[18] Τὸν δ' ἱερὸν λόχον ὥς φασι συνετάξατο Γοργίδας
πρῶτος ἐξ ἀνδρῶν ἐπιλέκτων τριακοσίων, οἷς ἡ πόλις ἄσκησιν
καὶ δίαιταν ἐν τῇ Καδμείᾳ στρατοπεδευομένοις παρεῖχε. καὶ διὰ
τοῦθ' ὁ ἐκ πόλεως λόχος ἐκαλοῦντο· τὰς γὰρ ἀκροπόλεις
ἐπιεικῶς οἱ τότε πόλεις ὠνόμαζον· (2) ἔνιοι δέ φασιν ἐξ
ἐραστῶν καὶ ἐρωμένων γενέσθαι τὸ σύστημα τοῦτο, καὶ
Παμμένους ἀπομνημονεύεταί τι μετὰ παιδιᾶς εἰρημένον· οὐ
γὰρ ἔφη τακτικὸν εἶναι τὸν Ὁμήρου Νέστορα, κελεύοντα κατὰ
φῦλα καὶ φρήτρας συλλοχίζεσθαι τοὺς Ἕλληνας,
ὡς φρήτρη φρήτρηφιν ἀρήγῃ, φῦλα δὲ φύλοις,
(3) δέον ἐραστὴν παρ' ἐρώμενον τάττειν. φυλέτας μὲν γὰρ
φυλετῶν καὶ φρατόρων <φράτορας> οὐ πολὺν λόγον ἔχειν ἐν
τοῖς δεινοῖς, τὸ δ' ἐξ ἐρωτικῆς φιλίας συνηρμοσμένον στῖφος
ἀδιάλυτον εἶναι καὶ ἄρρηκτον, ὅταν οἱ μὲν ἀγαπῶντες τοὺς
ἐρωμένους, οἱ δ' αἰσχυνόμενοι τοὺς ἐρῶντας, (4) ἐμμένωσι τοῖς
δεινοῖς ὑπὲρ ἀλλήλων. καὶ τοῦτο θαυμαστὸν οὐκ ἔστιν, εἴγε δὴ
καὶ μὴ παρόντας αἰδοῦνται μᾶλλον ἑτέρων παρόντων, ὡς
ἐκεῖνος ὁ τοῦ πολεμίου κείμενον αὐτὸν ἐπισφάττειν μέλλοντος
δεόμενος καὶ ἀντιβολῶν διὰ τοῦ στέρνου διεῖναι τὸ ξίφος,
"ὅπως" ἔφη "μή με νεκρὸν ὁ ἐρώμενος ὁρῶν κατὰ νώτου
τετρωμένον (5) αἰσχυνθῇ." λέγεται δὲ καὶ τὸν Ἰόλεων τοῦ
Ἡρακλέους ἐρώμενον ὄντα κοινωνεῖν τῶν ἄθλων καὶ
παρασπίζειν. Ἀριστοτέλης δὲ καὶ καθ' αὑτὸν ἔτι φησὶν ἐπὶ τοῦ
τάφου τοῦ Ἰόλεω τὰς καταπιστώσεις ποιεῖσθαι τοὺς ἐρωμένους
(6) καὶ τοὺς ἐραστάς. εἰκὸς οὖν καὶ τὸν λόχον ἱερὸν
προσαγορεύεσθαι, καθότι καὶ Πλάτων ἔνθεον φίλον (7) τὸν
ἐραστὴν προσεῖπε. λέγεται δὲ διαμεῖναι μέχρι τῆς ἐν Χαιρωνείᾳ
μάχης ἀήττητον· ὡς δὲ μετὰ τὴν μάχην ἐφορῶν τοὺς νεκροὺς ὁ
Φίλιππος ἔστη κατὰ τοῦτο τὸ χωρίον, ἐν ᾧ συνετύγχανε κεῖσθαι
τοὺς τριακοσίους, ἐναντίους ἀπηντηκότας ταῖς σαρίσαις
ἅπαντας ἐν τοῖς (στενοῖς) ὅπλοις καὶ μετ' ἀλλήλων
ἀναμεμειγμένους, θαυμάσαντα καὶ πυθόμενον, ὡς ὁ τῶν
ἐραστῶν καὶ τῶν ἐρωμένων οὗτος εἴη λόχος, δακρῦσαι καὶ
εἰπεῖν· "ἀπόλοιντο κακῶς οἱ τούτους τι ποιεῖν ἢ πάσχειν
αἰσχρὸν ὑπονοοῦντες."
| [18] XIX. Quant au bataillon sacré,
Gorgidas fut, dit-on, le premier qui le forma de trois cents hommes d'élite, soudoyés
et entretenus par la ville dans la Cadmée; d'où il fut appelé le bataillon de la ville,
parce qu'alors on donnait assez communément aux citadelles le nom de villes.
D'autres prétendent que ce bataillon fut composé de citoyens unis entre eux par une
amitié réciproque; et on rapporte à ce sujet un mot de Pammènes qui disait
agréablement que le Nestor d'Homère ne s'entendait pas en tactique, lorsqu'il
ordonnait aux Grecs de se ranger en bataille par nations et par lignées, afin, disait-il,
"Que chaque nation à l'envi se soutienne"; au lieu qu'il fallait mettre ensemble les gens
unis entre eux par une étroite amitié. Car dans les dangers, les nations et les lignées
s'occupent peu les unes des autres; mais un bataillon formé de gens qui s'aiment est
invincible, et ne peut jamais être rompu. L'amour et le respect qu'ils se portent
mutuellement les rend inébranlables au milieu des plus grands périls ; et doit-on
s'en étonner, lorsqu'on les voit se respecter même absents, beaucoup plus que les
autres hommes ne le font quand ils sont ensemble? N'en a-t-on pas une preuve
frappante dans ce soldat qui, renversé par terre, et voyant son ennemi prêt à le percer
de son épée, le pria de le frapper à la poitrine, « afin, lui dit-il, que mon ami n'ait pas
la honte de me voir blessé par-derrière. » Iolaüs, tendrement aimé par Hercule,
partagea, dit-on, tous ses travaux et tous ses dangers; et Aristote rapporte que, encore
de son temps, on obligeait ses amis d'aller se jurer une fidélité mutuelle sur le
tombeau d'lolaüs. Il est donc assez vraisemblable que le bataillon des Thébains
fut appelé sacré dans le sens que Platon dit de ces sortes d'amis, qu'ils sont inspirés
de Dieu. On assure que ce bataillon se conserva toujours invincible jusqu'à la
bataille de Chéronée, et que Philippe, en visitant les morts après sa victoire, s'arrêta à
l'endroit où ces trois cents Thébains étaient étendus par terre, serrés les uns contre les
autres, et tous percés par-devant de grands coups de piques. Frappé d'admiration, et
apprenant que c'était là ce bataillon composé d'amis intimes, il ne peut retenir ses
larmes : « Périssent misérablement, s'écria-t-il, ceux qui soupçonnent de tels
hommes d'avoir pu faire ou souffrir rien de déshonnête!"
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