[27] Τὸ μὲν οὖν ἔτος ἱσταμένου θέρους εἶχεν ὥραν καὶ
λήγοντι μηνὶ (2) Θαργηλιῶνι πρὸς τὰς τροπὰς ἤδη συνῆπτε τὸν
καιρόν· ὁμίχλην δὲ τοῦ ποταμοῦ πολλὴν ἀναδιδόντος, πρῶτον
μὲν ἀπεκρύπτετο ζόφῳ τὸ πεδίον, καὶ σύνοπτον οὐδὲν ἦν ἀπὸ
τῶν πολεμίων, πλὴν ἠχή τις ἄκριτος καὶ συμμιγὴς ἄνω πρὸς
τὸν λόφον ἐχώρει πρόσωθεν, ἀνισταμένης στρατιᾶς (3)
τοσαύτης. ὡς δ' ἀναβάντες ἐπὶ τὸν λόφον ἔστησαν οἱ Κορίνθιοι
καὶ θέμενοι τὰς ἀσπίδας διανεπαύοντο, τοῦ ἡλίου
παραφαινομένου καὶ μετεωρίζοντος τὴν ἀναθυμίασιν, ὁ μὲν
θολερὸς ἀὴρ ἀθροιζόμενος πρὸς τὰ ὑψηλὰ καὶ (4) συνιστάμενος
κατενέφωσε τὰς ἀκρωρείας, τῶν δ' ὑπὸ πόδας τόπων
ἀνακαθαιρομένων ὅ τε Κριμισὸς ἐξεφάνη καὶ διαβαίνοντες
αὐτὸν ὤφθησαν οἱ πολέμιοι, πρώτοις μὲν τοῖς τεθρίπποις
ἐκπληκτικῶς πρὸς ἀγῶνα (5) κατεσκευασμένοις, κατόπιν δὲ
τούτων μυρίοις ὁπλίταις λευκάσπισι. τούτους ἐτεκμαίροντο
Καρχηδονίους εἶναι τῇ λαμπρότητι τῆς σκευῆς καὶ τῇ (6)
βραδυτῆτι καὶ τάξει τῆς πορείας. μετὰ δὲ τούτους τῶν λοιπῶν
ἐθνῶν ἐπιρρεόντων καὶ τὴν διάβασιν μετ' ὠθισμοῦ καὶ ταραχῆς
ποιουμένων, συνιδὼν ὁ Τιμολέων τὸν ποταμὸν αὐτοῖς
ταμιεύοντα τοῦ πλήθους τῶν πολεμίων ἀπολαβεῖν ὅσοις
ἐθέλοιεν αὐτοὶ μάχεσθαι, καὶ τοὺς στρατιώτας καθορᾶν
κελεύσας τὴν φάλαγγα τῷ ῥείθρῳ διαλελυμένην καὶ τοὺς μὲν
ἤδη διαβεβηκότας, τοὺς δὲ μέλλοντας, προσέταξε Δημαρέτῳ
λαβόντι τοὺς ἱππεῖς ἐμβαλεῖν εἰς τοὺς Καρχηδονίους καὶ
συνταράξαι τὸν διάκοσμον (7) αὐτῶν τῆς παρατάξεως οὔπω
καθεστώσης. αὐτὸς δὲ καταβὰς εἰς τὸ πεδίον, τὰ μὲν κέρατα
τοῖς ἄλλοις Σικελιώταις ἀπέδωκεν, ἀναμείξας ἑκατέρῳ τῶν
ξένων οὐ πολλούς, ἐν μέσῳ δὲ περὶ αὑτὸν λαβὼν τοὺς
Συρακοσίους καὶ τοὺς μαχιμωτάτους τῶν μισθοφόρων, βραχὺν
μὲν χρόνον ἐπέσχε, (8) τὸ τῶν ἱππέων ἀποθεωρῶν ἔργον· ὡς δ'
ἐκείνους εἶδεν ὑπὸ τῶν ἁρμάτων πρὸ τῆς τάξεως διαθεόντων
εἰς χεῖρας ἐλθεῖν τοῖς Καρχηδονίοις οὐ δυναμένους, ἀλλ' ὅπως
μὴ συνταραχθεῖεν ἀναγκαζομένους ἐξελίττειν (9) συνεχῶς καὶ
πυκνὰς ἐξ ἐπιστροφῆς ποιεῖσθαι τὰς ἐπελάσεις, ἀναλαβὼν τὴν
ἀσπίδα καὶ βοήσας ἕπεσθαι καὶ θαρρεῖν τοῖς πεζοῖς, ἔδοξεν
ὑπερφυεῖ φωνῇ καὶ μείζονι κεχρῆσθαι τῆς συνήθους, εἴτε τῷ
πάθει παρὰ τὸν ἀγῶνα καὶ τὸν ἐνθουσιασμὸν οὕτω
διατεινάμενος, εἴτε δαιμονίου τινός, ὡς τοῖς (10) πολλοῖς τότε
παρέστη, συνεπιφθεγξαμένου. ταχὺ δὲ τὴν κραυγὴν
ἀνταποδόντων καὶ παρεγγυώντων ἄγειν καὶ μὴ μέλλειν, τοῖς
μὲν ἱππόταις ἐσήμανεν ἔξω παρὰ τὴν τάξιν τῶν ἁρμάτων
παρελάσαι, καὶ κατὰ κέρας προσφέρεσθαι τοῖς πολεμίοις,
αὐτὸς δὲ τοὺς προμάχους πυκνώσας τῷ συνασπισμῷ, καὶ τὴν
σάλπιγγα κελεύσας ἐπιφθέγξασθαι, προσέβαλε τοῖς Καρχηδονίοις.
| [27] XXX. On était alors vers le commencement de l'été, et la fin du mois de Thargélion 2
allait ramener le solstice. Il se leva tout à coup de la rivière un brouillard épais qui
couvrit d'abord la campagne d'une si grande obscurité qu'on ne pouvait rien
apercevoir de l'armée des ennemis, et qu'on entendait seulement, comme il était
naturel dans une armée si nombreuse, un bruit confus de voix qui parvenait jusqu'au
sommet de la colline. Lorsque les Corinthiens y furent montés, ils quittèrent leurs
boucliers et se reposèrent. Le soleil en tournant fit élever les vapeurs; et le brouillard
s'étant épaissi sur le haut des montagnes les obscurcit entièrement, tandis que toute
la plaine en fut dégagée, et parut à découvert. On aperçut alors la rivière de Crimèse,
et l'on vit distinctement les ennemis qui la passaient : ils avaient placé à la tête de
l'armée les chars à quatre chevaux, dont l'appareil était formidable; ils étaient suivis
d'un corps de dix mille hommes de pied qui portaient des boucliers remarquables
par leur blancheur. L'éclat resplendissant de leurs armes, la gravité et le bon ordre de
leur marche, faisaient conjecturer que c'étaient tous des Carthaginois naturels. Après
eux venaient les troupes des différentes nations, qui faisaient leur passage avec
beaucoup de confusion et de désordre. XXXI. Timoléon, voyant que la rivière lui
donnait la facilité de n'attaquer que le nombre d'ennemis qu'il voudrait, et ayant fait
observer à ses troupes que celles des Carthaginois étaient séparées les unes des
autres par le Crimèse, qu'une partie l'avait déjà passé, et que les autres se disposaient
à le faire, ordonne à Démarète de se mettre à la tête de la cavalerie, de tomber
brusquement sur les Carthaginois, et de mettre le désordre parmi eux avant qu'ils
eussent le temps de se ranger en bataille. Il descend lui-même dans la plaine, place
aux deux ailes les troupes de Sicile et une partie des soldats étrangers, met autour de
lui, au centre, les Syracusains avec les plus braves de ses mercenaires, et s'arrête
quelque temps pour considérer l'attaque de sa cavalerie. Il voit que les chars qui
couraient devant la première ligne empêchent ses cavaliers de pénétrer jusqu'aux
Carthaginois, et que, de peur d'être mis eux-mêmes en désordre, ils sont obligés de
tourner continuellement autour des ennemis, et de se rallier souvent pour retourner à
la charge. A l'instant il prend son bouclier, et crie à son infanterie de le suivre sans
crainte. Sa voix paraissait être plus forte que de coutume, et avoir même quelque
chose de surnaturel; soit qu'au moment du combat, et dans l'enthousiasme dont il
était transporté, la passion renforçât ainsi sa voix; soit qu'un dieu, comme on le crut
assez généralement, eût joint à sa voix l'éclat de la sienne. Ses soldats répondent à son
cri, et le pressent de les mener promptement à l'ennemi; alors il fait signe à sa
cavalerie de dépasser la ligne des chars, et de charger les Carthaginois en flanc; il fait
serrer le premier rang de son infanterie bouclier contre bouclier, ordonne aux
trompettes de sonner la charge, et fond avec rapidité sur les ennemis.
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