[11] ΜΙΛΗΣΙΑΙ.
Τὰς Μιλησίων ποτὲ παρθένους δεινὸν πάθος καὶ
ἀλλόκοτον κατέσχεν ἐκ δή τινος αἰτίας ἀδήλου· μάλιστα
δ´ εἰκάζετο κρᾶσιν ἐκστατικὴν καὶ φαρμακώδη λαβὼν
ὁ ἀὴρ τροπὴν αὐταῖς καὶ παραφορὰν τῆς διανοίας ἐνεργάσασθαι.
πάσαις μὲν γὰρ ἐξαίφνης ἐπιθυμία θανάτου
καὶ πρὸς ἀγχόνην ὁρμὴ περιμανὴς ἐνέπιπτε, πολλαὶ δ´
ἀπήγχοντο λανθάνουσαι· λόγοι δὲ καὶ δάκρυα γονέων
καὶ παρηγορίαι φίλων οὐδὲν ἐπέραινον, ἀλλὰ περιῆσαν
ἐπινοίας καὶ πανουργίας ἁπάσης τῶν φυλαττόντων ἑαυτὰς
διαχρώμεναι. καὶ τὸ κακὸν ἐδόκει δαιμόνιον εἶναι καὶ
κρεῖττον ἀνθρωπίνης βοηθείας, ἄχρις οὗ γνώμῃ νοῦν
ἔχοντος ἀνδρὸς ἐγράφη προβούλευμα, τὰς ἀπαγχομένας
γυμνὰς ἐκκομίζεσθαι διὰ τῆς ἀγορᾶς· καὶ τοῦτο κυρωθὲν
οὐ μόνον ἐπέσχεν, ἀλλὰ καὶ παντελῶς ἔπαυσε θανατώσας
τὰς παρθένους. μέγα δὴ τεκμήριον εὐφυΐας καὶ
ἀρετῆς ἡ τῆς ἀδοξίας εὐλάβεια καὶ τὸ πρὸς τὰ δεινότατα
τῶν ὄντων, θάνατον καὶ πόνον, ἀδεῶς ἐχούσας αἰσχροῦ
φαντασίαν μὴ ὑπομεῖναι μηδ´ ἐνεγκεῖν αἰσχύνην μετὰ
θάνατον ἐσομένην.
| [11] MILÉSIENNES.
Les jeunes filles de Milet furent saisies autrefois d'une
manie étrange et bizarre, sans que l'on pût en connaître la
cause. Ce qui sembla le plus probable, c'est que des influences
malignes et pestilentielles répandues dans l'air
avaient produit chez elles le trouble et le désordre de l'intelligence.
Elles se trouvèrent toutes soudainement prises
d'un désir de mort et d'une envie furieuse de se pendre. Un
grand nombre d'entre elles se pendirent en effet secrètement.
Représentations et larmes de leurs parents, prières de leurs
amis, rien ne réussissait; et pour mettre fin à leur existence,
elles déjouaient toute l'attention, toute l'activité de
ceux qui les surveillaient. Il semblait que ce fût une calamité
céleste que nul secours humain ne pourrait arrêter.
A la fin, sur la proposition d'un homme de sens, il fut décrété,
que les jeunes filles qui se pendraient seraient portées
toutes nues au bûcher à travers la place publique. Le décret
reçut son exécution; et non seulement il produisit un temps
d'arrêt, mais encore il fit complétement cesser cette manie
de suicide. C'était, du reste, une grande preuve d'excellente
nature et de vertu que cette crainte de l'infamie. Ces
mêmes jeunes filles qui devant ce qu'il y a de plus terrible
au monde, à savoir la mort et ses souffrances, s'étaient montrées
résolues, cédèrent en songeant à un affront, et ne purent
supporter la honte qui pèserait sur elles après leur trépas.
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