[5,6] ΠΡΟΒΛΗΜΑ
Τίς αἰτία τῆς ἐν ἀρχῇ στενοχωρίας τῶν δειπνούντων εἶθ´
ὕστερον εὐρυχωρίας.
Ῥηθέντων δὲ τούτων, εὐθὺς ἐζητεῖτο περὶ τῆς ἐν
ἀρχῇ στενοχωρίας τῶν κατακειμένων εἶτ´ ἀνέσεως· οὗ
τοὐναντίον εἰκὸς ἦν συμβαίνειν διὰ τὴν ἐπὶ τοῦ δείπνου
πλήρωσιν. ἔνιοι μὲν οὖν ἡμῶν τὸ σχῆμα τῆς κατακλίσεως
ᾐτιῶντο· πλατεῖς γὰρ ὡς ἐπίπαν κατακειμένους δειπνεῖν,
ἅτε δὴ τὴν δεξιὰν προτείνοντας ἐπὶ τὰς τραπέζας· δειπνήσαντας
δ´ ἀναστρέφειν αὑτοὺς μᾶλλον ἐπὶ πλευράν, ὀξὺ
τὸ σχῆμα ποιοῦντας τοῦ σώματος καὶ οὐκέθ´ ὡς εἰπεῖν
κατ´ ἐπίπεδον, ἀλλὰ κατὰ γραμμὴν τῆς χώρας ἁπτομένους·
| ὥσπερ οὖν οἱ ἀστράγαλοι τόπον ἐλάττω κατέχουσιν
ὀρθοὶ πίπτοντες ἢ πρημεῖς, οὕτως ἡμῶν ἕκαστον
ἐν ἀρχῇ μὲν ἐπὶ στόμα προνεύειν ἀποβλέποντα πρὸς τὴν
τράπεζαν ὕστερον δὲ μετασχηματίζειν ἐπὶ βάθος ἐκ
πλάτους τὴν κατάκλισιν. οἱ δὲ πολλοὶ τὴν συνένδοσιν
τῆς στρωμνῆς προεφέροντο· θλιβομένην γὰρ ἐν τῇ κατακλίσει
πλατύνεσθαι καὶ διαχωρεῖν, ὥσπερ τῶν ὑποδημάτων
τὰ τριβόμενα, κατὰ μικρὸν ἐπιδιδόντα καὶ χαλῶντα
τοῖς πόροις, εὐρυχωρίαν τῷ ποδὶ καὶ ἀναστροφὴν παρέχει.
ὁ δὲ πρεσβύτης ἅμα παίζων δύ´ ἔφη τὸ αὐτὸ συμπόσιον
ἀνομοίους ἔχειν ἐπιστάτας τε καὶ ἡγεμόνας, ἐν ἀρχῇ
μὲν τὸν λιμὸν ᾧ τῶν τακτικῶν οὐδὲν μέτεστιν, ὕστερον
δὲ τὸν Διόνυσον ὃν πάντες ἄριστον γεγονέναι στρατηγὸν
ὁμολογοῦσιν· ὥσπερ οὖν ὁ Ἐπαμεινώνδας, εἴς τινα δυσχωρίαν
τῶν στρατηγῶν ὑπ´ ἀπειρίας εἰσβαλλόντων τὴν φάλαγγα
περιπίπτουσαν ἑαυτῇ καὶ ταρασσομένην ὑπολαβών,
ἐξέλυσε καὶ κατέστησεν εἰς τάξιν, οὕτως ἡμᾶς ἐν ἀρχῇ
συμπεφορημένους ὑπὸ τοῦ λιμοῦ κυνηδὸν ἄρτι παραλαμβάνων
ὁ Λυαῖος θεὸς καὶ Χορεῖος εἰς τάξιν ἱλαρὰν
καὶ φιλάνθρωπον καθίστησιν.
| [5,6] QUESTION VI.
Pourquoi au commencement du souper les convives sont serrés
à table, et pourquoi à la fin ils s'y trouvent au large.
PERSONNAGES DU DIALOGUE :
PLUTARQUE - LAMPRIAS L'AÏEUL - AUTRES ASSISTANTS.
1. Ces propos achevés, on chercha aussitôt pourquoi au
commencement du repas les convives ont peu de place, et
pourquoi ensuite ils sont à l'aise : tandis qu'il semble que
ce serait le contraire qui dût arriver , en raison de ce
que l'on s'est rempli de nourriture au souper. Cela était
attribué par quelques-uns d'entre nous à la manière dont
on se place à table. En soupant on est couché à peu près
à plat, vu que l'on étend la main droite sur la table. Mais
quand on a soupé, on se retourne de préférence sur le flanc,
on allonge en pointe la forme de son corps; et ce n'est plus
une surface, c'est une ligne que l'on occupe. Ainsi, de même
que les osselets tiennent moins d'espace tombant droit que
tombant à plat, de même chaque convive, disait-on, se penche
sur le devant au commencement du repas parce que ses
regards se dirigent vers la table; mais plus tard il change de
position, et regagne en hauteur ce qu'il occupait d'abord en largeur.
Le plus grand nombre donnaient pour raison l'élasticité
du lit, devenu, par la pression de celui qui s'y est couché,
plus plat et plus spacieux. Comme il arrive pour les chaussures
quand elles s'usent: peu à peu elles se relâchent, s'élargissent
par la marche, et permettent au pied d'y loger à l'aise
et de se retourner. Mais notre vieillard, qui voulait en même
temps plaisanter, ajouta que dans tout festin se trouvent à
la fois deux présidents et deux chefs bien différents l'un de
l'autre. Au début c'est l'appétit, lequel ne sait pas ce que
c'est que garder de l'ordre ; plus tard c'est Bacchus, lequel
tout le monde s'accorde à reconnaître pour un excellent général
d'armée. Mon aïeul continua en nous citant l'exemple
d'Épaminondas. Les autres généraux thébains ayant, par
leur impéritie, jeté la phalange dans une position étroite, où
elle se heurtait et s'embarrassait elle-même, Epaminondas
n'en eut pas plus tôt pris la conduite, qu'il la dégagea et
la remit en bon ordre. « De même, dit Lamprias, au commencement
nous nous pressons les uns contre les autres,
semblables à une meute affamée; mais bientôt, prenant la
direction de notre troupe, le Dieu qui délie les âmes, le
Dieu qui préside aux choeurs de danse, rétablit parmi nous
un ordre où l'aisance se joint à la gaieté."
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