[34] (1) Ἐν δὲ τῇ συγκρίσει πρῶτον ὁ Νικίου πλοῦτος
τῷ Κράσσου παραβαλλόμενος ἀμεμπτοτέραν ἔχει τὴν
κτῆσιν. ἄλλως μὲν γὰρ οὐκ ἄν τις δοκιμάσειε τὴν ἀπὸ
μετάλλων ἐργασίαν, ἧς τὰ πλεῖστα περαίνεται διὰ κακούργων
ἢ βαρβάρων ὠνίων, δεδεμένων καὶ φθειρομένων
ἐν τόποις ὑπούλοις καὶ νοσεροῖς· παραβαλλομένη δὲ πρὸς
τὰ Σύλλα δημιόπρατα καὶ τὰς περὶ τὸ πῦρ ἐργολαβίας,
ἐπιεικεστέρα φανεῖται. ταύταις γὰρ ὁ Κράσσος ἀναφανδὸν
ὡς τῷ γεωργεῖν ἐχρῆτο καὶ τῷ δανείζειν· ἃ δ´ ἔξαρνος
ἦν ἐλεγχόμενος, ἐπὶ κέρδεσιν ἐν βουλῇ λέγειν καὶ τοὺς
συμμάχους ἀδικεῖν καὶ γύναια περιιὼν κολακεύειν καὶ
συνεπικρύπτειν τοὺς πονηρούς, τούτων αἰτίαν οὐδὲ ψευδῆ
πώποτε Νικίας ἔλαβεν, ἄλλως δὲ διδοὺς καὶ προϊέμενος
ἀργύριον ὑπὸ δειλίας τοῖς συκοφάνταις ἐχλευάζετο, πρᾶγμα
ποιῶν Περικλεῖ μὲν ἴσως καὶ Ἀριστείδῃ μὴ πρέπον, αὐτῷ
δ´ ἀναγκαῖον, οὐκ εὖ πεφυκότι πρὸς τὸ θαρρεῖν. ᾧ καὶ
Λυκοῦργος ὕστερον ὁ ῥήτωρ ἐπαρρησιάσατο πρὸς τὸν
δῆμον, αἰτίαν ἔχων ἐξωνεῖσθαί τινας τῶν συκοφαντῶν·
„ἥδομαι γάρ“ εἶπεν, „εἰ τοσοῦτον χρόνον πεπολιτευμένος
παρ´ ὑμῖν, διδοὺς πεφώραμαι πρότερον ἢ λαμβάνων.“
ἦν δὲ ταῖς δαπάναις πολιτικώτερος μὲν ὁ Νικίας,
ἀναθήμασι καὶ γυμνασιαρχίαις καὶ διδασκαλίαις χορῶν
φιλοτιμούμενος· ὧν δ´ ὁ Κράσσος ἀνήλωσεν, ἑστιάσας
ἅμα τοσαύτας μυριάδας ἀνθρώπων, εἶτα θρέψας πάλιν,
οὐδὲν ἦν μέρος ἃ Νικίας ἐκέκτητο σὺν οἷς ἀνήλωσεν, ὥστε
θαυμάζειν εἴ τινα λέληθε τὸ τὴν κακίαν ἀνωμαλίαν εἶναί
τινα τρόπου καὶ ἀνομολογίαν, ὁρῶντα τοὺς αἰσχρῶς συλλέγοντας
εἶτ´ ἀχρήστως ἐκχέοντας.
| [34] (1) PARALLÈLE DE NICIAS ET DE CRASSUS.
Le premier objet de ce parallèle sera de montrer que
les richesses de Nicias furent acquises par des voies moins
blâmables que celles de Crassus. Ce n'est pas qu'on puisse
approuver le moyen de s'enrichir que donne le travail des
mines, où l'on n'emploie ordinairement que des malfaiteurs
ou des barbares, la plupart enchaînés, et qui périssent par
l'insalubrité de l'air de ces lieux souterrains. Mais cette manière
d'augmenter sa fortune paraîtra plus honnête si on la
compare avec les moyens employés par Crassus, qui achetait
les biens que Sylla avait confisqués ou les maisons menacées
d'incendie; car il usait de ces moyens aussi ouvertement
que de l'agriculture et de la banque. Quant aux autres
crimes dont on l'accusait, et qu'il a toujours niés, comme de
vendre son suffrage dans le sénat, de piller les alliés du peuple
romain, de faire par intérêt sa cour aux femmes, de recéler
chez lui des scélérats pour un certain prix; c'est ce que
jamais personne n'osa imputer même faussement à Nicias.
Au contraire on le raillait publiquement sur la prodigalité
avec laquelle il donnait, par un motif de crainte, de l'argent
aux délateurs; prodigalité qui sans doute eût été déplacée
dans un Périclès ou un Aristide, mais que le naturel timide
de Nicias lui rendait nécessaire. C'est même de quoi l'orateur
Lycurgue se fit honneur dans la suite auprès du peuple;
accusé de s'être racheté à prix d'argent d'un calomniateur :
« Je me félicite, dit-il, de ce qu'après avoir été si longtemps
à la tête de l'administration publique, je suis convaincu
d'avoir plutôt donné que pris. » Quant à leur manière de
dépenser, celle de Nicias était plus d'un homme d'État qui
mettait son ambition à consacrer des offrandes dans les
temples, à donner des jeux, à faire les frais des choeurs de
tragédie. A la vérité, tout ce que Nicias employa pour ses libéralités,
en y joignant même le bien qui lui restait, n'était
qu'une petite partie de ce qu'il en coûta en une seule fois à
Crassus pour donner un festin à tant de milliers d'hommes et
leur distribuer de quoi se nourrir pendant quelque temps.
Mais qui ne sent pas que le vice n'est qu'une inégalité et une
dissonnance dans les mceurs, quand il voit employer en
dépenses honnêtes ce qui a été acquis par des voies honteuses?
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