HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales - Sur les moyens de connaître les progrès qu'on fait dans la vertu

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[81] Ἔστιν (81a) οὖν τοῦ προκόπτοντος οὐ μόνον δόντα τῷ φίλῳ καὶ γνώριμον εὐεργετήσαντα μὴ φράσαι πρὸς ἑτέρους, ἀλλὰ καὶ ψῆφον ἐν πολλαῖς θέμενον ἀδίκοις δικαίαν καὶ πρὸς ἔντευξιν αἰσχρὰν πλουσίου τινὸς ἄρχοντος ἀπισχυρισάμενον καὶ δωρεὰς ὑπεριδόντα καὶ νὴ Δία διψήσαντα νύκτωρ καὶ μὴ πιόντα πρὸς φίλημα καλῆς καλοῦ διαμαχεσάμενον, ὡς Ἀγησίλαος, ἐν ἑαυτῷ κατασχεῖν καὶ σιγῆσαι. Οὗτος γὰρ αὐτὸς εὐδοκιμῶν παρ´ ἑαυτῷ μὴ καταφρονῶν ἀλλὰ χαίρων κἀγαπῶν ὡς ἱκανὸς ὢν μάρτυς ἅμα καὶ (81b) θεατὴς τῶν καλῶν δείκνυσι τὸν λόγον ἐντὸς ἤδη τρεφόμενον καὶ ῥιζούμενον ἐν ἑαυτῷ καὶ κατὰ Δημόκριτον αὐτὸν « Ἐξ ἑαυτοῦ λαμβάνειν τὰς τέρψιας ἐθιζόμενον. » Οἱ μὲν οὖν γεωργοὶ τῶν σταχύων ἥδιον ὁρῶσι τοὺς κεκλιμένους καὶ νεύοντας ἐπὶ γῆν, τοὺς δ´ ὑπὸ κουφότητος αἰρομένους ἄνω κενοὺς ἡγοῦνται καὶ ἀλαζόνας· οὕτω δὲ καὶ τῶν φιλοσοφεῖν βουλομένων νέων οἱ μάλιστα κενοὶ καὶ βάρος οὐκ ἔχοντες θράσος ἔχουσι καὶ σχῆμα καὶ βάδισμα καὶ πρόσωπον ὑπεροψίας καὶ ὀλιγωρίας μεστὸν ἀφειδούσης ἁπάντων, ἀρχόμενοι δὲ πληροῦσθαι καὶ συλλέγειν καρπὸν ἀπὸ τῶν λόγων τὸ σοβαρὸν καὶ (81c) φλοιῶδες ἀποτίθενται. — Καὶ καθάπερ ἀγγείων κενῶν ὑγρὸν δεχομένων ἐντὸς ἀὴρ ὑπέξεισιν ἐκθλιβόμενος, οὕτως ἀνθρώποις πληρουμένοις τῶν ἀληθινῶν ἀγαθῶν ἐνδίδωσιν τῦφος καὶ γίγνεται τὸ οἴημα μαλακώτερον, καὶ παυόμενοι τοῦ διὰ πώγωνα καὶ τρίβωνα φρονεῖν μέγα τὴν ἄσκησιν ἐπὶ τὴν ψυχὴν μεταφέρουσι, καὶ τῷ δηκτικῷ καὶ πικρῷ χρῶνται πρὸς ἑαυτοὺς μάλιστα, τοῖς δ´ ἄλλοις πραότερον ἐντυγχάνουσι. Τὸ δὲ φιλοσοφίας ὄνομα καὶ τὴν τοῦ φιλοσοφεῖν δόξαν οὐχ ἁρπάζουσιν ἑαυτοῖς ὡς (81d) πρότερον οὐδὲ προσγράφουσιν, ἀλλὰ καὶ προσαγορευθεὶς ὑφ´ ἑτέρου τῇ προσηγορίᾳ ταύτῃ φθάσας ἂν εὐφυὴς νέος εἴποι μετ´ ἐρυθήματος, οὔ τίς τοι θεός εἰμι· τί μ´ ἀθανάτοισιν ἐίσκεις; « Νέας » μὲν γὰρ « γυναικός, » ὡς Αἰσχύλος φησίν, « Οὔ τι λανθάνει φλέγων ὀφθαλμός, ἥτις ἀνδρὸς γεγευμένη· » νέῳ δ´ ἀνδρὶ γευσαμένῳ προκοπῆς ἀληθοῦς ἐν φιλοσοφίᾳ τὰ Σαπφικὰ ταυτὶ παρέπεται Κὰμ μὲν γλῶσσα ἔαγε, λέπτον δ´ αὔτικα χρῷ πῦρ ὑποδεδρόμακεν, ἀθόρυβον δ´ ὄψει καὶ πρᾶον ὄμμα, φθεγγομένου δ´ ἂν ἀκοῦσαι ποθήσειας. Ὥσπερ γὰρ οἱ τελούμενοι κατ´ ἀρχὰς μὲν ἐν θορύβῳ καὶ βοῇ συνίασι πρὸς (81e) ἀλλήλους ὠθούμενοι, δρωμένων δὲ καὶ δεικνυμένων τῶν ἱερῶν προσέχουσιν ἤδη μετὰ φόβου καὶ σιωπῆς, οὕτω καὶ φιλοσοφίας ἐν ἀρχῇ καὶ περὶ θύρας πολὺν θόρυβον ὄψει καὶ λαλιὰν καὶ θρασύτητα, ὠθουμένων πρὸς τὴν δόξαν ἐνίων ἀγροίκως τε καὶ βιαίως· δ´ ἐντὸς γενόμενος καὶ μέγα φῶς ἰδών, οἷον ἀνακτόρων ἀνοιγομένων, ἕτερον λαβὼν σχῆμα καὶ σιωπὴν καὶ θάμβος ὥσπερ θεῷ τῷ λόγῳ « Ταπεινὸς συνέπεται καὶ κεκοσμημένος. » Εἰς δὲ τούτους ἔοικε καὶ τὸ Μενεδήμῳ πεπαιγμένον καλῶς λέγεσθαι· (81f) καταπλεῖν γὰρ ἔφη τοὺς πολλοὺς ἐπὶ σχολὴν Ἀθήναζε, σοφοὺς τὸ πρῶτον, εἶτα γίγνεσθαι φιλοσόφους, εἶτα ῥήτορας, τοῦ χρόνου δὲ προϊόντος ἰδιώτας, ὅσῳ μᾶλλον ἅπτονται τοῦ λόγου, μᾶλλον τὸ οἴημα καὶ τὸν τῦφον κατατιθεμένους. Τῶν τοίνυν δεομένων ἰατρείας οἱ μὲν ὀδόντα πονοῦντες δάκτυλον αὐτόθεν βαδίζουσι παρὰ τοὺς θεραπεύοντας, οἱ δὲ πυρέττοντες οἴκαδε καλοῦσι καὶ δέονται βοηθεῖν, οἱ δ´ εἰς μελαγχολίαν φρενῖτιν παρακοπὴν ἥκοντες οὐδὲ φοιτῶντας ἐνιαχοῦ πρὸς αὐτοὺς ἀνέχονται, ἀλλ´ ἐξελαύνουσιν φεύγουσιν, μηδ´ ὅτι νοσοῦσιν ὑπὸ τοῦ σφόδρα νοσεῖν αἰσθανόμενοι. [81] (81a) Mais celui à qui la vertu s'est montrée dans toute sa beauté et qui en connaît tout le prix, ne se borne pas à taire les services qu'il a rendus à ses amis; si, dans un jugement, il a opiné avec justice, malgré la prévarication du plus grand nombre des juges ; s'il a méprisé les sollicitations injustes d'un homme riche ou puissant ; s'il a rejeté les présents qu'on lui offrait; s'il a supporté la faim et la soif, ou résisté, comme Agésilas, aux attraits de la volupté, il ensevelit dans le silence ces actions vertueuses. Content de son suffrage, sans néanmoins mépriser celui des autres, il croit avoir, dans sa conscience, un témoin (81b) et un juge assez éclairés. Il montre, par cette conduite, que la sagesse a jeté dans son âme des racines profondes, et qu'il est accoutumé, selon la pensée de Démocrite, à chercher sa satisfaction dans son propre cœur. Les laboureurs voient avec plaisir les épis qui courbent leur tige vers la terre ; mais ils soupçonnent ceux qui s'élèvent au-dessus des autres de n'avoir qu'une vaine apparence. De même, entre les jeunes gens qui s'appliquent à la philosophie, ceux qui sont vains et légers annoncent, par une contenance haute et fière, par un air méprisant et une démarche orgueilleuse, le vide de leur âme. Lorsque ensuite ils commencent à se nourrir des fruits que l'instruction a fait germer en eux, ils quittent ces manières superbes qui décelaient leur vanité. (81c) Quand on verse une liqueur dans un vase, l'air qu'il contient se sentant pressé, cède la place au liquide qu'on y introduit. De même, les hommes, à mesure qu'ils se remplissent des véritables biens, se vident de la vanité, et perdent l'opinion avantageuse qu'ils avaient d'eux-mêmes. Ils cessent de se croire estimables pour porter un manteau et une longue barbe, et tournent toute leur application du côté de leur âme; aussi sévères pour eux-mêmes qu'indulgents pour les autres, loin d'usurper encore la réputation de philosophes, ils n'osent plus même en prendre le titre. (81d) C'est alors qu'un jeune homme qui aurait fait des progrès dans le bien, et qui s'entendrait appeler de ce nom honorable, en rougirait de modestie, et répondrait avec un doux sourire : "Je ne suis point un dieu : c'est aux seuls immortels Qu'est dû le nom sacré digne de nos autels". Le poète Eschyle disait d'une jeune femme : "En elle un regard vif, de flamme étincelant, Montre que du plaisir elle a goûté les charmes". Mais un jeune homme qui, en avançant dans la philosophie, a senti tous ses attraits, éprouve pour la vertu ces mouvements et ces transports que Sapho a si bien décrits dans une de ses odes : "Quand je te vois, ma langue immobile et glacée Ne peut seconder mes désirs; Ma voix expire, et ma pensée N'a d'organe que mes soupirs. Une vive et subtile flamme Se glisse dans mes sens, et pénètre mon âme". Quel plaisir alors de contempler la contenance modeste, le regard doux et serein de ce vertueux jeune homme ! Oui ne voudrait pouvoir l'entendre, pour admirer les charmes de son langage? Ceux qui viennent se faire initier aux mystères de Cérès s'assemblent d'abord tumultuairement et en désordre, poussent des cris confus et se heurtent les (81e) uns les autres. Mais quand la cérémonie commence, et que les images sacrées se dévoilent à leurs yeux, ils se tiennent dans un respectueux silence. Ainsi, à l'entrée de la philosophie, ce n'est ordinairement que bruit, que confusion et que tumulte : la plupart des jeunes gens, par un vain désir de gloire, s'y portent avec violence; mais, lorsqu'ils y sont entrés, et que cette lumière divine frappe leurs regards, alors, comme à la vue d'un sanctuaire auguste, ils changent de contenance; pénétrés d'une frayeur religieuse, ils marchent en silence, dans un maintien grave et modeste, et suivent la raison comme un dieu. On peut leur appliquer ce que disait ingénieusement Ménédème, que la plupart de ceux (81f) qui venaient aux écoles d'Athènes commençaient par se croire des sages, ensuite des philosophes, c'est-à-dire des amateurs de la sagesse., bientôt après des sophistes, et qu'ils finissaient par se trouver ignorants : leur présomption et leur enflure diminuaient à mesure qu'ils étaient plus instruits. Les malades qui n'ont que des indispositions légères vont eux-mêmes trouver le médecin. Quand la fièvre les retient au lit, ils le font prier de venir et de les traiter ; mais s'ils sont en frénésie, en démence ou en fureur, et que la violence les empêche de sentir leur état, ils chassent le médecin ou prennent eux-mêmes la fuite.


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Dernière mise à jour : 8/05/2008