HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

PLUTARQUE, Oeuvres morales, Le Banquet des sept Sages

Chapitre 3

  Chapitre 3

[3] Ἐν τοιούτοις λόγοις γενόμενοι κατὰ τὴν ὁδὸν ἀφικόμεθα πρὸς τὴν οἰκίαν, καὶ λούσασθαι μὲν Θαλῆς οὐκ ἠθέλησεν, ἀληλιμμένοι γὰρ ἦμεν· ἐπιὼν δὲ τούς τε δρόμους ἐθεᾶτο καὶ τὰς παλαίστρας καὶ τὸ ἄλσος τὸ παρὰ τὴν θάλατταν ἱκανῶς διακεκοσμημένον, ὑπ´ οὐδενὸς ἐκπληττόμενος τῶν τοιούτων, ἀλλ´ ὅπως μὴ καταφρονεῖν δοκοίη μηδ´ ὑπερορᾶν τοῦ Περιάνδρου τῆς φιλοτιμίας. τῶν δ´ ἄλλων τὸν ἀλειψάμενον λουσάμενον οἱ θεράποντες εἰσῆγον εἰς τὸν ἀνδρῶνα διὰ τῆς στοᾶς. δ´ Ἀνάχαρσις ἐν τῇ στοᾷ καθῆστο, καὶ παιδίσκη προειστήκει τὴν κόμην ταῖς χερσὶ διακρίνουσα. ταύτην Θαλῆς ἐλευθεριώτατά πως αὐτῷ προσδραμοῦσαν ἐφίλησε καὶ γελάσας "οὕτως," ἔφη, "ποίει καλὸν τὸν ξένον, ὅπως ἡμερώτατος ὢν μὴ φοβερὸς τὴν ὄψιν ἡμῖν μηδ´ ἄγριος." Ἐμοῦ δ´ ἐρομένου περὶ τῆς παιδὸς ἥτις εἴη, "τὴν σοφήν," ἔφη, "καὶ περιβόητον ἀγνοεῖς Εὔμητιν; οὕτω γὰρ ταύτην πατὴρ αὐτός, οἱ δὲ πολλοὶ πατρόθεν ὀνομάζουσι Κλεοβουλίνην." Καὶ Νειλόξενος εἶπεν " που τὴν περὶ τὰ αἰνίγματα δεινότητα καὶ σοφίαν," ἔφη, "τῆς κόρης ἐπαινεῖς· καὶ γὰρ εἰς Αἴγυπτον ἔνια τῶν προβαλλομένων ὑπ´ αὐτῆς διῖκται." "Οὐκ ἔγωγ´," εἶπεν Θαλῆς· "τούτοις γὰρ ὥσπερ ἀστραγάλοις, ὅταν τύχῃ, παίζουσα χρῆται καὶ διαβάλλεται πρὸς τοὺς ἐντυχόντας. ἀλλὰ καὶ φρόνημα θαυμαστὸν καὶ νοῦς ἔνεστι πολιτικὸς καὶ φιλάνθρωπον ἦθος, καὶ τὸν πατέρα τοῖς πολίταις πραότερον ἄρχοντα παρέχει καὶ δημοτικώτερον." "Εἶεν," Νειλόξενος ἔφη, "καὶ φαίνεται βλέποντι πρὸς τὴν λιτότητα καὶ ἀφέλειαν αὐτῆς· Ἀνάχαρσιν δὲ πόθεν οὕτω τημελεῖ φιλοστόργως;" "Ὅτι," ἔφη, "σώφρων ἀνήρ ἐστι καὶ πολυμαθής, καὶ τὴν δίαιταν αὐτῇ καὶ τὸν καθαρμόν, χρῶνται Σκύθαι περὶ τοὺς κάμνοντας, ἀφθόνως καὶ προθύμως παραδέδωκε. καὶ νῦν οἶμαι περιέπειν αὐτὴν τὸν ἄνδρα καὶ φιλοφρονεῖσθαι, μανθάνουσάν τι καὶ προσδιαλεγομένην." Ἤδη δὲ πλησίον οὖσιν ἡμῖν τοῦ ἀνδρῶνος ἀπήντησεν Ἀλεξίδημος Μιλήσιος (ἦν δὲ Θρασυβούλου τοῦ τυράννου νόθος) καὶ ἐξῄει τεταραγμένος καὶ σὺν ὀργῇ τινι πρὸς αὑτὸν οὐδὲν ἡμῖν γε σαφὲς διαλεγόμενος. ὡς δὲ τὸν Θαλῆν εἶδε, μικρὸν ἀνενεγκὼν καὶ καταστάς "οἵαν ὕβριν," εἶπεν, "εἰς ἡμᾶς Περίανδρος ὕβρικεν, ἐκπλεῦσαι μὲν οὐκ ἐάσας ὡρμημένον ἀλλὰ προσμεῖναι δεηθεὶς τὸ δεῖπνον, ἐλθόντι δὲ νέμων κλισίαν ἄτιμον, Αἰολεῖς δὲ καὶ νησιώτας (καὶ τίνας γὰρ οὐχί;) Θρασυβούλου προτιμῶν· Θρασύβουλον γὰρ ἐν ἐμοὶ τὸν πέμψαντα προπηλακίσαι βουλόμενος καὶ καταβαλεῖν ὡς δὴ περιορῶν δῆλός ἐστιν." "Εἶτ´," ἔφη, "σὺ δέδιας μὴ καθάπερ Αἰγύπτιοι τοὺς ἀστέρας ὑψώματα καὶ ταπεινώματα λαμβάνοντας ἐν τοῖς τόποις οὓς διεξίασι γίγνεσθαι βελτίονας χείρονας ἑαυτῶν λέγουσιν, οὕτως περὶ σὲ διὰ τὸν τόπον ἀμαύρωσις ταπείνωσις γένηται; καὶ τοῦ Λάκωνος ἔσῃ φαυλότερος, ὃς ἐν χορῷ τινι κατασταθεὶς εἰς τὴν ἐσχάτην χώραν ὑπὸ τοῦ ἄρχοντοςεὖ γ´,’ εἶπεν, ‘ἐξεῦρες, ὡς καὶ αὕτα ἔντιμος γένηται.’ οὐ καταλαβόντας," ἔφη, "τόπον μετὰ τίνας κατακείμεθα δεῖ ζητεῖν, μᾶλλον δ´ ὅπως εὐάρμοστοι τοῖς συγκατακειμένοις ὦμεν, ἀρχὴν καὶ λαβὴν φιλίας εὐθὺς ἐν αὐτοῖς ζητοῦντες, μᾶλλον δ´ ἔχοντες τὸ μὴ δυσκολαίνειν ἀλλ´ ἐπαινεῖν ὅτι τοιούτοις συγκατεκλίθημεν· ὡς γε τόπῳ κλισίας δυσχεραίνων δυσχεραίνει τῷ συγκλίτῃ μᾶλλον τῷ κεκληκότι, καὶ πρὸς ἀμφοτέρους ἀπεχθάνεται." "Λόγος," ἔφη, "ταῦτ´ ἄλλως ἐστίν" Ἀλεξίδημος, "ἔργῳ δὲ καὶ τοὺς σοφοὺς ὑμᾶς ὁρῶ τὸ τιμᾶσθαι διώκοντας," καὶ ἅμα παραμειψάμενος ἡμᾶς ἀπῆλθε. Καὶ Θαλῆς πρὸς ἡμᾶς τὴν ἀτοπίαν τοῦ ἀνθρώπου θαυμάζοντας, "ἔμπληκτος," ἔφη, "καὶ ἀλλόκοτος φύσει, ἐπεὶ καὶ μειράκιον ὢν ἔτι, μύρου σπουδαίου Θρασυβούλῳ κομισθέντος, εἰς ψυκτῆρα κατεράσας μέγαν καὶ προσεγχέας ἄκρατον ἐξέπιεν, ἔχθραν ἀντὶ φιλίας Θρασυβούλῳ διαπεπραγμένος." Ἐκ τούτου περιελθὼν ὑπηρέτης "κελεύει σε Περίανδρος," ἔφη, "καὶ Θαλῆν παραλαβόντα τοῦτον ἐπισκέψασθαι τὸ κεκομισμένον ἀρτίως αὐτῷ πότερον ἄλλως γέγονεν τι σημεῖόν ἐστι καὶ τέρας· αὐτὸς μὲν γὰρ ἔοικε τεταράχθαι σφόδρα, μίασμα καὶ κηλῖδα τῆς θυσίας ἡγούμενος." ἅμα δ´ ἀπῆγεν ἡμᾶς εἴς τι οἴκημα τῶν περὶ τὸν κῆπον. ἐνταῦθα νεανίσκος ὡς ἐφαίνετο νομευτικός, οὔπω γενειῶν ἄλλως τε τὸ εἶδος οὐκ ἀγεννής, ἀναπτύξας τινὰ διφθέραν ἔδειξεν ἡμῖν βρέφος ὡς ἔφη γεγονὸς ἐξ ἵππου, τὰ μὲν ἄνω μέχρι τοῦ τραχήλου καὶ τῶν χειρῶν ἀνθρωπόμορφον, τὰ λοιπὰ δ´ ἔχον ἵππου, τῇ δὲ φωνῇ καθάπερ τὰ νεογνὰ παιδάρια κλαυθμυριζόμενον. μὲν οὖν Νειλόξενος, "Ἀλεξίκακε" εἰπών, ἀπεστράφη τὴν ὄψιν, δὲ Θαλῆς προσέβλεπε τῷ νεανίσκῳ πολὺν χρόνον, εἶτα μειδιάσας (εἰώθει δ´ ἀεὶ παίζειν πρὸς ἐμὲ περὶ τῆς τέχνης) " που τὸν καθαρμόν, Διόκλεις," ἔφη, "κινεῖν διανοῇ καὶ παρέχειν πράγματα τοῖς ἀποτροπαίοις, ὥς τινος δεινοῦ καὶ μεγάλου συμβάντος;" "Τί δ´," εἶπον, "οὐ μέλλω; στάσεως γάρ, Θαλῆ, καὶ διαφορᾶς τὸ σημεῖόν ἐστι, καὶ δέδια μὴ μέχρι γάμου καὶ γενεᾶς ἐξίκηται, <[3] Ce fut en tenant de tels propos chemin faisant, que nous arrivâmes à la maison. Thalès ne voulut pas se baigner : «Je me suis frotté d'huile,» dit-il. Il se promena donc de côté et d'autre, regardant les champs de course, les palestres, et le bois sacré, voisin de la mer, que l'on avait bien convenablement disposé. Ce n'était pas qu'il fût frappé par aucun de ces préparatifs, mais il voulait ne pas avoir l'air de mépriser Périandre et de faire peu de cas de l'empressement avec lequel celui-ci honorait ses hôtes. Pour les autres convives, à mesure qu'ils s'étaient parfumés ou baignés, les serviteurs les introduisaient par la galerie dans la salle du banquet. Or Anacharsis s'était installé dans cette galerie, et devant lui une jeune fille se tenait, lui séparant les cheveux avec ses mains. Lorsqu'entra Thalès, elle s'élança très librement à sa rencontre, et Thalès, après l'avoir embrassée, lui dit en riant : «Continue à rendre bien beau notre étranger, afin qu'étant devenu la douceur même il ne conserve pas au milieu de nous une mine à faire peur et un aspect sauvage.» Je lui demandai quelle était cette jeune enfant : Quoi!» me dit-il, «vous ne connaissez pas la savante et célèbre Eumétis ! car c'est ainsi que son père la nomme : le plus communément on l'appelle Cléobuline, du nom paternel.» Et Niloxène : «C'est sans doute à cause de son talent et de son habileté pour les énigmes, que vous faites l'éloge de cette jeune fille : car quelques-unes de celles qu'elle a proposées sont parvenues jusqu'en Égypte.»— «Ce n'est pas à cause de cela», répondit Thalès : «les énigmes sont pour elle des joujoux dont elle s'amuse à l'occasion pour faire sa partie avec ceux qui se rencontrent. Mais ce qui est admirable en elle c'est sa profondeur d'esprit, son sens politique, l'aménité de son caractère, et le talent qu'elle a de rendre plus douce l'autorité de son père et d'inspirer à celui-ci des sentiments plus humains à l'égard du peuple.» — «Soit», dit Niloxène; «et cela se reconnaît à voir sa modestie et sa simplicité. Mais d'où vient qu'elle prend un soin si amoureux de la toilette d'Anacharsis?» — Parce que c'est, répondit Thalès, «un sage, un homme des plus instruits, et parce qu'il lui a communiqué, avec de nombreux détails et de grand coeur, l'ensemble des pratiques sanitaires et des purifications que les Scythes appliquent au traitement des malades. Et dans ce moment je suppose qu'elle l'entoure de soins et d'amitiés parce qu'elle s'instruit de quelque chose en conversant avec lui.» Comme nous étions déjà près de la salle, Alexidème le Milésien vint à notre rencontre. C'était un bâtard du tyran Thrasybule. Il était sorti tout troublé, et avec une sorte de fureur il se parlait à lui-même, mais ses paroles n'avaient rien de clair pour nous. Quand il eut vu Thalès, il se remit un peu; puis, s'arrêtant tout court': «Quel affront Périandre vient de nous faire! Je voulais mettre à la voile: il ne l'a pas permis ; il m'a supplié de rester à son festin, et quand j'arrive, il me donne une des dernières places, faisant passer des Éoliens, des insulaires (je ne sais qui il ne me préfère pas), les faisant passer, dis je, avant Thrasybule, car c'est Thrasybule en ma personne, c'est celui par lequel je suis envoyé qu'il a l'intention de traîner dans la boue et de ravaler comme le méprisant : la chose est bien claire.»— «Eh quoi!» lui dit Thalès, «êtes-vous comme les Égyptiens, qui prétendent que les astres, suivant qu'ils prennent une position élevée ou basse en parcourant leur orbite, ont une condition meilleure ou pire qu'ils ne l'avaient? Craignez-vous, pareillement, qu'autour de vous, en raison de la place où vous serez, il ne se produise obscurité ou dépression? Serez-vous moins résigné que certain Spartiate? A je ne sais quelle représentation il avait été placé au dernier rang par le maître des cérémonies' : «Voilà qui va bien», lui dit-il : «tu as trouvé moyen de rendre honorable ce lieu même. Quand nous avons pris une place nous ne devons pas chercher au-dessous de qui nous sommes installés, mais plutôt comment nous nous mettrons en bon accord avec nos voisins. A leur occasion nous ferons voir tout d'abord, ou plutôt nous l'éprouverons réellement, un désir d'initiative et de prise de possession en matière d'amitié, et nous manifesterons ce désir en nous félicitant, loin d'en montrer du dépit, de ce que l'on nous a placés en une telle compagnie. Mais celui qui se plaint du rang qu'on lui donne à table montre plus de mécontentement contre son commensal que contre son hôte, et il se rend odieux à l'un et à l'autre.»— «Paroles que tout cela,» dit Alexidème, «et paroles sans portée! Mais je vois que de fait, vous autres sages, vous recherchez aussi les honneurs.» En même temps il s'éloigna de nous et disparut. Une conduite si étrange nous semblait étonnante. «C'est», nous dit Thalès, «un homme écervelé et naturellement bizarre. Vous allez en juger. Il était encore tout jeune; on avait apporté à Thrasybule un parfum d'un très haut prix. Alexidème le versa dans un grand vase à rafraîchir, y mêla du vin pur, et avala le tout, rendant son père odieux au lieu de le faire aimer.» Au même moment parut un serviteur : «Vous êtes invité par Périandre», me dit-il, «à venir, en vous faisant accompagner de Thalès que voici, examiner l'objet qu'on lui a récemment apporté, afin que vous disiez si c'est une création toute fortuite, ou bien un présage et une monstruosité; car, pour ce qui est de Périandre, il a l'air grandement troublé, pensant que c'est une souillure et une profanation pour son sacrifice.» En même temps, il nous emmena vers une des salles qui donnaient sur le jardin. Là un jeune homme paraissant appartenir à la classe des bergers, qui n'avait pas encore de barbe et dont la physionomie ne manquait pas de noblesse, déploya une espèce de couverture en cuir, et nous montra un petit enfant né, disait-il, d'une cavale. Par le haut, jusqu'au cou et aux mains, cette créature était de forme humaine; mais le reste était d'un cheval, et sa voix avait quelque chose des vagissements poussés par les petits enfants qui viennent de naître. «Dieu préservateur!» s'écria Niloxène, et il détourna les yeux. Mais Thalès fixa longtemps son regard sur le jeune pâtre; puis s'étant mis à sourire, (car il avait l'habitude de plaisanter toujours avec moi sur ma profession) : «Eh bien, Dioclès,» dit-il, «songez-vous à préparer quelque expiation, et à donner de la besogne aux dieux préservateurs, comme vous trouvant en présence de quelque événement grave et considérable?»— «Pourquoi non?» répondis-je : «j'y vois le présage de troubles et de discordes qui s'étendront, j'en ai peur, jusqu'à un mariage et une génération avant que le courroux de la déesse ait été apaisé, puisqu'elle fait, vous le savez, une seconde manifestation". A ces paroles Thalès ne répondit rien : il se contenta de rire et de s'en aller. Et comme Périandre était à la porte, s'avançant pour nous interroger sur ce que nous venions de voir, Thalès me quitta et le prit par la main : "Ce que Dioclès prescrira, vous l'exécuterez à loisir », lui dit-il; «mais moi j'ai un conseil à vous donner: pour faire paître vos juments ne prenez pas de jeunes garçons, ou bien à ceux-ci donnez des femmes.» Ces paroles me semblèrent causer, des qu'il les eut entendues, une vive satisfaction à Périandre, car il éclata de rire et serra très affectueusement Thalès dans ses bras. Thalès alors : «Dioclès », me dit-il, «si je conjecture bien, le prodige reçoit déjà son accomplissement. Car vous voyez quel grand malheur nous est arrivé, Alexidème n'ayant pas voulu souper avec nous. »


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Dernière mise à jour : 10/05/2005