| [11] ὁ μὲν οὖν Ἀλκιβιάδης ὑποπτεύσας τι καὶ προδοσίας ἐν 
αὐτοῖς ἀπηλλάττετο. πέμπτῃ δὲ ἡμέρᾳ τῶν Ἀθηναίων 
ποιησαμένων τὸν ἐπίπλουν καὶ πάλιν ἀπερχομένων, ὥσπερ 
εἰώθεσαν, ὀλιγώρως πάνυ καὶ καταφρονητικῶς, ὁ Λύσανδρος 
ἐκπέμπων τὰς κατασκόπους ναῦς ἐκέλευσε τοὺς τριηράρχους, 
ὅταν ἴδωσι τοὺς Ἀθηναίους ἐκβεβηκότας, ἐλαύνειν 
ἀποστρέψαντας ὀπίσω τάχει παντί, καὶ γενομένους κατὰ μέσον 
τὸν πόρον ἀσπίδα χαλκῆν ἐπάρασθαι πρῴραθεν ἐπίπλου 
σύμβολον. (2) αὐτὸς δὲ τοὺς κυβερνήτας καὶ τριηράρχους 
ἐπιπλέων ἀνεκαλεῖτο καὶ παρώρμα συνέχειν ἕκαστον ἐν τάξει 
τὸ πλήρωμα καὶ τοὺς ναύτας καὶ τοὺς ἐπιβάτας, ὅταν δὲ 
σημανθῇ, μετὰ προθυμίας καὶ ῥώμης ἐλαύνειν ἐπὶ τοὺς 
πολεμίους. ὡς δὲ ἥ τε ἀσπὶς ἀπὸ τῶν νεῶν ἤρθη καὶ τῇ 
σάλπιγγι τὴν ἀναγωγὴν ἐσήμαινεν ἀπὸ τῆς ναυαρχίδος, 
ἐπέπλεον μὲν αἱ νῆες, ἡμιλλῶντο δὲ οἱ πεζοὶ παρὰ τὸν 
αἰγιαλὸν ἐπὶ τὴν ἄκραν. (3) τὸ δὲ μεταξὺ τῶν ἠπείρων διάστημα 
ταύτῃ πεντεκαίδεκα σταδίων ἐστί, καὶ ταχέως ὑπὸ σπουδῆς καὶ 
προθυμίας τῶν ἐλαυνόντων συνῄρητο. Κόνων δὲ πρῶτος ὁ τῶν 
Ἀθηναίων στρατηγὸς ἀπὸ τῆς γῆς ἰδὼν ἐπιπλέοντα τὸν στόλον 
ἐξαίφνης ἀνεβόησεν ἐμβαίνειν, καὶ περιπαθῶν τῷ κακῷ τοὺς 
μὲν ἐκάλει, τῶν δὲ ἐδεῖτο, τοὺς δὲ ἠνάγκαζε πληροῦν τὰς 
τριήρεις. (4) ἦν δὲ οὐδὲν ἔργον αὐτοῦ τῆς σπουδῆς 
ἐσκεδασμένων τῶν ἀνθρώπων. ὡς γὰρ ἐξέβησαν, εὐθύς, ἅτε 
μηδὲν προσδοκῶντες, ἠγόραζον, ἐπλανῶντο περὶ τὴν χώραν, 
ἐκάθευδον ὑπὸ ταῖς σκηναῖς, ἠριστοποιοῦντο, πορρωτάτω τοῦ 
μέλλοντος ἀπειρίᾳ τῶν ἡγουμένων ὄντες. (5) ἤδη δὲ κραυγῇ καὶ 
ῥοθίῳ προσφερομένων τῶν πολεμίων ὁ μὲν Κόνων ὀκτὼ 
ναυσὶν ὑπεξέπλευσε καὶ διαφυγὼν ἀπεπέρασεν εἰς Κύπρον 
πρὸς Εὐαγόραν, ταῖς δὲ ἄλλαις ἐπιπεσόντες οἱ Πελοποννήσιοι 
τὰς μὲν κενὰς παντάπασιν ᾕρουν, τὰς δ' ἔτι πληρουμένας 
ἔκοπτον. οἱ δὲ ἄνθρωποι πρός τε ταῖς ναυσὶν ἀπέθνησκον 
ἄνοπλοι καὶ σποράδες ἐπιβοηθοῦντες, ἔν τε τῇ γῇ φεύγοντες 
ἀποβάντων τῶν πολεμίων ἐκτείνοντο. (6) λαμβάνει δὲ ὁ 
Λύσανδρος τρισχιλίους ἄνδρας αἰχμαλώτους μετὰ τῶν 
στρατηγῶν, ἅπαν δὲ τὸ ναύσταθμον ἄνευ τῆς Παράλου καὶ τῶν 
μετὰ Κόνωνος ἐκφυγουσῶν. ἀναδησάμενος δὲ τὰς ναῦς καὶ 
διαπορθήσας τὸ στρατόπεδον μετὰ αὐλοῦ καὶ παιάνων 
ἀνέπλευσεν εἰς Λάμψακον, ἔργον ἐλαχίστῳ πόνῳ μέγιστον 
ἐξειργασμένος, καὶ συνῃρηκὼς ὥρᾳ μιᾷ χρόνου μήκιστον καὶ 
ποικιλώτατον πάθεσί τε καὶ τύχαις ἀπιστότατον τῶν πρὸ αὐτοῦ 
πολέμων, (7) ὃς μυρίας μορφὰς ἀγώνων καὶ πραγμάτων 
μεταβολὰς ἀμείψας, καὶ στρατηγοὺς ὅσους οὐδὲ οἱ σύμπαντες 
οἱ πρὸ αὐτοῦ τῆς Ἑλλάδος ἀναλώσας, ἑνὸς ἀνδρὸς εὐβουλία 
καὶ δεινότητι συνῄρητο· διὸ καὶ θεῖόν τινες ἡγήσαντο τοῦτο τὸ 
ἔργον.
 | [11] XII. Cependant Alcibiade, qui se tenait dans des  places fortes de la Chersonèse 
qu'il avait à lui,  vint à cheval au camp des Athéniens, 
et représenta aux généraux qu'ils avaient imprudemment,  et contre leur sûreté, placé 
leur flotte sur une  côte découverte, et qui n'avait aucun abri; en second lieu, qu'ils 
avaient eu tort d'abandonner  Seste, d'où ils tiraient leurs provisions; et qu'ils  
feraient sagement de regagner promptement le  port de cette ville, pour se tenir plus 
loin des  ennemis, qui, commandés par un seul chef, suivaient une exacte discipline, 
et obéissaient à tout  au moindre signal. Mais les généraux n'eurent  aucun égard à ses 
représentations; et Tydée, l'un  d'eux, lui répondit d'un ton insultant que ce  n'était 
pas lui qui commandait, et que l'armée  avait ses généraux. Alcibiade, soupçonnant 
quelque trahison, se retira sans répliquer. Le cinquième jour, les Athéniens vinrent 
encore présenter la bataille aux ennemis; et le soir, quand ils  se furent retirés avec cet 
air de négligence et de  mépris qui leur était ordinaire, Lysandre envoya  quelques 
vaisseaux d'observation, avec ordre aux  capitaines que lorsqu'ils auraient vu 
débarquer  les Athéniens, ils revinssent en toute diligence;  et qu'arrivés au milieu 
du détroit, ils élevassent  sur leur proue, au bout d'une pique, un bouclier  d'airain, 
pour lui donner le signal de faire partir  sa flotte. Lui-même, sur sa galère, parcourant  
toute la ligne, animait les pilotes et les capitaines;  les exhortait tous, soldats et 
matelots, de tenir  chacun leur équipage en bon ordre, et, dès que  le signal serait 
donné, de voguer de toutes leurs  forces contre l'ennemi. XIII. Il n'eut pas plutôt vu le 
bouclier élevé  sur les galères d'observation, que la trompette de  la galère 
capitainesse donna le signal, et que toute  la flotte se mit à voguer en bon ordre : 
l'armée de  terre se hâta aussi de gagner le promontoire qui  dominait le rivage, pour 
être spectatrice du combat. Le détroit qui sépare ces deux continents  n'a de largeur 
en cet endroit que quinze stades;  la diligence et l'activité des rameurs eurent 
bientôt franchi cet intervalle. Conon fut le premier des  généraux Athéniens qui, de la 
terre, vit cette  flotte s'avancer à pleines voiles, et qui cria qu'on  s'embarquât. Saisi de 
douleur à la vue du malheur  qui menace la flotte, il appelle les uns, il conjure  les 
autres, il force tous ceux qu'il trouve de monter sur les vaisseaux; mais ses efforts et 
son zèle  sont inutiles, les. soldats étaient dispersés de côté  et d'autre; ils avaient à 
peine quitté leurs vaisseaux, que, ne s'attendant à rien de nouveau, ils  avaient couru 
ou acheter des vivres, ou se promener dans la campagne. Les uns dormaient dans  
leurs tentes, d'autres préparaient leur souper;  tous, par l'inexpérience de leurs chefs, 
étaient  bien loin de prévoir ce qui les menaçait. Déjà les  ennemis venaient sur eux 
avec impétuosité, en  jetant de grands cris, lorsque Conon, se dérobant  avec huit 
vaisseaux, se retira dans l'île de Cypre,  auprès d'Évagoras. Les Péloponésiens, 
tombant  sur les autres galères, enlèvent celles qui sont  vides, et froissent de leur 
choc celles qui commençaient à se remplir. Les soldats qui accouraient  pour les 
défendre par pelotons et sans armes sont  tués près de leurs vaisseaux, et ceux qui 
s'enfuient  dans les terres sont massacrés par les ennemis, qui,  descendant du 
promontoire, se mettent à leur  poursuite. Lysandre fit trois mille prisonniers,  au 
nombre desquels étaient les généraux. Il s'empara de toute la flotte, excepté du 
vaisseau Paralus, et des huit que Conon avait emmenés au  commencement de 
l'action. Lysandre ayant remorqué les galères captives, et pillé le camp des  
Athéniens, s'en retourna à Lampsaque, au son des  flûtes et aux chants de victoire. Il 
venait d'exécuter, sans aucune peine, un des plus grands  exploits de guerre : il avait, 
pour ainsi dire, resserré dans l'espace d'une heure le temps le plus  considérable et le 
plus fécond en événements. Il  avait mis fin à une guerre signalée par les coups  les 
plus extraordinaires de la fortune; une guerre  qui, ayant eu successivement les 
formes les plus  variées, produit les plus étonnantes vicissitudes,  amené un nombre 
infini de batailles par terre et  par mer, et enlevé plus de généraux que toutes les  
guerres dont la Grèce avait été jusqu'alors le  théâtre, venait d'être terminée par la 
prudence et  l'habileté d'un seul homme. XIV. Aussi regarda-t-on ce succès 
comme l'ouvrage d'un dieu; 
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