HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales - Sur les moyens de connaître les progrès qu'on fait dans la vertu

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[76] μεγίστης δὲ (76a) τῆς εἰς μίαν ὁμοῦ κακίαν πάντας ἀνθρώπους πλὴν ἑνὸς τοῦ τελείου τιθεμένης, ὑφ´ ἧς αἴνιγμα γέγονεν λεγομένη προκοπή, μικρὸν ἀπολείπουσα ἀφροσύνης ἐσχάτης, τοὺς δὲ πάντων ἅμα παθῶν καὶ νοσημάτων ἀφειμένους ὑπ´ αὐτῆς ἔτι τοῖς μηδενὸς ἀπηλλαγμένοις τῶν κακίστων ὁμοίως παρέχουσα κακοδαιμονοῦντας. Οὗτοι μὲν οὖν ἑαυτοὺς ἐλέγχουσιν, ἐν μὲν ταῖς σχολαῖς ἴσην ἀδικίαν τὴν Ἀριστείδου τῇ Φαλάριδος τιθέμενοι, καὶ δειλίαν τὴν (76b) Βρασίδου τῇ Δόλωνος, καὶ νὴ Δία τῆς Μελήτου μηδ´ ὁτιοῦν τὴν Πλάτωνος ἀγνωμοσύνην διαφέρουσαν, ἐν δὲ τῷ βίῳ καὶ τοῖς πράγμασιν ἐκείνους μὲν ἐκτρεπόμενοι καὶ φεύγοντες ὡς ἀμειλίκτους, τούτοις δ´ ὡς ἀξίοις πολλοῦ τὰ μέγιστα καὶ χρώμενοι καὶ πιστεύοντες. Ἡμεῖς δὲ παντὶ γένει κακοῦ, μάλιστα δὲ τῷ περὶ ψυχὴν ἀτάκτῳ καὶ ἀορίστῳ τὸ μᾶλλον καὶ ἧττον προσγιγνόμενον ὁρῶντες ( καὶ διαφέρουσιν αἱ προκοπαί, καθάπερ, σκιᾶς ἀνέσει τῆς μοχθηρίας τοῦ λόγου διαφωτίζοντος ἀτρέμα τὴν ψυχὴν καὶ διακαθαίροντος) οὐκ ἄλογον οἰόμεθα τὴν συναίσθησιν εἶναι τῆς μεταβολῆς ὥσπερ ἐκ βυθοῦ τινὸς ἀναφερομένοις, (76c) ἀλλ´ ἔχουσαν ἐπιλογισμούς. Ὧν σκόπει τὸν πρῶτον εὐθύς. Εἰ καθάπερ οἱ πρὸς ἀχανὲς θέοντες ἱστίοις πέλαγος ἅμα τῷ χρόνῳ πρὸς τὴν τοῦ πνεύματος ῥώμην ἀναμετροῦνται τὸν δρόμον, ὅσον εἰκὸς ἐν τοσούτῳ γεγονόσιν ὑπὸ τοσαύτης κομιζομένοις ἠνύσθαι δυνάμεως, οὕτως ἄν τις ἐν φιλοσοφίᾳ τὸ ἐνδελεχὲς καὶ τὸ συνεχὲς τῆς πορείας καὶ μὴ πολλὰς διὰ μέσου ποιούμενον ἐπιστάσεις, εἶτ´ αὖθις ὁρμὰς καὶ ἐπιπηδήσεις, ἀλλὰ λείως καὶ ὁμαλῶς τοῦ πρόσθεν ἐπιλαμβανόμενον ἀεὶ καὶ διϊὸν ἀπταίστως διὰ τοῦ λόγου τεκμήριον ἑαυτῷ ποιήσαιτο προκοπῆς. Τὸ γὰρ Εἰ καὶ σμικρὸν ἐπὶ σμικρῷ καταθεῖο καὶ θαμὰ τοῦθ´ ἕρδοις (76d) οὐ πρὸς ἀργυρίου μόνον αὔξησιν εἴρηται καλῶς, ἀλλ´ εἰς ἅπαντα ποιεῖ, μάλιστα δ´ εἰς ἀρετῆς ἐπίδοσιν, πολὺ καὶ τελεσιουργὸν ἔθος τοῦ λόγου προσλαμβάνοντος· αἱ δ´ ἀνωμαλίαι καὶ ἀμβλύτητες τῶν φιλοσοφούντων οὐ μόνον μονὰς ποιοῦσι καὶ ἐποχὰς ὥσπερ ἐν ὁδῷ τῆς προκοπῆς, ἀλλὰ καὶ ἀναλύσεις, ἀεὶ τῷ παρείκοντι κατὰ σχολὴν τῆς κακίας ἐπιτιθεμένης καὶ πρὸς τοὐναντίον ἀνθυποφερούσης. Τοὺς μὲν γὰρ πλάνητας οἱ μαθηματικοὶ στηρίζειν λέγουσι παυσαμένης τῆς εἰς τοὔμπροσθεν αὐτῶν πορείας, ἐν δὲ τῷ φιλοσοφεῖν οὐκ ἔστι ληγούσης (76e) διάλειμμα προκοπῆς οὐδὲ στηριγμός, ἀλλ´ ἀεί τινας ἔχουσα κινήσεις φύσις ὥσπερ ἐπὶ ζυγοῦ ῥέπειν ἐθέλει καὶ κατατείνεσθαι ταῖς βελτίοσιν, ταῖς ἐναντίαις πρὸς τὸ χεῖρον οἴχεται φερομένη. Ἂν οὖν κατὰ τὸν δοθέντα χρησμὸν ὑπὸ τοῦ θεοῦ « Κιρραίοις πάντ´ ἤματα καὶ πάσας νύκτας πολεμεῖν » οὕτω συνειδῇς σεαυτὸν ἡμέρας τε καὶ νύκτωρ ἀεὶ τῇ κακίᾳ διαμεμαχημένον, μὴ πολλάκις γε τὴν φρουρὰν ἀνεικότα μηδὲ συνεχῶς παρ´ αὐτῆς οἱονεὶ κήρυκας ἡδονάς τινας ῥᾳστώνας ἀσχολίας ἐπὶ σπονδαῖς προσδεδεγμένον, εἰκότως ἂν εὐθαρσὴς καὶ πρόθυμος βαδίζοις ἐπὶ τὸ λειπόμενον. (76f) Οὐ μὴν ἀλλὰ κἂν διαλείμματα γιγνόμενα τοῦ φιλοσοφεῖν, τὰ δ´ ὕστερα τῶν πρότερον ἑδραιότερα καὶ μακρότερα, σημεῖον οὐ φαῦλόν ἐστιν ἐκθλιβομένης πόνῳ καὶ ἀσκήσει τῆς ῥᾳθυμίας· τὸ δ´ ἐναντίον πονηρόν, αἱ μετ´ οὐ πολὺν χρόνον πολλαὶ καὶ συνεχεῖς ἀνακοπαί, τῆς προθυμίας οἷον ἀπομαραινομένης. [76] Une des plus grandes, (76a) c'est qu'ils soutiennent que tous les hommes qui n'ont pas une vertu parfaite sont également vicieux, que ce progrès dans la sagesse est une énigme incompréhensible, une opinion absurde ; ils vont même jusqu'à dire que ceux qui n'ont guéri que par ces progrès successifs les maladies de leur âme, sont aussi malheureux que les hommes les plus esclaves de leurs vices et de leurs passions. Mais il ne faut, pour les réfuter, que les opposer à eux-mêmes. Dans leurs écoles, ils soutiennent qu'Aristide est aussi injuste que Phalaris ; (76b) Brasidas aussi lâche que DoIon, et qui le croirait? Platon même aussi ingrat que Mélitus. Mais dans le commerce de la vie ils évitent, ils fuient les hommes vicieux, parce qu'ils ne trouvent point de sûreté à traiter avec eux, et ils s'adressent aux autres dans les affaires les plus importantes, comme à des gens qui méritent toute leur confiance. Pour nous, qui voyons qu'en tout genre de mal et principalement dans les désordres de l'âme, le vice est toujours plus ou moins grand à proportion des progrès que l'on fait dans le bien, qu'il diminue et s'efface peu à peu comme une ombre à mesure que la sagesse vient éclairer et purifier l'âme, nous croyons pouvoir assurer que ce passage du vice à la vertu doit être sensible à ceux en qui il s'opère, que l'âme se dégage et s'élève successivement du milieu de ces vices comme du fond d'un abîme, (76c) et juge de ses progrès par la course qu'elle a faite. Tels des voyageurs qui font voile sur une mer immense calculent la durée de leur navigation et la force du vent qui les pousse, pour connaître, en combinant l'une et l'autre, l'espace qu'ils ont parcouru; de même nous pouvons juger avec certitude que nous avons fait des progrès dans la philosophie, lorsque notre marche n'est point une alternative continuelle de repos et de courses, mais que, sous la conduite de la raison, nous avançons toujours vers le terme d'un pas égal et soutenu. Cette maxime d'Hésiode : "Peu, souvent répété, fait bientôt une somme", (76d) n'a pas lieu seulement pour l'argent qu'on amasse ; elle est encore applicable à tout et principalement au progrès dans le bien ; des actes fréquents de vertu font contracter à l'âme cette heureuse habitude dont le pouvoir est toujours si grand. Mais les inégalités et les tiédeurs, non seulement arrêtent les progrès qu'on pourrait faire, comme des repos fréquents retardent la marche du voyageur, elles produisent encore un dépérissement sensible ; le vice profite toujours de ces relâchements pour nous faire reculer et nous engager plus fortement dans ses liens. Les astronomes disent des planètes qu'elles sont stationnaires lorsqu'elles paraissent s'arrêter. Mais la pratique de la sagesse n'admet point (76e) ces sortes de repos. L'âme, toujours en mouvement et comme placée sur une balance, est sans cesse ou élevée par l'activité de la vertu, ou rabaissée par le poids du vice. Les habitants de Cirrha demandaient à l'oracle comment ils pourraient vivre en paix chez eux. « C'est, leur répondit-il, en faisant nuit et jour la guerre au dehors. » Si, selon le sens de cette réponse, vous pouvez vous rendre témoignage que nuit et jour vous déclarez à vos passions une guerre infatigable; si, ferme dans le poste que la vertu vous a confié, vous refusez toutes les trêves que le vice vous propose, sous prétexte d'un plaisir passager, d'un délassement utile, ou même d'une occupation importante, ayez alors une juste confiance de parcourir heureusement la carrière. (76f) Au reste, quand votre course serait quelquefois interrompue, pourvu que ces relâchements soient rares et promptement réparés par une ardeur plus soutenue, ne vous découragez point ; c'est une preuve que le travail et l'exercice commencent à dompter en vous l'opposition au bien et qu'ils achèveront d'en triompher. Vous auriez plus lieu de craindre si ces intervalles étaient longs et fréquents; ils annonceraient que votre activité se refroidit et va bientôt s'éteindre.


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Dernière mise à jour : 8/05/2008