[1066] οὐδὲ δι´ εὐτραπελίαν ἡ ἀδικία (1066a) καὶ γέλωτα καὶ βωμολοχίαν
προστέτριπται τοῖς πράγμασιν, ὑφ´ ὧν οὐδ´ ὄναρ ἰδεῖν ἔστι τῆς ὑμνουμένης
ὁμολογίας. Ἔτι τὸ μὲν φαῦλον ἐπίγραμμα τοῦ ποιήματος πολλοστημόριόν ἐστι καὶ
μικρὸν ἐπέχει παντάπασιν ἐν τῇ κωμῳδίᾳ χωρίον, καὶ οὔτε πλεονάζει τὰ τοιαῦτα οὔτε
τῶν εὖ πεποιῆσθαι δοκούντων ἀπόλλυσι καὶ λυμαίνεται τὴν χάριν, τῆς δὲ
κακίας ἀναπέπλησται πάντα πράγματα, καὶ πᾶς ὁ βίος εὐθὺς ἐκ παρόδου καὶ
ἀρχῆς ἄχρι κορωνίδος ἀσχημονῶν καὶ ἐκπίπτων καὶ ταραττόμενος καὶ μηδὲν
ἔχων μέρος καθαρὸν μηδ´ ἀνεπίληπτον, ὡς οὗτοι λέγουσιν, αἴσχιστόν (1066b) ἐστι
δραμάτων ἁπάντων καὶ ἀτερπέστατον.
Ὅθεν ἡδέως ἂν πυθοίμην, πρὸς τί γέγονεν εὔχρηστος ἡ κακία τοῖς ὅλοις. Οὐ
γὰρ δὴ πρὸς τὰ οὐράνια καὶ θεῖα φήσει. Γελοῖον γὰρ εἰ, μὴ γενομένης ἐν
ἀνθρώποις μηδ´ οὔσης κακίας καὶ ἀπληστίας καὶ ψευδολογίας μηδ´ ἀλλήλους
ἡμῶν ἀγόντων καὶ φερόντων καὶ συκοφαντούντων καὶ φονευόντων, οὐκ ἂν
ἐβάδιζεν ὁ ἥλιος τὴν τεταγμένην πορείαν οὐδ´ ἂν ὥραις ἐχρῆτο καὶ περιόδοις
καιρῶν ὁ κόσμος οὐδ´ ἡ γῆ τὴν μέσην χώραν ἔχουσα τοῦ παντὸς ἀρχὰς
πνευμάτων ἐνεδίδου καὶ ὄμβρων. Ἀπολείπεται τοίνυν (1066c) πρὸς ἡμᾶς καὶ τὰ
ἡμέτερα τὴν κακίαν εὐχρήστως γεγονέναι· καὶ τοῦτ´ ἴσως οἱ ἄνδρες λέγουσιν.
Ἆρ´ οὖν ὑγιαίνομεν μᾶλλον κακοὶ ὄντες, ἤ τι δὴ μᾶλλον εὐποροῦμεν τῶν
ἀναγκαίων; Πρὸς δὲ κάλλος ἡμῖν ἢ πρὸς ἰσχὺν εὔχρηστος ἡ κακία γέγονεν; Οὔ
φασιν. Ἡ δέ, ποῦ γῆς ἐστιν· ὄνομα μόνον καὶ δόκημα νυκτερωπὸν ἐννύχων
σοφιστῶν· οὐχ ὥσπερ ἡ κακία πᾶσιν ὑπερέκκειται καὶ πᾶσιν ἐναργὴς οὐδενὸς
ὡς ἀχρήστου μεταλαβεῖν, ἥκιστα δ´ ἀρετῆς, ὦ θεοί, δι´ ἣν γεγόναμεν; Εἶτ´
οὐ δεινόν, εἰ γεωργῷ μὲν καὶ κυβερνήτῃ καὶ ἡνιόχῳ τὰ εὔχρηστα φορὰ καὶ
συνεργὰ πρὸς τὸ οἰκεῖόν ἐστι τέλος, τὸ δ´ ὑπὸ τοῦ θεοῦ πρὸς ἀρετὴν (1066d)
γεγονὸς ἀπολώλεκε τὴν ἀρετὴν καὶ διέφθαρκεν;
Ἀλλ´ ἴσως ἤδη καιρὸς ἐπ´ ἄλλο τρέπεσθαι, τοῦτο δ´ ἀφεῖναι.
(ΕΤΑΙΡΟΣ)
Οὐδαμῶς, ὦ φίλος, ἐμὴν χάριν· ἐπιθυμῶ γὰρ πυθέσθαι, τίνα δὴ τρόπον οἱ
ἄνδρες τὰ κακὰ τῶν ἀγαθῶν καὶ τὴν κακίαν τῆς ἀρετῆς προεισάγουσιν.
(ΔΙΑΔΟΥΜΕΝΟΣ)
Ἀμέλει καὶ ἄξιον, ὦ ἑταῖρε. Πολὺς μὲν ὁ ψελλισμὸς αὐτῶν, τέλος δὲ τὴν μὲν
φρόνησιν ἐπιστήμην ἀγαθῶν καὶ κακῶν οὖσαν ἀναιρεθέντων τῶν κακῶν καὶ
παντάπασιν ἀναιρεῖσθαι λέγουσιν· ὡς δ´ ἀληθῶν ὄντων ἀδύνατον μὴ καὶ ψευδῆ
τιν´ εἶναι, παραπλησίως οἴονται προσήκειν ἀγαθῶν ὑπαρχόντων καὶ κακὰ
ὑπάρχειν.
(ΕΤΑΙΡΟΣ)
Ἀλλὰ τοῦτο μὲν οὐ φαύλως λέλεκται, τὸ δ´ ἕτερον οἶμαι μηδ´ ἐμὲ λανθάνειν.
Ὁρῶ γὰρ διαφοράν, ᾗ τὸ μὲν οὐκ ἀληθὲς εὐθὺς ψεῦδός ἐστιν, οὐ μὴν εὐθὺς
κακὸν τὸ μὴ ἀγαθόν. Ὅθεν ἀληθῶν μὲν καὶ ψευδῶν οὐδέν ἐστι μέσον, ἀγαθῶν δὲ
καὶ κακῶν τὸ ἀδιάφορον. Καὶ οὐκ ἀνάγκη ταῦτα συνυπάρχειν ἐκείνοις· ἐξήρκει
γὰρ τὴν φύσιν ἔχειν τὸ ἀγαθόν, τοῦ κακοῦ μὴ δεομένην ἀλλὰ τὸ μήτ´ ἀγαθὸν
μήτε κακὸν ἔχουσαν. Πρὸς δὲ τὸν πρότερον λόγον εἴ τι λέγεται παρ´ ὑμῶν,
ἀκουστέον.
(ΔΙΑΔΟΥΜΕΝΟΣ)
Ἀλλὰ πολλὰ μὲν λέγεται, τὰ δὲ νῦν τοῖς ἀναγκαίοις χρηστέον. Πρῶτον μὲν οὖν
εὔηθες οἴεσθαι (1066f) φρονήσεως ἕνεκα γένεσιν κακῶν ὑποστῆναι καὶ ἀγαθῶν.
Ὄντων γὰρ ἀγαθῶν καὶ κακῶν ἐπιγίνεται φρόνησις, ὥσπερ ἰατρικὴ νοσερῶν
ὑποκειμένων καὶ ὑγιεινῶν. Οὐ γὰρ τὸ ἀγαθὸν ὑφίσταται καὶ τὸ κακόν, ἵνα
γένηται φρόνησις, ἀλλ´ ᾗ τὸ ἀγαθὸν καὶ τὸ κακὸν ὄντα καὶ ὑφεστῶτα
κρίνομεν, ὠνομάσθη φρόνησις· ὥσπερ ὄψις ἡ λευκῶν καὶ μελάνων αἴσθησις οὐ
γενομένων ὅπως ἔχοιμεν ὄψιν ἡμεῖς,
| [1066] (1066a)
Ce n'est point par amusement ou par plaisanterie qu'il l'a comme associé à
la vie humaine, puisque le vice n'a pas même l'ombre de cette conformité
avec la nature si fort célébrée par les stoïciens. D'ailleurs une
épigramme maligne n'est qu'une bien faible partie d'une pièce, et n'y
occupe qu'un très petit espace. Ces sortes de traits n'y abondent même
pas, et ils ne détruisent pas le mérite et la grâce de ce qu'il y a
réellement de bon dans la comédie. Mais dans le monde tout est plein de
vices, et la vie humaine, qui, depuis l'entrée et le prélude jusqu'au
dénouement, est remplie de désordres, de troubles et d'erreurs ; qui, de
l'aveu même des stoïciens, n'a rien de pur et d'irrépréhensible, est, de
tous les drames, (1066b) le moins agréable et le plus triste.
Mais je demanderais volontiers à Chrysippe de quelle utilité est le vice
dans l'univers. Il ne répondrait pas sans doute qu'il sert aux choses
célestes et divines ; il serait trop ridicule de dire que si le vice n'eût
pas régné parmi les hommes, s'ils n'eussent été ni avares, ni menteurs, ni
brigands, ni calomniateurs, ni meurtriers, le soleil n'aurait pas tenu la
route qui lui est prescrite, le monde n'aurait pas joui du retour périodique des
temps et des saisons, et la terre ne serait point placée au centre de l'univers pour
y produire les vents et les pluies. Il reste donc (1066c) à dire que c'est à nous
et à nos affaires que le vice est utile, et sans doute c'est ainsi que les
stoïciens l'entendent. Sommes-nous donc plus sains, pour être vicieux?
Avons-nous plus en abondance les choses nécessaires à la vie? Le vice nous
rend-il plus beaux et plus forts? Ils disent eux-mêmes que nous n'en
retirons aucun de ces avantages ; mais la vertu n'est pour eux qu'un vain
nom, une idée vaine et obscure, fruit des rêves des sophistes, qui n'est
pas exposée aux regards de tout le monde, comme le vice, qui ne participe
à rien d'utile, et moins encore à la vertu, pour laquelle nous avons été
formés. Et quelle absurdité de vouloir que ce qui est utile à un
laboureur, à un pilote, les conduise à la fin qu'ils se proposent, et que
l'homme, que Dieu a fait pour la vertu, (1066d) l'ait détruite et
anéantie? Mais je crois qu'il est temps de laisser là ce point de leur
doctrine, et de passer à un autre.
(LAMPRIAS)
Non, je vous en conjure, mon cher Diadumène. Je suis curieux de savoir
comment ces philosophes placent les maux avant les biens et le vice avant
la vertu.
(DIADUMÈNE)
Il est vrai, mon cher Lamprias, que c'est un article de leur doctrine
assez curieux, et sur lequel ils balbutient beaucoup. En un mot, ils
prétendent que si on supprime les maux on détruit aussi la prudence, qui
est la science des biens et des maux, comme l'existence du vrai suppose
nécessairement celle du faux, de même à peu près disent-ils que les biens
ne peuvent exister sans les maux.
(1066e) (LAMPRIAS)
L'une de ces assertions me paraît fondée, et je crois saisir l'autre, car
j'aperçois la différence entre les deux. De ce qu'une chose n'est pas
vraie, il s'ensuit qu'elle est fausse ; mais ce qui n'est pas un bien n'est pas
nécessairement un mal, parce qu'il n'y a point de milieu entre le vrai et
le faux; au lieu que l'indifférent tient le milieu entre le bien et le
mal, et l'un n'existe pas nécessairement avec l'autre. Le bien peut être
dans la nature sans qu'elle ait besoin du mal ; il lui faut seulement ce
qui n'est ni bien ni mal ; mais je serais bien aise de savoir ce que vos
philosophes disent sur la première assertion.
(DIADUMÈNE)
Ils en disent bien des choses, mais il faut pour le présent se borner au
nécessaire ; et d'abord, il est contraire au bon sens de croire (1066f)
que le bien et le mal ne subsistent que par rapport à la prudence ; car
les biens et les maux existaient déjà, et la prudence est venue ensuite,
comme la médecine n'a été inventée qu'après que les choses salutaires et
nuisibles à la santé ont existé. Ce n'est donc pas afin que la prudence
ait lieu de s'exercer que le bien et le mal existent ; mais la faculté par
laquelle nous jugeons le bien et le mal qui existent déjà se nomme la
prudence, comme la vue est la perception des objets blancs et noirs ; et
ces objets n'ont pas été faits pour que l'organe de la vue existât en nous,
|