[16] Τούτους ἀναλαβὼν ὁ Πύρρος ἐβάδιζεν εἰς Τάραντα. καὶ
τοῦ Κινέου προαγαγόντος εἰς ἀπάντησιν ὡς ᾔσθετο τοὺς
στρατιώτας, παρελθὼν οὐδὲν ἀκόντων οὐδὲ πρὸς βίαν ἔπραττε
τῶν Ταραντίνων, ἕως ἀνεσώθησαν αἱ νῆες ἐκ τῆς θαλάττης καὶ
συνῆλθεν ἡ πλείστη τῆς δυνάμεως. <2> τηνικαῦτα δ' ὁρῶν τὸ
πλῆθος ἄνευ μεγάλης ἀνάγκης μήτε σῴζεσθαι δυνάμενον μήτε
σῴζειν, ἀλλ' οἷον ἐκείνου προπολεμοῦντος οἴκοι καθῆσθαι περὶ
λουτρὰ καὶ συνουσίας γενόμενον, ἀπέκλεισε μὲν τὰ γυμνάσια
καὶ τοὺς περιπάτους, ἐν οἷς ἀλύοντες ὑπὲρ τῶν πραγμάτων
λόγῳ διεστρατήγουν, πότους δὲ καὶ κώμους καὶ θαλίας
ἀκαίρους <3> ἀνεῖλεν, ἐκάλει δὲ πρὸς τὰ ὅπλα, καὶ περὶ τοὺς
καταλόγους τῶν στρατευομένων ἀπαραίτητος ἦν καὶ λυπηρός,
ὥστε πολλοὺς ἐκ τῆς πόλεως ἀπελθεῖν, ἀηθείᾳ τοῦ ἄρχεσθαι
δουλείαν τὸ μὴ πρὸς ἡδονὴν ζῆν καλοῦντας.
<4> Ἐπεὶ δὲ Λαιβῖνος ὁ τῶν Ῥωμαίων ὕπατος ἠγγέλλετο
πολλῇ στρατιᾷ χωρεῖν ἐπ' αὐτόν, ἅμα τὴν Λευκανίαν
διαπορθῶν, οὐδέπω μὲν οἱ σύμμαχοι παρῆσαν αὐτῷ, δεινὸν δὲ
ποιούμενος ἀνασχέσθαι καὶ περιιδεῖν τοὺς πολεμίους ἐγγυτέρω
προϊόντας, ἐξῆλθε μετὰ τῆς δυνάμεως, προπέμψας κήρυκα
πρὸς τοὺς Ῥωμαίους, εἰ φίλον ἐστὶν αὐτοῖς πρὸ πολέμου δίκας
λαβεῖν παρὰ τῶν Ἰταλιωτῶν, αὐτῷ δικαστῇ καὶ διαλλακτῇ
χρησαμένους. ἀποκριναμένου δὲ τοῦ Λαιβίνου μήτε
διαλλακτὴν Πύρρον αἱρεῖσθαι Ῥωμαίους μήτε δεδοικέναι
πολέμιον, προελθὼν κατεστρατοπέδευσεν ἐν τῷ μεταξὺ πεδίῳ
Πανδοσίας πόλεως καὶ Ἡρακλείας. πυθόμενος δὲ τοὺς
Ῥωμαίους ἐγγὺς εἶναι καὶ πέραν τοῦ Σίριος ποταμοῦ
καταστρατοπεδεύειν, προσίππευσε τῷ ποταμῷ θέας ἕνεκα·
καὶ κατιδὼν τάξιν τε καὶ φυλακὰς καὶ κόσμον αὐτῶν καὶ τὸ
σχῆμα τῆς στρατοπεδείας, ἐθαύμασε καὶ τῶν φίλων
προσαγορεύσας τὸν ἐγγυτάτω "τάξις μέν" εἶπεν "ὦ Μεγάκλεις
αὕτη τῶν βαρβάρων οὐ βάρβαρος, τὸ δ' ἔργον εἰσόμεθα." καὶ
διὰ φροντίδος ἔχων ἤδη τὸ μέλλον, ἔγνω τοὺς συμμάχους
ἀναμένειν, τοῖς δὲ Ῥωμαίοις, ἂν πρότερον ἐπιχειρῶσι
διαβαίνειν, ἐπέστησε φυλακὴν ὑπὲρ τοῦ <9> ποταμοῦ τὴν
εἴρξουσαν. οἱ δ' ἅπερ ἐκεῖνος ἔγνω περιμένειν φθῆναι
σπεύδοντες, ἐνεχείρουν τῇ διαβάσει, κατὰ πόρον μὲν οἱ πεζοί,
πολλαχόθεν δ' οἱ ἱππεῖς διεξελαύνοντες τὸν ποταμόν, ὥστε
δείσαντας τὴν κύκλωσιν ἀναχωρεῖν τοὺς Ἕλληνας, αἰσθόμενον
δὲ τὸν Πύρρον καὶ διαταραχθέντα, τοῖς μὲν ἡγεμόσι τοῦ πεζοῦ
παρεγγυᾶν εὐθὺς εἰς τάξιν καθίστασθαι καὶ περιμένειν ἐν τοῖς
ὅπλοις, αὐτὸν δὲ τοῖς ἱππεῦσι παρεξελάσαι τρισχιλίοις οὖσιν,
ἐλπίζοντα διαβαίνοντας ἔτι καὶ διεσπασμένους ἀτάκτους
λήψεσθαι τοὺς Ῥωμαίους. ἐπεὶ δ' ἑώρα θυρεούς τε πολλοὺς
ὑπερφαινομένους τοῦ ποταμοῦ καὶ τοὺς ἱππεῖς ἐπελαύνοντας
ἐν τάξει, συστρέψας ἐνέβαλε πρῶτος, αὐτόθεν τε περίοπτος ὢν
ὅπλων κάλλει καὶ λαμπρότητι κεκοσμημένων περιττῶς, καὶ τὴν
δόξαν ἐπιδεικνύμενος ἔργοις οὐκ ἀποδέουσαν αὐτοῦ τῆς
ἀρετῆς, μάλιστα δ' ὅτι τὰς χεῖρας καὶ τὸ σῶμα παρέχων τῷ
ἀγῶνι καὶ τοὺς καθ' αὑτὸν ἀμυνόμενος ἐρρωμένως, οὐ
συνεχεῖτο τὸν λογισμὸν οὐδὲ τοῦ φρονεῖν ἐξέπιπτεν, ἀλλ'
ὥσπερ ἔξωθεν ἐφορῶν διεκυβέρνα τὸν πόλεμον, αὐτὸς
μεταθέων ἑκασταχόσε καὶ <12> παραβοηθῶν τοῖς ἐκβιάζεσθαι
δοκοῦσιν. ἔνθα δὴ Λεοννάτος ὁ Μακεδὼν ἄνδρα κατιδὼν
Ἰταλὸν ἐπέχοντα τῷ Πύρρῳ καὶ τὸν ἵππον ἀντιπαρεξάγοντα
καὶ συμμεθιστάμενον ἀεὶ καὶ συγκινούμενον, "ὁρᾷς" εἶπεν
"ὦ βασιλεῦ τὸν βάρβαρον ἐκεῖνον, ὃν ὁ μέλας ἵππος ὁ
λευκόπους φέρει; μέγα τι βουλευομένῳ καὶ δεινὸν ὅμοιός ἐστι.
σοὶ γὰρ ἐνορᾷ καὶ πρὸς σὲ τέταται, πνεύματος μεστὸς ὢν καὶ
θυμοῦ, τοὺς δ' ἄλλους ἐᾷ χαίρειν. ἀλλὰ σὺ φυλάττου <14> τὸν
ἄνδρα." καὶ ὁ Πύρρος ἀπεκρίνατο· "τὸ μὲν εἱμαρμένον ὦ
Λεοννάτε διαφυγεῖν ἀδύνατον· χαίρων δ' οὔθ' οὗτος οὔτ' ἄλλος
τις Ἰταλῶν εἰς χεῖρας ἡμῖν σύνεισιν." <15> ἔτι ταῦτα
προσδιαλεγομένων, ὁ Ἰταλὸς διαλαβὼν τὸ δόρυ καὶ συστρέψας
τὸν ἵππον ὥρμησεν ἐπὶ τὸν Πύρρον. εἶθ' ἅμα παίει μὲν αὐτὸς
τῷ δόρατι τοῦ βασιλέως τὸν <16> ἵππον, παίει δὲ τὸν ἐκείνου
παραβαλὼν ὁ Λεοννάτος. ἀμφοτέρων δὲ τῶν ἵππων πεσόντων,
τὸν μὲν Πύρρον οἱ φίλοι περισχόντες ἀνήρπασαν, τὸν δ' Ἰταλὸν
μαχόμενον διέφθειραν. ἦν δὲ τῷ γένει Φρεντανός, ἴλης ἡγεμών,
Ὄπλακος ὄνομα.
| [16] Pyrrhus les ayant rassemblés, prit avec eux le chemin de Tarente;
et Cinéas, averti de son arrivée, alla au-devant de lui avec les soldats qu'il commandait.
XVIII. Pyrrhus étant entré dans la ville, ne voulut d'abord rien faire
d'autorité et contre le gré des Tarentins, jusqu'à ce qu'il eût su que ses vaisseaux
avaient échappé aux fureurs de la mer, et que la plus grande partie de son armée fut
rassemblée auprès de lui. Quand il eut réuni toutes ses forces, voyant que les
Tarentins ne pourraient être amenés sans la plus grande contrainte à se défendre
eux-mêmes et à secourir les autres; qu'ils s'étaient imaginé que pendant qu'il
combattrait pour leur défense, tranquilles dans leurs maisons, ils continueraient à se
baigner et à faire bonne chère, il fit fermer tous les gymnases, tous les lieux publics
où ils avaient accoutumé de régler, en se promenant, les affaires de la guerre; il
défendit les festins, les bals et tous les autres divertissements de ce genre, qui
n'étaient plus de saison. Il les obligea tous de s'armer, et se montra d'une sévérité
inexorable pour les enrôlements; en sorte que plusieurs d'entre eux, peu faits à
l'obéissance, et regardant comme une servitude la privation de la vie voluptueuse
qu'ils avaient menée jusqu'alors, sortirent de la ville. Cependant Pyrrhus, informé
que le consul Lévinus marchait contre lui avec une armée très nombreuse, et qu'il
était déjà dans la Lucanie, où il mettait tout à feu et à sang, ne crut pas pouvoir, sans
honte, laisser approcher davantage les ennemis; et quoique ses alliés ne l'eussent pas
encore joint, il se mit en marche avec ce qu'il avait de troupes. Il s'était fait précéder
d'un héraut chargé de proposer aux Romains s'ils ne voudraient pas, avant de
commencer la guerre, le prendre pour arbitre et pour juge des différends qu'ils
avaient avec les Grecs d'Italie. Le consul Lévinus ayant répondu que les Romains ne
voulaient pas Pyrrhus pour arbitre, et qu'ils ne le craignaient pas comme ennemi, il
continua sa marche, et alla camper dans la plaine qui est entre les villes de Pandosie
et d'Héraclée. Là, ayant appris que les Romains étaient campés assez près de lui,
de l'autre côté du Siris, il monte à cheval, et va jusqu'au bord du fleuve pour
reconnaître leur position. Quand il eut vu l'ordonnance de leurs troupes, leurs
postes avancés, l'ordre et l'assiette de leur camp, il en fut dans l'admiration; et
s'adressant â celui de ses amis qui était le plus près de lui : "Mégaclès, lui dit-il, cette
ordonnance de Barbares n'a rien de barbare; nous verrons ce qu'ils savent faire. »
Alors, moins tranquille sur l'avenir, il résolut d'attendre ses alliés. Seulement il laissa,
sur le bord du Siris, un corps de troupes pour en empêcher le passage, si les
Romains voulaient le tenter. Ceux-ci, se hâtant de prévenir les secours que Pyrrhus
avait dessein d'attendre, se disposèrent à passer la rivière. L'infanterie la traversa au
gué, et la cavalerie, partout où elle trouva le passage plus facile. Les Grecs, craignant
d'être enveloppés, se retirèrent vers le gros de l'armée. XIX. Pyrrhus, à qui on vint
l'apprendre, troublé de cette nouvelle, ordonne aux capitaines de mettre sur-le-champ
l'infanterie en bataille, et d'attendre ses ordres sous les armes. Lui-même
avec sa cavalerie, qui était de trois mille chevaux, marche en diligence contre les
Romains, espérant les surprendre au passage, dispersés et en désordre; mais quand
il voit en deçà de la rivière, briller cette grande quantité de boucliers, et la cavalerie
s'avancer vers lui dans le plus bel ordre, alors il fait serrer les rangs, et commence
l'attaque. Il se fit bientôt remarquer par l'éclat et la magnificence de son armure, et
montra par ses faits d'armes que sa valeur n'était pas au-dessous de sa réputation. Il
était tout entier au combat, et, exposant sa personne sans ménagement, il renversait
tout ce qui se présentait devant lui. Mais son ardeur ne lui faisait rien perdre de sa
prudence et de son sang-froid ordinaires; et comme s'il eût été hors de l'action, il
donnait partout ses ordres, il animait tout de sa présence, il se portait de tous côtés
pour donner du secours à ceux qu'il voyait près de succomber. Au fort de la mêlée,
Léonatus de Macédoine vit un cavalier italien qui, s'attachant à Pyrrhus, piquait
droit à lui, changeait de place toutes les fois que le prince en changeait lui-même, et
suivait tous ses mouvements. "Seigneur, dit Léonatus au roi, voyez-vous ce Barbare
qui monte un cheval noir à pieds blancs? Il médite sûrement quelque grand dessein;
ses yeux sont toujours fixés sur vous, il n'en veut qu'à vous seul; plein d'ardeur et de
courage, il néglige tous les autres pour ne suivre que vous : tenez-vous en garde
contre lui. — Léonatus, lui répondit le roi, il est impossible de fuir sa destinée; mais
ni lui, ni aucun autre Italien, ne s'applaudira d'en être venu aux mains avec moi". Il
parlait encore, lorsque l'Italien, prenant sa pique et tournant son cheval, fond sur
Pyrrhus, et enfonce sa javeline dans les flancs du coursier que montait ce prince, en
même temps que Léonatus perce de la sienne le cheval de l'Italien. Les deux chevaux
étant tombés, les amis de Pyrrhus l'environnent aussitôt, et l'enlèvent. Le cavalier
italien fut tué en se défendant avec le plus grand courage. Il était de Férente,
commandait une compagnie, et se nommait Oplacus.
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