[446] (446a) ὥσπερ ἐξ ὅλης τῆς συνεπινεύων ταῖς ἡδοναῖς καὶ
ὑπερειπόμενος. Οὐχ ἧττον δὲ τούτων ὁ εἰπών
« Ἔα μ´ ἀπολέσθαι· τοῦτο γάρ μοι συμφέρει »
τὴν κρίσιν ἔχει τῷ πάθει συννοσοῦσαν. Αἱ δὲ τῆς ἀκρασίας ἕτεραι καὶ
διαφέρουσαι
« Γνώμην ἔχοντά μ´ ἡ φύσις βιάζεται »
καί
« Αἰαῖ, τόδ´ ἤδη θεῖον ἀνθρώποις κακόν,
ὅταν τις εἰδῇ τἀγαθὸν χρῆται δὲ μή »
καί
« Εἴκει γὰρ ἤδη θυμὸς οὐδ´ ἔτ´ ἀντέχει,
θινῶδες ὡς ἄγκιστρον ἀγκύρας σάλῳ »,
θινῶδες ἄγκιστρον οὐ φαύλως λέγων τὸ μὴ κάτοχον τοῦ λογισμοῦ μηδ´ ἀραρός,
ἀλλὰ μανότητι τῆς ψυχῆς καὶ μαλακίᾳ προϊέμενον τὴν κρίσιν. Οὐ πόρρω δὲ τῆς
εἰκόνος (446b) ταύτης κἀκεῖνα εἴρηται
« Ναῦς ὥς τις ἐκ μὲν γῆς ἀνήρτημαι βρόχοις,
πνεῖ δ´ οὖρος, ἡμῖν δ´ οὐ κρατεῖ τὰ πείσματα· »
πείσματα γὰρ λέγει τὰς ἀντεχούσας κρίσεις πρὸς τὸ αἰσχρόν, εἶθ´ ὥσπερ ὑπὸ
πνεύματος πολλοῦ ῥηγνυμένας τοῦ πάθους. Τῷ γὰρ ὄντι πλησίστιος μὲν ἐπὶ τὰς
ἡδονὰς ὁ ἀκόλαστος ὑπὸ τῶν ἐπιθυμιῶν φέρεται καὶ δίδωσιν ἑαυτὸν καὶ
συγκατευθύνει· πλάγιος δ´ ὁ ἀκρατής, οἷον ἐξαναφέρειν γλιχόμενος καὶ
διωθεῖσθαι τὸ πάθος, ὑποσύρεται καὶ περιπίπτει περὶ τὸ αἰσχρόν· ὡς
Ἀνάξαρχον ἐσίλλαινε Τίμων
« Ἐν δὲ τὸ θαρσαλέον τε καὶ ἐμμενὲς ὅππη ὀρούσαι
φαίνετ´ Ἀναξάρχου κύνεον μένος· ὅς ῥα καὶ εἰδώς,
(446c) ὡς φάσαν, ἄθλιος ἔσκε, φύσις δέ μιν ἔμπαλιν ἦγεν
ἡδονοπλήξ, ἣν πλεῖστοι ὑποτρείουσι σοφιστῶν. »
Οὔτε γὰρ ὁ σοφὸς ἐγκρατὴς ἀλλὰ σώφρων, οὔθ´ ὁ ἀμαθὴς ἀκρατὴς ἀλλ´
ἀκόλαστος· ὁ μὲν γὰρ ἥδεται τοῖς καλοῖς ὁ δ´ οὐκ ἄχθεται τοῖς αἰσχροῖς.
Σοφιστικῆς οὖν ψυχῆς ἡ ἀκρασία λόγον ἐχούσης οἷς ἔγνωκεν ὀρθῶς ἐμμένειν μὴ
δυνάμενον.
Ἡ μὲν οὖν ἀκρασία τοιαύτας ἔχει διαφορὰς πρὸς τὴν ἀκολασίαν, ἡ δ´
ἐγκράτεια πρὸς τὴν σωφροσύνην αὖθις αὖ τὰς ἀντιστρόφους ἀναλόγως. Τὸ γὰρ
δάκνον καὶ τὸ λυποῦν καὶ τὸ ἀγανακτοῦν οὔπω τὴν ἐγκράτειαν ἀπολέλοιπε·
(446d) τῆς δὲ σώφρονος ψυχῆς τὸ πανταχόθεν ὁμαλὲς καὶ ἄσφυκτον καὶ
ὑγιαῖνον, ᾧ συνήρμοσται καὶ συγκέκραται τὸ ἄλογον πρὸς τὸν λογισμὸν
εὐπειθείᾳ καὶ πραότητι θαυμαστῇ κεκοσμημένον, εἴποις ἂν ἐπιβλέψας
« Δὴ τότ´ ἔπειτ´ ἄνεμος μὲν ἐπαύσατο, ἡ δὲ γαλήνη
ἔπλετο νηνεμίη, κοίμησε δὲ κύματα δαίμων »,
τὰ σφοδρὰ καὶ περιμανῆ καὶ οἰστρώδη κινήματα τῶν ἐπιθυμιῶν τοῦ λόγου
κατασβέσαντος, ὧν δ´ ἡ φύσις ἀναγκαίως δεῖται, ταῦθ´ ὁμοπαθῆ καὶ ὑπήκοα
καὶ φίλα καὶ συνεργὰ πεποιημένου ταῖς πρακτικαῖς προαιρέσεσιν, ὥστε μὴ
προεκθεῖν τοῦ λογισμοῦ μηδ´ ὑπενδιδόναι μηδ´ ἀτακτεῖν (446e) μηδ´
ἀπειθεῖν, ἀλλὰ πᾶσαν ὁρμὴν εὐάγωγον οὖσαν
« Ἄθηλον ἵππῳ πῶλον ὣς ἅμα τρέχειν »,
ἐπιβεβαιοῦσαν τὸν Ξενοκράτους λόγον, ὃν ἐκεῖνος εἶπε περὶ τῶν ἀληθῶς
φιλοσοφούντων, ὅτι μόνοι ποιοῦσιν ἑκουσίως ἃ ποιοῦσιν ἄκοντες οἱ λοιποὶ
διὰ τὸν νόμον, ὥσπερ ὑπὸ πληγῆς κύνες ἢ γαλαῖ ψόφῳ τῶν ἡδονῶν
ἀποτρεπόμενοι καὶ πρὸς τὸ δεινὸν ὑποβλέποντες.
Ὅτι μὲν οὖν γίνεταί τις ἐν τῇ ψυχῇ τοιαύτης ἑτερότητος αἴσθησις καὶ
διαφορᾶς περὶ τὰς ἐπιθυμίας, ὥς τινος μαχομένου καὶ τἀναντία λέγοντος
αὐταῖς, οὐκ ἄδηλόν ἐστιν. (446f) Ἔνιοι δέ φασιν οὐχ ἕτερον εἶναι τοῦ λόγου
τὸ πάθος οὐδὲ δυεῖν διαφορὰν καὶ στάσιν, ἀλλ´ ἑνὸς λόγου τροπὴν ἐπ´
ἀμφότερα, λανθάνουσαν ἡμᾶς ὀξύτητι καὶ τάχει μεταβολῆς,
| [446] (446a) N'est-ce pas là le langage d'un cœur qui ne respire que la volupté,
et qui s'en est rendu l'esclave? Celui qui disait :
"Ah! laissez-moi périr; la mort me sera douce"!
avait, comme les deux autres, le jugement aussi malade que la volonté.
L'incontinent tient un langage bien différent:
"Au vice, malgré moi, la nature m'entraîne.
Les dieux nous livrent donc à ce destin fatal,
De connaître le bien, et de faire le mal.
Malgré tous mes efforts, la colère m'emporte.
Tel un vaisseau battu par les flots écumants,
Est détaché de l'ancre, et vogue au gré des vents".
Il compare avec assez de justesse à une ancre fichée dans le sable, une
âme qui, mal affermie dans ses principes, trahit, par une indigne
faiblesse, les lumières de sa raison. L'image suivante (446b) est analogue
à celle-là :
"Le câble dans le port arrête le vaisseau ;
Le vent souffle, il le rompt, et loin du port l'entraîne".
Le câble désigne la résistance que la raison oppose d'abord au vice ; mais
la passion, telle qu'un vent impétueux, l'a bientôt rompu.
Ainsi, l'intempérant déploie toutes ses voiles au souffle des voluptés ;
il dirige leur mouvement, et se livre à toute leur action. L'incontinent,
semblable au pilote qui louvoie, lutte avec effort contre la passion qui
l'attire ; mais bientôt, entraîné par sa violence, il échoue
misérablement. C'est ce que Timon, dans ses silles, reprochait au
philosophe Anaxarque :
"Anaxarque auprès d'eux, toujours dur et caustique,
Exhale le venin de sa langue cynique".
(446c) "Mais on dit que du vice adorateur honteux,
Ce sévère censeur se trouvait malheureux.
L'amour des voluptés, écueil de plus d'un sage,
Tyran de sa raison, démentait son langage".
La tempérance est donc la vertu du sage, et l'intempérance, le vice de
l'insensé. L'un approuve les actions honnêtes, l'autre ne rejette pas même
les plus honteuses. L'incontinence est le partage d'une âme faible, qui
connaît le vrai, mais qui, manquant de fermeté, dénient ses
principes par sa conduite. Voilà en quoi diffèrent l'incontinence et
l'intempérance.
Les vertus opposées à ces deux vices ont aussi des traits de différence
analogues et correspondants. La continence laisse subsister dans le cœur
les remords, la tristesse, l'indignation contre soi-même. (446d) L'âme de
l'homme tempérant, toujours saine, toujours calme, se maintient dans une
égalité parfaite, fruit de l'heureuse harmonie qui règne entre la raison,
et la cupidité dont la soumission et la docilité ne sont jamais altérées.
C'est d'une telle disposition qu'on pourrait dire avec Homère :
"Les vents sont apaisés; le souverain de l'onde
Fait régner sur les mers la paix la plus profonde";
Tant la raison a su étouffer ces désirs effrénés qui, dans les hommes
vicieux, s'emportent vers leur objet avec une fureur immodérée ! Pour les
passions nécessaires à la nature, elle les a rendues dociles et
soumises, elle vit avec elles dans une parfaite intelligence, et en fait
les ministres de ses desseins et de ses actions. Aussi ne les voit-on
jamais prévenir la raison, ou l'abandonner, ni exciter le moindre
désordre, (446e) ou se révolter contre elle. Tous les désirs marchent
constamment sous ses lois,
"Comme un léger poulain suit les pas de sa mère".
Les vrais philosophes, disait Xénocrate, font seuls volontairement ce que
le reste des hommes ne fait que par la contrainte des lois. Semblables à
de vils animaux, la vue seule du danger, ou la crainte du supplice, les
détourne du crime.
Il est certain que l'âme a la fermeté nécessaire pour résister aux
passions et pour les combattre. (446f) Il est néanmoins des
philosophes qui prétendent que la passion ne diffère pas de la raison, que
ce ne sont pas deux facultés ennemies et divisées, et que c'est toujours
la raison seule qui se porte vers des objets opposés. Mais trompés,
disent-ils, par son passage subit et rapide d'un objet à un autre,
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