[21] ἐν τούτῳ δὲ Δημοσθένης ὑπὲρ τῶν λιμένων ἐπεφαίνετο
λαμπρότατος τῇ παρασκευῇ καὶ δεινότατος τοῖς πολεμίοις, ἐπὶ
νεῶν ἑβδομήκοντα καὶ τριῶν ἄγων ὁπλίτας πεντακισχιλίους,
ἀκοντιστὰς δὲ καὶ τοξότας καὶ σφενδονήτας τρισχιλίων οὐκ
ἐλάττους, ὅπλων δὲ κόσμῳ καὶ παρασήμοις τριήρων καὶ πλήθει
κελευστῶν καὶ αὐλητῶν θεατρικῶς καὶ πρὸς ἔκπληξιν
πολεμίων ἐξησκημένος. (2) ἦν οὖν, ὡς εἰκός, αὖθις ἐν φόβῳ
μεγάλῳ τὰ Συρακουσίων εἰς οὐδὲν πέρας οὐδὲ ἀπαλλαγήν,
ἀλλὰ πονοῦντας ἄλλως καὶ φθειρομένους αὑτοὺς μάτην
ὁρώντων. τὸν δὲ Νικίαν οὐ πολὺν χρόνον εὔφρανεν ἡ παρουσία
τῆς δυνάμεως, ἀλλ' ἅμα τῷ πρῶτον ἐν λόγοις γενέσθαι, τοῦ
Δημοσθένους εὐθὺς ἐπιχειρεῖν τοῖς πολεμίοις κελεύοντος καὶ
τῷ ταχίστῳ τῶν κινδύνων περὶ τοῦ παντὸς διαγωνισαμένους
ἑλεῖν Συρακούσας ἢ ἀποπλεῖν οἴκαδε, δείσας καὶ θαυμάσας τὴν
ὀξύτητα καὶ τόλμαν ἐδεῖτο μηδὲν ἀπεγνωσμένως πράττειν
μηδὲ ἀνοήτως. (3) τὴν γὰρ τριβὴν εἶναι κατὰ τῶν πολεμίων
οὔτε χρήματα κεκτημένων ἔτι, μήτε τῶν συμμάχων αὐτοῖς
πολὺν χρόνον παραμενούντων, εἰ δὲ θλίβοιντο ταῖς ἀπορίαις,
ταχὺ πάλιν ἐπ' αὐτὸν ἐπὶ συμβάσεις τραπησομένων, ὡς
πρότερον. καὶ γὰρ ἦσαν ἄνδρες οὐκ ὀλίγοι τῶν ἐν Συρακούσαις
διαλεγόμενοι τῷ Νικίᾳ κρύφα καὶ μένειν κελεύοντες, ὡς καὶ
νῦν ὑπερπονούντων τῷ πολέμῳ καὶ τὸν Γύλιππον
βαρυνομένων, ἐὰν δὲ μικρὸν ἐπιτείνωσιν αἱ ἀνάγκαι,
παντάπασιν ἀπαγορευσόντων. τούτων ὁ Νικίας τὰ μὲν
αἰνιττόμενος, (4) τὰ δ' οὐ θέλων ἐν φανερῷ λέγειν, ἀτολμίας
παρέσχε τοῖς στρατηγοῖς δόξαν, καὶ ταῦτ' ἐκεῖνα πάλιν ἥκειν
φάσκοντες αὐτοῦ, μελλήματα καὶ διατριβὰς καὶ ἀκριβολογίας,
αἷς ἀπώλεσε τὴν ἀκμὴν οὐκ εὐθὺς ἐπιχειρῶν τοῖς πολεμίοις,
ἀλλ' ἕωλος καὶ καταφρονούμενος, τῷ Δημοσθένει
προσετίθεντο. καὶ ὁ Νικίας μόλις συνεχώρησεν ἐκβιασθείς. (5)
οὕτω δὴ τὴν πεζὴν στρατιὰν ἀναλαβὼν ὁ Δημοσθένης νυκτὸς
ἐπεχείρει ταῖς Ἐπιπολαῖς· καὶ τοὺς μὲν φθάσας πρὶν αἰσθέσθαι
τῶν πολεμίων ἀπέκτεινε, τοὺς δ' ἀμυνομένους ἐτρέψατο. καὶ
κρατῶν οὐκ ἔμενεν, ἀλλ' ἐχώρει προσωτέρω, μέχρι οὗ τοῖς
Βοιωτοῖς ἐνέτυχε. πρῶτοι γὰρ οὗτοι συστρέψαντες ἑαυτοὺς καὶ
συνδραμόντες εἰς τοὺς Ἀθηναίους ἐναντίοις τοῖς δόρασι μετὰ
βοῆς ἐώσαντο καὶ πολλοὺς αὐτοῦ κατέβαλον. (6) δι' ὅλου δὲ τοῦ
στρατεύματος εὐθὺς ἦν πτοία καὶ ταραχή, καὶ τοῦ φεύγοντος
ἤδη καταπιμπλάμενον τὸ ἔτι νικῶν, καὶ τὸ ἐπιβαῖνον καὶ
προσφερόμενον ὑπὸ τῶν πεφοβημένων ἀνακοπτόμενον ἑαυτῷ
περιέπιπτε, τοὺς μὲν φεύγοντας οἰόμενον διώκειν, τοῖς δὲ
φίλοις ὡς πολεμίοις χρώμενον. (7) ἡ γὰρ ἄτακτος ἀνάμιξις ἐν
ταὐτῷ μετὰ φόβου καὶ ἀγνοίας, καὶ τὸ τῆς ὄψεως ἄπιστον ἐν
νυκτὶ μήτε σκότος ἄκρατον μήτε φῶς ἐχούσῃ βέβαιον, ἀλλ'
οἵαν εἰκὸς ἤδη καταφερομένης σελήνης καὶ περισκιαζομένης
ὅπλοις πολλοῖς καὶ σώμασι κινουμένοις διὰ τοῦ φωτὸς μὴ
διασαφοῦσαν τὰ εἴδη φόβῳ τοῦ πολεμίου. καὶ τὸ οἰκεῖον ποιεῖν
ὕποπτον, εἰς δεινὰς ἀπορίας καὶ περιπετείας καθίστη τοὺς
Ἀθηναίους. (8) ἔτυχον δέ πως καὶ τὴν σελήνην ἔχοντες ὄπισθεν·
ὅθεν αὐτοὶ μὲν αὑτοῖς τὰς σκιὰς ἐπιβάλλοντες ἀπέκρυπτον τὸ
πλῆθος τῶν ὅπλων καὶ τὴν λαμπρότητα, τοὺς δ' ἐναντίους ὁ
πρὸς τὴν σελήνην τῶν ἀσπίδων ἀντιφωτισμὸς πολὺ πλείονας
ὁρᾶσθαι καὶ λαμπροτέρους ἐποίει. τέλος δὲ πανταχόθεν αὐτοῖς,
(9) ὡς ἐνέδοσαν, προσκειμένων τῶν πολεμίων φεύγοντες οἱ μὲν
ὑπ' ἐκείνων, οἱ δ' ὑπ' ἀλλήλων ἀπέθνησκον, οἱ δὲ κατὰ τῶν
κρημνῶν ὀλισθαίνοντες· τοὺς δ' ἀποσκεδασθέντας καὶ
πλανωμένους ἡμέρας ἐπιγενομένης οἱ ἱππεῖς
καταλαμβάνοντες διέφθειρον. ἐγένοντο δὲ νεκροὶ δισχίλιοι, καὶ
τῶν περιγενομένων ὀλίγοι μετὰ τῶν ὅπλων ἀπεσώθησαν.
| [21] Cependant Démosthène parut tout à coup au-dessus du port,
à la vue des ennemis, dans un appareil aussi magnifique que formidable;
sa flotte était composée de soixante-treize vaisseaux, montés de cinq
mille hommes d'infanterie, d'environ trois mille tant archers que frondeurs et gens de
trait; l'éclat des armes, les couleurs brillantes des enseignes, le grand nombre des
officiers et le son bruyant des trompettes, tout offrait aux ennemis le spectacle le plus
pompeux et à la fois le plus effrayant. Les Syracusains furent de nouveau en proie
aux plus vives alarmes; ils ne voyaient plus de terme à leurs maux, plus d'espoir d'un
meilleur sort; ils allaient perdre le fruit de tous leurs travaux, et périr sans ressource.
Pour Nicias, la joie qui lui avait causé un renfort si considérable ne fut pas de longue
durée. Démosthène, dès sa première entrevue avec lui, proposa d'aller sur-le-champ
attaquer les Syracusains, de tout risquer au plus tôt pour emporter Syracuse, et s'en
retourner tout de suite à Athènes. Nicias aussi surpris qu'effrayé de la précipitation
et de l'audace de Démosthène, le conjurait de ne rien hasarder témérairement et en
désespéré; il lui représentait que les délais seraient funestes aux ennemis, qui, n'ayant
plus d'argent pour solder leurs troupes, seraient bientôt abandonnés de leurs alliés,
et forcés par la disette, ne tarderaient pas à proposer une nouvelle capitulation,
comme ils l'avaient fait auparavant. Il avait en effet dans Syracuse des intelligences
avec des habitants qui le pressaient de rester, qui lui assuraient que les Syracusains
étaient las de la guerre, et supportaient impatiemment l'autorité de Gylippe; que
pour peu que la disette à laquelle ils étaient réduits vînt à augmenter, ils se
rendraient bientôt à discrétion. XXXI. Comme Nicias faisait ces représentations d'une
manière enveloppée, sans vouloir s'expliquer trop clairement, elles parurent aux
autres généraux l'effet de sa timidité naturelle. C'étaient toujours, disaient-ils, ses
lenteurs ordinaires, ses délais continuels, ses précautions excessives, par lesquelles
émoussant toute la vigueur de ses troupes, au lieu de les mener sur-le-champ à
l'ennemi, il les avait laissé tomber dans un tel refroidissement, qu'elles étaient
devenues un objet de mépris. Ils furent donc tous de l'avis de Démosthène, et Nicias
lui-même se vit contraint de leur céder. Démosthène, prenant dès la nuit suivante
tout ce qu'il avait de troupes de terre, va attaquer le fort d'Épipoles, et avant que
d'être aperçu, il charge les ennemis, en tue une partie, et met en fuite ceux qui
veulent se défendre. Il profite de cet avantage, et, poussant plus loin, il donne dans le
corps des Béotiens, qui, s'étant mis les premiers en bataille, tombent les piques
baissées sur les Athéniens en jetant de grands cris, et en font un grand carnage. Le
trouble et la frayeur se communiquent au reste de l'armée; une partie d'entre eux, qui
combattaient encore avec avantage, se trouvent mêlés avec les fuyards, et ceux qui
descendaient de l'Épipoles, pour soutenir les premiers, sont blessés par ceux que la
frayeur disperse ; ils prennent les fuyards pour des gens qui les poursuivent, se
renversent sur leurs propres troupes et les traitent en ennemis. La confusion qui naît
de ce mélange, la frayeur, où les jette la difficulté de se reconnaître et de se distinguer
dans une nuit qui n'était ni tout à fait obscure, ni assez claire pour discerner les
objets; la lune, qui, déjà sur son coucher, ne donnait qu'une faible lumière, et
tellement offusquée par le mouvement des armes et des soldats qu'on ne pouvait voir
avec certitude ce qui se passait, et que la crainte des ennemis rendait même les amis
suspects; tout livre les Athéniens aux plus cruelles perplexités, et les précipite dans
les plus grands maux. Outre cela, ils avaient la lune au dos, en sorte que leur ombre
projetée devant eux cachait aux Syracusains leur nombre et l'éclat de leurs armes;
tandis que la réverbération de la clarté de la lune, qui donnait sur les boucliers des
ennemis, semblait les multiplier, et rendait leurs armes plus brillantes. Enfin, pressés
de toutes parts, ils commencent à lâcher le pied, et bientôt mis en pleine déroute, ils
tombent les uns sous le fer des Syracusains, les autres sous leurs propres armes;
quelques-uns se précipitent le long des rochers, d'autres, en se sauvant, s'égarent
dans les campagnes, où le lendemain matin ils sont enveloppés et massacrés par la
cavalerie des ennemis. Il périt deux mille hommes dans le combat, et de ceux qui
échappèrent au carnage, il n'y en eut qu'un bien petit nombre qui se sauvèrent avec
leurs armes.
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