[1061] Ἀλλὰ δι´ ἐκεῖνα μὲν ὡς λαμπρὰ καὶ μεγάλα κἂν ἀποθάνοιεν,
(1061a) ἐπὶ τούτοις δὲ σεμνύνειν ἑαυτὸν αἰσχύνη καὶ γέλως.
Λέγει δὲ καὶ Χρύσιππος ἐν τῷ περὶ τοῦ Διὸς συγγράμματι καὶ τῷ τρίτῳ περὶ
Θεῶν ψυχρὸν εἶναι καὶ ἄτοπον καὶ ἀλλότριον τὰ τοιαῦτα τῶν ἀπ´ ἀρετῆς
συμβαινόντων ἐπαινεῖν, ὅτι δῆγμα μυίας ἀνδρείως ὑπέμεινε καὶ δυσθανατώσης
γραὸς ἀπέσχετο σωφρόνως. Ἆρ´ οὖν παρὰ τὴν κοινὴν φιλοσοφοῦσιν ἔννοιαν, ἃς
αἰσχύνονται πράξεις ἐπαινεῖν, μηδὲν τούτων κάλλιον ὁμολογοῦντες; Ποῦ γὰρ
αἱρετὸν ἢ πῶς ἀποδεκτόν, ὃ μήτ´ ἐπαινεῖν μήτε θαυμάζειν ἄξιόν ἐστιν, ἀλλὰ
καὶ τοὺς ἐπαινοῦντας ἢ θαυμάζοντας ἀτόπους καὶ ψυχροὺς νομίζουσιν;
(1061b) Ἔτι δὲ μᾶλλον, οἶμαι, φανεῖταί σοι παρὰ τὴν κοινὴν ἔννοιαν, εἰ τῶν
μεγίστων ἀγαθῶν ὁ φρόνιμος μήτ´ ἀπόντων μήτ´ εἰ πάρεστιν αὐτῷ φροντίζοι,
ἀλλ´ οἷός ἐστιν ἐν τοῖς ἀδιαφόροις καὶ τῇ περὶ ταῦτα πραγματείᾳ καὶ
οἰκονομίᾳ, τοιοῦτος ἂν κἀν τούτοις εἴη. πάντες γὰρ δήπουθεν
« Εὐρυεδοῦς ὅσοι καρπὸν αἰνύμεθα χθονός » ,
οὗ μὲν καὶ παρόντος ὄνησίς ἐστι καὶ μὴ παρόντος ὥσπερ ἔνδεια καὶ ὄρεξις,
αἱρετὸν καὶ ἀγαθὸν καὶ ὠφέλιμον νοοῦμεν, ἐφ´ ᾧ δ´ οὐδὲν ἄν τις
πραγματεύσαιτο μὴ παιδιᾶς ἕνεκεν μηδὲ ῥᾳστώνης, τοῦτ´ ἀδιάφορον. Ἄλλῳ γὰρ
οὐδενὶ (1061c) τοῦ φιλοπόνου τὸν κενόσπουδον ἀφορίζομεν ἐν τοῖς ἔργοις
ἴσον ὄντα πολλάκις ἢ τῷ τὸν μὲν εἰς ἀνωφελῆ πονεῖν καὶ ἀδιάφορα τὸν δ´
ἕνεκά του τῶν συμφερόντων καὶ λυσιτελῶν. Ἀλλ´ οὗτοί γε τοὐναντίον· ὁ γὰρ
σοφὸς αὐτοῖς καὶ φρόνιμος ἐν πολλαῖς καταλήψεσι καὶ μνήμαις καταλήψεων
γεγονὼς ὀλίγας πρὸς αὑτὸν ἡγεῖται, τῶν τ´ ἄλλων οὐ πεφροντικὼς οὔτ´
ἔλαττον ἔχειν οὔτε πλέον οἴεται μνημονεύων ὅτι πέρυσι κατάληψιν ἔλαβε
πταρνυμένου Δίωνος ἢ σφαιρίζοντος Θέωνος· καίτοι πᾶσα κατάληψις ἐν τῷ σοφῷ
καὶ μνήμη τὸ ἀσφαλὲς ἔχουσα καὶ βέβαιον εὐθύς ἐστιν ἐπιστήμη καὶ ἀγαθὸν
μέγα καὶ μέγιστον. (1061d) Ἆρ´ οὖν ὁμοίως ὑγιείας ἐπιλειπούσης,
αἰσθητηρίου καμόντος, οὐσίας ἀπολλυμένης ἄφροντίς ἐστι καὶ πρὸς αὑτὸν
οὐδὲν ἡγούμενος τούτων ὁ σοφός; Ἢ νοσῶν μὲν ἰατροῖς τελεῖ μισθοὺς χρημάτων
δ´ ἕνεκα πρὸς Λεύκωνα πλεῖ τὸν ἐν Βοσπόρῳ δυνάστην καὶ πρὸς Ἰδάνθυρσον
ἀποδημεῖ τὸν Σκύθην, ὥς φησι Χρύσιππος, τῶν δ´ αἰσθήσεων ἔστιν ἃς ἀποβαλὼν
οὐδὲ ζῆν ὑπομένει; Πῶς οὖν οὐχ ὁμολογοῦσι παρὰ τὰς ἐννοίας φιλοσοφεῖν, ἐπὶ
τοῖς ἀδιαφόροις τοσαῦτα πραγματευόμενοι καὶ σπουδάζοντες, ἀγαθῶν δὲ
μεγάλων καὶ παρόντων καὶ μὴ παρόντων ἀδιαφόρως ἔχοντες;
(1061e) Ἀλλὰ κἀκεῖνο παρὰ τὰς κοινὰς ἐννοίας ἐστίν, ἄνθρωπον ὄντα μὴ
χαίρειν ἐκ τῶν μεγίστων κακῶν ἐν τοῖς μεγίστοις ἀγαθοῖς γενόμενον. Τοῦτο
δὲ πέπονθεν ὁ τούτων σοφός· ἐκ γὰρ τῆς ἄκρας κακίας μεταβαλὼν εἰς τὴν
ἄκραν ἀρετὴν καὶ τὸν ἀθλιώτατον βίον διαφυγὼν ἅμα καὶ κτησάμενος τὸν
μακαριώτατον οὐδὲν ἐπίδηλον εἰς χαρὰν ἔσχεν, οὐδ´ ἐπῆρεν αὐτὸν οὐδ´
ἐκίνησεν ἡ τοσαύτη μεταβολή, κακοδαιμονίας ἀπαλλαγέντα καὶ μοχθηρίας
ἁπάσης, εἰς δ´ ἀσφαλῆ τινα καὶ βεβαίαν παντέλειαν ἀγαθῶν ἐξικόμενον.
Παρὰ τὴν ἔννοιάν ἐστιν ἀγαθῶν μὲν εἶναι μέγιστον τὸ ἀμετάπτωτον ἐν ταῖς
κρίσεσι καὶ βέβαιον, μὴ δεῖσθαι (1061f) δὲ τούτου τὸν ἐπ´ ἄκρον
προκόπτοντα μηδὲ φροντίζειν παραγενομένου, πολλάκις δὲ μηδὲ τὸν δάκτυλον
προτεῖναι ταύτης γ´ ἕνεκα τῆς ἀσφαλείας καὶ βεβαιότητος, ἣν τέλειον ἀγαθὸν
καὶ μέγα νομίζουσιν. Οὐ μόνον οὖν ταῦτα λέγουσιν οἱ ἄνδρες, ἀλλὰ κἀκεῖνα
πρὸς τούτοις,
| [1061] Cependant ils veulent que la première action soit grande
et honorable ; (1061a) mais il serait ridicule, disent-ils, de se vanter de
la seconde. Chrysippe lui-même a dit dans son traité de Jupiter et dans
son troisième livre des Dieux, qu'il serait puéril et absurde de louer
certaines actions, par exemple, de supporter courageusement la piqûre
d'une mouche, et de s'abstenir d'une femme qui a déjà un pied dans la
fosse, quoique ces actions aient la vertu pour principes. N'est-ce pas
aller contre le bon sens que de rougir de louer des actions qu'ils
regardent comme les plus belles du monde ? Peut-on, sans se montrer sot et
ridicule, désirer et choisir ce qu'on ne doit ni louer ni admirer?
(1061b) Mais sans doute que vous trouverez encore moins sensé de prétendre
que le sage ne fait pas plus de cas de la jouissance qu'il ne se plaint de
la privation des plus grands biens, et qu'il se conduit dans leur usage et
leur disposition comme il ferait à l'égard des choses les plus
indifférentes; car nous tous "Qui consumons les fruits que la terre nous donne",
nous estimons qu'une chose dont la jouissance nous est commode, dont la
privation se fait sentir et excite nos désirs, est bonne, utile et digne
d'être recherchée, et nous ne regardons comme indifférentes que celles que
nous ne voudrions pas acquérir par la moindre peine, à moins que ce ne fût
pour s'amuser et pour passer le temps ; car la plus grande différence que
l'on connaisse (1061c) entre un homme laborieux et celui qui ne se fait
que des occupations frivoles, c'est que celui-ci se fatigue pour des
choses indifférentes et inutiles, et l'autre pour des choses utiles et
importantes. Les stoïciens en jugent tout autrement. Selon eux, l'homme
sage et prudent, qui a plusieurs perceptions et plusieurs souvenirs de
perceptions, en voit peu d'intéressantes pour lui, ne fait point de cas
des autres, et croit qu'il lui est très indifférent de se souvenir qu'il a vu, il y a
quelques jours, un de ses amis éternuer ou jouer à la paume. Cependant
toute perception et tout souvenir, quand ils portent sur des bases
solides, forment la science dans l'esprit du sage, et c'est pour lui un
bien et un très grand bien. (1061d) Mais peut-il être tranquille et
indifférent quand il est privé de la santé, quand il souffre dans quelque
partie de son corps, quand il a perdu ses biens? Mais plutôt, dès qu'il
est malade, n'appelle-t-il pas un médecin ? Ne va-t-il pas pour gagner de
l'argent à la cour de Leucon, prince du Bosphore, ou d'Indathyrse, roi des
Scythes, comme le dit Chrysippe lui-même? Il est même des privations qui
le déterminent à quitter la vie. Peuvent-ils nier qu'ils ne renversent
toutes les idées communes, lorsqu'ils se donnent tant de peine et de soin
pour les choses indifférentes, et qu'ils ne sont pas plus affectés de la
jouissance que de la privation des plus grands biens?
(1061e) Est-il plus sensé de dire qu'un homme ne sent pas de plaisir à
passer de l'excès des maux au comble des biens? Telle est cependant la
disposition de leur sage. Lorsque de la corruption la plus profonde il
s'élève à la vertu la plus parfaite, qu'il sort de la vie la plus
misérable pour entrer dans l'état le plus heureux, il ne donne aucun signe
de joie ; il ne s'élève ni ne s'émeut d'un tel changement, qui, de l'abîme
des vices et du sein de la misère, le fait parvenir à la plus grande
abondance des biens les plus solides elles plus durables.
Il est aussi peu raisonnable de dire que l'assurance d'être exempt
d'erreur dans ses opinions et dans ses jugements étant le plus grand bien
de l'homme, elle n'est pas nécessaire (1061f) à celui qui est parvenu au
plus haut point de perfection, qui n'en apprécie pas la jouissance, qu'il
ne daignerait pas même étendre la main pour obtenir cette certitude et
cette stabilité, qu'ils regardent cependant comme le bien le plus grand et
le plus parfait. Ils vont encore plus loin :
|