[17] ἐπεὶ δὲ βοηθήσας τοῖς Λακεδαιμονίοις ἀπῄει διὰ Κορίνθου τὴν στρατιὰν
ἄγων, ἐνεκάλει Λάχαρτος αὐτῷ πρὶν ἐντυχεῖν τοῖς πολίταις εἰσαγαγόντι τὸ
στράτευμα· καὶ γὰρ θύραν κόψαντας ἀλλοτρίαν οὐκ εἰσιέναι πρότερον ἢ τὸν κύριον
κελεῦσαι. καὶ ὁ Κίμων "ἀλλ᾽ οὐχ ὑμεῖς," εἶπεν, "ὦ Λάχαρτε, τὰς Κλεωναίων καὶ
Μεγαρέων πύλας κόψαντες, ἀλλὰ κατασχίσαντες εἰσεβιάσασθε μετὰ τῶν ὅπλων
ἀξιοῦντες ἀνεῳγέναι πάντα τοῖς μεῖζον δυναμένοις." οὕτω μὲν ἐθρασύνατο πρὸς
τὸν Κορίνθιον ἐν δέοντι, καὶ μετὰ τῆς στρατιᾶς διεξῆλθεν.
(2) οἱ δὲ Λακεδαιμόνιοι τοὺς Ἀθηναίους αὖθις ἐκάλουν ἐπὶ τοὺς ἐν Ἰθώμῃ
Μεσσηνίους καὶ εἵλωτας, ἐλθόντων δὲ τὴν τόλμαν καὶ τὴν λαμπρότητα δείσαντες
ἀπεπέμψαντο μόνους τῶν συμμάχων ὡς νεωτεριστάς. οἱ δὲ πρὸς ὀργὴν ἀπελθόντες
ἤδη τοῖς λακωνίζουσι φανερῶς ἐχαλέπαινον, καὶ τὸν Κίμωνα μικρᾶς ἐπιλαβόμενοι
προφάσεως ἐξωστράκισαν εἰς ἔτη δέκα· τοσοῦτον γὰρ ἦν χρόνου τεταγμένον ἅπασι
τοῖς ἐξοστρακιζομένοις.
(3) ἐν δὲ τούτῳ τῶν Λακεδαιμονίων, ὡς ἐπανήρχοντο Δελφοὺς ἀπὸ Φωκέων
ἐλευθερώσαντες, ἐν Τανάγρᾳ καταστρατοπεδευσάντων Ἀθηναῖοι μὲν ἀπήντων
διαμαχούμενοι, Κίμων δὲ μετὰ τῶν ὅπλων ἧκεν εἰς τὴν αὑτοῦ φυλὴν τὴν Οἰνηΐδα,
πρόθυμος ὢν ἀμύνεσθαι τοὺς Λακεδαιμονίους μετὰ τῶν πολιτῶν. (4) ἡ δὲ βουλὴ
τῶν πεντακοσίων πυθομένη καὶ φοβηθεῖσα, τῶν ἐχθρῶν αὐτοῦ καταβοώντων ὡς
συνταράξαι τὴν φάλαγγα βουλομένου καὶ τῇ πόλει Λακεδαιμονίους ἐπαγαγεῖν,
ἀπηγόρευσε τοῖς στρατηγοῖς μὴ δέχεσθαι τὸν ἄνδρα. κἀκεῖνος μὲν ᾤχετο δεηθεὶς
Εὐθίππου τοῦ Ἀναφλυστίου καὶ τῶν ἄλλων ἑταίρων, ὅσοι μάλιστα τὴν τοῦ
λακωνίζειν αἰτίαν ἔσχον, ἐρρωμένως ἀγωνίσασθαι πρὸς τοὺς πολεμίους καὶ δι᾽
ἔργων ἀπολύσασθαι τὴν αἰτίαν πρὸς τοὺς πολίτας. (5) οἱ δὲ λαβόντες αὐτοῦ τὴν
πανοπλίαν εἰς τὸν λόχον ἔθεντο· καὶ μετ᾽ ἀλλήλων συστάντες ἐκθύμως ἑκατὸν
ὄντες ἔπεσον, πολὺν αὑτῶν πόθον καὶ μεταμέλειαν ἐφ᾽ οἷς ᾐτιάθησαν ἀδίκως
ἀπολιπόντες τοῖς Ἀθηναίοις. ὅθεν οὐδὲ τῷ πρὸς Κίμωνα θυμῷ πολὺν χρόνον
ἐνέμειναν, τὰ μέν, ὡς εἰκός, ὧν ἔπαθον εὖ μεμνημένοι, τὰ δὲ τοῦ καιροῦ
συλλαμβανομένου. (6) νενικημένοι γὰρ ἐν Τανάγρᾳ μάχῃ μεγάλῃ καὶ
προσδοκῶντες εἰς ὥραν ἔτους στρατιὰν Πελοποννησίων ἐπ᾽ αὐτοὺς ἐκάλουν ἐκ τῆς
φυγῆς τὸν Κίμωνα· καὶ κατῆλθε τὸ ψήφισμα γράψαντος αὐτῷ Περικλέους. οὕτω
τότε πολιτικαὶ μὲν ἦσαν αἱ διαφοραί, μέτριοι δ᾽ οἱ θυμοὶ καὶ πρὸς τὸ κοινὸν
εὐανάκλητοι συμφέρον, ἡ δὲ φιλοτιμία πάντων ἐπικρατοῦσα τῶν παθῶν τοῖς τῆς
πατρίδος ὑπεχώρει καιροῖς.
| [17] Après avoir secouru les Lacédémoniens, il s'en retourna par Corinthe
avec son armée. Lachartus, qui commandait dans cette ville, se plaignit à lui de ce
qu'il y avait fait entrer ses troupes sans en prévenir les Corinthiens. « Lorsqu'on
frappe à une porte, ajouta-t-il, on n'entre pas que le maître ne l'ait ordonné. — Mais
vous-même, Lachartus, lui répondit Cimon, au lieu de frapper aux portes de Cléone
et de Mégare, vous les avez brisées, et vous êtes entré dans ces villes les armes à la
main, en disant que les plus forts avaient droit d'entrer partout. Ce ton de fermeté en
imposa à propos au général corinthien, et Cimon poursuivit sa marche. Les
Lacédémoniens appelèrent une seconde fois les Athéniens à leur secours contre les
Messéniens et les Ilotes, qui s'étaient rendus maîtres d'Ithome. Mais quand les
Athéniens furent arrivés, les Spartiates craignirent leur audace et leur ardeur; et sous
prétexte qu'ils tramaient quelque nouveauté, ils les renvoyèrent seuls entre tous les
alliés. Cet affront outra de colère les Athéniens, qui, étant repartis sur-le-champ, se
déclarèrent dès ce moment les ennemis de ceux qui favorisaient les Lacédémoniens ;
et, saisissant le plus léger prétexte, ils bannirent Cimon par l'ostracisme, genre d'exil
qui devait durer dix ans. XXV. Dans cet intervalle, les Lacédémoniens, en revenant
de Delphes qu'ils avaient délivrée du joug des Phocéens, campèrent dans les plaines
de Tanagre. Les Athéniens sortirent au-devant d'eux pour leur livrer bataille, et
Cimon se rendit en armes dans sa tribu AEnéide, montrant la plus grande ardeur
pour combattre, avec ses conpatriotes, contre les Lacédémoniens. Mais le conseil des
cinq-cents qui en fut informé, et à qui les clameurs des ennemis de Cimon firent
craindre qu'il ne fût venu pour troubler l'ordonnance de la bataille, et introduire les
Lacédémoniens dans Athènes, fit défendre aux capitaines de le recevoir dans
aucune de leurs compagnies. Il se retira donc, après avoir conjuré Euthippe, du
bourg d'Anaphlyste, et quelques autres de ses compagnons qu'on regardait comme
les plus chauds partisans des Lacédémoniens, de combattre de toutes leurs forces, et
de se laver par leur conduite, aux yeux de leurs concitoyens, du soupçon qu'on avait
formé contre eux. Ces guerriers, qui étaient au nombre de cent, placèrent au milieu
de leur bataillon l'armure complète de Cimon; et, se tenant serrés les uns contre les
autres; ils se firent tous tuer, après avoir fait des prodiges de valeur, et laissé aux
Athéniens autant de regret que de repentir de l'accusation injuste dont on les avait
noircis. Aussi leur ressentiment contre Cimon ne dura-t-il pas longtemps; il céda
bientôt, soit au souvenir de ses grands services, soit aux conjonctures fàcheuses où
ils se trouvèrent. Complétement battus dans ce combat de Tanagre, et s'attendant,
pour le printemps prochain, à une incursion des Péloponésiens sur leurs terres, ils
rappelèrent Cimon de son bannissement; et Périclès lui-même en proposa le décret :
tant les querelles particulières étaient subordonnées aux raisons d'État! tant les
inimitiés étaient modérées, et tombaient facilement devant l'intérêt public ! tant enfin
l'ambition, cette passion qui soumet toutes les autres, cédait sans peine aux besoins
de la patrie!
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