[5] ἐπεὶ δὲ ὁ μὲν Ἀλκιβιάδης εἰς Φωκαίαν ἐκ Σάμου
διέπλευσεν ἐπὶ τοῦ στόλου καταλιπὼν Ἀντίοχον τὸν
κυβερνήτην, ὁ δὲ Ἀντίοχος οἷον ἐφυβρίζων τῷ Λυσάνδρῳ καὶ
θρασυνόμενος ἐπέπλευσε δυσὶ τριήρεσιν εἰς τὸν λιμένα τῶν
Ἐφεσίων καὶ παρὰ τὸν ναύσταθμον γέλωτι καὶ πατάγῳ
χρώμενος σοβαρῶς παρήλαυνεν, ἀγανακτήσας ὁ Λύσανδρος
καὶ κατασπάσας τὸ πρῶτον οὐ πολλὰς τῶν τριήρων ἐδίωκεν
αὐτόν, ἰδὼν δὲ αὖ τοὺς Ἀθηναίους βοηθοῦντας ἄλλας ἐπλήρου,
καὶ τέλος ἐναυμάχουν συμπεσόντες. (2) ἐνίκα δὲ Λύσανδρος,
καὶ πεντεκαίδεκα τριήρεις λαβὼν ἔστησε τρόπαιον. ἐπὶ τούτῳ
τὸν Ἀλκιβιάδην ὁ μὲν ἐν ἄστει δῆμος ὀργισθεὶς
ἀπεχειροτόνησεν, ὑπὸ δὲ τῶν ἐν Σάμῳ στρατιωτῶν
ἀτιμαζόμενος καὶ κακῶς ἀκούων ἀπέπλευσεν εἰς Χερρόνησον
ἐκ τοῦ στρατοπέδου. ταύτην μὲν οὖν τὴν μάχην, καίπερ οὐ
μεγάλην τῇ πράξει γενομένην, ἡ τύχη δι' Ἀλκιβιάδην
ὀνομαστὴν ἐποίησεν.
(3) ὁ δὲ Λύσανδρος ἀπὸ τῶν πόλεων εἰς Ἔφεσον
μεταπεμπόμενος οὓς ἑώρα μάλιστα ταῖς τε τόλμαις καὶ τοῖς
φρονήμασιν ὑπὲρ τοὺς πολλοὺς ὄντας, ἀρχὰς ὑπέσπειρε τῶν
ὕστερον ἐπ' αὐτοῦ γενομένων δεκαδαρχιῶν καὶ νεωτερισμῶν,
προτρέπων καὶ παροξύνων ἑταιρικὰ συνίστασθαι καὶ
προσέχειν τὸν νοῦν τοῖς πράγμασιν, ὡς ἅμα τῷ καταλυθῆναι
τοὺς Ἀθηναίους τῶν τε δήμων ἀπαλλαξομένους καὶ
δυναστεύσοντας ἐν ταῖς πατρίσι. (4) τούτων δὲ τὴν πίστιν
ἑκάστῳ δι' ἔργων παρεῖχε, τοὺς ἤδη γεγονότας φίλους αὐτῷ καὶ
ξένους εἰς μεγάλα πράγματα καὶ τιμὰς καὶ στρατηγίας
ἀνάγων, καὶ συναδικῶν καὶ συνεξαμαρτάνων αὐτὸς ὑπὲρ τῆς
ἐκείνων πλεονεξίας, ὥστε προσέχειν ἅπαντας αὐτῷ καὶ
χαρίζεσθαι καὶ ποθεῖν, ἐλπίζοντας οὐδενὸς ἀτυχήσειν τῶν
μεγίστων ἐκείνου κρατοῦντος. (5) διὸ καὶ Καλλικρατίδαν οὔτ'
εὐθὺς ἡδέως εἶδον ἐλθόντα τῷ Λυσάνδρῳ διάδοχον τῆς
ναυαρχίας, οὔτε, ὡς ὕστερον διδοὺς πεῖραν ἀνὴρ ἐφαίνετο
πάντων ἄριστος καὶ δικαιότατος, ἠρέσκοντο τῷ τρόπῳ τῆς
ἡγεμονίας ἁπλοῦν τι καὶ Δώριον ἐχούσης καὶ ἀληθινόν. ἀλλὰ
τούτου μὲν τὴν ἀρετὴν ὥσπερ ἀγάλματος ἡρωικοῦ κάλλος
ἐθαύμαζον, ἐπόθουν δὲ τὴν ἐκείνου σπουδὴν καὶ τὸ φιλέταιρον
καὶ χρειῶδες ἐζήτουν, ὥστε ἀθυμεῖν ἐκπλέοντος αὐτοῦ καὶ
δακρύειν.
| [5] V. Mais Alcibiade étant parti de Samos pour aller à Phocée,
et ayant laissé le commandement de la flotte à son pilote Antiochus,
celuici, pour insulter à Lysandre et faire preuve de fierté, entre dans le port
d'Éphèse, suivi seulement de deux galères; et cinglant avec beaucoup de bruit et de
grands éclats de rire, il passe insolemment devant la flotte lacédémonienne, qui était
à sec sur le rivage. Lysandre, indigné de son audace, mit d'abord en mer quelques
galères, afin de le poursuivre; et voyant que les Athéniens venaient au secours
d'Antiochus, il en détacha d'autres successivement; enfin, les deux flottes
combattirent avec toutes leurs forces. Lysandre fut vainqueur; et ayant pris quinze
galères ennemies, il en dressa un trophée. Les Athéniens, irrités de cette défaite,
ôtèrent le commandement de la flotte à Alcibiade, qui, se voyant en butte au mépris
et aux reproches de l'armée de Samos, quitta le camp, et fit voile vers la Chersonèse.
Cette victoire fut en soi peu considérable; mais la fortune lui donna le plus
grand éclat, à cause de la réputation dont jouissait Alcibiade. Cependant Lysandre
ayant fait venir des villes d'Asie à Éphèse les hommes qu'il connaissait pour les plus
courageux et les plus entreprenants, il s'appliqua à semer parmi eux les premiers
germes des innovations et des changements qu'il effectua depuis dans ces villes; il
exhorta, il anima ces hommes audacieux à former entre eux des associations, et à se
rendre maîtres des affaires; il leur promit que lorsqu'il aurait renversé la puissance
des Athéniens, il détruirait partout la domination du peuple, et les investirait du
pouvoir souverain dans leur patrie. Il leur donna, par des effets réels, des garants
sûrs de ses promesses; il mit à la tête de l'administrstion ceux qui étaient devenus ses
amis et ses hôtes; il leur conféra les honneurs et Ies dignités, et se rendit, pour
satisfaire leur ambition, le complice de leurs injustices et de leurs fautes. Aussi,
entièrement dévoués à sa personne, ils ne désiraient que lui, ils ne cherchaient qu'à
lui complaire, assurés qu'ils en obtiendraient tout tant qu'il serait le maître. VI. Cet
attachement à Lysandre leur fit voir de mauvais oeil Callicratidas, qui vint le
remplacer dans le commandement de la flotte; et quand ils eurent connu, par
expérience, que c'était l'homme le meilleur et le plus juste, ils furent encore plus
mécontents de sa manière de gouverner simple, droite, et tout à fait dorienne. Ils
admiraient, il est vrai, sa vertu, mais de cette admiration qu'inspire la beauté d'une
statue antique de quelque héros; au lieu qu'ils aimaient le zèle, l'affection de
Lysandre, pour ses amis, et qu'ils regrettaient les avantages que sa faveur leur
procurait. Quand il le virent s'embarquer, ils furent si affligés de son départ, qu'ils
ne purent retenir leurs larmes.
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