[10] Οὐ μὴν ἀλλ' ὁ Τιμολέων τοῖς πρεσβευταῖς καὶ τοῖς
ἄρχουσι τῶν Καρχηδονίων ἐντυχὼν ἐπιεικῶς, ἔφη πείθεσθαι
μὲν οἷς κελεύουσι (τί γὰρ ἂν καὶ περαίνειν ἀπειθῶν), ἐθέλειν δὲ
ταῦτα πόλεως Ἑλληνίδος καὶ φίλης κοινῆς τῆς Ῥηγίνων
ἐναντίον ἀκούσας καὶ εἰπὼν ἀπαλλάττεσθαι· (2) καὶ γὰρ αὐτῷ
τοῦτο πρὸς ἀσφάλειαν διαφέρειν, κἀκείνους ἐμμενεῖν
βεβαιότερον οἷς ἐπαγγέλλονται περὶ Συρακοσίων, δήμῳ
μάρτυρι τὰς (3) ὁμολογίας παρακαταθεμένους. ταῦτα δ'
ὑπέτεινεν αὐτοῖς ἀπάτην ἐπὶ τῇ διαβάσει τεχνάζων, καὶ
συνετέχναζον οἱ τῶν Ῥηγίνων στρατηγοὶ πάντες, ἐπιθυμοῦντες
ἐπὶ Κορινθίοις τὰ πράγματα τῶν Σικελιωτῶν γενέσθαι καὶ (4)
φοβούμενοι τὴν τῶν βαρβάρων γειτνίασιν. διὸ συνῆγον
ἐκκλησίαν καὶ τὰς πύλας ἀπέκλειον, ὡς μὴ πρὸς ἄλλο τι
τρέπεσθαι τοὺς πολίτας, καὶ παρελθόντες εἰς τὸ πλῆθος
ἐχρῶντο μήκει λόγων, ἕτερος ἑτέρῳ παραδιδοὺς τὴν αὐτὴν
ὑπόθεσιν πρὸς οὐδὲν τέλος, ἀλλὰ διάγοντες ἄλλως τὸν χρόνον,
ἕως <ἂν> ἀναχθῶσιν αἱ τῶν Κορινθίων τριήρεις, καὶ
Καρχηδονίους ἐπὶ τῆς ἐκκλησίας κατέχοντες ἀνυπόπτως, ἅτε
καὶ τοῦ Τιμολέοντος παρόντος καὶ παρέχοντος δόκησιν ὅσον
οὔπω πρὸς τὸν λόγον ἀνίστασθαι καὶ (5) δημηγορεῖν. ὡς δ'
ἀπήγγειλέ τις αὐτῷ κρύφα τὰς μὲν ἄλλας τριήρεις ἀνῆχθαι,
μίαν δὲ τὴν ἐκείνου περιμένειν ὑπολελειμμένην, διεκδὺς τὸν
ὄχλον, ἅμα τῶν περὶ τὸ βῆμα Ῥηγίνων συνεπικρυπτόντων, καὶ
καταβὰς ἐπὶ θάλασσαν (6) ἐξέπλευσε διὰ ταχέων. καὶ
κατήχθησαν εἰς Ταυρομένιον τῆς Σικελίας, ὑποδεχομένου καὶ
καλοῦντος αὐτοὺς ἔκπαλαι προθύμως Ἀνδρομάχου τοῦ (7) τὴν
πόλιν ἔχοντος καὶ δυναστεύοντος. οὗτος ἦν πατὴρ Τιμαίου τοῦ
ἱστορικοῦ, καὶ πολὺ κράτιστος τῶν τότε δυναστευόντων ἐν
Σικελίᾳ γενόμενος, τῶν θ' ἑαυτοῦ πολιτῶν ἡγεῖτο νομίμως καὶ
δικαίως, καὶ πρὸς τοὺς τυράννους (8) φανερὸς ἦν ἀεὶ
διακείμενος ἀπεχθῶς καὶ ἀλλοτρίως. διὸ καὶ Τιμολέοντι τότε
τὴν πόλιν ὁρμητήριον παρέσχε, καὶ τοὺς πολίτας ἔπεισε
συναγωνίζεσθαι τοῖς Κορινθίοις καὶ συνελευθεροῦν τὴν Σικελίαν.
| [10] XI. Cependant Timoléon, s'étant abouché avec les ambassadeurs et les
capitaines des vaisseaux carthaginois, leur dit qu'il exécuterait volontiers ce qu'ils lui
proposaient; car que gagnerait-il à leur résister? mais qu'avant de se retirer, il désirait
qu'ils lui fissent leurs propositions et reçussent ses réponses dans Rhège, qui, comme
ville grecque, était amie des deux partis; que cette démarche importait à sa sûreté;
que, de leur côté, ils tiendraient plus fidèlement ce qu'ils auraient promis pour les
Syracusains, lorsqu'ils auraient tout le peuple de Rhège pour témoin de leurs
engagements. Ce n'était de sa part qu'une ruse, par laquelle il voulait se ménager le
moyen de passer en Sicile; il était secondé par les magistrats de Rhège, qui tous
préféraient que les Corinthiens fussent maîtres de la Sicile, et qui d'ailleurs
craignaient le voisinage des Barbares. Ils convoquèrent donc l'assemblée, et
fermèrent les portes de la ville, sous prétexte d'empêcher que les citoyens n'allassent
s'occuper d'aucune autre affaire. Quand le peuple fut assemblé, les magistrats firent
tous de longs discours sans rien conclure, chacun laissant à l'autre le même sujet à
traiter; ils ne voulaient que gagner du temps, jusqu'à ce que les galères des
Corinthiens fussent sorties du port. Ils retinrent aussi dans l'assemblée les
Carthaginois, qui n'avaient pas le moindre soupçon de ce qui se tramait, parce que
Timoléon était présent, et qu'il paraisait attendre le moment de parler à son tour.
Lorsqu'on fut venu lui dire tout bas que les galères étaient en mer, et qu'il ne restait
plus que la sienne qui l'attendait dans le port, il se glissa parmi la foule des Rhégiens,
qui, pour favoriser son évasion, se pressaient autour de la tribune. S'étant rendu à
bord, il hâta son départ, et arriva avec toute sa flotte à Tauroménium, ville de Sicile ;
il y était appelé depuis longtemps par Andromachus, qui exerçait dans cette
ville une autorité presque absolue, et qui le reçut avec la plus grande joie. Il était père
de l'historien Timée, et le plus vertueux de tous ceux qui dominaient en Sicile: il
gouvernait ses concitoyens avec autant de sagesse que de justice, et avait voué aux
tyrans une haine implacable. Il fit donc de sa ville la place d'armes de Timoléon, et
détermina les habitants à se joindre aux troupes de Corinthe, pour mettre la Sicile en
liberté.
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