| [5] Τῶν μὲν οὖν πολλῶν ὁ Φάβιος τὴν γνώμην ἀναρτήσας
 εἰς τὸ θεῖον, ἡδίω πρὸς τὸ μέλλον ἐποίησεν· αὐτὸς
 δὲ πάσας θέμενος ἐν αὑτῷ τὰς τῆς νίκης ἐλπίδας, ὡς καὶ
 τοῦ θεοῦ τὰς εὐπραξίας δι´ ἀρετῆς καὶ φρονήσεως παραδιδόντος,
 τρέπεται πρὸς Ἀννίβαν, οὐχ ὡς διαμαχούμενος,
 ἀλλὰ χρόνῳ τὴν ἀκμὴν αὐτοῦ καὶ χρήμασι τὴν ἀπορίαν
 καὶ πολυανθρωπίᾳ τὴν ὀλιγότητα τρίβειν καὶ ὑπαναλίσκειν
 βεβουλευμένος. ὅθεν αἰεὶ μετέωρος ἀπὸ τῆς ἵππου
 τῶν πολεμίων ἐν τόποις ὀρεινοῖς στρατοπεδεύων ἐπῃωρεῖτο,
 καθημένου μὲν ἡσυχάζων, κινουμένου δὲ κατὰ τῶν
 ἄκρων κύκλῳ περιιὼν καὶ περιφαινόμενος ἐκ διαστήματος,
 ὅσον ἀκοντὶ μὴ βιασθῆναι μάχεσθαι καὶ φόβον ὡς
 μαχησόμενος τοῖς πολεμίοις ἀπὸ τῆς μελλήσεως αὐτῆς
 παρέχειν. οὕτω δὲ παράγων τὸν χρόνον ὑπὸ πάντων κατεφρονεῖτο,
 καὶ κακῶς μὲν ἤκουεν ἐν τῷ στρατοπέδῳ, κομιδῇ
 δὲ τοῖς πολεμίοις ἄτολμος ἐδόκει καὶ τὸ μηδὲν
 εἶναι, πλὴν ἑνὸς ἀνδρὸς Ἀννίβου. μόνος δ´ ἐκεῖνος
 αὐτοῦ τὴν δεινότητα καὶ τὸν τρόπον ᾧ πολεμεῖν ἐγνώκει
 συνιδών, καὶ διανοηθεὶς ὡς πάσῃ τέχνῃ καὶ βίᾳ
 κινητέος ἐστὶν εἰς μάχην ὁ ἀνὴρ ἢ διαπέπρακται τὰ
 Καρχηδονίων, οἷς μέν εἰσι κρείττους ὅπλοις χρήσασθαι
 μὴ δυναμένων, οἷς δὲ λείπονται σώμασι καὶ χρήμασιν
 ἐλαττουμένων καὶ δαπανωμένων εἰς τὸ μηδέν, ἐπὶ πᾶσαν
 ἰδέαν στρατηγικῶν σοφισμάτων καὶ παλαισμάτων τρεπόμενος
 καὶ πειρώμενος ὥσπερ δεινὸς ἀθλητὴς λαβὴν
 ζητῶν, προσέβαλλε καὶ διετάραττε καὶ μετῆγε πολλαχόσε
 τὸν Φάβιον, ἐκστῆσαι τῶν ὑπὲρ τῆς ἀσφαλείας λογισμῶν
 βουλόμενος. τῷ δ´ ἡ μὲν κρίσις πίστιν ἔχοντι τοῦ συμφέροντος
 ἐν αὑτῇ βέβαιος εἱστήκει καὶ ἀμετάπτωτος, ἠνώχλει
 δ´ αὐτὸν ὁ ἵππαρχος Μινούκιος, φιλομαχῶν ἀκαίρως
 καὶ θρασυνόμενος καὶ δημαγωγῶν τὸ στράτευμα, μανικῆς
 φορᾶς καὶ κενῶν ἐλπίδων ὑπ´ αὐτοῦ πεπληρωμένον·
 οἳ τὸν μὲν Φάβιον σκώπτοντες καὶ καταφρονοῦντες Ἀννίβου
 παιδαγωγὸν ἀπεκάλουν, τὸν δὲ Μινούκιον μέγαν ἄνδρα
 καὶ τῆς Ῥώμης ἄξιον ἡγοῦντο στρατηγόν. ὁ δὲ μᾶλλον εἰς
 φρόνημα καὶ θράσος ἀνειμένος, ἐχλεύαζε μὲν τὰς ἐπὶ τῶν
 ἄκρων στρατοπεδείας, ὡς καλὰ θέατρα τοῦ δικτάτορος
 ἀεὶ παρασκευαζομένου θεωρήσουσι πορθουμένην καὶ φλεγομένην
 τὴν Ἰταλίαν, ἠρώτα δὲ τοὺς φίλους τοῦ Φαβίου,
 πότερον εἰς τὸν οὐρανὸν ἄρας ἀναφέρει τὸν στρατὸν ὥσπερ
 τῆς γῆς ἀπεγνωκώς, ἢ νέφη καὶ ὁμίχλας προβαλλόμενος
 ἀποδιδράσκει τοὺς πολεμίους. ταῦτα τῶν φίλων πρὸς τὸν
 Φάβιον ἀπαγγελλόντων καὶ τὴν ἀδοξίαν τῷ κινδύνῳ λῦσαι
 παραινούντων, „οὕτω μέντἄν“ ἔφη „δειλότερος ἢ νῦν εἶναι
 δοκῶ γενοίμην, εἰ σκώμματα καὶ λοιδορίας φοβηθεὶς
 ἐκπέσοιμι τῶν ἐμαυτοῦ λογισμῶν. καίτοι τὸ μὲν ὑπὲρ
 πατρίδος οὐκ αἰσχρὸν δέος, ἡ δὲ πρὸς δόξαν ἀνθρώπων
 καὶ διαβολὰς καὶ ψόγους ἔκπληξις οὐκ ἀξίου τηλικαύτης
 ἀρχῆς ἀνδρός, ἀλλὰ δουλεύοντος ὧν κρατεῖν αὐτὸν καὶ
 δεσπόζειν κακῶς φρονούντων προσήκει.“
 | [5] Ainsi Fabius, élevant la pensée des masses vers 
la divinité, fit envisager l'avenir sous un jour plus 
agréable. Lui-même ne mit qu'en soi toutes les espérances 
de victoire, et, jugeant que Dieu accordait le succès 
au courage et à l'intelligence, il se tourna contre Hannibal, 
non pour le combattre pied à pied, mais dans l'intention 
réfléchie de l'user et de l'épuiser en opposant le 
temps à son élan, l'argent à sa pauvreté, le nombre à sa 
pénurie d'hommes. Il dominait donc toujours la cavalerie 
d'Hannibal en restant campé dans des lieux montagneux; 
et, si l'armée ennemie ne bougeait pas, lui-même 
restait tranquille ; si elle s'ébranlait, il descendait 
des hauteurs pour tourner autour d'elle, et il se montrait 
par intervalles, juste assez pour n'être pas forcé de combattre 
malgré lui et pour inspirer à l'adversaire, par son 
retard même, la crainte d'être attaqué. Traînant de 
cette façon, les choses en longueur, il était méprisé de 
tout le monde, et il avait une mauvaise réputation
dans son camp. Les ennemis aussi le prenaient pour un 
poltron sans aucune valeur, à l'exception du seul Hannibal. 
Car il n'y avait que ce grand homme pour comprendre 
l'habileté de cette tactique. Hannibal se persuada 
qu'il fallait, par tous les procédés de la ruse et de la violence, 
amener Fabius à livrer combat; sinon, c'en serait 
fait des Carthaginois; car, ne pouvant se servir des 
armes qui faisaient leur supériorité, ils gaspilleraient 
et gâcheraient ce dont ils manquaient, les hommes et 
l'argent. Il eut donc recours à toute espèce de stratagème 
et de feinte; et, comme un athlète expérimenté, il 
tâtait l'adversaire pour chercher le défaut de la cuirasse. 
En conséquence, il faisait des attaques partielles, jetait 
la confusion dans les rangs, tâchait d'attirer Fabius 
en mille endroits, voulant le faire sortir de la ligne de 
conduite réfléchie que lui imposait le souci de sa sécurité. 
Fabius restait ferme et inébranlable dans sa décision, 
persuadé qu'il y allait du salut de l'État; mais il 
se heurtait au maître de la cavalerie Minucius, qui 
montrait pour les combats un amour intempestif, affectait 
de l'audace et flagornait l'armée, pleine, grâce à 
lui, d'une belle confiance et de vains espoirs. Les soldats 
raillaient donc Fabius, qu'ils appelaient, par mépris, 
le pédagogue d'Hannibal; quant à Minucius, ils le 
prenaient pour un grand homme et un général digne de 
Rome. Ce personnage, se laissant aller davantage à 
l'orgueil et à la témérité, raillait l'habitude de camper 
sur les hauteurs, en disant que le dictateur préparait 
toujours de beaux amphithéâtres, d'où l'on pouvait 
avoir le spectacle de l'Italie mise à feu et à sang. Il 
demandait aussi aux amis de Fabius si celai-ci voulait 
faire monter son armée jusqu'au ciel par suite d'une 
renonciation définitive à la terre, ou s'il se faisait un 
rempart de nuages et de brouillards pour échapper 
à l'ennemi. Comme les amis de Fabius rapportaient ces 
propos au dictateur et lui conseillaient d'affronter le 
combat pour se réhabiliter : « Je serais alors, dit-il, plus 
lâche que je ne parais l'être maintenant, si, par peur des
railleries et des injures, je me laissais détourner d'un 
plan mûri. Il n'est pas honteux de craindre pour la 
patrie; mais trembler devant l'opinion, la calomnie et 
le blâme, serait d'un homme qui, indigne d'exercer 
une charge comme la mienne, s'asservit aux insensés 
dont il doit être le chef et le maître. »
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