[5] Ὁ Σοφοκλῆς ἐρωτηθείς, εἰ δύναται γυναικὶ πλησιάζειν,
‘εὐφήμει, ἄνθρωπε’ εἶπεν ‘ἐλεύθερος γέγονα λυττῶντας
καὶ ἀγρίους δεσπότας διὰ τὸ γῆρας ἀποφυγών.’ χάριεν
γὰρ ἅμα ταῖς ἡδοναῖς συνεκλείπειν τὰς ἐπιθυμίας, ἃς
μήτε ηὗρεν μὲν φησὶν Ἀλκαῖος μήτε γυναῖκα.
τοῦτο δ´ οὐκ ἔστιν ἐπὶ τῆς φιλοπλουτίας· ἀλλ´ ὥσπερ βαρεῖα
καὶ πικρὰ δέσποινα κτάσθαι μὲν ἀναγκάζει χρῆσθαι
δὲ κωλύει, καὶ τὴν μὲν ἐπιθυμίαν ἐγείρει τὴν δ´ ἡδονὴν
ἀφαιρεῖται. τοὺς μὲν οὖν Ῥοδίους ὁ Στρατόνικος ἐπέσκωπτεν
εἰς πολυτέλειαν, οἰκοδομεῖν μὲν ὡς ἀθανάτους λέγων
ὀψωνεῖν δ´ ὡς ὀλιγοχρονίους· οἱ δὲ φιλάργυροι κτῶνται
μὲν ὡς πολυτελεῖς χρῶνται δ´ ὡς ἀνελεύθεροι, καὶ τοὺς
μὲν πόνους ὑπομένουσι τὰς δ´ ἡδονὰς οὐκ ἔχουσιν. ὁ γοῦν
Δημάδης ἐπιστὰς ἀριστῶντί ποτε Φωκίωνι καὶ θεασάμενος
αὐτοῦ τὴν τράπεζαν αὐστηρὰν καὶ λιτὴν ‘θαυμάζω
ς´ ὦ Φωκίων’ εἶπεν ‘ὅτι οὕτως ἀριστᾶν δυνάμενος πολιτεύῃ’
(αὐτὸς γὰρ εἰς τὴν γαστέρα ἐδημαγώγει, καὶ τὰς Ἀθήνας
μικρὸν ἡγούμενος τῆς ἀσωτίας ἐφόδιον ἐκ τῆς Μακεδονίας
ἐπεσιτίζετο· καὶ διὰ τοῦτ´ Ἀντίπατρος εἶπε θεασάμενος
αὐτὸν γέροντα ‘καθάπερ ἱερείου διαπεπραγμένου μηδὲν
ἔτι λοιπὸν ἢ τὴν γλῶσσαν εἶναι καὶ τὴν κοιλίαν’)· σὲ δ´
οὐκ ἄν τις, ὦ κακόδαιμον, θαυμάσειεν, εἰ δυνάμενος οὕτω
ζῆν ἀνελευθέρως καὶ ἀπανθρώπως καὶ ἀμεταδότως καὶ
πρὸς φίλους ἀπηνῶς καὶ πρὸς πόλιν ἀφιλοτίμως κακοπαθεῖς
καὶ ἀγρυπνεῖς καὶ ἐργολαβεῖς καὶ κληρονομεῖς καὶ
ὑποπίπτεις τηλικοῦτον ἔχων τῆς ἀπραγμοσύνης ἐφόδιον,
τὴν ἀνελευθερίαν; Βυζάντιόν τινα λέγουσιν ἐπὶ δυσμόρφῳ
γυναικὶ μοιχὸν εὑρόντ´ εἰπεῖν, ‘ὦ ταλαίπωρε, τίς ἀνάγκα;
σαπρὰ γὰρ ἁ τρύξ’. ἄγε σὺ κυκᾷς ὑφάπτεις, ὦ πόνηρε,
τοὺς βασιλεῖς ἔα πορίζεσθαι τοὺς ἐπιτρόπους τῶν βασιλέων
τοὺς ἐν ταῖς πόλεσι πρωτεύειν καὶ ἄρχειν ἐθέλοντας,
ἐκείνοις ἀνάγκη διὰ τὴν φιλοτιμίαν καὶ τὴν ἀλαζονείαν καὶ
τὴν κενὴν δόξαν ἑστιῶσιν χαριζομένοις δορυφοροῦσιν δῶρα
πέμπουσι στρατεύματα τρέφουσι μονομάχους ὠνουμένοις·
σὺ δὲ τοσαῦτα πράγματα συγχεῖς καὶ ταράττεις καὶ ‘στροβεῖς
σεαυτόν’, κοχλίου βίον ζῶν διὰ τὴν μικρολογίαν, καὶ
τὰ δυσχερῆ πάνθ´ ὑπομένεις οὐδὲν εὖ πάσχων, ὥσπερ
ὄνος βαλανέως ξύλα καὶ φρύγανα κατακομίζων, ἀεὶ καπνοῦ
καὶ τέφρας ἀναπιμπλάμενος λουτροῦ δὲ μὴ μετέχων μηδ´
ἀλέας μηδὲ καθαρειότητος.
| [5] Sophocle, interrogé s'il pouvait encore avoir commerce
avec une femme, répondit : «Ami, parlez mieux.
Je suis devenu libre, et la vieillesse m'a débarrassé de
tyrans furieux et cruels." Il est de bon goût, en effet,
quand on a quitté l'âge des plaisirs, d'en quitter aussi le
goût, quoi qu'en dise Alcée, qui prétend que ni hommes ni
femmes ne peuvent se dérober à leur violence. Il n'en est
pas de même pour l'amour des richesses. C'est comme un
despote exigeant et impitoyable. Il force d'acquérir, et il défend
d'user. II excite le désir, et il interdit la jouissance.
Stratonicus raillait les Rhodiens sur leur manie de dépenser,
disant qu'ils bâtissaient comme s'ils eussent été
immortels et qu'ils se nourrissaient comme s'ils n'avaient
que peu de temps à vivre. Mais les avares acquièrent en
hommes qui sont riches et usent en hommes sordides. Ils
endurent les fatigues et ils n'ont pas le plaisir.
Démade assistait un jour au dîner de Phocion, et voyant à
quel point cette table était frugale et simple : «Phocion,
lui dit-il, je ne comprends pas comment, lorsque vous pouvez
dîner ainsi, vous prenez part aux affaires publiques.» C'est
que Démade lui-même n'y prenait part qu'afin d'avoir le
moyen de satisfaire son ventre ; et comme il trouvait que la
ville d'Athènes ne pourvoyait qu'insuffisamment à son
intempérance, il mettait encore la Macédoine à contribution
pour sa victuaille. Aussi, quand il fut vieux, Antipater, qui
eut occasion de le voir, disait-il de lui, qu'il ressemblait à une
victime dépecée et qu'il ne lui restait plus que la langue
et le ventre. Et toi, misérable avare, comment ne s'étonnerait-on
pas de ta conduite? Quoi ! lorsque tu peux te résoudre
à mener une existence si servile et si indigne d'un
homme, à ne rien donner à qui que ce soit, à repousser
durement tes amis, à décliner toute marque de munificence
envers ta ville, alors même tu te condamnes aux tourments
et aux veilles, tu travailles comme un mercenaire, tu cours
après des successions, tu te soumets humblement à tout !
Ta dégradation même ne t'autorise-t-elle pas grandement à
ne rien faire? On raconte qu'un Byzantin dont la femme
etait très laide, surprit auprès d'elle un amant adultère :
«Malheureux ! lui dit-il, qui t'y forçait? J'ai du moins la
dot pour excuse. Mais toi, tu portes ici gratuitement le
trouble en allumant des feux illégitimes". Il faut que les
rois, ainsi que leurs ministres, quand ils veulent conserver
l'autorité et la suprématie dans les villes se procurent force
argent. Leur amour-propre, leur faste, le besoin de
représentation, les obligent à donner des festins, à se rendre
agréables, à s'entourer de satellites, à envoyer des présents,
à nourrir des troupes, à acheter des gladiateurs. Toi, dans
quelle prévision entasses-tu ces immenses richesses? Pourquoi
t'agites-tu, te tourmentes-tu comme tu le fais, quand ton avarice
"Te condamne à mener l'existence d'une huître"?
Qui t'oblige à supporter toutes ces misères, à te refuser
les moindres douceurs? Je crois voir l'âne qui apporte le
bois et les sarments pour le bain. Toujours plein de fumée
et de cendres, il ne se lave jamais, jamais il ne profite du
bain pour se chauffer ou pour se décrasser.
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