[26] ΞΕΝΟΚΡΙΤΗ.
Οὐχ ἧττον δ´ ἄν τις ἀγάσαιτο τὴν Κυμαίαν Ξενοκρίτην
ἐπὶ τοῖς πραχθεῖσι περὶ Ἀριστόδημον τὸν τύραννον,
ᾧ τινες Μαλακὸν ἐπίκλησιν οἴονται γεγονέναι, τὸ
ἀληθὲς ἀγνοοῦντες. ἐπεκλήθη γὰρ ὑπὸ τῶν βαρβάρων
Μαλακός, ὅπερ ἐστὶν ἀντίπαις, ὅτι μειράκιον ὢν παντάπασι
μετὰ τῶν ἡλίκων ἔτι κομώντων (οὓς κορωνιστὰς
ὡς ἔοικεν ἀπὸ τῆς κόμης ὠνόμαζον) ἐν τοῖς πρὸς τοὺς
βαρβάρους πολέμοις ἐπιφανὴς ἦν καὶ λαμπρὸς οὐ τόλμῃ
μόνον οὐδὲ χειρὸς ἔργοις, ἀλλὰ καὶ συνέσει καὶ προνοίᾳ
φανεὶς περιττός. ὅθεν εἰς τὰς μεγίστας προῆλθεν ἀρχὰς
θαυμαζόμενος ὑπὸ τῶν πολιτῶν, καὶ Ῥωμαίοις ἐπικουρίαν
ἄγων ἐπέμφθη πολεμουμένοις ὑπὸ τῶν Τυρρηνῶν,
Ταρκύνιον Σούπερβον ἐπὶ τὴν βασιλείαν καταγόντων.
ἐν ταύτῃ δὲ τῇ στρατείᾳ μακρᾷ γενομένῃ πάντα
πρὸς χάριν ἐνδιδοὺς τοῖς στρατευομένοις τῶν πολιτῶν
καὶ δημαγωγῶν μᾶλλον ἢ στρατηγῶν ἔπεισεν αὐτοὺς
συνεπιθέσθαι τῇ βουλῇ καὶ συνεκβαλεῖν τοὺς ἀρίστους
καὶ δυνατωτάτους. ἐκ δὲ τούτου γενόμενος τύραννος ἦν
μὲν ἐν ταῖς περὶ γυναῖκας καὶ παῖδας ἐλευθέρους ἀδικίαις
αὐτὸς ἑαυτοῦ μοχθηρότατος. ἱστόρηται γάρ, ὅτι
τοὺς μὲν ἄρρενας παῖδας ἤσκει κομᾶν καὶ χρυσοφορεῖν,
τὰς δὲ θηλείας ἠνάγκαζε περιτρόχαλα κείρεσθαι καὶ
φορεῖν ἐφηβικὰς χλαμύδας κατὰ τῶν ἀνακώλων χιτωνίσκων.
οὐ μὴν ἀλλ´ ἐξαιρέτως ἐρασθεὶς τῆς Ξενοκρίτης
εἶχεν αὐτὴν φυγάδος οὖσαν πατρός, οὐ καταγαγὼν
οὐδὲ πείσας ἐκεῖνον, ἀλλ´ ὁπωσοῦν ἡγούμενος
ἀγαπᾶν συνοῦσαν αὐτῷ τὴν κόρην, ἅτε δὴ ζηλουμένην
καὶ μακαριζομένην ὑπὸ τῶν πολιτῶν. τὴν δὲ ταῦτα μὲν
οὐκ ἐξέπληττεν· ἀχθομένη δ´ ἐπὶ τῷ συνοικεῖν ἀνέκδοτος
καὶ ἀνέγγυος οὐδενὸς ἧττον ἐπόθει τῶν μισουμένων
ὑπὸ τοῦ τυράννου τὴν τῆς πατρίδος ἐλευθερίαν. ἔτυχε
δὲ κατ´ ἐκεῖνο καιροῦ τάφρον ἄγων κύκλῳ περὶ τὴν
χώραν ὁ Ἀριστόδημος, οὔτ´ ἀναγκαῖον ἔργον οὔτε χρήσιμον,
ἄλλως δὲ τρίβειν καὶ ἀποκναίειν πόνοις καὶ ἀσχολίαις
τοὺς πολίτας βουλόμενος· ἦν γὰρ προστεταγμένον
ἑκάστῳ μέτρων τινῶν ἀριθμὸν ἐκφέρειν τῆς γῆς. ὡς
εἶδεν ἐπιόντα τὸν Ἀριστόδημον, ἐξέκλινε καὶ παρεκαλύψατο
τῷ χιτωνίσκῳ τὸ πρόσωπον. ἀπελθόντος οὖν τοῦ
Ἀριστοδήμου, σκώπτοντες οἱ νεανίσκοι καὶ παίζοντες
ἠρώτων, ὅ τι δὴ μόνον ὑπ´ αἰδοῦς φύγοι τὸν Ἀριστόδημον,
πρὸς δὲ τοὺς ἄλλους οὐδὲν πάθοι τοιοῦτον· ἡ δὲ
καὶ μάλα μετὰ σπουδῆς ἀπεκρίνατο ’μόνος γάρ‘ ἔφη
’Κυμαίων Ἀριστόδημος ἀνήρ ἐστι.‘ τοῦτο γὰρ λεχθὲν
τὸ ῥῆμα πάντων μὲν ἥψατο, τοὺς δὲ γενναίους καὶ
παρώξυνεν αἰσχύνῃ τῆς ἐλευθερίας ἀντέχεσθαι. λέγεται
δὲ καὶ Ξενοκρίτην ἀκούσασαν εἰπεῖν, ὡς ἐβούλετ´ ἂν καὶ
αὐτὴ γῆν ὑπὲρ τοῦ πατρὸς φέρειν παρόντος ἢ τρυφῆς
συμμετέχειν Ἀριστοδήμῳ καὶ δυνάμεως τοσαύτης. ἐπέρρωσεν
οὖν ταῦτα τοὺς συνισταμένους ἐπὶ τὸν Ἀριστόδημον,
ὧν ἡγεῖτο Θυμοτέλης· καὶ τῆς Ξενοκρίτης εἰσόδου
παρεχούσης αὐτοῖς ἄδειαν καὶ τὸν Ἀριστόδημον
ἄοπλον καὶ ἀφύλακτον, οὐ χαλεπῶς παρεισπεσόντες διαφθείρουσιν
αὐτόν. οὕτω μὲν ἡ Κυμαίων πόλις ἠλευθερώθη
δυεῖν ἀρετῇ γυναικῶν, τῆς μὲν ἐπίνοιαν αὐτοῖς
καὶ ὁρμὴν ἐμβαλούσης τοῦ ἔργου, τῆς δὲ πρὸς τὸ τέλος
συλλαβομένης. τιμῶν δὲ καὶ δωρεῶν μεγάλων τῇ Ξενοκρίτῃ
προτεινομένων ἐάσασα πάσας ἓν ᾐτήσατο, θάψαι
τὸ σῶμα τοῦ Ἀριστοδήμου· καὶ τοῦτ´ οὖν ἔδοσαν αὐτῇ
καὶ Δήμητρος ἱέρειαν αὐτὴν εἵλοντο, οὐχ ἧττον οἰόμενοι
τῇ θεῷ κεχαρισμένην ἢ πρέπουσαν ἐκείνῃ τιμὴν ἔσεσθαι.
| [26] XÉNOCRITE.
Ce n'est pas une moindre admiration que doit inspirer
l'héroïne de Cumes, Xénocrite, pour la manière dont elle
se conduisit avec le tyran Aristodème, surnommé le Délicat.
Disons en passant, que ceux qui croient comprendre
l'origine de ce surnom ignorent la vérité. Les Barbares le
surnommèrent "Délicat", qui équivaut à "impubère", parce
qu'il était à peine sorti de l'enfance. Il se trouvait au nombre
des jeunes garçons qui gardaient encore leur chevelure, (on
les nommait "coronistes", sans doute à cause de cette chevelure)
lorsqu'il figura dans les guerres entreprises contre les
Barbares. Là il s'était distingué et avait acquis de l'illustration.
Ce n'était pas seulement son audace et ses coups de
main, c'était encore sa pénétration et sa prévoyance, qui l'avaient
rendu remarquable entre tous. Aussi ses concitoyens
pénétrés d'admiration l'élevèrent-ils aux premiers emplois;
et il fut mis à la tête du secours que l'on envoyait aux Romains
vivement pressés par les Étrusques, lorsque ceux-ci voulaient
rétablir sur son trône Tarquin le Superbe. Dans cette expédition,
qui fut d'assez longue durée, Aristodème mit tout
en oeuvre pour être agréable à ceux de ses concitoyens qui
formaient son corps de troupes. Bien plus jaloux de flatter
les passions populaires que de justifier son titre de général,
il leur persuada de se porter avec lui contre le Sénat et de
chasser de la ville les meilleurs et les plus puissants. Devenu
maître du pouvoir à la suite d'un tel coup, il se surpassa
lui-même en scélératesse par les indignités qu'il exerça
contre des femrnes et des enfants de condition libre. En effet
on rapporte qu'il habituait les garçons à laisser croître
leurs cheveux, à porter des parures en or; que les filles, au
contraire, étaient forcées de se faire raser la tête en rond,
d'avoir des chlamydes de jeunes garçons et de petites tuniques
écourtées. Quoi qu'il en soit, il s'éprit tout particulièrement
de Xénocrite, dont le père était exilé, et il la posséda.
Il aurait pu rappeler le père et obtenir son consentement.
Mais il pensa que la jeune fille serait trop contente d'être à
lui, n'importe à quel titre, du moment qu'elle verrait toute
la ville envier le sort qu'elle avait et l'estimer bien heureuse.
Cependant une telle condition ne la frappa point de vertige.
Honteuse de vivre avec un homme à qui elle n'avait été ni
mariée ni fiancée, elle ne désirait pas moins que les ennemis
de l'usurpateur l'affranchissement de son pays. Il arriva dans
ces conjonctures, qu'Aristodème faisait creuser tout autour
de la ville un vaste fossé, travail qui n'était ni nécessaire ni
utile. Il voulait sans nul motif vexer ses concitoyens, les
accabler de fatigues et ne leur laisser aucune trêve. Chacun
avait une certaine quantité de terre à transporter tous les
jours. Une femme qui travaillait comme les autres voyant
Aristodème venir de son côté, détourna la tête et se cacha le
visage avec sa tunique. Quand il fut parti les jeunes gens
se moquaient d'elle, et lui demandaient en riant pourquoi
elle se dérobait ainsi par une sorte de pudeur aux regards
du seul Aristodème, et pourquoi les autres ne lui inspiraient
pas le même sentiment : "C'est", répondit-elle d'un air
très-sérieu, «parce que dans Cumes il n'y a qu'Aristodème
qui soit un homme». Cette parole produisit sur tous
une profonde impression, et la honte qu'en ressentirent les
plus généreux leur inspira le dessein de reconquérir leur liberté.
Xénocrite qui le sut, dit, à ce que l'on rapporte,
qu'elle aimerait mieux, elle aussi, charrier de la terre pour
voir son père rappelé que de partager le luxe d'Aristodème
et un si grand pouvoir. Elle les encouragea donc au complot
qu'ils organisèrent contre le tyran, complot dont le chef
était Thymotèle. Grâce aux facilités qu'elle leur ménagea
pour parvenir jusqu'à la personne d'Aristodème, ils le trouvèrent
désarmé et sans gardes. Ils s'emparèrent de lui facilement
et le massacrèrent. Ainsi fut délivrée la ville de
Cumes, grâce à l'énergie de deux femmes, l'une qui leur
inspira l'idée et le courage de tenter l'entreprise, l'autre qui
leur en prépara le succès. On offrit à Xénocrite des honneurs
et des récompenses considérables. Elle refusa tout,
ne réclamant que le droit d'ensevelir le corps d'Aristodème,
ce qui lui fut accordé. En outre on la choisit pour prêtresse
de Cérès, et l'on pensa que cette distinction ne serait pas moins
agréable à la Déesse qu'elle n'était convenable pour Xénocrite.
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