HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

PLUTARQUE, Oeuvres morales, Les vertus des femmes

Chapitre 19

  Chapitre 19

[19] ΑΡΕΤΑΦΙΛΑ. Ἀρεταφίλα δ´ Κυρηναία παλαιὰ μὲν οὐ γέγονεν ἀλλ´ ἐν τοῖς Μιθριδατικοῖς καιροῖς, ἀρετὴν δὲ καὶ πρᾶξιν ἐνάμιλλον τῇ βουλῇ τῶν ἡρωίδων παρέσχεν. ἦν δὲ θυγάτηρ μὲν Αἰγλάνορος Φαιδίμου δὲ γυνή, γνωρίμων ἀνδρῶν· καλὴ δὲ τὴν ὄψιν οὖσα καὶ τὸ φρονεῖν ἐδόκει περιττή τις εἶναι καὶ πολιτικῆς δεινότητος οὐκ ἄμοιρος· ἐπιφανῆ δ´ αὐτὴν αἱ κοιναὶ τύχαι τῆς πατρίδος ἐποίησαν. Νικοκράτης γὰρ ἐπαναστὰς Κυρηναίοις τύραννος ἄλλους τε πολλοὺς ἐφόνευε τῶν πολιτῶν καὶ τὸν ἱερέα τοῦ Ἀπόλλωνος αὐτόχειρ ἀνελὼν Μελάνιππον εἶχε τὴν ἱερωσύνην· ἀνεῖλε δὲ καὶ Φαίδιμον τὸν τῆς Ἀρεταφίλας ἄνδρα καὶ τὴν Ἀρεταφίλαν ἔγημεν ἄκουσαν. πρὸς δὲ μυρίοις ἄλλοις παρανομήμασι φύλακας ἐπὶ τῶν πυλῶν κατέστησεν, οἳ τοὺς ἐκφερομένους νεκροὺς ἐλυμαίνοντο νύττοντες ξιφιδίοις καὶ καυτήρια προσβάλλοντες ὑπὲρ τοῦ μηδένα τῶν πολιτῶν ὡς νεκρὸν λαθεῖν ἐκκομιζόμενον. δύσφορα μὲν οὖν ἦν τῇ Ἀρεταφίλᾳ τὰ οἰκεῖα κακά, καίπερ ἐνδιδόντος αὐτῇ δι´ ἔρωτα τοῦ τυράννου πλεῖστον ἀπολαύειν τῆς δυνάμεως (ἥττητο γὰρ ἐκείνης καὶ μόνῃ χειροήθη παρεῖχεν αὑτὸν ἄτεγκτος ὢν τἄλλα καὶ θηριώδηςἠνία δὲ μᾶλλον αὐτὴν πατρὶς οἰκτρὰ πάσχουσα παρ´ ἀξίαν. ἄλλος γὰρ ἐπ´ ἄλλῳ τῶν πολιτῶν ἐσφάττετο, τιμωρία δ´ ἀπ´ οὐδενὸς ἠλπίζετο· καὶ γὰρ οἱ φυγάδες, ἀσθενεῖς παντάπασιν ὄντες καὶ περίφοβοι, διεσπάρησαν. αὑτὴν οὖν Ἀρεταφίλα ὑποθεῖσα μόνην τοῖς κοινοῖς ἐλπίδα καὶ τὰ Θήβης ζηλώσασα τῆς Φεραίας καλὰ καὶ περιβόητα τολμήματα, συμμάχων δὲ πιστῶν καὶ οἰκείων, οἵους ἐκείνῃ τὰ πράγματα παρέσχεν, ἔρημος οὖσα, φαρμάκοις ἐπεχείρησε διεργάσασθαι τὸν ἄνδρα. παρασκευαζομένη δὲ καὶ πορίζουσα καὶ διαπειρωμένη πολλῶν δυνάμεων οὐκ ἔλαθεν ἀλλ´ ἐμηνύθη· καὶ γινομένων ἐλέγχων, Καλβία μὲν τοῦ Νικοκράτους μήτηρ, φύσει φονικὴ γυνὴ καὶ ἀπαραίτητος, εὐθὺς ᾤετο δεῖν ἀναιρεῖν αἰκισαμένην τὴν Ἀρεταφίλαν· τοῦ δὲ Νικοκράτους μέλλησιν ἐνεποίει τῇ ὀργῇ καὶ ἀσθένειαν ἔρως, καὶ τὸ τὴν Ἀρεταφίλαν ἐρρωμένως ὁμόσε χωρεῖν ταῖς κατηγορίαις ἀμύνουσαν ἑαυτῇ πρόφασίν τινα τῷ πάθει παρεῖχεν. ἐπεὶ δὲ κατελαμβάνετο τοῖς ἐλέγχοις καὶ τὴν παρασκευὴν τῆς φαρμακείας ἑώρα μὴ δεχομένην ἄρνησιν, ὡμολόγει, παρασκευάσασθαι δ´ οὐκ ὀλέθριον φαρμακείαν, ’ἀλλ´ ὑπὲρ μεγάλωνεἶπεν, ’ ἄνερ, ἀγωνίζομαι, τῆς σῆς εὐνοίας πρὸς ἐμὲ καὶ δόξης καὶ δυνάμεως, ἣν διὰ σὲ καρποῦμαι πολλαῖς ἐπίφθονος οὖσα κακαῖς γυναιξίν· ὧν φάρμακα δεδοικυῖα καὶ μηχανὰς ἐπείσθην ἀντιμηχανήσασθαι, μωρὰ μὲν ἴσως καὶ γυναικεῖα, θανάτου δ´ οὐκ ἄξια· πλὴν εἰ κριτῇ σοι δόξειε φίλτρων ἕνεκα καὶ γοητείας κτεῖναι γυναῖκα, πλεῖον σὺ βούλει φιλεῖσθαι δεομένην.‘ τοιαῦτα τὴν Ἀρεταφίλαν ἀπολογουμένην ἔδοξε τῷ Νικοκράτει βασανίσαι· καὶ τῆς Καλβίας ἐφεστώσης ἀτέγκτου καὶ ἀπαραιτήτου, ταῖς βασάνοις ἀνέκρινε· καὶ διεφύλαττεν αὑτὴν ἀήττητον ἐν ταῖς ἀνάγκαις ἄχρι καὶ τὴν Καλβίαν ἀποκαμεῖν ἄκουσαν. δὲ Νικοκράτης ἀφῆκε πεισθεὶς καὶ μετενόει βασανίσας· καὶ χρόνον οὐ πολὺν διαλιπὼν αὖθις ἧκεν ὑπὸ τοῦ πάθους εἰς αὐτὴν φερόμενος, καὶ συνῆν αὖθις ἀναλαμβάνων τιμαῖς καὶ φιλοφροσύναις τὴν εὔνοιαν. δ´ οὐκ ἔμελλε χάριτος ἡττᾶσθαι κρατήσασα βασάνων καὶ πόνων, ἀλλὰ τῷ φιλοκάλῳ φιλονεικίας προσγενομένης ἑτέρας ἥπτετο μηχανῆς. ἦν γὰρ αὐτῇ θυγάτηρ ἀνδρὸς ὥραν ἔχουσα καὶ τὴν ὄψιν ἱκανή· ταύτην ὑφῆκε τἀδελφῷ τοῦ τυράννου δέλεαρ, ὄντι μειρακίῳ πρὸς ἡδονὰς εὐαλώτῳ. πολὺς δὲ λόγος ἐστὶ χρησαμένην γοητείᾳ καὶ φαρμάκοις ἐπὶ τῇ κόρῃ τὴν Ἀρεταφίλαν χειρώσασθαι καὶ διαφθεῖραι τοῦ νεανίσκου τὸν λογισμόν· ἐκαλεῖτο δὲ Λάανδρος. ἐπεὶ δ´ ἡλώκει καὶ λιπαρήσας τὸν ἀδελφὸν ἔτυχε τοῦ γάμου, τὰ μὲν κόρη παρῆγεν αὐτὸν ὑπὸ τῆς μητρὸς διδασκομένη καὶ ἀνέπειθεν ἐλευθεροῦν τὴν πόλιν, ὡς μηδ´ αὐτὸν ἐλεύθερον ἐν τυραννίδι ζῶντα μηδὲ τοῦ λαβεῖν γάμον φυλάξαι κύριον ὄντα, τὰ δ´ οἱ φίλοι τῇ Ἀρεταφίλᾳ χαριζόμενοι διαβολάς τινας ἀεὶ καὶ ὑπονοίας κατεσκεύαζον αὐτῷ πρὸς τὸν ἀδελφόν. ὡς δ´ ᾔσθετο καὶ τὴν Ἀρεταφίλαν τὰ αὐτὰ βουλευομένην καὶ σπουδάζουσαν, ἐπεχείρει τὸ ἔργον, καὶ Δάφνιν οἰκέτην παρορμήσας ἀπέκτεινε δι´ ἐκείνου τὸν Νικοκράτην. τὰ λοιπὰ δ´ οὐκέτι τῇ Ἀρεταφίλᾳ προσεῖχεν, ἀλλ´ εὐθὺς ἔδειξε τοῖς ἔργοις ἀδελφοκτόνος οὐ τυραννοκτόνος γεγονώς· ἦρχε γὰρ ἐμπλήκτως καὶ ἀνοήτως. τιμὴ δέ τις ὅμως ἦν τῆς Ἀρεταφίλας παρ´ αὐτῷ καὶ δύναμις, οὐκ ἀπεχθανομένης οὐδὲ πολεμούσης ἄντικρυς ἀλλ´ ἀδήλως διαταττούσης τὰ πράγματα. πρῶτον μὲν γὰρ αὐτῷ Λιβυκὸν ὑπεκίνησε πόλεμον, Ἀνάβουν τινὰ πείσασα δυνάστην τὴν χώραν ἐπιδραμεῖν καὶ τῇ πόλει προσαγαγεῖν, ἔπειτα διέβαλε τοὺς φίλους καὶ τοὺς στρατηγοὺς πρὸς τὸν Λάανδρον, ὡς πολεμεῖν οὐκ ὄντας προθύμους, εἰρήνης δὲ μᾶλλον δεομένους καὶ ἡσυχίας, ἣν καὶ τὰ πράγματα ποθεῖν αὐτοῦ καὶ τὴν τυραννίδα, βουλομένου βεβαίως κρατεῖν τῶν πολιτῶν· αὐτὴ δὲ πράξειν ἔφη τὰς διαλύσεις καὶ τὸν Ἀνάβουν&[19] ARÉTAPHILE. Arétaphile, de Cyrène, ne remonte pas à une haute antiquité. Elle vivait du temps de Mithridate. Sa vertu et l'acte de résolution par elle accompli la rendent digne de figurer avec avantage dans le conseil des demi-déesses. Elle était fille d'Eglator et de Phédime, personnages de haute condition tous les deux. Outre sa merveilleuse beauté, elle passait pour avoir un très grand sens et pour n'être rien moins qu'étrangère à la science politique. Ce furent les malheurs publics de sa patrie qui mirent chez elle ces qualités en lumière. Nicocrate avait usurpé le pouvoir souverain à Cyrène. Il avait mis à mort un grand nombre de citoyens, et entre autres un prêtre d'Apollon, nommé Mélanippus, qu'il tua de sa propre main pour s'emparer du sacerdoce. Sous ses coups avait aussi succombé Phédime, l'époux d'Arétaphile, et il avait épousé malgré elle cette dernière. Il ne se contenta pas d'avoir porté de nombreux attentats contre les lois. Il plaça aux portes de la ville des gardes commis pour outrager les morts que l'on conduisait à leur dernière demeure. Ils perçaient leurs cadavres à coups de poignard et leur appliquaient des fers brûlants. C'était dans la crainte que quelque citoyen ne s'échappât de la ville en se faisant passer pour mort. Arétaphile supportait avec peine ses maux particuliers, malgré la très grande part que le tyran, fort épris d'elle, lui donnait dans sa puissance. Elle exerçait en effet sur lui une sorte de domination. Inflexible et farouche d'ailleurs, il ne s'apprivoisait que pour elle. Mais ce qui la désolait le plus, c'étaient les malheurs de sa patrie indignement opprimée. Les citoyens étaient égorgés les uns après les autres, et l'on n'espérait de vengeance d'aucun côté : car ceux qui avaient été bannis, se sentant dénués de toute ressource, étaient frappés de terreur et restaient dispersés. Arétaphile voulut se constituer seule l'espérance commune de tous. Le noble courage qui avait rendu si célèbre Thébé, la femme du tyran de Phères, lui inspira à elle-même une glorieuse émulation. Elle était privée, il est vrai, de l'assistance amicale que Thébé avait rencontrée dans sa famille ; mais elle résolut de faire périr Nicocrate par le poison. Préparant toutes choses en vue de ce dessein, elle s'était procuré plusieurs substances vénéneuses. Elle en faisait l'essai, lorsqu'elle fut découverte et dénoncée. Sur les premiers indices, la mère du tyran, Calvia, femme d'un naturel sanguinaire et inflexible, voulait que sans retard on livrât Arétaphile à la mort, après lui avoir fait subir les plus honteux traitements. Nicocrate, au contraire, trouvait dans son amour des prétextes pour retarder et pour adoucir les effets de sa fureur. L'énergie que mettait Arétaphile à repousser les accusations et à se défendre, semblait en quelque sorte justifier ces dispositions. Mais quand elle eut été accablée sous les preuves et qu'elle vit que ses préparatifs d'empoisonnement ne pouvaient se nier, elle en fit l'aveu, prétendant toutefois que ce n'était pas un breuvage mortel qu'elle avait apprêté : «Cher époux, dit-elle, je lutte pour ménager mes plus précieux intérêts, à savoir, la tendresse que vous me portez, ma gloire, et la puissance dont, grâce à vous, il m'est donné de jouir. J'excite donc la jalousie de bien des femmes criminelles dont je redoute les poisons et les artifices, et je me suis laissé persuader que je devais chercher à les prévenir. Je suis folle peut-être, peut-être cédé-je trop aux faiblesses de mon sexe, mais je ne mérite pas un tel sort, à moins que mon souverain juge ne se décide à faire périr, pour avoir usé de philtres et d'enchantements, celle qui éprouvait le besoin d'être aimée de lui plus ardemment qu'il ne le voulait.» Nicocrate crut devoir mettre à l'épreuve la sincérité d'une pareille justification. En présence de Calvia, cette femme dure et implacable, il fit mettre Arétaphile à la question; mais elle opposa aux bourreaux une fermeté si invincible que sa belle-mère fut lassée et renonça malgré elle. Pour Nicocrate, convaincu de l'innocence d'Arétaphile il fit cesser la torture et se repentit d'y avoir recouru. Peu de jours s'étaient même à peine écoulés, que son amour le ramenait près d'elle et qu'il la reprenait avec lui, faisant tout pour regagner sa bienveillance à force d'hommages et de tendresses. Mais elle ne devait pas céder aux bons traitements quand elle avait triomphé des tourments et de la douleur: Son noble patriotisme s'accrut encore de ses désirs de vengeance, et elle imagina un autre moyen. Elle avait une fille en âge de se marier et suffisamment belle. Ce fut comme un appât dont elle se servit auprès du fils de Nicocrate, parce que le jeune homme devait se laisser facilement prendre à l'attrait du plaisir. L'opinion la plus générale est qu'elle usa d'enchantements et de philtres auprès de sa fille, pour que celle-ci subjuguât le prince et lui fit perdre la raison. Il se nommait Léandre. Une fois épris, il n'eut ni cesse ni trêve que son frère ne lui eût permis de se marier. D'un côté la jeune fille, à qui sa mère avait fait la leçon, se mit dès ce moment à exciter Léandre : elle lui persuada qu'il devait affranchir la ville, que lui-même n'était pas libre sous un gouvernement tyrannique, puisqu'il n'avait pas le droit de prendre ou de garder une compagne. D'un autre côté les amis de ce jeune homme insinuaient toujours dans son esprit des griefs et des soupçons contre son frère, afin de se concilier les bonnes grâces d'Arétaphile. Dès qu'il sut que cette dernière avait les mêmes projets que lui et qu'elle agissait vigoureusement, il précipita l'exécution. Il gagna un domestique appelé Daphnis, et fit par lui donner la mort à Nicocrate. Mais à partir de ce moment, loin de se rapprocher d'Arétaphile, Léandre montra aussitôt par ses actes que s'il avait tué son frère il n'avait pas fait disparaître le tyran, et il déploya le despotisme le plus brutal et le plus insensé. Toutefois Arétaphile jouissait auprès de lui d'un peu d'honneur et d'autorité. Elle ne semblait pas le haïr, et elle ne lui faisait point une guerre ouverte. C'était en secret qu'elle disposait ses plans. D'abord elle suscita contre lui une expédition des Libyens, en déterminant un des petits rois, nommé Anabus, à envahir la contrée et à marcher contre Cyrène. Ensuite elle calomnia auprès de Léandre les amis et les généraux du tyran : elle lui dit qu'ils n'avaient pas d'ardeur à combattre et qu'ils aimaient bien mieux la paix et leur tranquillité. Elle ajoutait que, du reste, il devait désirer lui-même cet état de choses pour conserver sa vie avec son trône et pour affermir son autorité sur ses sujets. Elle promettait en même temps de ménager une cessation d'hostilités, et se faisait forte, pour peu qu'il l'y autorisât, de déterminer Anabus à un accommodement qui préviendrait les maux à peu près irrémédiables d'une guerre. Léandre l'y invitant, Arétaphile eut d'abord un entretien particulier avec l'Africain; et à force de largesses, à force d'argent, elle lui fit promettre qu'il s'emparerait de la personne de Léandre lorsque celui-ci se rendrait à la conférence. L'Africain s'y engagea. Pour le tyran, il hésitait; mais comme Arétaphile lui eut répété qu'elle serait présente à l'entretien, cette déclaration lui fit honte, et il partit sans armes et sans escorte. A peine était-il arrivé, à peine avait-il aperçu Anabus, qu'il fut saisi d'un vif sentiment de répugnance, et il voulait encore attendre ses satellites; mais Arétaphile, qui était là, sut le retenir en lui adressant tour à tour des paroles rassurantes et des reproches. Il balançait toujours. Alors elle lui saisit la main par un mouvement énergique et résolu, et le fit approcher du Barbare. C'était le livrer tout à fait à l'ennemi. Au mème instant on se saisit de sa personne. Arrêté, chargé de chaines, il fut gardé à vue par les Africains, jusqu'au moment où les amis d'Arétaphile apportant les sommes promises se présentèrent avec les autres citoyens. Ceux-ci en effet, dès qu'ils avaient été informés, étaient accourus en foule à cet appel. Quand ils eurent vu Arétaphile, peu s'en fallut qu'ils n'oubliassent la colère dont ils étaient animés contre le tyran. Le besoin d'assouvir leur vengeance ne fut pas celui qui leur sembla le plus impérieux. Leur premier mouvement, leur premier acte de liberté fut de saluer unanimement cette femme généreuse avec des démonstrations de joie et des torrents de larmes. On se prosternait à ses pieds comme devant la statue d'une déesse. Les flots d'adorateurs se succédèrent sans interruption, et ce ne fut qu'à grand'peine que vers le soir, après s'être fait livrer Léandre, ils retournèrent à la ville. Dès lors, bien rassasiés d'offrir à Arétaphile leurs éloges et leurs hommages, ils songèrent à s'occuper des tyrans. Calvia fut brûlée vive. Léandre, cousu dans un sac, fut jeté à la mer. On décida qu'Arétaphile partagerait le gouvernement de l'État et l'autorité souveraine avec les principaux citoyens. Mais elle, comme ayant conduit un drame des plus longs et des plus compliqués jusqu'au dénouement où la couronne se décerne, elle avait hâte de rentrer dans son gynécée. Elle abjura complétement toute participation aux affaires publiques; et à dater de ce jour elle passa tranquillement sa vie entière, occupée de travaux d'aiguille, au milieu de ses amis et de ses proches.


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Dernière mise à jour : 23/05/2005