HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales - Sur les moyens de connaître les progrès qu'on fait dans la vertu

Page 84

  Page 84

[84] καὶ θαυμασταὶ παρ´ δεῖ (84a) λόγων καὶ ἀνθρώπων καταφρονηταί. Καθάπερ γὰρ αἱ τῶν νόσων εἰς τὰ μὴ κύρια μέρη τοῦ σώματος ἐκτροπαὶ σημεῖόν εἰσιν οὐ φαῦλον, οὕτως κακία τῶν προκοπτόντων ἔοικεν εἰς ἐπιεικέστερα πάθη μεθισταμένη κατὰ μικρὸν ἐξαλείφεσθαι. Φρῦνιν μὲν γὰρ οἱ ἔφοροι ταῖς ἑπτὰ χορδαῖς δύο παρεντεινάμενον ἠρώτων πότερον τὰς ἄνωθεν τὰς κάτωθεν ἐκτεμεῖν αὐτοῖς ἐθέλει παρασχεῖν· ἡμῶν δὲ δεῖται μέν πως τὰ ἄνω καὶ τὰ κάτω περικοπῆς, εἰ μέλλομεν εἰς τὸ μέσον καθίστασθαι καὶ μέτριον· δὲ προκοπὴ τὰς ὑπερβολὰς πρότερον καὶ τὰς ὀξύτητας τῶν παθῶν ἀνίησι (84b) πρὸς ἅσπερ οἱ μαργῶντες ἐντονώτατοι κατὰ Σοφοκλέα. Καὶ μὴν ὅτι τὸ τὰς κρίσεις ἐπὶ τὰ ἔργα μετάγειν καὶ τοὺς λόγους μὴ λόγους ἐᾶν ἀλλὰ πράξεις ποιεῖν μάλιστα τῆς προκοπῆς ἴδιόν ἐστιν εἴρηται. Δήλωμα δ´ αὐτοῦ πρῶτον μὲν πρὸς τὰ ἐπαινούμενα ζῆλος καὶ τὸ ποιεῖν εἶναι προθύμους θαυμάζομεν, δὲ ψέγομεν μὴ ἐθέλειν μηδ´ ὑπομένειν. Ἐπεὶ πάντας μὲν Ἀθηναίους εἰκὸς ἦν ἐπαινεῖν τὴν Μιλτιάδου τόλμαν καὶ ἀνδρείαν, Θεμιστοκλῆς (84c) δ´ εἰπὼν ὡς οὐκ ἐᾷ καθεύδειν αὐτὸν ἀλλ´ ἐκ τῶν ὕπνων ἀνίστησι τὸ Μιλτιάδου τρόπαιον, οὐκ ἐπαινῶν μόνον οὐδὲ θαυμάζων ἀλλὰ καὶ ζηλῶν καὶ μιμούμενος εὐθὺς ἦν καταφανής. Σμικρὸν οὖν οἴεσθαι χρὴ προκόπτειν, ἄχρι οὗ τὸ θαυμάζειν τοὺς κατορθοῦντας ἀργὸν ἔχομεν καὶ ἀκίνητον ἐξ ἑαυτοῦ πρὸς μίμησιν. Οὔτε γὰρ ἔρως σώματος ἐνεργός, εἰ μὴ μετὰ ζηλοτυπίας ἔνεστιν, οὔτ´ ἔπαινος ἀρετῆς διάπυρος καὶ δραστήριος μὴ νύττων μηδὲ κεντρίζων μηδὲ ποιῶν ἀντὶ φθόνου ζῆλον ἐπὶ τοῖς καλοῖς, (84d) ἀναπληρώσεως ὀρεγόμενον. Οὐ γὰρ ὑπὸ τῶν λόγων δεῖ τοῦ φιλοσοφοῦντος μόνον ὥσπερ Ἀλκιβιάδης ἔλεγε τὴν καρδίαν στρέφεσθαι καὶ δάκρυα ἐκπίπτειν, ἀλλ´ γε προκόπτων ἀληθῶς, μᾶλλον ἔργοις καὶ πράξεσιν ἀνδρὸς ἀγαθοῦ καὶ τελείου παραβάλλων ἑαυτόν, ἅμα τῷ συνειδότι τοῦ ἐνδεοῦς δακνόμενος καὶ δι´ ἐλπίδα καὶ πόθον χαίρων καὶ μεστὸς ὢν ὁρμῆς οὐκ ἠρεμούσης οἷός ἐστι κατὰ Σιμωνίδην Ἄθηλος ἵππῳ πῶλος ὣς ἅμα τρέχειν, (84e) τῷ ἀγαθῷ μονονουχὶ συμφῦναι γλιχόμενος. Καὶ γὰρ τοῦτο προκοπῆς ἀληθοῦς ἴδιόν ἐστι πάθος, ὧν ζηλοῦμεν τὰ ἔργα τὴν διάθεσιν φιλεῖν καὶ ἀγαπᾶν καὶ μετ´ εὐνοίας ἀεὶ τιμὴν εὔφημον ἀποδιδούσης ἐξομοιοῦσθαι. Φιλονεικία δ´ ὅτῳ καὶ φθόνος ἐνέστακται πρὸς τοὺς κρείττονας, οὗτος ἴστω δόξης τινὸς δυνάμεως ζηλοτυπίᾳ κνιζόμενος, ἀρετὴν δὲ μὴ τιμῶν μηδὲ θαυμάζων. Ὅταν οὖν οὕτως ἀρχώμεθα τῶν ἀγαθῶν ἐρᾶν, ὥστε μὴ μόνον κατὰ Πλάτωνα μακάριον μὲν αὐτὸν ἡγεῖσθαι τὸν σώφρονα, « Μακάριον δὲ τὸν ξυνήκοον τῶν ἐκ τοῦ σωφρονοῦντος στόματος ἰόντων λόγων, » ἀλλὰ καὶ σχῆμα καὶ βάδισμα καὶ βλέμμα καὶ μειδίαμα θαυμάζοντες αὐτοῦ καὶ ἀγαπῶντες οἷον συναρμόττειν καὶ συγκολλᾶν ἑαυτοὺς ὦμεν (84f) πρόθυμοι, τότε χρὴ νομίζειν ἀληθῶς προκόπτειν. Ἔτι δὲ μᾶλλον, ἂν μὴ μόνον εὐημεροῦντας τοὺς ἀγαθοὺς θαυμάζωμεν, ἀλλ´ ὥσπερ οἱ ἐρῶντες καὶ τραυλότητας ἀσπάζονται τῶν ἐν ὥρᾳ καὶ ὠχρότητας, τῆς δὲ Πανθείας καὶ δάκρυα καὶ κατήφεια πενθούσης ἄρα καὶ κεκακωμένης ἐξέπληξε τὸν Ἀράσπην, οὕτως ἡμεῖς μήτε φυγὴν Ἀριστείδου μήθ´ εἱργμὸν Ἀναξαγόρου μήτε πενίαν Σωκράτους Φωκίωνος καταδίκην ὑποδειμαίνωμεν, ἀλλὰ καὶ μετὰ τούτων ἀξιέραστον ἡγούμενοι τὴν ἀρετὴν ὁμόσε χωρῶμεν αὐτῇ, τὸ Εὐριπίδειον ἐφ´ ἑκάστῳ φθεγγόμενοι [84] si nous avons pour les hommes et pour leurs discours une admiration excessive ou un mépris outré. (84a) Quand les maladies changent de siège, et qu'elles se portent des parties nobles du corps sur d'autres moins essentielles, c'est le signe d'une guérison prochaine. Ainsi, quand les passions se dénaturent et se portent sur des objets plus modérés, on peut croire que bientôt elles disparaîtront entièrement, et seront remplacées par des vertus. Phrynnis, musicien de Lacédémone, ayant ajouté deux nouvelles cordes à la lyre, les éphores lui en firent retrancher deux, lui laissant seulement le choix entre celles d'en haut ou celles d'en bas. Pour nous, il faut que nous coupions également dans les deux extrémités, pour nous réduire à ce juste milieu dans lequel consiste la sagesse. A mesure qu'on fait des progrès dans le bien, on retranche sur ses passions, on en émousse l'activité, au lieu que, selon l'expression de Sophocle, (84b) "L'insensé suit toujours leur fougue impétueuse". Nous avons déjà dit qu'il ne faut pas s'en tenir à des discours stériles, mais pratiquer en même temps qu'on s'instruit. Une preuve certaine qu'on est dans cette disposition, c'est d'un côté le zèle et l'ardeur à imiter ce que nous admirons, et de l'autre, l'éloignement de tout ce qui nous paraît blâmable. Tous les Athéniens sans doute louaient le courage et la vertu de Miltiade ; mais Thémistocle, (84c) qui disait que les victoires de Miltiade l'empêchaient de dormir et l'éveillaient en sursaut pendant la nuit, faisait bien voir qu'en les admirant il brûlait du désir de les imiter. Ne nous flattons donc point d'avoir fait beaucoup de progrès, tant que les actions vertueuses n'exciteront en nous qu'une admiration oisive, sans aucun sentiment d'émulation. L'amour n'est jamais bien actif, s'il n'est mêlé d'un peu de jalousie ; de même, les louanges qu'on donne à la vertu demeurent froides et stériles, si elles ne piquent et n'enflamment le cœur, si elles ne lui inspirent, non une basse jalousie, (84d) mais une ardente émulation envers les gens de bien, un vif désir d'acquérir les qualités que nous n'avons pas, et que nous admirons en eux. Il ne suffit point, disait Alcibiade, de se laisser attendrir jusqu'aux larmes par les discours d'une morale touchante ; un vrai philosophe va plus loin : il compare ses actions et sa conduite avec celles de l'homme le plus vertueux qu'il peut connaître ; et d'une part humilié par le sentiment de ce qui lui manque, encouragé de l'autre par le désir et par l'espérance de l'acquérir un jour, il se sent pénétré d'une ardeur qui n'est jamais infructueuse. Semblable, selon l'expression de Simonide, "A ce jeune poulain , qu'une course légère Entraîne, plein de feu, sur les pas de sa mère", (84e) il brûle de s'attacher à cet homme illustre, et, pour ainsi dire, de s'incorporer avec lui. C'est l'effet d'un progrès véritable dans le bien, que d'aimer la conduite des personnes vertueuses que nous prenons pour modèles, d'estimer leur manière de vivre, de nous sentir pénétrés de bienveillance pour elles, de leur rendre, en toute occasion, le tribut de louanges qui leur est dû, et surtout de travailler à leur ressembler. Mais un esprit de contestation et d'envie contre des hommes d'un mérite distingué annonce moins l'estime et l'admiration de leur vertu, qu'une jalousie secrète de leurs talents et de leur gloire. On ne peut douter de ses progrès dans la vertu, lorsqu'on a conçu pour les gens de bien un amour si vif et si sincère, que non seulement, comme dit Platon, on estime heureux, et le sage lui-même, et celui qui peut l'entendre parler, mais encore qu'on admire, qu'on aime en lui jusqu'à son air, sa démarche, son regard et son sourire, (84f) qu'on voudrait s'attacher intimement à lui, et le copier trait pour trait. Faisons plus encore ; et non contents d'admirer ces grands hommes dans la prospérité, soyons pour eux dans la disposition des amants qui trouvent de l'agrément jusque dans les défauts des personnes qu'ils aiment. Les larmes de Panthée, son air triste et éploré, frappèrent vivement Araspe, et lui inspirèrent de l'amour pour elle. Ainsi, loin de nous effrayer de l'exil d'Aristide, de la prison d'Anaxagore, de la pauvreté de Socrate, de l'injuste condamnation de Phocion, nous chérirons la vertu, même dans ses disgrâces ; nous la rechercherons avec plus d'empressement, et à chaque revers qu'elle éprouvera, nous dirons avec Euripide :


Recherches | Texte | Lecture | Liste du vocabulaire | Index inverse | Menu | Site de Philippe Remacle |

 
UCL | FLTR | Hodoi Elektronikai | Itinera Electronica | Bibliotheca Classica Selecta (BCS) |
Ingénierie Technologies de l'Information : B. Maroutaeff - C. Ruell - J. Schumacher

Dernière mise à jour : 8/05/2008