| [17]  Ἔτι δὲ τοῦ Σόλωνος λέγοντος εἰσῆλθε
 Γόργος ὁ Περιάνδρου ἀδελφός· ἐτύγχανε γὰρ εἰς
 Ταίναρον ἀπεσταλμένος ἔκ τινων χρησμῶν, τῷ
 Ποσειδῶνι θυσίαν καὶ θεωρίαν ἀπάγων. ἀσπασαμένων
 δ´ αὐτὸν ἡμῶν καὶ τοῦ Περιάνδρου προσαγαγομένου
 καὶ φιλήσαντος καθίσας παρ´ αὐτὸν ἐπὶ
 τῆς κλίνης ἀπήγγειλεν ἅττα δὴ πρὸς μόνον ἐκεῖνον,
 ὁ δ´ ἠκροᾶτο, πολλὰ πάσχοντι πρὸς τὸν λόγον
 ὅμοιος ὤν. τὰ μὲν γὰρ ἀχθόμενος τὰ δ´ ἀγανακτῶν
 ἐφαίνετο, πολλάκις δ´ ἀπιστῶν, εἶτα θαυμάζων·
 τέλος δὲ γελάσας πρὸς ἡμᾶς "βούλομαι μέν,"
 ἔφη, "πρὸς τὸ παρὸν φράσαι τὸ προσηγγελμένον·
 ὀκνῶ δ´ ἀκούσας Θαλέω ποτ´ εἰπόντος ὅτι δεῖ
 τὰ μὲν εἰκότα λέγειν, τὰ δ´ ἀμήχανα σιωπᾶν."
 Ὑπολαβὼν οὖν ὁ Βίας "ἀλλὰ καὶ τοῦτ´," ἔφη,
 "Θαλέω τὸ σοφόν ἐστιν, ὅτι δεῖ τοῖς μὲν ἐχθροῖς
 καὶ περὶ τῶν πιστῶν ἀπιστεῖν, τοῖς δὲ φίλοις καὶ
 τὰ ἄπιστα πιστεύειν, ἐχθροὺς μέν, ἔγωγ´ ἡγοῦμαι,
 τοὺς πονηροὺς καὶ ἀνοήτους, φίλους δὲ τοὺς
 χρηστοὺς καὶ φρονίμους αὐτοῦ καλοῦντος. οὐκοῦν,"
 ἔφη, "λεκτέον εἰς ἅπαντας, ὦ Γόργε, μᾶλλον δ´
 ἀκτέον ἐπὶ τοὺς νέους τούτους διθυράμβους ὑπερφθεγγόμενον
 ὃν ἥκεις λόγον ἡμῖν κομίζων."
 | [17] Solon parlait encore, que nous vîmes entrer Gorgias, 
le frère de Périandre ; car il se trouvait avoir été dépêché 
à Ténare, d'après certains oracles, pour un sacrifice et une 
cérémonie qu'il devait célébrer en l'honneur de Neptune. 
Nous autres nous le saluâmes ; mais Périandre, l'ayant fait 
approcher de lui et l'ayant embrassé, l'installa sur le lit à 
son côté. Gorgias lui dit quelques mots à lui seul, et Pé-
riandre l'écoutait avec l'air d'un homme touché de plu-
sieurs manières par les paroles qu'il entend. Le chagrin, 
l'indignation, souvent l'incrédulité, puis l'étonnement, se 
peignaient sur son visage. A la fin il s'adressa à nous en
éclatant de rire : «Je voudrais vous faire connaître, sans 
plus attendre', ce que Gorgias vient de me conter; et pour-
tant j'hésite, parce que j'ai autrefois entendu dire à Thalès 
qu'il faut dire les choses vraisemblables et taire les impos-
sibles. «Mais n, reprit Bias, «c'est à Thalès aussi 
qu'appartient cette sage parole : qu'il faut ne pas croire ses 
ennemis même sur les choses croyables, et croire ses amis 
même sur celles qui ne le sont pas : par ennemis il enten-
dait, je suppose, les méchants et les sots, par amis, les 
gens vertueux et sensés.»— «Eh bien, Gorgias», dit alors 
Périandre, «il faut faire ce récit à l'assemblée, ou plutôt 
monter ta voix au ton des nouveaux dithyrambes, et déclamer 
l'aventure que tu viens nous apprendre.»
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