dans un si
grand nombre, ne céda, même par une faiblesse involontaire,
à un mouvement de lâcheté.
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