[5,5] ΠΡΟΒΛΗΜΑ Ε
Περὶ τῶν πολλοὺς ἐπὶ δεῖπνον καλούντων.
Τὸ περὶ τὰς κατακλίσεις φαινόμενον ἄτοπον πλείονα
λόγον παρέσχεν ἐν ταῖς ὑποδοχαῖς, ἃς ἐποιεῖτο τῶν φίλων
ἕκαστος ἑστιῶν ἡμᾶς ἥκοντας ἀπὸ τῆς Ἀλεξανδρείας·
ἐκαλοῦντο γὰρ ἀεὶ πολλοὶ τῶν ὁπωσοῦν προσήκειν δοκούντων,
καὶ τὰ συμπόσια θορυβώδεις εἶχε τὰς συμπεριφορὰς
καὶ τὰς διαλύσεις ταχείας. ἐπειδὴ δ´ Ὀνησικράτης
ὁ ἰατρὸς οὐ πολλοὺς ἀλλὰ τοὺς σφόδρα συνήθεις καὶ
οἰκειοτάτους παρέλαβεν ἐπὶ τὸ δεῖπνον, ἐφάνη μοι τὸ
λεγόμενον ὑπὸ Πλάτωνος ’αὐξομένην
πόλιν πόλεις οὐ πόλιν‘ συμποσίω δεδόσθαι . ’καὶ
γὰρ συμποσίου μέγεθος ἱκανόν ἐστιν, ἄχρι οὗ συμπόσιον
ἐθέλει μένειν· ἐὰν δ´ ὑπερβάλῃ διὰ πλῆθος, ὡς μηκέτι
προσήγορον ἑαυτῷ μηδὲ συμπαθὲς εἶναι ταῖς φιλοφροσύναις
μηδὲ γνώριμον, οὐδὲ συμπόσιόν ἐστι. δεῖ γὰρ οὐχ
ὥσπερ ἐν στρατοπέδῳ διαγγέλοις οὐδ´ ὥσπερ ἐν τριήρει
χρῆσθαι κελευσταῖς, αὐτοὺς δὲ δι´ ἑαυτῶν ἐντυγχάνειν
ἀλλήλοις, ὥσπερ χοροῦ τοῦ συμποσίου τὸν κρασπεδίτην
τῷ κορυφαίῳ συνήκοον ἔχοντος.‘
Ἐμοῦ δὲ ταῦτ´ εἰπόντος, εἰς μέσον ἤδη φθεγξάμενος
ὁ πάππος ἡμῶν Λαμπρίας ’ἆρ´ οὖν‘ εἶπεν ’οὐ περὶ τὰ
δεῖπνα μόνον, ἀλλὰ καὶ περὶ τὰς κλήσεις δεόμεθα τῆς
ἐγκρατείας; ἔστι γάρ τις οἶμαι καὶ φιλανθρωπίας ἀκρασία,
μηδένα παρερχομένης τῶν συμποτῶν ἀλλὰ πάντας
ἑλκούσης ὡς ἐπὶ θέαν ἢ ἀκρόασιν. ἔμοιγ´ οὖν οὔτ´ ἄρτος
οὔτ´ οἶνος ἐπιλείπων τοῖς κεκλημένοις οὕτω δοκεῖ τὸν
κεκληκότα ποιεῖν γελοῖον, ὡς χώρα καὶ τόπος· ὧν καὶ
μὴ κεκλημένοις ἀλλ´ ἐπελθοῦσιν αὐτομάτως ξένοις καὶ
ἀλλοτρίοις ἀεὶ παρεσκευασμένην ἀφθονίαν ὑπάρχειν δεῖ.
ἔτι δ´ ἄρτου μὲν καὶ οἴνου ἐπιλειπόντων ἔστι καὶ τοὺς
οἰκέτας ὡς κλέπτοντας αἰτιᾶσθαι, τόπου δὲ πενία καὶ
κατανάλωσις εἰς πλῆθος ὀλιγωρία τίς ἐστι τοῦ καλοῦντος.
εὐδοκιμεῖ δὲ θαυμαστῶς καὶ Ἡσίοδος εἰπών
‘ἤτοι μὲν πρώτιστα χάος γένετ´·’ χώραν γὰρ ἔδει καὶ
τόπον προϋποκεῖσθαι τοῖς γινομένοις, | οὐχ ὡς χθὲς
οὑμὸς υἱός‘ ἔφη ’τὸ Ἀναξαγόρειον ‘ἦν ὁμοῦ πάντα
χρήματα’ τὸ σύνδειπνον ἐποίησεν. οὐ μὴν ἀλλὰ κἂν
τόπος ὑπάρχῃ καὶ παρασκευή, τὸ πλῆθος αὐτὸ φυλακτέον
ὡς ἄμικτον τὴν συνουσίαν ποιοῦν καὶ ἀπροσήγορον· οἴνου
γὰρ ἀνελεῖν ἧττόν ἐστι κακὸν ἢ λόγου κοινωνίαν ἐκ δείπνου·
διὸ καὶ Θεόφραστος ἄοινα συμπόσια
παίζων ἐκάλει τὰ κουρεῖα διὰ τὴν λαλιὰν τῶν προσκαθιζόντων.
λόγων δὲ κοινωνίαν ἀναιροῦσιν οἱ πολλοὺς εἰς
ταὐτὸ συμφοροῦντες, μᾶλλον δ´ ὀλίγους ποιοῦσιν ἀλλήλοις
συνεῖναι· {καὶ} κατὰ δύο γὰρ ἢ τρεῖς ἀπολαμβάνοντες
ἐντυγχάνουσι καὶ προσδιαλέγονται, τοὺς δὲ πόρρω κατακειμένους
οὐδ´ ἴσασιν οὐδὲ προσορῶσιν ἵππου δρόμον
ἀπέχοντας
‘ἠμὲν ἐπ´ Αἴαντος κλισίας Τελαμωνιάδαο
ἠδ´ ἐπ´ Ἀχιλλῆος.’
ὅθεν οὐκ ὀρθῶς οἱ πλούσιοι νεανιεύονται κατασκευάζοντες
οἴκους τριακοντακλίνους καὶ μείζους· ἀμίκτων
γὰρ αὕτη καὶ ἀφίλων δείπνων ἡ παρασκευὴ καὶ πανηγυριάρχου
μᾶλλον ἢ συμποσιάρχου δεομένων. ἀλλ´
ἐκείνοις μὲν ταῦτα συγγνώμη ποιεῖν· ἄπλουτον γὰρ οἴονται
τὸν πλοῦτον καὶ τυφλὸν ἀληθῶς καὶ ἀνέξοδον, ἂν μὴ
μάρτυρας ἔχῃ καὶ καθάπερ τραγῳδία θεατάς· ἡμῖν δ´
ἂν ἴαμα γένοιτο τοῦ πολλοὺς ὁμοῦ συνάγειν τὸ πολλάκις
κατ´ ὀλίγους παραλαμβάνειν. οἱ γὰρ σπανίως καὶ ‘δι´
Ἅρματος’ ὥς φασιν ἑστιῶντες ἀναγκάζονται τὸν ὁπωσοῦν
ἐπιτήδειον ἢ γνώριμον καταγράφειν· οἱ δὲ συνεχέστερον
κατὰ τρεῖς ἢ τέτταρας ἀναλαμβάνοντες ὥσπερ
πορθμεῖα τὰ συμπόσια κουφότερα ποιοῦσι. ποιεῖ δέ
τινα τοῦ πολλοῦ τῶν φίλων πλήθους διάκρισιν καὶ ὁ τῆς
αἰτίας διηνεκὴς ἐπιλογισμός· ὡς γὰρ ἐπὶ τὰς χρείας οὐ
πάντας ἀλλὰ τοὺς ἁρμόττοντας ἑκάστῃ παρακαλοῦμεν,
βουλευόμενοι μὲν τοὺς φρονίμους δικαζόμενοι δὲ τοὺς
λέγοντας ἀποδημοῦντες δὲ τοὺς ἐλαφροὺς μάλιστα τοῖς
βιωτικοῖς καὶ σχολὴν ἄγοντας, οὕτως ἐν ταῖς ὑποδοχαῖς
ἑκάστοτε τοὺς ἐπιτηδείους παραληπτέον. ἐπιτήδειοι δὲ τῷ
μὲν ἡγεμόνα δειπνίζοντι συνδειπνεῖν οἵ τ´ ἄρχοντες, ἐὰν
ὦσι φίλοι, καὶ οἱ πρῶτοι τῆς πόλεως· ἐν δὲ γάμοις ἢ {καὶ}
γενεθλίοις οἱ κατὰ γένος προσήκοντες καὶ Διὸς ὁμογνίου
κοινωνοῦντες· ἐν δὲ ταῖς τοιαύταις ὑποδοχαῖς ἢ προπομπαῖς
τοὺς ἐκείνοις μάλιστα κεχαρισμένους εἰς ταὐτὸ
συνακτέον. οὐδὲ γὰρ θεῷ θύοντες πᾶσι τοῖς ἄλλοις θεοῖς,
ἀλλὰ μάλιστα {καὶ} συννάοις καὶ συμβώμοις κατευχόμεθα,
καὶ τριῶν κρατήρων κιρναμένων τοῖς μὲν ἀπὸ τοῦ
πρώτου σπένδομεν τοῖς δ´ ἀπὸ τοῦ δευτέρου τοῖς δ´ ἀπὸ
τοῦ τελευταίου· ‘φθόνος γὰρ ἔξω θείου χοροῦ ἵσταται’·
θεῖος δέ που καὶ ὁ τῶν φίλων
χορὸς εὐγνωμόνως διανεμόμενος ἐν ταῖς συμπεριφοραῖς.‘
| [5,5] QUESTION V.
Sur ceux qui invitent beaucoup de convives à souper.
PERSONNAGES DU DIALOGUE :
ONÉSICRATE - PLUTARQUE - LAMPRIAS, AÏEUL DE PLUTARQUE.
1. L'abus évident des invitations devint le texte de plus
d'un entretien, à propos des repas donnés par chacun de
ceux qui m'aimaient quand ils me firent fête à mon retour
d'Alexandrie. Ils invitaient successivement un grand nombre
de ceux qu'ils croyaient attachés à moi par un lien quelconque;
et ces repas n'étaient que des réunions de table
tout à fait tumultueuses, d'où l'on se retirait très promptement.
Or un jour que le médecin Onésicrate, au lieu de
réunir beaucoup de convives, n'avait invité à sa table que
mes amis les plus intimes et les plus familiers, je me rappelai
le mot de Platon à propos d'une ville qui va s'augmentant,
et je le trouvai parfaitement applicable à la circonstance.
Il y a, en effet, un certain développement du festin,
jusqu'où il consent à rester festin; mais si on dépasse cette
mesure par le grand nombre des convives, il n'y a plus
moyen de maintenir un échange de propos, de sympathies,
et de sentiments de bienveillance. On ne se connaît pas : ce
n'est plus un festin. Sera-t-on, à table, obligé de communiquer
entre soi par l'entremise de messagers, comme dans
un camp, ou par des porte-voix, comme sur une galère ? Non.
Il faut deviser personnellement les uns avec les autres ; et
le repas doit ressembler à un choeur dans lequel le dernier
personnage peut s'entendre avec celui qui est à la tête.
2. Quand j'eus exprimé cette opinion, mon aïeul Lamprias
prit à son tour la parole au milieu des convives:
« C'est qu'en effet, dit-il, ce n'est pas dans le festin seulement,
mais aussi dans les invitations que l'on doit faire
preuve de réserve. Il y a, ce me semble, même en fait de
courtoisie et de bon vouloir, une sorte d'intempérance qui
consiste à n'omettre aucun de ceux que l'on a une fois invités,
et à les attirer tous de force, comme s'il s'agissait d'un spectacle
ou d'un concert. Pour moi, ni le pain, ni le vin venant
à manquer aux invités ne me sembleraient jeter autant de
ridicule sur un maître de maison, que le trop peu d'espace
et de place. A cet égard, non seulement pour les invités,
mais encore pour ceux qui se présentent d'eux-mêmes,
pour les hôtes, les étrangers, il faut qu'il y ait toujours des
places en abondance. J'ajouterai même, que si le pain et le
vin font défaut, il y a moyen de rejeter le blâme sur les
esclaves en disant qu'ils l'ont dérobé. Mais là où l'emplacement
est trop exigu et se trouve obstrué par le grand
nombre des convives, il y a mépris de la part du maître de
maison. Je trouve merveilleusement dites ces, paroles d'Hésiode :
"Dans le principe, tout n'était qu'un grand chaos".
Car il fallait bien qu'antérieurement à tout il y eût de la
place et de l'espace pour les oeuvres de la Création. Ce n'était
pas, ajouta Lamprias, comme hier, lorsque mon fils
dans le souper qu'il donna, réalisait le mot d'Anaxagore :
« Tout était confondu pêle-mêle. »
D'ailleurs, y eût-il même assez de place et assez de
provisions, il faudrait encore éviter le grand nombre :
parce qu'il produit une réunion où l'on ne peut ni se reconnaître
ni deviser ensemble. Or, ce serait un moindre
mal de supprimer la communauté du vin dans un repas,
que la communauté des entretiens. C'est en ce sens que
Théophraste, par plaisanterie, donnait le nom de « banquets
sans vin » aux boutiques de barbiers : faisant allusion
aux bavardages de ceux qui s'y installent les uns à côté
des autres. C'est supprimer la communauté d'entretiens,
que d'entasser beaucoup de convives en un même endroit;
ou plutôt, c'est vouloir que la réunion se restreigne à un
petit nombre. On se prend à l'écart, deux par deux ou trois
par trois, pour se rapprocher et parler en tête-à-tête. Quant
aux personnes loin placées, on ne sait pas qu'elles sont là;
on ne les voit pas, séparé qu'on est d'elles d'une course de cheval.
"L'un campe près d'Ajax, et l'autre près d'Achille."
Aussi, n'y a-t-il que sottise et irréflexion chez les riches
qui bâtissent des salles à contenir trente lits et davantage.
C'est disposer là des festins contraires à toute fusion, à toute
amitié, des festins où il faudrait des officiers de police plutôt
qu'un président de table. Il y a lieu, toutefois, de leur
pardonner d'agir ainsi. Car ils se figurent que la richesse
ne serait pas de la richesse, qu'elle serait véritablement
condamnée aux ténèbres et claquemurée si elle ne se déployait
pas, comme une tragédie, devant de nombreux té-.
moins qui lui constituent des spectateurs.
« Selon nous, le remède à l'inconvénient d'assembler
trop de gens à la fois serait d'en recevoir à plusieurs
reprises un petit nombre. Car ceux qui donnent à souper
rarement, et, comme qui dirait, par un suprême effort,
sont obligés d'inscrire sur leur liste tout ce qu'ils
ont d'amis et connaissances. Mais quand on invite plus
fréquemment trois ou quatre personnes ensemble, on rend
ses festins semblables aux petites barques qui servent à
alléger les grands bateaux. Il est encore un moyen de déterminer
ses choix parmi une foule considérable d'amis : c'est
de se rendre assidûment compte des motifs d'invitation.
Car, de même que pour les affaires nous n'appelons pas
tout le monde à nous, mais ceux qui s'entendent mieux ä
telle ou telle : que s'il s'agit d'un conseil, nous nous adressons
aux prudents; d'un procès, aux personnes discrètes;
d'un voyage en pays étranger, à ceux qui sont les moins
embarrassés par leur régime de vie et qui ont le plus de
loisirs : de même, à notre table nous devons inviter ceux
qui s'ajustent en quelque sorte le mieux à la circonstance.
Traite-t-on un grand personnage; ceux qu'il conviendra
de faire souper avec lui, ce seront les magistrats et les
premiers de la ville, s'il se trouve qu'ils soient ses amis.
Dans un festin de noces ou d'anniversaires de naissance,
ce seront les parents et ceux qui seront unis par les liens
de famille. Mais dans ces sortes de réceptions et de galas
il faut toujours avoir soin de mettre ensemble ceux qui
devront être les plus agréables les uns aux autres. Lorsque
nous sacrifions à un dieu, ce n'est pas à dire que nous
invoquions tous les autres, ni, d'une manière spéciale,
les dieux qui sont avec lui dans le même temple et sur le
même autel. Non : après avoir préparé le breuvage de trois
coupes, nous offrons aux uns les libations de la première,
aux autres celles de la seconde, aux autres celles de la dernière.
En effet, l'envie ne saurait trouver sa place dans un
choeur de dieux. Or c'est aussi en quelque sorte un chœur
de dieux qu'une réunion d'amis, quand on sait les grouper
avec une intelligente bienveillance autour des tables où les
mets leur sont distribués.
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