[37] 16. Τοῦτο διελυμήνατο τὰ πράγματα τῆς Ἑλλάδος,
ἁμῶς γέ πως ἐκ τῶν παρόντων ἀναλαβεῖν αὑτὴν ἔτι καὶ
διαφυγεῖν τὴν Μακεδόνων ὕβριν καὶ πλεονεξίαν (2) δυναμένης.
ὁ γὰρ Ἄρατος, εἴτ' ἀπιστίᾳ καὶ φόβῳ τοῦ Κλεομένους, εἴτε
φθονῶν εὐτυχοῦντι παρ' ἐλπίδα καὶ νομίζων, ἔτη τρία καὶ
τριάκοντα πρωτεύοντος αὐτοῦ, δεινὸν εἶναι τὴν δόξαν ἅμα καὶ
τὴν δύναμιν ἐπιφύντα νέον ἄνδρα καθελεῖν καὶ παραλαβεῖν
πραγμάτων ηὐξημένων ὑπ' αὐτοῦ καὶ κεκρατημένων χρόνον
τοσοῦτον ἀρχήν, πρῶτον μὲν ἐπειρᾶτο τοὺς Ἀχαιοὺς
παραβιάζε(3)σθαι καὶ διακωλύειν· ὡς δ' οὐ προσεῖχον αὐτῷ, τοῦ
Κλεομένους ἐκπεπληγμένοι τὸ θράσος, ἀλλὰ καὶ δικαίαν
ἐποιοῦντο τὴν ἀξίωσιν τῶν Λακεδαιμονίων εἰς τὸ πάτριον
σχῆμα κοσμούντων τὴν Πελοπόννησον, τρέπεται πρὸς ἔργον
οὐδενὶ μὲν τῶν Ἑλλήνων προσῆκον, αἴσχιστον δ' ἐκείνῳ καὶ
τῶν πεπραγμένων ὑπ' αὐτοῦ καὶ πεπολιτευμένων
ἀναξιώτατον, Ἀντίγονον ἐπὶ τὴν Ἑλλάδα καλεῖν καὶ
Μακεδόνων ἐμπιπλάναι τὴν Πελοπόν(4)νησον, οὓς αὐτὸς ἐκ
Πελοποννήσου μειράκιον ὢν ἐξήλασεν, ἐλευθερώσας τὸν
Ἀκροκόρινθον, καὶ πᾶσι μὲν τοῖς βασιλεῦσιν ὕποπτος καὶ
διάφορος γενόμενος, τουτονὶ δ' αὐτὸν Ἀντίγονον εἰρηκὼς κακὰ
μυρία δι' ὧν (5) ἀπολέλοιπεν ὑπομνημάτων. καίτοι πολλὰ
παθεῖν καὶ παραβαλέσθαι φησὶν αὐτὸς ὑπὲρ Ἀθηναίων, ὅπως ἡ
πόλις ἀπαλλαγείη φρουρᾶς καὶ Μακεδόνων· εἶτα τούτους ἐπὶ
τὴν πατρίδα καὶ τὴν ἑστίαν τὴν ἑαυτοῦ μεθ' ὅπλων εἰσήγαγεν
ἄχρι τῆς γυναικωνίτιδος· τὸν δ' ἀφ' Ἡρακλέους γεγονότα καὶ
βασιλεύοντα Σπαρτιατῶν καὶ τὴν πάτριον πολιτείαν, ὥσπερ
ἁρμονίαν ἐκλελυμένην, ἀνακρουόμενον αὖθις ἐπὶ τὸν
σώφρονα καὶ Δώριον ἐκεῖνον τοῦ Λυκούργου νόμον καὶ βίον,
οὐκ ἠξίου Σικυωνίων ἡγεμόνα καὶ Τριταιέων γράφεσθαι· (7)
φεύγων δὲ τὴν μάζαν καὶ τὸν τρίβωνα, καὶ τὸ δεινότατον ὧν
κατηγόρει Κλεομένους, ἀναίρεσιν πλούτου καὶ πενίας
ἐπανόρθωσιν, διαδήματι καὶ πορφύρᾳ καὶ Μακεδονικοῖς καὶ
σατραπικοῖς προστάγμασιν ὑπέρριψε μετὰ τῆς Ἀχαΐας αὑτόν,
ἵνα μὴ Κλεομένει ποιεῖν δοκῇ τὸ προσταττόμενον, Ἀντιγόνεια
θύων καὶ παιᾶνας ᾄδων αὐτὸς ἐστεφανωμένος εἰς ἄνθρωπον
ὑπὸ φθόης κατασηπόμενον. (8) ἀλλὰ ταῦτα μὲν οὐκ Ἀράτου
βουλόμενοι κατηγορεῖν γράφομεν -- ἐν πολλοῖς γὰρ ὁ ἀνὴρ
οὗτος Ἑλληνικὸς γέγονε καὶ μέγας -- , οἰκτίροντες δὲ τῆς
ἀνθρωπίνης φύσεως τὴν ἀσθένειαν, εἰ μηδ' ἐν ἤθεσιν οὕτως
ἀξιολόγοις καὶ διαφόροις πρὸς ἀρετὴν ἐκφέρειν δύναται τὸ
καλὸν ἀνεμέσητον.
| [37] XL. Ce délai fut très-funeste aux affaires de la Grèce,
qui aurait pu se relever de son état de faiblesse, et s'affranchir de
l'avarice et de l'insolence des Macédoniens; mais Aratus, soit par crainte et par
défiance de Cléomène, soit par jalousie des succès inespérés de ce prince, ne put
souffrir, après avoir eu pendant trente-trois ans le commandement de la Grèce, qu'un
jeune homme vînt tout à coup s'élever sur les débris de sa gloire et de sa puissance, et
lui ravir une domination qu'il avait si fort accrue par ses travaux, et si longtemps
conservée. Il essaya d'abord de détourner les Achéens de la paix, et n'oublia rien
pour en empêcher la conclusion. Quand il vit qu'il n'était pas écouté, et que les
Achéens, effrayés par l'audace de Cléomène, trouvaient d'ailleurs juste la demande
que faisaient les Lacédémoniens de remettre le Péloponèse dans son premier état, il
eut recours à un moyen qui, déplacé de la part de tout autre Grec, était pour lui le
plus honteux, le plus indigne de tout ce qu'il avait fait jusqu'alors et dans la guerre et
dans la paix : il appela Antigonus en Grèce, et remplit le Péloponèse de Macédoniens,
lui qui les en avait chassés dans sa jeunesse, et avait affranchi de leur joug la citadelle
de Corinthe; lui qui, suspect à tous leurs rois, s'était déclaré leur ennemi, surtout
d'Antigonus, dont il dit tant de mal dans les Mémoires qu'il a laissés, où il assure
qu'il a supporté les travaux les plus pénibles, et bravé les plus grands dangers, pour
chasser d'Athènes la garnison macédonienne. XLI. Cependant il appelle ensuite ces
mêmes Macédoniens dans sa patrie, il les fait entrer en armes dans ses propres
foyers, et jusque dans les appartements des femmes, et cela pour empêcher qu'un
descendant d'Hercule, qu'un roi de Sparte, qui voulait ramener sa patrie, dont le
gouvernement avait perdu toute son harmonie, à cette sage institution, à cette
discipline dorique que les lois de Lycurgue y avaient établie; pour empêcher dis-je,
qu'il ne prît le titre de général des Sicyoniens et des Tritéens. Il craignait un roi
qui mangeait du gros pain et portait un manteau d'une étoffe commune (et, ce
qu'Aratus jugeait encore plus terrible, et dont il faisait un crime à Cléomène) un roi
qui voulait bannir la richesse et remédier à la pauvreté ; et pour n'avoir pas l'air de
recevoir les ordres de Cléomène, il se soumettait, lui et tous les Achéens, au diadème,
à la robe de pourpre des Macédoniens, et aux volontés de leurs satrapes. Il célébrait
des fêtes en l'honneur d'Antigonus, et n'avait pas honte de chanter des hymnes, une
couronne de fleurs sur la tête, à la gloire d'un homme dont le corps tombait en
pourriture. Au reste, ce que j'en dis ici n'a pas pour but d'accuser Aratus, qui en tant
d'occasions s'est montré si grand, si digne de la Grèce ; je veux seulement déplorer la
faiblesse de la nature humaine, qui dans les âmes même les plus élevées, et que la
nature a le plus faites pour le bien, ne peut produire une vertu exempte de tout
reproche.
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