[14] Οὐ μὴν ἀλλ' οἱ Μακεδόνες ἀδείας μὲν οὔσης
ἐφθείροντο πρὸς τοὺς διδόντας καὶ τὰς ἐκείνων θύρας
ἐθεράπευον, δορυφορουμένων καὶ στρα(2)τηγιώντων· ἐπεὶ δ'
Ἀντίγονος αὐτοῖς παρεστρατοπέδευσε μετὰ πολλῆς δυνάμεως
καὶ τὰ πράγματα <μόνον οὐχὶ> φωνὴν ἀφιέντα τὸν ἀληθινὸν
ἐκάλει στρατηγόν, οὐ μόνον οἱ στρατευόμενοι τῷ Εὐμενεῖ
προσεῖχον, ἀλλὰ καὶ τῶν ἐν εἰρήνῃ καὶ τρυφῇ μεγάλων ἐκείνων
ἕκαστος ἐνέδωκε καὶ παρεῖχεν (3) ἑαυτὸν σιωπῇ τὴν δοθεῖσαν
φυλάττοντα τάξιν. καὶ γάρ τοι περὶ τὸν Πασιτίγριν ποταμὸν
ἐπιχειρήσαντα διαβαίνειν τὸν Ἀντίγονον οἱ μὲν ἄλλοι
παραφυλάττοντες οὐδ' ᾔσθοντο, μόνος δ' Εὐμενὴς ὑπέστη, καὶ
συνάψας μάχην πολλοὺς μὲν κατέβαλε καὶ νεκρῶν ἐνέπλησε
τὸ ῥεῖθρον, ἔλαβε δὲ (4) τετρακισχιλίους αἰχμαλώτους. μάλιστα
δ' οἱ Μακεδόνες περὶ τὴν συμβᾶσαν ἀρρωστίαν αὐτῷ
καταφανεῖς ἐγένοντο τοὺς μὲν ἄλλους ἑστιᾶν λαμπρῶς καὶ
πανηγυρίζειν, ἄρχειν δὲ καὶ πολεμεῖν δυνατὸν ἡγούμενοι
μόνον (5) ἐκεῖνον. ὁ μὲν γὰρ Πευκέστας ἐν τῇ Περσίδι λαμπρῶς
αὐτοὺς ἑστιάσας (6) καὶ κατ' ἄνδρα διαδοὺς ἱερεῖον εἰς θυσίαν,
ἤλπιζεν εἶναι μέγιστος· ὀλίγαις δ' ὕστερον ἡμέραις τῶν
στρατιωτῶν ἐπὶ τοὺς πολεμίους βαδιζόντων, ἐτύγχανεν ὁ
Εὐμενὴς ἐκ νόσου τινὸς ἐπισφαλοῦς ἐν φορείῳ κομιζόμενος (7)
ἔξω τοῦ στρατεύματος ἐν ἡσυχίᾳ διὰ τὰς ἀγρυπνίας, μικρὸν δὲ
προελθοῦσιν αὐτοῖς ἄφνω λόφους τινὰς ὑπερβάλλοντες
ἐξεφάνησαν οἱ πολέμιοι <καὶ> (8) καταβαίνοντες εἰς τὸ πεδίον.
ὡς οὖν αἵ τε τῶν χρυσῶν ὅπλων αὐγαὶ πρὸς τὸν ἥλιον
ἐξέλαμψαν ἀπὸ τῶν ἄκρων, τοῦ ἀγήματος ἐν τάξει
πορευομένου, καὶ τῶν θηρίων τοὺς πύργους ἄνω καὶ τὰς
πορφύρας εἶδον, ὅσπερ ἦν αὐτοῖς κόσμος εἰς μάχην ἀγομένοις,
ἐπιστήσαντες οἱ πρῶτοι τὴν πορείαν ἐβόων (9) Εὐμενῆ καλεῖν
αὑτοῖς· οὐ γὰρ ἂν προελθεῖν ἐκείνου μὴ στρατηγοῦντος· καὶ τὰ
ὅπλα πρὸς τὴν γῆν ἐρείσαντες, ἀλλήλοις μένειν διεκελεύοντο
καὶ τοῖς ἡγεμόσιν ἡσυχίαν ἔχειν καὶ χωρὶς Εὐμενοῦς μὴ
μάχεσθαι μηδὲ κινδυ(10)νεύειν πρὸς τοὺς πολεμίους. ἀκούσας
δ' ὁ Εὐμενὴς ἧκε πρὸς αὐτοὺς δρόμῳ, τοὺς κομίζοντας
ἐπιταχύνας, καὶ τοῦ φορείου τὰς ἑκατέρωθεν αὐλαίας (11)
ἀνακαλύψας προὔτεινε τὴν δεξιὰν γεγηθώς. οἱ δ' ὡς εἶδον,
εὐθὺς ἀσπασάμενοι Μακεδονιστὶ τῇ φωνῇ τάς τ' ἀσπίδας
ἀνείλοντο καὶ ταῖς σαρίσαις ἐπιδουπήσαντες ἀνηλάλαξαν,
προκαλούμενοι τοὺς πολεμίους, ὡς τοῦ ἡγεμόνος αὐτοῖς
παρόντος.
| [14] Tant que les Macédoniens n'eurent rien à craindre des ennemis, ils
se livrèrent à tous ceux qui voulurent les corrompre; ils se trouvaient à leur lever
pour leur faire la cour, et se faisaient les satellites de ceux qui briguaient leurs
suffrages pour s'élever au commandement. Mais dès qu'ils virent Antigonus campé
auprès d'eux avec une puissante armée, les affaires elles-mêmes appelant, pour ainsi
dire, à haute voix un véritable général, non seulement les soldats tournèrent les yeux
vers Eumène, mais ces satrapes eux-mêmes, qui, pendant la paix et au sein d'une vie
voluptueuse, affectaient tant de grandeur, lui cédèrent le droit de commander, et se
soumirent en silence à prendre le poste qui leur fut assigné. Antigonus ayant tenté le
passage du fleuve Pasitigre, aucun de ces satrapes qui occupaient divers postes,
pour l'en empêcher, ne s'en aperçut; Eumène seul l'arrêta, lui livra bataille, remplit
de morts le lit du fleuve, et fit quatre mille prisonniers. XX. Ce fut surtout dans une
maladie d'Eumène que les Macédoniens firent connaître qu'ils croyaient les autres
capitaines faits pour ordonner des festins et des fêtes, et Eumène seul capable de
commander et de faire la guerre. Peucestas, qui leur avait donné en Perse un
banquet magnifique, et distribué à chaque soldat un mouton pour le sacrifice,
croyait avoir acquis auprès d'eux la plus grande autorité ; mais peu de jours après,
comme on était en marche pour aller au-devant de l'ennemi, Eumène, attaqué d'une
maladie grave et travaillé d'insomnie, se faisait porter dans une litière, assez loin de
l'armée pour ne pas en entendre le bruit. Quand ils furent un peu avancés, ils
découvrirent tout à coup les ennemis, qui, ayant franchi quelques hauteurs,
descendaient dans la plaine. Dès qu'ils virent briller, du sommet de ces collines, la
lueur étincelante de leurs armes dorées, qui réfléchissaient les rayons du soleil; qu'ils
remarquèrent la belle ordonnance de leurs bataillons, leurs éléphants chargés de
tours, les cottes d'armes de pourpre, qui faisaient l'ornement ordinaire de la cavalerie
quand elle marchait à l'ennemi; les premiers rangs s'arrêtèrent aussitôt, et
demandèrent à grands cris qu'on appelât Eumène, protestant qu'ils n'avanceraient
pas, s'il ne venait se mettre à leur tête. En même temps ils posent leurs boucliers à
terre, s'invitent mutuellement à rester où ils sont, et déclarent à leurs officiers qu'ils
peuvent eux-mêmes se tenir tranquilles, sans combattre, afin de ne pas exposer les
troupes contre les ennemis, tant qu'Eumène ne les commandera pas. Celui-ci en
étant informé, ordonne aux esclaves qui le portaient de faire la plus grande diligence;
et ouvrant des deux côtés les rideaux de sa litière, il tend la main aux soldats, avec
un air qui témoignait sa joie. Les soldats ne l'ont pas plutôt vu, que le saluant en
langage macédonien, ils relèvent leurs boucliers, les frappent de leurs longues
piques, et défient les ennemis en jetant des cris d'allégresse, ne doutant plus de la
victoire, dès qu'ils ont avec eux leur général.
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