[9] Οἱ δὲ περὶ τὸν Πελοπίδαν ἐσθῆτας γεωργῶν
μεταλαβόντες καὶ διελόντες αὑτούς, ἄλλοι κατ' ἄλλα μέρη (2)
τῆς πόλεως παρεισῆλθον ἔθ' ἡμέρας οὔσης. ἦν δέ τι πνεῦμα καὶ
νιφετός, ἀρχομένου τρέπεσθαι τοῦ ἀέρος· <ᾧ> καὶ μᾶλλον
ἔλαθον, καταπεφευγότων ἤδη διὰ τὸν χειμῶνα (3) τῶν
πλείστων εἰς τὰς οἰκίας. οἷς δ' ἦν ἐπιμελὲς τὰ πραττόμενα
γινώσκειν, ἀνελάμβανον τοὺς προσερχομένους καὶ καθίστων
εὐθὺς εἰς τὴν οἰκίαν τοῦ Χάρωνος· ἐγένοντο δὲ σὺν τοῖς φυγάσι
πεντήκοντα δυοῖν δέοντες.
(4) Τὰ δὲ περὶ τοὺς τυράννους οὕτως εἶχε. Φυλλίδας ὁ
γραμματεὺς συνέπραττε μὲν ὥσπερ εἴρηται πάντα καὶ συνῄδει
τοῖς φυγάσιν, εἰς δὲ τὴν ἡμέραν ἐκείνην ἐκ παλαιοῦ
κατηγγελκὼς τοῖς περὶ τὸν Ἀρχίαν πότον τινὰ καὶ συνουσίαν
καὶ γύναια τῶν ὑπάνδρων, ἔπραττεν ὅτι μάλιστα ταῖς ἡδοναῖς
ἐκλελυμένους καὶ κατοίνους (5) μεταχειρίσασθαι παρέξειν τοῖς
ἐπιτιθεμένοις. οὔπω δὲ πάνυ πόρρω μέθης οὖσιν αὐτοῖς
προσέπεσέ τις οὐ ψευδὴς μέν, ἀβέβαιος δὲ καὶ πολλὴν
ἀσάφειαν ἔχουσα περὶ τῶν (6) φυγάδων μήνυσις, ὡς ἐν τῇ
πόλει κρυπτομένων. τοῦ δὲ Φυλλίδου παραφέροντος τὸν λόγον,
ὅμως Ἀρχίας ἔπεμψέ τινα τῶν ὑπηρετῶν πρὸς τὸν Χάρωνα,
προστάσσων εὐθὺς (7) ἥκειν <πρὸς> αὐτόν. ἦν δ' ἑσπέρα, καὶ
συνέταττον ἔνδον αὑτοὺς οἱ περὶ τὸν Πελοπίδαν, ἤδη
τεθωρακισμένοι καὶ (8) τὰς μαχαίρας ἀνειληφότες. ἐξαίφνης δὲ
κοπτομένης τῆς θύρας, προσδραμών τις καὶ πυθόμενος τοῦ
ὑπηρέτου Χάρωνα μετιέναι παρὰ τῶν πολεμάρχων φάσκοντος,
ἀπήγγειλεν εἴσω τεθορυβημένος, καὶ πᾶσιν εὐθὺς παρέστη τήν
τε πρᾶξιν ἐκμεμηνῦσθαι καὶ σφᾶς ἅπαντας ἀπολωλέναι (9)
μηδὲ δράσαντάς τι τῆς ἀρετῆς ἄξιον. οὐ μὴν ἀλλ' ἔδοξεν
ὑπακοῦσαι τὸν Χάρωνα καὶ παρασχεῖν ἑαυτὸν ἀνυπόπτως τοῖς
ἄρχουσιν, ἄλλως μὲν ἀνδρώδη καὶ βαρὺν ὄντα τῷ θαρρεῖν
παρὰ τὰ δεινά, τότε δὲ δι' ἐκείνους ἐκπεπληγμένον καὶ
περιπαθοῦντα, μή τις ὑποψία προδοσίας ἐπ' αὐτὸν ἔλθῃ
τοσούτων ἅμα καὶ τοιούτων πολιτῶν ἀπολομένων. (10) ὡς οὖν
ἔμελλεν ἀπιέναι, παραλαβὼν ἐκ τῆς γυναικωνίτιδος τὸν υἱόν,
ἔτι μὲν ὄντα παῖδα, κάλλει δὲ καὶ ῥώμῃ σώματος πρωτεύοντα
τῶν καθ' ἡλικίαν, ἐνεχείριζε τοῖς περὶ Πελοπίδαν, εἴ τινα δόλον
καὶ προδοσίαν αὐτοῦ καταγνοῖεν, ὡς (11) πολεμίῳ χρῆσθαι
κελεύων ἐκείνῳ καὶ μὴ φείδεσθαι. πολλοῖς μὲν οὖν αὐτῶν
δάκρυα πρὸς τὸ πάθος καὶ τὸ φρόνημα τοῦ Χάρωνος ἐξέπεσε,
πάντες δ' ἠγανάκτουν, εἰ δειλὸν οὕτως εἶναί τινα δοκεῖ καὶ
διεφθαρμένον ὑπὸ τοῦ παρόντος, (12) ὥσθ' ὑπονοεῖν ἐκεῖνον ἢ
ὅλως αἰτιᾶσθαι· καὶ τὸν υἱὸν ἐδέοντο μὴ καταμειγνύειν αὐτοῖς,
ἀλλ' ἐκποδὼν θέσθαι τοῦ μέλλοντος, ὅπως αὐτός γε τῇ πόλει
καὶ τοῖς φίλοις τιμωρὸς ὑποτρέφοιτο, περισωθεὶς καὶ διαφυγὼν
τοὺς τυράννους. (13) ὁ δὲ Χάρων τὸν μὲν υἱὸν ἀπαλλάξειν οὐκ
ἔφη· ποῖον γὰρ αὐτῷ βίον ὁρᾶν ἢ τίνα σωτηρίαν καλλίονα τῆς
ὁμοῦ μετὰ πατρὸς καὶ φίλων τοσούτων ἀνυβρίστου τελευτῆς;
ἐπευξάμενος δὲ τοῖς θεοῖς καὶ πάντας ἀσπασάμενος καὶ
παραθαρρύνας ἀπῄει, προσέχων ἑαυτῷ καὶ ῥυθμίζων σχήματι
προσώπου καὶ τόνῳ φωνῆς ἀνομοιότατος οἷς ἔπραττε φανῆναι.
| [9] Pélopidas et ses compagnons s'habillent en paysans, et s'étant séparés, ils
entrent dans la ville par différents côtés, pendant qu'il faisait encore jour. On était au
commencement de l'hiver, et il soufflait un vent piquant accompagné de neige. Cela
servit à les cacher, parce que le froid avait fait rentrer tout le monde chez soi.
Ceux qui s'étaient chargés de pourvoir à tout recueillirent les bannis à mesure qu'ils
arrivaient, et les menèrent droit à la maison de Charon, où il se trouva, en comptant
les bannis, quarante-huit personnes. IX. Du côté des tyrans, Philidas, greffier des
polémarques, était, comme nous l'avons déjà dit, dans le secret de la conjuration, et la
secondait de tout son pouvoir. Il avait depuis quelque temps promis, pour ce jour-là,
à Archias et à Philippe un magnifique souper, où il devait leur amener des femmes
d'un rang distingué. Il voulait les livrer aux conjurés, plongés dans le vin et énervés
par la débauche. Pendant qu'ils étaient à table, et avant qu'ils fussent tout-à-fait ivres,
il leur vint une nouvelle, vraie au fond, mais vague et incertaine, que les bannis
étaient cachés dans la ville. Philidas cherchait à détourner la conversation ; mais
Archias envoya un de ses satellites à Charon, avec ordre de se rendre sur-le-champ
auprès de lui. Il était déjà tard, et Pélopidas avec les autres conjurés commençaient à
s'armer de leurs cuirasses et de leurs épées, lorsque tout à coup ils entendent frapper
à la porte; et celui qui était allé l'ouvrir, ayant reçu du satellite l'ordre des
polémarques qui mandaient Charon, rentre tout troublé, et leur fait part de cette
nouvelle. Ils crurent que la conjuration était découverte, et qu'ils allaient tous périr
avant d'avoir rien fait pour signaler leur courage. Cependant ils furent d'avis que
Charon devait obéir et se présenter aux magistrats avec une assurance qui leur ôtât
tout soupçon. Charon, homme ferme et intrépide dans les dangers qui lui étaient
personnels, fut effrayé alors du péril des conjurés, et craignit qu'on ne le soupçonnât
de trahison, si tant de citoyens illustres venaient à périr dans sa maison. X. Comme il
était sur le point de sortir, il passe dans l'appartement de sa femme; et prenant son
fils, qui, encore dans sa première jeunesse, surpassait en force et en beauté tous les
jeunes gens de son âge, il le remit à Pélopidas. « Si vous apprenez, lui dit-il, que je
vous aie trahis ou que j'aie usé envers vous de mauvaise foi, traitez, cet enfant en
ennemi, et n'ayez pour lui aucun ménagement. » L'émotion et la générosité de
Charon arrachèrent des larmes à la plupart des conjurés. Ils virent avec peine qu'il
pût croire quelqu'un d'entre eux assez lâche, assez effrayé du danger présent, pour le
soupçonner de trahison, ou pour vouloir le rendre responsable de l'événement. Ils le
conjurèrent de ne pas laisser son fils au milieu d'eux, et de le mettre à l'abri de tout
danger, afin que, s'il échappait aux tyrans, il restât en lui un vengeur pour ses amis et
pour la ville. Charon s'obstina à ne pas retirer son fils. « Quelle vie serait la sienne,
leur dit-il, s'il nous survivait! et quelle destinée plus glorieuse pour lui, que de
mourir sans tache au milieu de son père et de ses amis "! Après avoir fait sa prière
aux dieux, et embrassé tous les conjurés, il sort en les exhortant à la confiance. En
chemin, il s'étudia à composer l'air de son visage et le son de sa voix de manière à
persuader aux tyrans qu'il était bien éloigné du complot qu'il tramait.
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