[3,9] ΠΡΟΒΛΗΜΑ Θ
Περὶ τοῦ ‘ἢ πέντε πίνειν ἢ τρί´ ἢ μὴ τέσσαρα’.
Ἐμοῦ δὲ ταῦτ´ εἰπόντος, Ἀριστίων ἀναβοήσας
ὥσπερ εἰώθει ‘πέφανται’ εἶπεν ‘εἰς τὰ συμπόσια τῷ δικαιοτάτῳ
καὶ δημοκρατικωτάτῳ τῶν μέτρων κάθοδος, ὑπὸ
δή τινος καιροῦ νήφοντος ὥσπερ τυράννου πεφυγαδευμένῳ
πολὺν χρόνον. καθάπερ γὰρ οἱ περὶ λύραν κανονικοὶ
τῶν λόγων φασὶ τὸν μὲν ἡμιόλιον τὴν διὰ πέντε συμφωνίαν
παρασχεῖν, τὸν δὲ διπλάσιον τὴν διὰ πασῶν, τὴν δὲ
διὰ τεσσάρων ἀμυδροτάτην οὖσαν ἐν ἐπιτρίτῳ συνίστασθαι,
οὕτως οἱ περὶ τὸν Διόνυσον ἁρμονικοὶ τρεῖς κατεῖδον
οἴνου συμφωνίας πρὸς ὕδωρ, διὰ πέντε καὶ διὰ τριῶν καὶ διὰ
τεσσάρων, οὕτω μὲν λέγοντες καὶ ᾄδοντες
’ἢ πέντε πίνειν ἢ τρί´ ἢ μὴ τέσσαρα.‘
πέντε γὰρ - - - ἐν ἡμιολίῳ λόγῳ, τριῶν ὕδατος κεραννυμένων
{οὐ} πρὸς δύ´ οἴνου· τρία δ´ ἐν διπλασίῳ πρὸς
ἕνα μιγνυμένων δυεῖν· τέσσαρα δ´, εἰς ἕνα τριῶν ὕδατος
ἐπιχεομένων, οὗτός ἐστιν ἐπίτριτος λόγος, ἀρχόντων
τινῶν ἐν πρυτανείῳ νοῦν ἐχόντων ἢ διαλεκτικῶν τὰς ὀφρῦς
ἀνεσπακότων, ὅταν τὰς μεταπτώσεις τῶν λόγων ἀνασκοπῶσι,
νηφάλιος καὶ ἀδρανὴς κρᾶσις. ἐκείνων δὲ τῶν
ἄλλων ἡ μὲν δυεῖν πρὸς ἕνα τὸν ταρακτικὸν τοῦτον καὶ
ἀκροθώρακα τῆς μέθης ἐπάγει τόνον
’κινοῦντα χορδὰς τὰς ἀκινήτους φρενῶν·‘
οὔτε γὰρ ἐᾷ νήφειν οὔτε καταδύει παντάπασι τὸν ἀνόητον
εἰς τὸν ἄκρατον· ἡ δὲ δυεῖν πρὸς τρία μουσικωτάτη, πᾶς´
ὑπνοφόρος καὶ λαθικηδὴς καὶ κατὰ τὴν Ἡσιόδειον ἐκείνην
’ἀλεξιάρην παίδων εὐκηλήτειραν‘ τῶν ἐν
ἡμῖν ἀγερώχων καὶ ἀκόσμων παθῶν διὰ βάθους ποιοῦσα
γαλήνην καὶ ἡσυχίαν.’
Πρὸς ταῦτα τῷ Ἀριστίωνι ἀντεῖπε μὲν οὐθείς· δῆλος
γὰρ ἦν παίζων· ἐγὼ δ´ ἐκέλευσα λαβόντα ποτήριον
ὥσπερ λύραν ἐντείνεσθαι τὴν ἐπαινουμένην κρᾶσιν καὶ
ἁρμονίαν, καὶ προσελθὼν ὁ παῖς ὑπέχει τὸν ἄκρατον· ὁ
δ´ ἀνεδύετο, λέγων ἅμα γέλωτι τῶν λογικῶν εἶναι περὶ
μουσικὴν οὐ τῶν ὀργανικῶν. ὁ μέντοι πατὴρ τοσοῦτον
ἐπεῖπε τοῖς εἰρημένοις, ὅτι δοκοῦσιν αὐτῷ καὶ οἱ παλαιοὶ
τοῦ μὲν Διὸς δύο ποιεῖν τιθήνας, τὴν Ἴδην καὶ τὴν Ἀδράστειαν,
τῆς δ´ Ἥρας μίαν, τὴν Εὔβοιαν· ἀμέλει δὲ καὶ τοῦ
Ἀπόλλωνος δύο, τὴν Ἀλήθειαν καὶ τὴν Κορυθάλειαν·
τοῦ δὲ Διονύσου πλείονας, ὅτι δεῖ τὸν θεὸν τοῦτον ἐν
πλείοσι μέτροις νυμφῶν τιθασευόμενον καὶ παιδευόμενον
ἡμερώτερον ποιεῖν καὶ φρονιμώτερον.
| [3,9] QUESTION IX.
Sur l'usage de boire suivant la proportion cinq, ou suivant
la proportion trois, ou suivant la proportion quatre.
PERSONNAGES DU DIALOGUE : ARISTON - PLUTARQUE -
LE PÉRE DE PLUTARQUE.
1. Quand j'eus ainsi parlé, Ariston, criant à tue-tête selon
son habitude : "On a promulgué, dit-il, un décret qui ramène
dans nos festins l'usage et la pratique des mesures.
C'est là une institution essentiellement juste et populaire,
que je ne sais quelle péripde de sobriété avait, par un acte de
véritable tyrannie, frappé d'un trop long exil. Car de même
que ceux qui sont passés maîtres dans les divers accords de
la lyre, disent que la proportion sesqui-altère produit l'accord
de la quinte, que la proportion double donne l'octave,
et que l'accord de la quarte, accord le plus sourd de tous, se
fait par la proportion sesqui-tierce; de même ceux qui s'entendent
aux harmonies de Bacchus, ont reconnu qu'il y a
trois accords du vin avec l'eau: accord de quinte, accord de
tierce, accord de quarte ; et ils vont disant et chantant :
A cinq ou bien à trois buvons, mais non à quatre.
Boire à cinq, constitue la proportion sesqui-altère : c'est
quand on mêle à trois cinquièmes d'eau deux cinquièmes
de vin. Boire à trois, constitue la proportion double : c'est
quand on mêle à deux tiers d'eau un tiers de vin. Boire à
quatre, constitue la proportion sesquitierce, qui donne trois
quarts d'eau pour un quart de vin. C'est la mesure adoptée
par quelques magistrats qui vouent leur intelligence à leurs
fonctions de Prytanes, ou par des dialecticiens aux sourcils
froncés sévèrement, lorsqu'ils étudient les combinaisons
variées du syllogisme. Nous tenons cette dernière mesure
pour un mélange trop sobre et trop insignifiant; et nous
n'allons traiter que des deux autres proportions. Celle de
deux tiers d'eau pour un tiers de vin fait monter le buveur
à ce degré d'ivresse turbulente que nous appelons l'acrothoracie :
demi-ivresse, dans laquelle
"De l'âme on vient toucher les cordes défendues".
En effet, cette proportion ne permet pas que l'on reste
à un état parfait de sobriété, et elle ne noie pas non plus
complétement la raison dans le vin. La proportion de deux
cinquièmes d'eau pour trois cinquièmes de vin est la plus
harmonieuse. Elle est toute propice à donner le sommeil, à
faire oublier les soucis. Elle représente cette terre fertile qui,
selon les paroles d'Hésiode,
"Dissipe les chagrins et nourrit les enfants".
Elle triomphe des mouvements moraux les plus intraitables,
les plus désordonnés; et, pénétrant au fond de l'âme,
elle y introduit le calme et le repos."
2. A ces paroles d'Ariston personne ne s'avisa de contredire :
car il était évident qu'il plaisantait. Mais moi je le
sommai de prendre une coupe, et, comme s'il eût tenu la
lyre, d'entonner cet accord et cette consonnance dont il venait
de faire l'éloge. En même temps l'esclave s'était avancé
pour lui donner le ton avec du vin pur. Mais Ariston refusa,
et dit en riant, que pour ce genre de musique il était habile
en théorie, mais inhabile dès qu'il fallait jouer de l'instrument.
Mon père ajouta seulement quelques mots. « Il
me semble, dit-il, que les poètes anciens avaient, dans le
même esprit, donné à Jupiter deux nourrices, Ité et Adrastie ;
à Junon, une seule; à Apollon, deux pareillement,
Aléthie et Corythalie; mais que Bacchus avait une grande
quantité de nourrices : attendu que ce Dieu a besoin d'être
adouci et d'avoir son éducation faite par un plus grand nombre de
mesures de Nymphes pour devenir plus calme et plus sensé."
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