[1000] (1000a) Ἔπειτα τοῦ κρίνειν ὄντος ὠφελίμου τὸ γεννᾶν ἐμπόδιόν ἐστι.
Τυφλοῦται γὰρ τὸ φιλοῦν περὶ τὸ φιλούμενον· φιλεῖται δὲ τῶν ἰδίων οὐδὲν
οὕτως ὡς δόξα καὶ λόγος ὑπὸ τοῦ τεκόντος. Ἡ γὰρ λεγομένη τέκνων δικαιοτάτη
διανομὴ πρὸς λόγους ἐστὶν ἀδικωτάτη· δεῖ γὰρ 6ἐκεῖ μὲν λαβεῖν τὸ ἴδιον,
ἐνταῦθα δέ, κἂν ἀλλότριον ᾖ, τὸ βέλτιστον. Ὅθεν ὁ γεννῶν ἴδια γίγνεται
φαυλότερος ἑτέρων κριτής. Καὶ καθάπερ Ἠλείους τῶν σοφῶν τις ἔφη βελτίους
ἂν εἶναι τῶν Ὀλυμπίων ἀγωνοθέτας, εἰ μηδὲ εἷς Ἠλείων ἦν ἀγωνιστής, οὕτως ὁ
μέλλων ἐν λόγοις ὀρθῶς ἐπιστατήσειν καὶ βραβεύσειν οὐ δίκαιός ἐστιν αὐτὸς
(1000b) φιλοστεφανεῖν οὐδ´ ἀνταγωνίζεσθαι τοῖς κρινομένοις. Καὶ γὰρ οἱ τῶν
Ἑλλήνων στρατηγοὶ τὴν περὶ τῶν ἀριστείων ψῆφον φέροντες αὑτοὺς ἀρίστους
ἔκριναν ἅπαντες· καὶ τῶν φιλοσόφων οὐδεὶς ἔστιν, ὃς οὐ τοῦτο πέπονθε δίχα
τῶν ὥσπερ Σωκράτης ὁμολογούντων μηδὲν ἴδιον λέγειν· οὗτοι δὲ καθαροὺς
μόνοι καὶ ἀδεκάστους τῆς ἀληθείας παρέχουσιν ἑαυτοὺς δικαστάς. Ὥσπερ γὰρ ὁ
ἐν τοῖς ὠσὶν ἀήρ, ἂν μὴ σταθερὸς ᾖ μηδὲ φωνῆς ἰδίας ἔρημος ἀλλ´ ἤχου καὶ
ῥοίζου μεστός, οὐκ ἀκριβῶς ἀντιλαμβάνεται τῶν φθεγγομένων, οὕτω τὸ τοὺς
λόγους ἐν φιλοσοφίᾳ (1000c) κρῖνον, ἂν ἔνδοθεν ἀντιπαταγῇ τι καὶ ἀντηχῇ,
δυσξύνετον ἔσται τῶν λεγομένων ἔξωθεν. Ἡ γὰρ οἰκεία δόξα καὶ σύνοικος οὐ
προσδέξεται τὸ διαφωνοῦν πρὸς αὑτήν, ὡς μαρτυρεῖ τῶν αἱρέσεων τὸ πλῆθος,
ὧν, ἂν ἄριστα πράττῃ φιλοσοφία, μίαν ἔχει κατορθοῦσαν, οἰομένας δὲ τὰς
ἄλλας ἁπάσας καὶ μαχομένας πρὸς τὴν ἀλήθειαν.
Ἔτι τοίνυν, εἰ μὲν οὐδέν ἐστι καταληπτὸν ἀνθρώπῳ καὶ γνωστόν, εἰκότως ὁ
θεὸς ἀπεκώλυσεν αὐτὸν ὑπηνέμια καὶ ψευδῆ καὶ ἀβέβαια γεννᾶν, ἐλέγχειν δὲ
τοὺς ἄλλους ἠνάγκαζε τοιαῦτα δοξάζοντας. Οὐ γὰρ μικρὸν ἦν ὄφελος ἀλλὰ
μέγιστον ὁ τοῦ μεγίστου τῶν κακῶν, ἀπάτης καὶ κενοφροσύνης, ἀπαλλάττων
λόγος «Οὐδ´ Ἀσκληπιάδαις τοῦτό γ´ ἔδωκε θεός.»
(1000d) Οὐ γὰρ σώματος ἡ Σωκράτους ἰατρεία, ψυχῆς δ´ ἦν ὑπούλου καὶ
διεφθαρμένης καθαρμός.
Εἰ δ´ ἔστιν ἐπιστήμη τοῦ ἀληθοῦς ἓν δὲ τὸ ἀληθές, οὐκ ἔλαττον ἔχει τοῦ
εὑρόντος ὁ μαθὼν παρὰ τοῦ εὑρόντος· λαμβάνει δὲ μᾶλλον ὁ μὴ πεπεισμένος
ἔχειν, καὶ λαμβάνει τὸ βέλτιστον ἐξ ἁπάντων, ὥσπερ ὁ μὴ τεκὼν παῖδα
ποιεῖται τὸν ἄριστον.
Ὅρα δὲ μὴ τἄλλα μὲν οὐδεμιᾶς ἦν ἄξια σπουδῆς ποιήματα καὶ μαθήματα καὶ
λόγοι ῥητόρων καὶ δόγματα σοφιστῶν, ἃ Σωκράτην γεννᾶν τὸ δαιμόνιον
ἀπεκώλυσεν· ἣν δὲ μόνην ἡγεῖτο Σωκράτης σοφίαν τὴν περὶ τὸ θεῖον καὶ
νοητόν, ἐρωτικὴν ὑπ´ αὐτοῦ προσαγορευομένην, ταύτης (1000e) οὐ γένεσις
ἔστιν ἀνθρώποις οὐδ´ εὕρεσις ἀλλ´ ἀνάμνησις. Ὅθεν οὐδὲν ἐδίδασκε Σωκράτης,
ἀλλ´ ἐνδιδοὺς ἀρχὰς ἀποριῶν ὥσπερ ὠδίνων τοῖς νέοις ἐπήγειρε καὶ ἀνεκίνει
καὶ συνεξῆγε τὰς ἐμφύτους νοήσεις· καὶ τοῦτο μαιωτικὴν τέχνην ὠνόμαζεν,
οὐκ ἐντιθεῖσαν ἔξωθεν, ὥσπερ ἕτεροι προσεποιοῦντο, νοῦν τοῖς
ἐντυγχάνουσιν, ἀλλ´ ἔχοντας οἰκεῖον ἐν ἑαυτοῖς ἀτελῆ δὲ καὶ συγκεχυμένον
καὶ δεόμενον τοῦ τρέφοντος καὶ βεβαιοῦντος ἐπιδεικνύουσαν.
ΖΗΤΗΜΑ Βʹ.
Τί δήποτε τὸν ἀνωτάτω θεὸν πατέρα τῶν πάντων καὶ ποιητὴν προσεῖπεν;
Πότερον ὅτι τῶν μὲν θεῶν τῶν γεννητῶν καὶ τῶν ἀνθρώπων πατήρ ἐστιν,
(1000f) ὡς Ὅμηρος ἐπονομάζει, ποιητὴς δὲ τῶν ἀλόγων καὶ ἀψύχων; Οὐδὲ γὰρ
χορίου φησὶ Χρύσιππος πατέρα καλεῖσθαι τὸν παρασχόντα τὸ σπέρμα, καίπερ ἐκ
τοῦ σπέρματος γεγονότος. Ἢ τῇ μεταφορᾷ χρώμενος, ὥσπερ εἴωθε, τὸν αἴτιον
πατέρα τοῦ κόσμου κέκληκεν; Ὡς τῶν ἐρωτικῶν λόγων «πατέρα» Φαῖδρον ἐν
Συμποσίῳ προσεῖπεν, εἰσηγητὴν αὐτῶν γενόμενον·
| [1000] (1000a) Le jugement est une faculté très utile,
mais elle se nuit à elle-même en voulant établir ses propres opinions. L'amitié nous
aveugle sur les objets que nous aimons, et rien ne nous est aussi cher que nos
opinions et nos pensées. Le partage qui, par rapport aux enfants d'une même famille,
est plein de justice, devient souverainement injuste dans les opinions. Là, chacun doit
prendre le sien ; ici, il faut choisir ce qu'il y a de meilleur, quoiqu'il appartienne à autrui
: celui donc qui produit ses opinions particulières devient plus mauvais juge de celles
des autres.
Un sophiste disait que les Éléens décerneraient avec plus de justice les prix des
jeux olympiques si aucun Éléen n'y était admis. De même celui qui veut prononcer
équitablement entre plusieurs opinions ne doit pas lui-même (1000b) aspirer à la
victoire ni disputer avec les contendants. Les généraux grecs s'étant assemblés, après
la défaite des Perses, pour décerner le prix de la valeur, chacun se l'adjugea à soi-même.
Il n'est aucun philosophe qui n'en fit autant, excepté ceux qui, comme Socrate,
font profession de ne rien dire d'eux-mêmes. Ce sont les seuls qui se montrent des
juges purs et incorruptibles de la vérité. Si l'air contenu dans la capacité de l'oreille
n'est pas parfaitement tranquille et qu'il éprouve de l'agitation, il ne transmet pas
exactement à notre organe les discours dont il est le canal. Il en est de même de
l'esprit quand il juge des opinions philosophiques; (1000c) s'il en a de personnelles qui
retentissent fortement au dedans de lui-même, il aura de la peine à saisir ce qu'on lui
dira du dehors. Son opinion particulière et, pour ainsi dire, domestique, quel qu'en soit
l'objet, lui paraîtra toujours la plus philosophique, la plus vraie; toutes les autres ne
seront au plus que vraisemblables. S'il est vrai d'ailleurs que l'homme ne puisse rien
comprendre ni rien savoir parfaitement, c'était avec raison que Dieu défendait à
Socrate de produire de ces faux germes d'opinions incertaines et mensongères, et
qu'il l'obligeait à réfuter et à convaincre ceux qui en avaient de semblables. Le pouvoir
de guérir les hommes des plus grands de leurs maux, l'erreur et l'illusion, était le
présent le plus utile que Dieu pût lui faire.
Il n'a pas fait ce don aux enfants d'Esculape.
(1000d) car Socrate se proposait, non de guérir les maladies
du corps, mais de purifier de leurs vices secrets les âmes corrompues.
S'il est une science de la vérité, comme la vérité est une, l'homme qui l'apprend
de celui qui l'a trouvée ne la possède pas moins que son inventeur. Mais celui qui ne
croit pas l'avoir n'en parvient que plus sûrement à sa possession, parce qu'il choisit ce
qu'il y a de mieux, comme celui qui n'a pu avoir des enfants adopte le meilleur de ceux
qu'il connaît. La poésie, les mathématiques, l'éloquence, les opinions des sophistes et
toutes les autres connaissances semblables méritaient sans doute que Socrate s'y
appliquât ; cependant la Divinité lui défendit de rien produire en ce genre. Mais la
science que Socrate regardait seule comme la véritable sagesse, celle qui se propose
la connaissance de Dieu et des choses intelligibles, et qui, selon lui, est l'objet de notre
amour, (1000e) ce ne sont pas les hommes qui la produisent ou qui l'inventent : elle
n'est en eux qu'un ressouvenir. Voilà pourquoi Socrate n'enseignait rien, et qu'il
suggérait seulement aux jeunes gens des commencements de doute qui, étant pour
eux comme les premières douleurs de l'enfantement, réveillaient, excitaient et
mettaient en mouvement les connaissances qu'ils avaient reçues de la nature. C'était
là ce qu'il appelait l'art de faire accoucher les pensées, art qui n'apportait pas du
dehors l'intelligence à ses auditeurs, comme les autres philosophes se vantaient de le
faire, mais qui leur découvrait celle qu'ils avaient naturellement en eux-mêmes,
laquelle, confuse et imparfaite, avait besoin d'être développée par l'instruction.
QUESTION II.
Pourquoi Platon a-t-il appelé le souverain Dieu Père et Créateur de toutes choses ?
Entend-il qu'il est, suivant l'expression d'Homère, le père des dieux engendrés
(1000f) et des hommes, et le créateur des êtres
inanimés et privés de raison? car, selon Chrysippe, on n'appelle pas proprement le
père d'un champ celui qui l'a ensemencé, quoique les fruits naissent de la semence.
Ou Platon, suivant son usage, a-t-il, par figure, appelé Père du monde celui qui en est
la cause efficiente, comme dans son Banquet il nomme Phèdre le père des propos
amoureux parce que c'était lui qui les avait mis le premier en avant,
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