[77] Ὡς γὰρ ἡ τοῦ καλάμου βλάστησις, (77a) ὁρμὴν ἔχουσα
πλείστην ἀπ´ ἀρχῆς εἰς μῆκος ὁμαλὸν καὶ συνεχές, τὸ πρῶτον ἐν διαστήμασι
μεγάλοις ὀλίγας λαμβάνουσα προσκρούσεις καὶ ἀντικοπάς, εἶθ´ οἷον ὑπ´
ἄσθματος ἄνω δι´ ἀσθένειαν ἀπαγορεύουσα πολλοῖς ἐνίσχεται καὶ πυκνοῖς τοῖς
γόνασι, τοῦ πνεύματος πληγὰς καὶ τρόμους λαμβάνοντος, οὕτως ὅσοι τὸ πρῶτον
μεγάλαις ἐκδρομαῖς ἐχρήσαντο πρὸς φιλοσοφίαν, εἶτα πολλὰ καὶ συνεχῆ
προσκρούματα καὶ διασπάσματα λαμβάνουσι μηδενὸς (77b) διαφόρου πρὸς τὸ
βέλτιον ἐπαισθανόμενοι, τελευτῶντες ἐξέκαμον καὶ ἀπηγόρευσαν. « Τῷ δ´ αὖτε
πτερὰ γίγνετο » δι´ ὠφέλειαν φερομένῳ καὶ διακόπτοντι τὰς προφάσεις ὥσπερ
ὄχλον ἐμποδὼν ὄντα ῥώμῃ καὶ προθυμίᾳ τῆς ἀνύσεως. Καθάπερ οὖν ἔρωτος
ἀρχομένου σημεῖόν ἐστιν οὐ τὸ χαίρειν τῷ καλῷ παρόντι (τοῦτο γὰρ κοινόν)
ἀλλὰ τὸ δάκνεσθαι καὶ ἀλγεῖν ἀποσπώμενον, οὕτως ἄγονται μὲν ὑπὸ φιλοσοφίας
πολλοὶ καὶ σφόδρα γε φιλοτίμως ἀντιλαμβάνεσθαι τοῦ μανθάνειν δοκοῦσιν, ἂν
δ´ ἀπελαθῶσι ὑπὸ πραγμάτων ἄλλων καὶ ἀσχολιῶν, ἐξερρύη τὸ πάθος αὐτῶν
ἐκεῖνο, καὶ ῥᾳδίως φέρουσιν.
Ὅτῳ δ´ ἔρωτος δῆγμα παιδικῶν (77c) πρόσεστι, μέτριος μὲν ἄν σοι φανείη καὶ
πρᾶος ἐν τῷ παρεῖναι καὶ συμφιλοσοφεῖν ὅταν δ´ ἀποσπασθῇ καὶ χωρὶς
γένηται, θεῶ φλεγόμενον καὶ ἀδημονοῦντα καὶ δυσκολαίνοντα πᾶσι πράγμασι
καὶ ἀσχολίαις, μνήμην δὲ φιλῶν ὥσπερ ἄλογος ἐλαύνεται πόθῳ τῷ πρὸς
φιλοσοφίαν. Οὐ γὰρ δεῖ τοῖς λόγοις εὐφραίνεσθαι μὲν παρόντας ὥσπερ τοῖς
μύροις, ἀποστάντας δὲ μὴ ζητεῖν μηδ´ ἀσχάλλειν, ἀλλὰ πείνῃ τινὶ καὶ δίψῃ
πάθος ὅμοιον ἐν τοῖς ἀποσπασμοῖς πάσχοντας ἔχεσθαι τοῦ προκόπτοντος
ἀληθῶς, ἄν τε γάμος ἄν τε πλοῦτος ἄν τε φιλία τις ἄν τε στρατεία (77d)
προσπεσοῦσα ποιήσῃ τὸν χωρισμόν. Ὅσῳ γὰρ πλέον ἐστὶ τὸ προσειλημμένον ἐκ
φιλοσοφίας, τοσούτῳ πλέον ἐνοχλεῖ τὸ ἀπολειπόμενον.
Τούτῳ δ´ ὁμοῦ τι ταὐτόν ἐστιν ἢ σύνεγγυς τὸ πρεσβύτατον δήλωμα προκοπῆς
τοῦ Ἡσιόδου, μηκέτι προσάντη μηδ´ ὄρθιον ἄγαν ἀλλὰ ῥᾳδίαν καὶ λείαν καὶ
δι´ εὐπετείας εἶναι τὴν ὁδόν, οἷον ἐκλεαινομένην τῇ ἀσκήσει καὶ φῶς ἐν τῷ
φιλοσοφεῖν καὶ λαμπρότητα ποιοῦσαν ἐξ ἀπορίας καὶ πλάνης καὶ μεταμελειῶν,
αἷς προστυγχάνουσιν οἱ φιλοσοφοῦντες τὸ πρῶτον, ὥσπερ οἱ γῆν ἀπολιπόντες
(77e) ἣν ἴσασι, μηδέπω δὲ καθορῶντες ἐφ´ ἣν πλέουσι. Προέμενοι γὰρ τὰ
κοινὰ καὶ συνήθη πρὶν ἢ τὰ βελτίονα γνῶναι καὶ λαβεῖν, ἐν μέσῳ
περιφέρονται πολλάκις ὑποτρεπόμενοι. Καθάπερ φασὶ Σέξτιον τὸν Ῥωμαῖον
ἀφεικότα τὰς ἐν τῇ πόλει τιμὰς καὶ ἀρχὰς διὰ φιλοσοφίαν, ἐν δὲ τῷ
φιλοσοφεῖν αὖ πάλιν δυσπαθοῦντα καὶ χρώμενον τῷ λόγῳ χαλεπῷ τὸ πρῶτον,
ὀλίγου δεῆσαι καταβαλεῖν ἑαυτὸν ἔκ τινος διήρους. Καὶ περὶ Διογένους ὅμοια
τοῦ Σινωπέως ἱστοροῦσιν ἀρχομένου φιλοσοφεῖν, ὡς Ἀθηναίοις ἦν ἑορτὴ καὶ
δεῖπνα δημοτελῆ καὶ θέατρα (77f) καὶ συνουσίας μετ´ ἀλλήλων ἔχοντες
ἐχρῶντο κώμοις καὶ παννυχίσιν, ὁ δ´ ἔν τινι γωνίᾳ συνεσπειραμένος ὡς
καθευδήσων ἐνέπιπτεν εἰς λογισμοὺς τρέποντας αὐτὸν οὐκ ἀτρέμα καὶ
θραύοντας, ὡς ἀπ´ οὐδεμιᾶς ἀνάγκης εἰς ἐπίπονον καὶ ἀλλόκοτον ἥκων βίον
αὐτὸς ὑφ´ ἑαυτοῦ κάθηται τῶν ἀγαθῶν ἁπάντων ἐστερημένος. Εἶτα μέντοι μῦν
τινα προσερπύσαντα λέγεται περὶ τὰς ψίχας αὐτοῦ τῆς μάζης ἀναστρέφεσθαι,
| [77] Voyez comme le premier jet d'un roseau (77a) s'élève avec grâce,
comme il pousse de longues tiges droites et unies
qui ne sont coupées qu'à de grandes distances; mais
ensuite, l'air qui les fait monter étant comme affaibli par ses premiers
efforts, et rabattu, pour ainsi dire, par une force supérieure qui gêne
son essor, alors ces tiges sont plus courtes et souvent interrompues par
des nœuds.
De même, parmi ceux qui s'adonnent à la philosophie, il en est qui, après
avoir commencé leur carrière avec la plus grande ardeur, sont souvent
arrêtés dans leur marche ; ils ne s'aperçoivent d'aucun progrès dans la
vertu, ils tombent peu à peu dans l'indifférence, et finissent par
abandonner leur entreprise. D'autres, au contraire, plus constants, plus
animés par le désir d'arriver au terme, franchissent d'un vol rapide tous
les obstacles dont la foule importune s'efforçait de retarder leur course.
Le plaisir que cause la vue d'une belle personne ne prouve pas un
commencement de passion ; c'est un sentiment commun à tous les hommes; ce
qui l'annonce, c'est la peine et le tourment qu'on éprouve quand il faut
s'en séparer. Combien de gens paraissent d'abord aimer la philosophie et
s'y livrer avec ardeur! Mais si d'autres soins viennent les en distraire,
leur amour pour elle s'évanouit bientôt, et ils en supportent facilement
la privation. (77c) Mais celui qu'elle a pénétré d'un amour véritable
paraît tranquille et modéré lorsqu'il jouit de ses entretiens. Est-il
obligé de s'en arracher? on le voit inquiet, agité, brûlant d'impatience,
s'indigner contre des affaires importunes, et tout quitter, jusqu'à ses
amis mêmes, pour suivre avec impétuosité le désir qui l'entraîne.
On respire un moment avec plaisir l'odeur d'un parfum agréable : la sensation
en est-elle passée ? elle n'excite ni désir, ni regret. L'étude de la
philosophie doit produire en nous un effet tout différent. Lorsque nous
sommes obligés de l'interrompre, quel que soit le motif qui nous en
sépare, un mariage, un établissement de fortune, une liaison d'amitié,
(77d) le service de l'État, il faut que cette interruption fasse éprouver
à notre âme un besoin réel. Plus les premières études nous auront apporté
de connaissances, plus nous serons impatients d'acquérir celles qui nous
manquent.
Un autre moyen assez semblable de juger de ses progrès dans la vertu,
c'est, comme dit Hésiode, que la route de la sagesse ne nous paraisse plus
rude ni escarpée, mais unie et facile; que l'exercice nous en ait aplani
les sentiers, qu'il ait fait succéder une lumière pure et brillante à ces
incertitudes, à ces perplexités où tombent ordinairement ceux qui entrent
dans la carrière de la philosophie. Semblables à des voyageurs qui
s'éloignent d'un pays (77e) qu'ils connaissent sans voir encore celui où
ils doivent aller, ces nouveaux philosophes perdent de vue les idées communes
qui leur étaient familières avant que
d'avoir pu saisir les connaissances plus vraies et plus solides que la
philosophie leur enseigne. Livrés alors à des agitations cruelles, après
avoir flotté quelque temps dans l'incertitude, ils reviennent sur leurs
pas et renoncent à leur entreprise. Un chevalier romain, nommé Sestius,
avait quitté les charges et les dignités qu'il possédait pour embrasser la
philosophie ; mais il fut tellement découragé par les premières
difficultés de cette étude, qu'il manqua de se précipiter dans la mer. On
dit aussi que Diogène éprouva le même dégoût lorsqu'il commença de s'y
appliquer. Pendant que les Athéniens célébraient une fête solennelle et
passaient les jours et les nuits dans les festins, les spectacles (77f) et
les réjouissances, ce philosophe se retira le soir, dans un coin de la
place publique, pour y passer la nuit. Il fut assailli d'une foule de
réflexions qui combattaient la résolution qu'il venait de prendre et
portaient à son âme les atteintes les plus vives. Il se disait à lui-même
que, sans aucune nécessité, il embrassait un genre de vie dur et sauvage
qui l'isolait du reste de la société, et le laissait dénué de toutes
sortes de biens. Dans le trouble que lui causaient ces pensées, il vit une
souris se glisser auprès de lui et ronger les miettes qui tombaient de son pain.
|