[9] ἤδη δέ που καὶ Ἀλκιβιάδης ἐνεφύετο τηνικαῦτα τοῖς
Ἀθηναίοις δημαγωγὸς οὐχ ὁμοίως ἄκρατος, ἀλλ' οἷον ἡ
Αἰγυπτίων χώρα λέγεται δι' ἀρετὴν ἐκφέρειν ὁμοῦ
φάρμακα πολλὰ μὲν ἐσθλὰ μεμιγμένα, πολλὰ δὲ λυγρά,
οὕτως ἡ Ἀλκιβιάδου φύσις ἐπ' ἀμφότερα πολλὴ ῥυεῖσα καὶ
λαμπρά, μεγάλων ἐνέδωκεν ἀρχὰς νεωτερισμῶν. (2) ὅθεν οὐδ'
ἀπαλλαγεὶς τοῦ Κλέωνος ὁ Νικίας καιρὸν ἔσχε παντάπασιν
ἀναπαῦσαι καὶ καταστορέσαι τὴν πόλιν, ἀλλ' εἰς ὁδὸν τὰ
πράγματα σωτήριον καταστήσας ἐξέπεσε, ῥύμῃ καὶ σφοδρότητι
τῆς Ἀλκιβιάδου φιλοτιμίας αὖθις ἐξωσθεὶς εἰς τὸν πόλεμον.
ἐπράχθη δὲ οὕτως. οἱ μάλιστα προσπολεμοῦντες τῇ εἰρήνῃ τῆς
Ἑλλάδος Κλέων καὶ Βρασίδας ἦσαν, ὧν ὁ πόλεμος τοῦ μὲν
ἀπέκρυπτε τὴν κακίαν, τοῦ δὲ τὴν ἀρετὴν ἐκόσμει. τῷ μὲν γὰρ
ἀδικημάτων μεγάλων, τῷ δὲ κατορθωμάτων ἀφορμὰς παρεῖχε.
(3) τούτων οὖν ἅμα πεσόντων ἐν μάχῃ μιᾷ περὶ Ἀμφίπολιν,
εὐθὺς ὁ Νικίας παραλαβὼν τοὺς μὲν Σπαρτιάτας ἔκπαλαι τῆς
εἰρήνης ὀρεγομένους, τοὺς δ' Ἀθηναίους οὐκέτι τῷ πολέμῳ
θαρροῦντας, ἀμφοτέρους δ' οἷον ἐκλελυμένους καὶ
παρακαθιέντας ἑκουσίως τὰς χεῖρας, ἔπραττεν ὅπως εἰς φιλίαν
τὰς πόλεις συναγαγὼν καὶ τοὺς ἄλλους Ἕλληνας ἀπαλλάξας
κακῶν καὶ ἀναπαυσάμενος, βέβαιον οὕτω τὸ τῆς εὐτυχίας
ὄνομα πρὸς τὸν αὖθις χρόνον ποιοῖτο. (4) τοὺς μὲν οὖν
εὐπόρους καὶ πρεσβυτέρους καὶ τῶν γεωργῶν τὸ πλῆθος
αὐτόθεν εἰρηνικὸν εἶχεν· ἐπεὶ δὲ καὶ τῶν ἄλλων πολλοῖς
ἐντυγχάνων ἰδίᾳ καὶ διδάσκων ἀμβλυτέρους ἐποίησε πρὸς τὸν
πόλεμον, οὕτως ἤδη τοῖς Σπαρτιάταις ἐλπίδας ἐνδιδοὺς
προεκαλεῖτο καὶ προὔτρεπεν ἔχεσθαι τῆς εἰρήνης. οἱ δ'
ἐπίστευον αὐτῷ διά τε τὴν ἄλλην ἐπιείκειαν, καὶ ὅτι τοῖς
ἡλωκόσι περὶ Πύλον καὶ δεδεμένοις ἐπιμελόμενος καὶ
περιέπων φιλανθρώπως ἐλαφροτέραν ἐποίει τὴν ἀτυχίαν. (5)
ἦσαν οὖν πρότερον πεποιημένοι τινὰ πρὸς ἀλλήλους
ἐκεχειρίαν ἐνιαύσιον, ἐν ᾗ συνιόντες εἰς ταὐτὸ καὶ γευόμενοι
πάλιν ἀδείας καὶ σχολῆς καὶ πρὸς ξένους καὶ οἰκείους
ἐπιμιξίας, ἐπόθουν τὸν ἀμίαντον καὶ ἀπόλεμον βίον, ἡδέως μὲν
ᾀδόντων τὰ τοιαῦτα χορῶν ἀκούοντες·
κείσθω δόρυ μοι μίτον ἀμφιπλέκειν ἀράχναις·
ἡδέως δὲ μεμνημένοι τοῦ εἰπόντος ὅτι τοὺς ἐν εἰρήνῃ
καθεύδοντας οὐ σάλπιγγες, ἀλλ' ἀλεκτρυόνες ἀφυπνίζουσι. (6)
λοιδοροῦντες οὖν καὶ προβαλλόμενοι τοὺς λέγοντας ὡς τρὶς
ἐννέα ἔτη διαπολεμηθῆναι πέπρωται τὸν πόλεμον, ἔπειθ' οὕτω
περὶ παντὸς εἰς λόγους συμβαίνοντες ἐποιήσαντο τὴν εἰρήνην,
δόξα τε παρέστη τοῖς πλείστοις ἀπαλλαγὴν κακῶν σαφῆ
γεγονέναι, καὶ τὸν Νικίαν διὰ στόματος εἶχον, ὡς ἀνὴρ εἴη
θεοφιλὴς καὶ τὸ δαιμόνιον αὐτῷ δι' εὐσέβειαν ἐπωνύμῳ
γενέσθαι τοῦ μεγίστου καὶ καλλίστου τῶν ἀγαθῶν (7) δέδωκε·
τῷ γὰρ ὄντι Νικίου τὴν εἰρήνην ἐνόμιζον ἔργον, ὡς Περικλέους
τὸν πόλεμον. ὁ μὲν γὰρ ἐπ' αἰτίαις μικραῖς εἰς συμφορὰς
μεγάλας ἐμβαλεῖν ἐδόκει τοὺς Ἕλληνας, ὁ δὲ τῶν μεγίστων
κακῶν ἔπεισεν ἐκλαθέσθαι φίλους γενομένους. διὸ καὶ τὴν
εἰρήνην ἐκείνην ἄχρι νῦν Νικίειον καλοῦσι.
| [9] XII.
Cependant Athènes voyait s'élever parmi ses orateurs le jeune Alcibiade, qui, sans
être aussi corrompu que les autres, pouvait être comparé à l'Égypte, dont Homère a
dit qu'à cause de la bonté de son sol, "En bons et mauvais fruits ses plaines sont
fertiles". De même, le caractère d'Alcibiade, en se portant avec une bouillante
impétuosité à des excès contraires, donna lieu à de si grandes nouveautés dans le
gouvernement, que Nicias, après même qu'il fut débarrassé de Cléon, n'eut pas le
temps de rétablir le calme et la tranquillité dans Athènes. II commençait à peine à
donner aux affaires un cours plus salutaire, que l'ambition violente d'Alcibiade le
rejeta hors de ses sages mesures, et l'entraîna de nouveau dans la guerre. Voici quelle
en fut l'occasion. Ceux qui mettaient le plus d'obstacle à la pacification de la Grèce
étaient Cléon et Brasidas : le premier, parce que la guerre couvrait ses vices; le
second, parce qu'elle relevait l'éclat de sa vertu. Cléon y trouvait des occasions de
faire de grandes injustices ; Brasidas, celles de s'illustrer par de grands exploits. Ils
périrent tous deux dans un combat qui fut donné près d'Amphipolis. Nicias, qui
vit d'un côté les Spartiates depuis longtemps portés à la paix, de l'autre les Athéniens
refroidis pour la guerre, et les deux partis, également fatigués, laisser pour ainsi dire,
tomber les armes de leurs mains, s'employa de tout son pouvoir à réconcilier les deux
villes, à délivrer les autres peuples de la Grèce des maux qui les accablaient, à leur
rendre le repos, et à leur procurer une félicité durable. Il trouva dans les riches, les
vieillards et les laboureurs, la plus grande disposition à la paix ; parlant ensuite en
particulier à la plupart des autres citoyens, il tempéra, par ses discours et par ses
conseils, leur ardeur pour la guerre; donnant alors de l'espérance aux Spartiates, il les
pressa de concourir à la paix. Les Lacédémoniens ajoutèrent foi à ses paroles, par la
confiance que leur donnait sa bonté ordinaire, et l'humanité avec laquelle il avait
traité les prisonniers spartiates que les Athéniens avaient faits à Pyles, et dont il avait
adouci l'infortune. XIII. Les deux peuples avaient déjà fait une trêve d'un an, pendant
laquelle se trouvant tous les jours ensemble, goûtant les douceurs du repos, de la
sécurité, et la satisfaction de voir librement leurs amis et les étrangers, ils en
désirèrent plus vivement une vie tranquille, que la guerre ne souillât plus de sang. Ils
aimaient à entendre chanter par les chœurs de leurs tragédies : "Que nos lances
enfin, au repos condamnées, Soient couvertes longtemps de toiles d'araignées". Ils se
rappelaient avec plaisir cette parole si connue : "Que ceux qui dorment au sein de la
paix sont réveillés, non par le son bruyant des trompettes, mais par le chant paisible
du coq". Maudissant donc ceux qui disaient qu'il était dans les destinées que la guerre
durât trois fois neuf ans, ils s'entretenaient mutuellement de leurs affaires, et ils
finirent par conclure un traité de paix. Le plus grand nombre se crurent alors
entièrement délivrés de leurs maux; ils n'avaient plus dans la bouche que le nom de
Nicias; ils le vantaient comme un homme chéri des dieux, qui, pour récompenser sa
piété, lui avaient donné un nom tiré du plus grand et du plus précieux de tous les
biens; car ils ne doutaient pas que cette paix ne fût l'ouvrage de Nicias, comme la
guerre avait été celui de Périclès. En. effet, celui-ci, pour des causes assez légères,
avait jeté les Grecs dans les plus grandes calamités; et l'autre, en les rendant amis,
leur avait fait oublier les maux les plus funestes. Aussi cette paix s'appelle-t-elle
encore le Nicieium, c'est-à-dire, l'oeuvre de Nicias.
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