[451] (451a) Οὐ γὰρ ὀρθότητι δοξῶν
οὐδὲ φαυλότητι δήπου τοῖς μὲν ἀλκαὶ καὶ ὁρμαὶ πρὸς τὰ φαινόμενα δεινὰ
παρίστανται, τοῖς δ´ ἀμήχανοι πτοῖαι καὶ φυγαὶ τῆς ψυχῆς· ἀλλ´ αἱ περὶ τὸ
αἷμα καὶ τὸ πνεῦμα καὶ τὸ σῶμα δυνάμεις τὰς τῶν παθῶν διαφορὰς ποιοῦσιν,
ὥσπερ ἐκ ῥίζης τοῦ παθητικοῦ τῆς σαρκὸς ἀναβλαστάνοντος καὶ συναναφέροντος
τὴν ποιότητα καὶ τὴν κρᾶσιν. Τοῦ δ´ ἀνθρώπου ταῖς μὲν παθητικαῖς ὁρμαῖς τὸ
σῶμα συμπαθοῦν καὶ συγκινούμενον ἐλέγχουσιν ὠχρότητες ἐρυθήματα τρόμοι
πηδήσεις καρδίας, διαχύσεις αὖ πάλιν ἐν ἐλπίσιν ἡδονῶν καὶ προσδοκίαις·
(451b) ὅταν δὲ μὴ μετὰ πάθους ἀλλ´ αὐτὸ καθ´ αὑτὸ κινῆται τὸ διανοητικόν,
ἡσυχίαν ἄγει τὸ σῶμα καὶ καθέστηκεν οὔτε κοινωνοῦν οὔτε μετέχον αὐτὸ τῆς
ἐνεργείας τοῦ φρονοῦντος, εἰ τοῦ παθητικοῦ μὴ συνεφάπτοιτο μηδὲ
συμπαραλαμβάνοι τὸ ἄλογον· ὥστε καὶ τούτῳ δύ´ ὄντα δηλοῦσθαι καὶ
διαφέροντα ταῖς δυνάμεσιν ἀλλήλων.
Καθόλου δὲ τῶν ὄντων αὐτοί τέ φασι καὶ δῆλόν ἐστιν ὅτι τὰ μὲν ἕξει
διοικεῖται τὰ δὲ φύσει τὰ δ´ ἀλόγῳ ψυχῇ τὰ δὲ καὶ λόγον ἐχούσῃ καὶ
διάνοιαν, ὧν ὁμοῦ τι πάντων ὁ ἄνθρωπος μετέσχηκε καὶ γέγονεν ἐν πάσαις
ταῖς εἰρημέναις διαφοραῖς· καὶ γὰρ (451c) ἕξει συνέχεται καὶ φύσει
τρέφεται καὶ λόγῳ χρῆται καὶ διανοίᾳ. Μέτεστιν οὖν αὐτῷ καὶ τοῦ ἀλόγου,
καὶ σύμφυτον ἔχει τὴν τοῦ πάθους ἀρχήν, οὐκ ἐπεισόδιον ἀλλ´ ἀναγκαίαν
οὖσαν, οὐδ´ ἀναιρετέαν παντάπασιν ἀλλὰ θεραπείας καὶ παιδαγωγίας δεομένην.
Ὅθεν οὐ Θρᾴκιον οὐδὲ Λυκούργειον τοῦ λόγου τὸ ἔργον ἐστί, συνεκκόπτειν καὶ
συνδιαφθείρειν τὰ ὠφέλιμα τοῖς βλαβεροῖς τοῦ πάθους, ἀλλ´ ᾗπερ ὁ φυτάλμιος
θεὸς καὶ ἡμερίδης, τὸ ἄγριον κολοῦσαι καὶ ἀφελεῖν τὴν ἀμετρίαν, εἶτα
τιθασεύειν καὶ παριστάναι τὸ χρήσιμον. (451d) Οὔτε γὰρ οἶνον οἱ φοβούμενοι
τὸ μεθύειν ἐκχέουσιν οὔτε πάθος οἱ δεδιότες τὸ ταρακτικὸν ἀναιροῦσιν ἀλλὰ
κεραννύουσι. Καὶ γὰρ βοῶν καὶ ἵππων τὰ πηδήματα καὶ τοὺς ἀφηνιασμοὺς οὐ
τὰς κινήσεις οὐδὲ τὰς ἐνεργείας ἀφαιροῦσι, καὶ τοῖς πάθεσι δεδαμασμένοις
χρῆται καὶ χειροήθεσιν ὁ λογισμός, οὐκ ἐκνευρίσας οὐδ´ ἐκτεμὼν παντάπασι
τῆς ψυχῆς τὸ ὑπηρετικόν.
« Ὑφ´ ἅρμασι » γὰρ « ἵππος » ὥς φησι Πίνδαρος « ἐν δ´ ἀρότρῳ βοῦς·
κάπρῳ δὲ βουλεύοντα φόνον κύνα χρὴ τλάθυμον ἐξευρεῖν »·
ὧν πολὺ χρησιμώτερα τὰ τῶν παθῶν θρέμματα τῷ λογισμῷ συμπαρόντα καὶ
συνεντείνοντα ταῖς ἀρεταῖς, ὁ θυμὸς (451e) τῇ ἀνδρείᾳ, μέτριος ὤν, ἡ
μισοπονηρία τῇ δικαιοσύνῃ καὶ ἡ νέμεσις ἐπὶ τοὺς παρ´ ἀξίαν εὐτυχοῦντας,
ὅταν ἅμ´ ἀνοίᾳ καὶ ὕβρει φλεγόμενοι τὴν ψυχὴν ἐπισχέσεως δέωνται. Φιλίας
δὲ φιλοστοργίαν ἢ φιλανθρωπίας ἔλεον ἢ τὸ συγχαίρειν καὶ συναλγεῖν εὐνοίας
ἀληθινῆς οὐδὲ βουλόμενος ἄν τις ἀποσπάσειεν οὐδ´ ἀποτήξειεν. Εἰ δ´ οἱ τὸν
ἔρωτα τῇ ἐρωτομανίᾳ συνεκβάλλοντες ἁμαρτάνουσιν, οὐδ´ οἱ τὴν ἐπιθυμίαν διὰ
τὴν φιλαργυρίαν ψέγοντες κατορθοῦσιν, ἀλλ´ ὅμοιόν τι πράττουσι τοῖς τὸ
τρέχειν διὰ τὸ προσπταίειν καὶ τὸ βάλλειν διὰ τὸ ὑπερβάλλειν ἀναιροῦσι
(451f) καὶ πρὸς τὸ ᾄδειν τὸ παράπαν διὰ τὸ ἀπᾴδειν ἀπεχθῶς ἔχουσιν. Οἷον
γὰρ ἐν φθόγγοις μουσικὴ τὸ ἐμμελὲς οὐκ ἀναιρέσει βαρύτητος καὶ ὀξύτητος,
ἐν δὲ σώμασιν ἰατρικὴ τὸ ὑγιεινὸν οὐ φθορᾷ θερμότητος καὶ ψυχρότητος, ἀλλὰ
συμμετρίαις καὶ ποσότησι κραθεισῶν ἀπεργάζεται, τοιοῦτον ἐν ψυχῇ τὸ ἠθικὸν
ἐγγενομένης ὑπὸ λόγου ταῖς παθητικαῖς δυνάμεσι καὶ κινήσεσιν ἐπιεικείας
καὶ μετριότητος.
| [451] (451a) Ce n'est pas de la vérité ou de
la fausseté de leurs opinions que viennent dans les uns cette fierté,
cette audace à affronter les objets les plus terribles ; et dans les
autres, ces craintes, ces frayeurs extraordinaires. Ces différences ont
leur source dans les différents degrés de la chaleur de leur sang, de
l'abondance et de la force de leurs esprits vitaux. Leurs passions
naissent de leur corps, comme de leur source, et forment les qualités
particulières qui les distinguent. Dans l'homme, au contraire, le rapport
naturel des sens avec les passions est attesté par la pâleur, la rougeur,
les tressaillements, les battements de cœur qu'il éprouve dans l'attente
des maux, et par ses épanouissements de joie dans l'espérance des
plaisirs. (451b) Mais la raison agit-elle seule sans le concours des
passions ; veut-elle, par exemple, s'occuper de quelque vérité
mathématique, alors la partie irraisonnable n'est pas appelée à partager
son opération. Le corps se tient dans un calme absolu, et ne participe en
rien au travail de l'âme. Que faut-il de plus pour se convaincre que la
cupidité et la raison sont deux facultés différentes dans leurs propriétés?
En un mot, il est de la dernière évidence, et les stoïciens eux-mêmes le
reconnaissent, que de toutes les choses qui existent, les unes sont régies
par la nature, les autres par l'habitude; celles-ci par la cupidité,
celles-là par la raison et par l'intelligence. L'homme réunit toutes ces
différences ; (451c) il est nourri par la nature et réglé par l'habitude.
Il use d'intelligence et de raison; il suit les mouvements de la cupidité.
Le principe des passions, loin de lui venir du dehors, est si naturel à
son être, qu'il en fait une partie nécessaire, et qu'au lieu de chercher à
le détruire, il faut le régler et le tourner vers des objets légitimes.
La raison ne va donc pas, comme autrefois Lycurgue, roi de Thrace,
abattre indifféremment ce que les passions ont d'utile avec ce qu'elles
ont de dangereux; mais telle que ce dieu sage et intelligent qui préside à
nos jardins, elle retranche ce qu'il y a de sauvage et de superflu,
adoucit l'âpreté de la sève, et rend les fruits plus agréables et plus
sains. (451d) Un homme qui craint de s'enivrer ne jette pas son vin, il le
tempère. Ainsi, pour prévenir le trouble des passions, il ne faut pas les
détruire, mais les modérer. Quand on dresse des animaux, on réprime en
eux, non l'ardeur et la vivacité des mouvements, mais leur fougue et leur
indocilité. Pourquoi voudrait-on que la raison énervât les passions et
leur ôtât toute leur énergie, au lieu de les dompter, de les apprivoiser
et de les faire servir à seconder ses opérations? Pindare a dit :
"L'intrépide coursier ne sert que pour la guerre.
Le boeuf d'un pas tardif va sillonner la terre.
Lu dauphin soulevant la surface des eaux, ;
Saute légèrement à l'entour des vaisseaux.
Le limier sait conduire avec beaucoup d'adresse
Le sanglier féroce au piége qu'on lui dresse".
Mais le service que font ces animaux n'est pas comparable à celui que la
raison tire des passions, quand elles secondent ses efforts vers le bien.
(451e) La colère modérée est l'aiguillon du courage, la haine du mal rend
la justice plus active, l'indignation sert à réprimer avec plus de force
l'insolence stupide de ces nouveaux parvenus qu'aveugle une prospérité
qu'ils ne méritaient pas. Peut-on séparer l'indulgence de l'amitié, la
compassion de l'humanité, la société des plaisirs et des peines, de la
véritable bienveillance?
Quelle erreur de croire qu'il faille bannir tout amour, parce qu'il y en a
de déraisonnables, ou proscrire tout désir à cause de l'avarice !
C'est vouloir défendre de courir, de tirer de l'arc (451f) ou de chanter,
parce qu' il y a des gens qui tombent, d'autres qui manquent le but,
d'autres enfin qui chantent mal. L'harmonie du chant ne consiste pas dans
la suppression des tons graves et aigus, ni la santé, dans la privation
totale du froid et du chaud, mais dans le mélange et la proportion de ces
qualités contraires. Ainsi dans l'âme, la raison obtient la victoire quand
elle réduit les passions aux lois de la décence et de la modération.
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