[2] Ἀλλὰ νοῦν οὐκ ἔχοντες οἱ πολλοὶ τῶν βασιλέων
καὶ ἀρχόντων μιμοῦνται τοὺς ἀτέχνους ἀνδριαντοποιούς,
οἳ νομίζουσι μεγάλους καὶ ἁδροὺς
φαίνεσθαι τοὺς κολοσσούς, ἂν διαβεβηκότας σφόδρα
καὶ διατεταμένους καὶ κεχηνότας πλάσωσι· καὶ γὰρ
οὗτοι βαρύτητι φωνῆς καὶ βλέμματος τραχύτητι
καὶ δυσκολίᾳ τρόπων καὶ ἀμιξίᾳ διαίτης ὄγκον
ἡγεμονίας καὶ σεμνότητα μιμεῖσθαι δοκοῦσιν, οὐδ´
ὁτιοῦν τῶν κολοσσικῶν διαφέροντες ἀνδριάντων,
οἳ τὴν ἔξωθεν ἡρωικὴν καὶ θεοπρεπῆ μορφὴν
ἔχοντες ἐντός εἰσι γῆς μεστοὶ καὶ λίθου καὶ μολίβδου·
πλὴν ὅτι τῶν μὲν ἀνδριάντων ταῦτα τὰ βάρη
τὴν ὀρθότητα μόνιμον καὶ ἀκλινῆ διαφυλάττει, οἱ
δ´ ἀπαίδευτοι στρατηγοὶ καὶ ἡγεμόνες ὑπὸ τῆς
ἐντὸς ἀγνωμοσύνης πολλάκις σαλεύονται καὶ περιτρέπονται·
βάσει γὰρ οὐ κειμένῃ πρὸς ὀρθὰς
ἐξουσίαν ἐποικοδομοῦντες ὑψηλὴν συναπονεύουσι.
δεῖ δέ, ὥσπερ ὁ κανὼν αὐτός, ἀστραβὴς γενόμενος
καὶ ἀδιάστροφος, οὕτως ἀπευθύνει τὰ λοιπὰ τῇ
πρὸς αὑτὸν ἐφαρμογῇ καὶ παραθέσει συνεξομοιῶν,
παραπλησίως τὸν ἄρχοντα πρῶτον τὴν ἀρχὴν
κτησάμενον ἐν ἑαυτῷ καὶ κατευθύναντα τὴν
ψυχὴν καὶ καταστησάμενον τὸ ἦθος οὕτω συναρμόττειν
τὸ ὑπήκοον· οὔτε γὰρ πίπτοντός ἐστιν
ὀρθοῦν οὔτε διδάσκειν ἀγνοοῦντος οὔτε κοσμεῖν
ἀκοσμοῦντος ἢ τάττειν ἀτακτοῦντος ἢ ἄρχειν μὴ
ἀρχομένου· ἀλλ´ οἱ πολλοὶ κακῶς φρονοῦντες
οἴονται πρῶτον ἐν τῷ ἄρχειν ἀγαθὸν εἶναι τὸ μὴ
ἄρχεσθαι, καὶ ὅ γε Περσῶν βασιλεὺς πάντας
ἡγεῖτο δούλους πλὴν τῆς αὑτοῦ γυναικός, ἧς
μάλιστα δεσπότης ὤφειλεν εἶναι.
| [2] Dans leur folie, la plupart des rois et des gouvernants
imitent les statuaires sans mérite, qui croient que tels colosses
paraîtront grands et forts s'ils les représentent ayant
les jambes très écartées, les bras tendus, la bouche béante.
Ces princes se figurent que la gravité de leur voix, la dureté
de leur regard, la difficulté de leur humeur, leur isolement
habituel, donneront du poids et de l'éclat à leur autorité.
Or, je ne fais aucune différence entre eux et ces gigantesques
effigies qui ont à l'extérieur une apparence héroïque,
une majesté de dieux, mais qui au dedans sont remplies
de terre, de pierres et de plomb. Seulement, pour les
statues il arrive que ces matières pesantes les maintiennent
dans une attitude droite et solide, tandis que pour les
généraux et les magistrats privés de toute instruction, leur
ignorance est souvent cause qu'ils sont violemment ébranlés
et qu'ils se renversent. En raison de ce que la base où pose
l'édifice, démesurement grand, de leur puissance n'est pas
régulièrement assise, ils chancèlent avec cette base.
Une condition est donc indispensable. Comme l'équerre
même, par sa rectitude et son inflexibilité, maintient droites
toutes les parties d'un ouvrage, et qu'en se dirigeant d'après
elle, qu'en l'appliquant, on rend toutes ces parties bien ajustées;
de même il faut qu'un souverain règne d'abord sur sa
propre personne. Il doit avoir réglé son esprit, donné de la
stabilité à son caractère, afin de pouvoir aussi servir de
modèle à ses sujets. Il n'appartient pas à qui tombe de faire
marcher droit les autres, à qui est ignorant d'instruire, à
qui n'a pas de convenance d'en donner, à qui manque d'ordre
d'en exiger, à qui ne reconnaît point d'autorité de
vouloir exercer la sienne. Mais le plus grand nombre estiment
à tort que le premier avantage qu'il y ait à commander,
ce soit de n'être point commandé. Au moins était-ce
l'opinion du roi de Perse, qui regardait tous ses sujets
comme autant d'esclaves. Il n'exceptait que sa femme, sur
laquelle précisément il aurait dû dominer plus que sur personne.
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