[16] Τῆς δὲ Διονυσίου δυστυχίας παραλόγου φανείσης, οὐχ
ἧττον ἡ (2) Τιμολέοντος εὐτυχία τὸ θαυμαστὸν ἔσχεν. ἐπιβὰς
γὰρ Σικελίας, ἐν ἡμέραις πεντήκοντα τήν τ' ἀκρόπολιν τῶν
Συρακοσίων παρέλαβε, καὶ Διονύσιον εἰς Πελοπόννησον
ἐξέπεμψεν. ὅθεν ἐπιρρωσθέντες οἱ Κορίνθιοι πέμπουσιν αὐτῷ
δισχιλίους ὁπλίτας καὶ διακοσίους ἱππεῖς, οἳ κομισθέντες ἄχρι
Θουρίων, τὴν ἐκεῖθεν περαίωσιν, ὑπὸ Καρχηδονίων πολλαῖς
ναυσὶ κατεχομένης τῆς θαλάσσης, ἄπορον ὁρῶντες, ὡς ἦν
ἀνάγκη καιρὸν περιμένοντας ἀτρεμεῖν αὐτόθι, πρὸς κάλλιστον
ἔργον ἀπεχρήσαντο τῇ σχολῇ. (4) Θουρίων γὰρ <αὐ>τῶν ἐπὶ
Βρεττίους στρατευόντων τὴν πόλιν παραλαβόντες, ὥσπερ
πατρίδα καθαρῶς καὶ πιστῶς διεφύλαξαν.
(5) Ὁ δ' Ἱκέτης τὴν μὲν ἀκρόπολιν τῶν Συρακουσῶν
ἐπολιόρκει καὶ σῖτον ἐκώλυεν εἰσπλεῖν τοῖς Κορινθίοις,
Τιμολέοντι δὲ δύο ξένους παρασκευάσας δολοφονήσοντας
αὐτὸν ὑπέπεμψεν εἰς Ἀδρανόν, οὔτ' ἄλλως περὶ τὸ σῶμα
συντεταγμένην ἔχοντι φυλακήν, καὶ τότε παντάπασι διὰ τὸν
θεὸν ἀνειμένως (6) καὶ ἀνυπόπτως σχολάζοντι μετὰ τῶν
Ἀδρανιτῶν. οἱ δὲ πεμφθέντες κατὰ τύχην πυθόμενοι μέλλοντα
θύειν αὐτόν, ἧκον εἰς τὸ ἱερόν, ὑπὸ τοῖς ἱματίοις ἐγχειρίδια
κομίζοντες, καὶ τοῖς περιεστῶσι τὸν βωμὸν ἀναμειχθέντες, (7)
ἐγγυτέρω κατὰ μικρὸν ἐπεχώρουν, καὶ ὅσον οὔπω
παρακελευομένων ἀλλήλοις ἐνάρχεσθαι, παίει τις αὐτῶν τὸν
ἕτερον κατὰ τῆς κεφαλῆς ξίφει, καὶ πεσόντος οὔθ' ὁ παίσας
ἔμεινεν οὔθ' ὁ μετὰ τοῦ πληγέντος ἥκων, ἀλλ' ἐκεῖνος μὲν
ὥσπερ εἶχε τὸ ξίφος φεύγων πρός τινα πέτραν ὑψηλὴν
ἀνεπήδησεν, ἅτερος δὲ τοῦ βωμοῦ λαβόμενος ἄδειαν ᾐτεῖτο
παρὰ (8) τοῦ Τιμολέοντος ἐπὶ τῷ πάντα μηνῦσαι, καὶ λαβὼν
ἐμήνυσε καθ' αὑτοῦ (9) καὶ κατὰ τοῦ τεθνηκότος, ὡς πεμφθεῖεν
ἐκεῖνον ἀποκτενοῦντες. ἐν τούτῳ δὲ καὶ τὸν ἀπὸ τῆς πέτρας
κατῆγον ἕτεροι, βοῶντα μηδὲν ἀδικεῖν, ἀλλ' ἀνῃρηκέναι
δικαίως τὸν ἄνθρωπον ὑπὲρ πατρὸς τεθνηκότος, ὃν ἐκεῖνος (10)
ἀπεκτονήκοι πρότερον ἐν Λεοντίνοις, καὶ μαρτυροῦντας εἶχεν
ἐνίους τῶν παρόντων, θαυμάζοντας ἅμα τῆς τύχης τὴν
εὐμηχανίαν, ὡς δι' ἑτέρων ἕτερα κινοῦσα καὶ συνάγουσα πάντα
πόρρωθεν καὶ συγκαταπλέκουσα τοῖς πλεῖστον διαφέρειν
δοκοῦσι καὶ μηδὲν ἔχειν πρὸς ἄλληλα κοινόν, ἀεὶ τοῖς (11)
ἀλλήλων χρῆται καὶ τέλεσι καὶ ἀρχαῖς. τὸν μὲν οὖν ἄνθρωπον
ἐστεφάνωσαν οἱ Κορίνθιοι δέκα μναῖς, ὅτι τῷ φυλάττοντι
δαίμονι τὸν Τιμολέοντα πάθος ἔχρησε δίκαιον καὶ τὸν ἐκ
πολλοῦ παρόντα θυμὸν αὐτῷ πρότερον οὐ κατανάλωσεν, ἀλλὰ
μετ' αἰτίας ἰδίας πρὸς τὴν ἐκείνου σωτηρίαν ἀπὸ (12) τύχης
διετήρησεν. ἡ δ' εἰς τὸν παρόντα καιρὸν εὐτυχία καὶ πρὸς τὰ
μέλλοντα ταῖς ἐλπίσιν ἐπῆρεν ὁρῶντας ὡς ἱερὸν ἄνδρα καὶ σὺν
θεῷ τιμωρὸν ἥκοντα τῇ Σικελίᾳ τὸν Τιμολέοντα σέβεσθαι καὶ
φυλάττειν.
| [16] XVII. Si l'infortune de Denys fut un événement bien extraordinaire,
il n'y eut pas un bonheur moins étonnant dans les exploits de
Timoléon, qui, cinquante jours après sa descente en Sicile, fut maître de la citadelle
de Syracuse, et envoya Denys dans le Péloponèse. Les Corinthiens, encouragés par
ces succès, lui envoyèrent deux mille hommes de pied et deux cents chevaux, qui
abordèrent à Thurium; mais voyant qu'il était impossible de passer en Sicile tandis
que les Carthaginois couvraient cette mer de leurs vaisseaux, et forcés d'attendre un
temps plus favorable, ils employèrent leur loisir à l'action la plus honnête et la plus
belle. Les Thuriens, en partant pour une expédition contre les Bruttiens, leur ayant
confié leur ville, ils la gardèrent avec une fidélité aussi entière qu'ils auraient fait de
leur propre patrie. XVIII. Cependant Icétas, qui tenait la citadelle de Syracuse
assiégée, et empêchait qu'il n'y entrât de convois pour les Corinthiens, envoyait en
même temps à Adrane deux soldats étrangers pour assassiner Timoléon, qui, n'ayant
pas ordinairement des gardes autour de sa personne, vivait encore alors avec moins
de précaution au milieu des Adranites, rassuré par sa confiance au dieu qu'ils
adoraient. Ces soldats ayant appris par hasard, en arrivant, qu'il était près de faire un
sacrifice, allèrent au temple avec des poignards cachés sous leur robe, et, s'étant
glissés parmi ceux qui entouraient l'autel, ils s'approchèrent de Timoléon. Ils
s'encourageaient l'un l'autre à le frapper, lorsqu'un homme de la foule déchargeant
un grand coup d'épée sur la tête d'un des assassins, l'abattit à ses pieds ; il prit
aussitôt la fuite, tenant toujours son épée nue à la main, et se sauva sur une roche
escarpée. L'autre assassin, au lieu de penser à fuir, embrasse l'autel, demande grâce à
Timoléon, en promettant de tout déclarer. Sur la parole que lui donne Timoléon, il
avoue que son camarade et lui avaient été envoyés pour le tuer. Cependant on amena
celui qui s'était sauvé sur le rocher, et qui criait qu'il n'était pas coupable; qu' il avait
tué avec justice un meurtrier qui avait commis un assassinat dans la ville de
Léontium. Le fait fut attesté par plusieurs personnes présentes; et l'on admira
comment la fortune sait amener avec art une chose par une autre, rapprocher les
événements les plus éloignés, lier ensemble des faits qui paraissent n'avoir entre eux
aucun rapport, ou qui sont entièrement opposés, et les disposer de manière que la fin
de l'un soit le commencement de l'autre. Les Corinthiens donnèrent à cet homme une
récompense de dix mines, parce qu'il avait prêté une passion personnelle et juste au
bon génie qui protégeait Timoléon; et qu'au lieu de satisfaire plutôt un ressentiment
déjà ancien, il l'avait, par des motifs particuliers, suspendu jusqu'au moment où la
fortune devait le faire servir à sauver Timoléon. Au reste, ce bonheur présent releva
leurs espérances pour l'avenir; il leur fit regarder Timoléon avec vénération, et veiller
plus attentivement sur ce général, comme sur un homme divin que les dieux
envoyaient pour délivrer la Sicile.
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