[23] Τῶν δὲ περὶ Μεσσήνην βαρβάρων, Μαμερτίνων
καλουμένων, πολλὰ τοῖς Ἕλλησιν ἐνοχλούντων, ἐνίους δὲ καὶ
φόρου πεποιημένων ὑποτελεῖς, πολλῶν δὲ καὶ μαχίμων ὄντων
διὸ καὶ προσηγορεύθησαν Ἀρήιοι γλώσσῃ τῇ Λατίνων , τοὺς
μὲν φορολόγους συλλαβὼν ἀπέκτεινεν, αὐτοὺς δὲ νικήσας
μάχῃ πολλὰ τῶν φρουρίων ἐξέκοψε.
<2> Καρχηδονίοις δὲ συμβατικῶς ἔχουσι καὶ χρήματα
βουλομένοις τελεῖν, εἰ γένοιτο φιλία, καὶ ναῦς ἀποστέλλειν,
ἀπεκρίνατο πλειόνων ἐφιέμενος μίαν εἶναι διάλυσιν καὶ φιλίαν
πρὸς αὐτούς, εἰ πᾶσαν ἐκλιπόντες Σικελίαν ὅρῳ <3> χρῷντο τῇ
Λιβυκῇ θαλάσσῃ πρὸς τοὺς Ἕλληνας. εὐτυχίᾳ δὲ καὶ ῥύμῃ τῶν
παρόντων ἐπαιρόμενος, καὶ διώκων τὰς ἐλπίδας ἐφ' αἷς ἀπ'
ἀρχῆς ἔπλευσε, πρώτης δὲ Λιβύης ἐφιέμενος καὶ ναῦς ἔχων
πολλὰς πληρωμάτων ἐπιδεεῖς, ἤγειρεν ἐρέτας, οὐκ ἐπιεικῶς
ἐντυγχάνων οὐδὲ πράως ταῖς πόλεσιν, ἀλλὰ δεσποτικῶς καὶ
πρὸς ὀργὴν βιαζόμενος καὶ κολάζων, οὐκ εὐθὺς ὢν οὐδ' ἐν
ἀρχῇ τοιοῦτος, ἀλλὰ καὶ μᾶλλον ἑτέρων τῷ πρὸς χάριν ὁμιλεῖν
καὶ πάντα πιστεύειν καὶ μηδὲν ἐνοχλεῖν ὑπαγόμενος, εἶτα
γινόμενος ἐκ δημαγωγοῦ τύραννος, ἀχαριστίας <4> τῇ
χαλεπότητι καὶ ἀπιστίας προσωφλίσκανε δόξαν. οὐ μὴν ἀλλὰ
ταῦτα μὲν ὡς ἀναγκαῖα συνεχώρουν καίπερ <5> δυσφοροῦντες·
ἐπεὶ δὲ Θοίνωνα καὶ Σωσίστρατον, ἄνδρας ἡγεμονικοὺς ἐν
Συρακούσαις, οἳ πρῶτοι μὲν αὐτὸν ἐλθεῖν ἔπεισαν εἰς Σικελίαν,
ἐλθόντι δὲ τὴν πόλιν εὐθὺς ἐνεχείρισαν καὶ τὰ πλεῖστα
συγκατειργάσαντο τῶν Σικελικῶν, μήτ' ἄγειν σὺν αὑτῷ μήτ'
ἀπολείπειν βουλόμενος ἐν ὑποψίαις εἶχε, καὶ Σωσίστρατος μὲν
ἀπέστη φοβηθείς, Θοίνωνα δὲ τὰ αὐτὰ φρονεῖν αἰτιασάμενος
ἀπέκτεινεν, οὐ κατὰ μικρὸν οὐδὲ καθ' ἓν αὐτῷ μεθίστατο τῶν
πραγμάτων, ἀλλὰ δεινοῦ τινος μίσους ἐγγενομένου ταῖς πόλεσι
πρὸς αὐτόν, αἱ μὲν προσετίθεντο <6> Καρχηδονίοις, αἱ δ'
ἐπήγοντο Μαμερτίνους. ἀποστάσεις δ' ὁρῶν ἅπαντα καὶ
νεωτερισμοὺς καὶ σύστασιν ἰσχυρὰν ἐφ' αὑτόν, ἐδέξατο
γράμματα Σαυνιτῶν καὶ Ταραντίνων, μόλις ἀντεχόντων ταῖς
πόλεσιν αὐταῖς πρὸς τὸν πόλεμον, εἰργομένων δὲ τῆς χώρας
ἁπάσης καὶ δεομένων βοηθεῖν. <7> τοῦτο δ' ἦν εὐπρέπεια, μὴ
φυγὴν εἶναι μηδ' ἀπόγνωσιν τὸν ἀπόπλουν τῶν αὐτόθι
πραγμάτων, τὸ δ' ἀληθὲς οὐ δυνάμενος κρατεῖν Σικελίας,
<ἀλλ'> ὥσπερ νεὼς ταραχθείσης <ἀλλ'> ἔκβασιν ζητῶν, αὖθις
ἔρριψεν ἑαυτὸν εἰς <8> Ἰταλίαν. λέγεται δ' ἀπαλλαττόμενος ἤδη
πρὸς τὴν νῆσον ἀπιδὼν εἰπεῖν τοῖς περὶ αὐτόν· "οἵαν
ἀπολείπομεν ὦ φίλοι Καρχηδονίοις καὶ Ῥωμαίοις παλαίστραν".
καὶ τοῦτο μὲν ὥσπερ εἰκάσθη μετ' οὐ πολὺν χρόνον ἐγένετο.
| [23] XXX. Il y avait aux environs de Messine une nation de Barbares appelés Mamertins,
qui tourmentaient fort les Grecs, dont quelques-uns même étaient devenus leurs
tributaires ; ces Barbares, nombreux et aguerris, avaient dû à leur valeur le nom de
Mamertins, qui, en langue latine, signifie martiaux. Pyrrhus s'étant saisi des
officiers qui levaient pour eux les impôts, les fit mourir; et ayant vaincu les
Mamertins eux-mêmes en bataille rangée, il abattit la plupart de leurs forteresses.
Les Carthaginois, qui désiraient de faire la paix avec ce prince, lui offrirent, pour l'y
déterminer, de l'argent et des vaisseaux; mais comme il portait plus loin son
ambition, il leur répondit qu'ils n'avaient qu'un seul moyen d'obtenir la paix et son
amitié : c'était d'évacuer toute la Sicile, et de prendre la mer d'Afrique pour bornes
entre la Grèce et eux. Enflé de ses succès, plein de confiance en ses forces, et
poursuivant les espérances qui l'avaient fait passer en Sicile, il aspirait à la conquête
de l'Afrique. Il avait assez de vaisseaux pour cette vaste entreprise ; mais il manquait
de matelots et de rameurs. Au lieu d'employer, pour en obtenir des villes, les
ménagements et la douceur, il prit un ton impérieux; ii s'emporta contre les
habitants, usa de violence, et alla jusqu'à les châtier rigoureusement. Ce n'était pas
ainsi qu'il s'était conduit en arrivant; il avait su mieux que personne attirer tous les
esprits par les propos les plus obligeants, par la confiance entière qu'il témoignait à
tout le monde, par le soin qu'il prenait de n'être à charge à personne. Mais de prince
populaire devenu tout à coup un tyran, il s'attira, par sa sévérité, la réputation d'un
homme ingrat et perfide. Cependant, quelque mécontents qu'ils fussent, ils cédaient
à la nécessité, et fournissaient tout ce qu'il exigeait d'eux. Mais sa conduite à l'égard
de Thénon et de Sostrate acheva de les aliéner. C'étaient deux des principaux
commandants de Syracuse, qui les premiers l'avaient appelé en Sicile, qui, à son
arrivée, lui ayant remis la ville entre les mains, l'avaient ensuite secondé de tout leur
pouvoir clans toutes ses entreprises. Pyrrhus, ayant conçu des soupçons contre eux,
ne voulait ni les mener avec lui, ni les laisser à Syracuse en son absence. Sostrate,
qui craignait sa mauvaise volonté, sortit de la ville; et Pyrrhus, accusant Thénon
d'être dans les mêmes dispositions que Sostrate, le fit mourir. Dès lors les esprits
changèrent, non pas insensiblement et les uns après les autres; mais toutes les villes,
animées à la fois contre lui de la haine la plus violente, ou s'allièrent avec les
Carthaginois, ou appelèrent les Mamertins à leur secours. Il ne voyait partout que
défections, que nouveautés, que soulèvements, lorsqu'il reçut des lettres des
Samnites et des Tarentins qui lui donnaient avis que, chassés de toute la campagne,
et ne pouvant plus se défendre dans les villes, ils le conjuraient de venir à leur
secours. XXXI. Ces lettres, lui donnant un prétexte honnête de quitter la Sicile,
ôtèrent à sa retraite l'air de la fuite et du désespoir de réussir. Mais, dans le fait, il
ne pouvait plus se rendre maître de cette île, qui ressemblait à un vaisseau battu par
la tempête ; et, désirant d'en sortir, il se jeta de nouveau dans l'Italie. Il dit en partant
à ceux qui l'environnaient : "Mes amis, quel beau champ de bataille nous laissons là
aux Carthaginois et aux Romains"! Sa conjecture ne tarda pas à être vérifiée.
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