| [2] Ἀριστείδης δὲ Κλεισθένους μὲν τοῦ καταστησαμένου τὴν πολιτείαν 
μετὰ τοὺς τυράννους ἑταῖρος γενόμενος, ζηλώσας δὲ καὶ θαυμάσας 
μάλιστα τῶν πολιτικῶν ἀνδρῶν Λυκοῦργον τὸν Λακεδαιμόνιον, ἥψατο 
μὲν ἀριστοκρατικῆς πολιτείας, ἔσχε δ᾽ ἀντιτασσόμενον ὑπὲρ τοῦ δήμου 
Θεμιστοκλέα τὸν Νεοκλέους. ἔνιοι μὲν οὖν φασιν παῖδας ὄντας αὐτοὺς 
καὶ συντρεφομένους ἀπ᾽ ἀρχῆς ἐν παντὶ καὶ σπουδῆς ἐχομένῳ καὶ 
παιδιᾶς πράγματι καὶ λόγῳ διαφέρεσθαι πρὸς ἀλλήλους, (2) καὶ τὰς 
φύσεις εὐθὺς ὑπὸ τῆς φιλονεικίας ἐκείνης ἀνακαλύπτεσθαι, τὴν μὲν 
εὐχερῆ καὶ παράβολον καὶ πανοῦργον οὖσαν καὶ μετ᾽ ὀξύτητος ἐπὶ πάντα 
ῥᾳδίως φερομένην, τὴν δ᾽ ἱδρυμένην ἐν ἤθει βεβαίῳ καὶ πρὸς τὸ δίκαιον 
ἀτενῆ, ψεῦδος δὲ καὶ βωμολοχίαν καὶ ἀπάτην οὐδ᾽ ἐν παιδιᾶς τινι τρόπῳ 
προσιεμένην.
Ἀρίστων δ᾽ ὁ Κεῖος ἐξ ἐρωτικῆς ἀρχῆς γενέσθαι φησὶ καὶ προελθεῖν ἐπὶ 
τοσοῦτον τὴν ἔχθραν αὐτῶν. (3) Στησίλεω γάρ, ὃς ἦν γένει Κεῖος, ἰδέᾳ τε 
καὶ μορφῇ σώματος πολὺ τῶν ἐν ὥρᾳ λαμπρότατος, ἀμφοτέρους 
ἐρασθέντας οὐ μετρίως ἐνεγκεῖν τὸ πάθος οὐδ᾽ ἅμα λήγοντι τῷ κάλλει 
τοῦ παιδὸς ἀποθέσθαι τὴν φιλονεικίαν, ἀλλ᾽ ὥσπερ ἐγγυμνασαμένους 
ἐκείνῃ πρὸς τὴν πολιτείαν εὐθὺς ὁρμῆσαι διαπύρους ὄντας καὶ διαφόρως 
ἔχοντας. (4) ὁ μὲν οὖν Θεμιστοκλῆς εἰς ἑταιρείαν ἐμβαλὼν ἑαυτὸν εἶχε 
πρόβλημα καὶ δύναμιν οὐκ εὐκαταφρόνητον, ὥστε καὶ πρὸς τὸν εἰπόντα 
καλῶς αὐτὸν ἄρξειν Ἀθηναίων, ἄνπερ ἴσος ᾖ καὶ κοινὸς ἅπασι 
"μηδέποτε," εἰπεῖν, "εἰς τοῦτον ἐγὼ καθίσαιμι τὸν θρόνον, ἐν ᾧ πλέον 
οὐδὲν ἕξουσιν (5) οἱ φίλοι παρ᾽ ἐμοὶ τῶν ἀλλοτρίων·" Ἀριστείδης δὲ καθ᾽ 
ἑαυτὸν ὥσπερ ὁδὸν ἰδίαν ἐβάδιζε διὰ τῆς πολιτείας, πρῶτον μὲν οὐ 
βουλόμενος συναδικεῖν τοῖς ἑταίροις ἢ λυπηρὸς εἶναι μὴ χαριζόμενος, 
ἔπειτα τὴν ἀπὸ τῶν φίλων δύναμιν οὐκ ὀλίγους ἰδὼν ἐπαίρουσαν ἀδικεῖν 
ἐφυλάττετο, μόνῳ τῷ χρηστὰ καὶ δίκαια πράττειν καὶ λέγειν ἀξιῶν 
θαρρεῖν τὸν ἀγαθὸν πολίτην. 
 | [2] III. Aristide fut l'ami particulier de Clistène, 
celui qui, après l'expulsion des tyrans, rétablit le gouvernement d'Athènes. Il 
avait aussi une estime et une admiration particulières pour Lycurgue, le législateur 
de Lacédémone, qu'il mettait au-dessus de tous les autres politiques : aussi, le 
prenant pour modèle, favorisait-il de tout son pouvoir l'aristocratie; mais il eut, à cet 
égard, un adversaire redoutable dans Thémistocle, fils de Néoclès, qui tenait pour 
l'état populaire. On dit même qu'élevés ensemble dès leur enfance, ils furent toujours 
divisés de sentiment et dans les affaires sérieuses et dans leurs jeux mêmes, et que 
cette division continuelle fit bientôt connaître le caractère de l'un et de l'autre. 
Thémistocle était prompt, hardi, rusé, et se portait à tout ce qu'il voulait faire avec la 
plus grande activité. Aristide, ferme et constant dans ses moeurs, inébranlable dans 
ses principes de justice, ne se permettait jamais, même en jouant, ni mensonge, ni 
flatterie, ni déguisement. Ariston, de Chio, dit que leur inimitié avait pris sa source 
dans l'amour, et qu'elle devint irréconciliable. Épris tous deux du jeune Stésiléus 
de Céos, dont la grâce et la beauté effaçaient, par leur éclat, tous les jeunes gens de 
son âge, ils furent extrêmes dans leur passion; et, après même que la beauté de 
Stésiléus fut passée, leur jalousie subsista toujours : elle parut n'avoir été qu'un essai 
de leur rivalité en administration politique, dans laquelle ils se jetèrent, tout 
échauffés encore de leurs disputes précédentes. IV. Thémistocle s'attacha d'abord à se 
faire beaucoup d'amis, qui furent un rempart pour sa sûreté personnelle, et qui lui 
servirent à acquérir une grande autorité. Quelqu'un lui disait un jour que le moyen 
de bien gouverner les Athéniens était de conserver l'égalité, et d'être impartial pour 
tout le monde. « Je ne voudrais jamais, répondit-il, m'asseoir sur un tribunal où mes 
amis ne trouveraient pas auprès de moi plus de faveur que les étrangers. » Aristide, 
au contraire, ne suivit dans le gouvernement que ses propres principes, et s'y fraya 
une route particulière. D'abord il ne voulait ni faire des injustices pour complaire à 
ses amis, ni les désobliger en ne leur accordant jamais rien. En second lieu, il voyait 
un grand nombre d'administrateurs que le crédit de leurs amis enhardissait à 
l'injustice; et afin de se roidir contre ce penchant, il eut toujours pour règle de sa 
conduite qu'un bon citoyen ne doit avoir d'autre appui que l'habitude de dire et de 
faire ce qui est juste et honnête. 
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