[1071] (1071a)
ἔτι δὲ μᾶλλόν ἐστι παρὰ τὴν ἔννοιαν ἄλλο μὲν εἶναι τέλος, ἐπ´ ἄλλο δὲ τῶν
πραττομένων ἕκαστον ἀναφέρεσθαι· τούτων δ´ αὐτοὺς ὑπομένειν ἀνάγκη
θάτερον. Εἰ γὰρ αὐτὰ μὲν τὰ πρῶτα κατὰ φύσιν ἀγαθὰ μή ἐστιν, ἡ δ´
εὐλόγιστος ἐκλογὴ καὶ λῆψις αὐτῶν καὶ τὸ πάντα τὰ παρ´ ἑαυτὸν ποιεῖν
ἕκαστον ἕνεκα τοῦ τυγχάνειν τῶν πρώτων κατὰ φύσιν, ἐπ´ ἐκεῖνο δεῖ πάντα
ἔχειν τὰ πραττόμενα τὴν ἀναφοράν, τὸ τυγχάνειν τῶν πρώτων κατὰ φύσιν.
Εἴπερ γὰρ οἴονται μὴ στοχαζομένους μηδ´ ἐφιεμένους τοῦ τυχεῖν ἐκείνων τὸ
τέλος ἔχειν ἄλλο ἕνεκα οὗ δεῖ ἀναφέρεσθαι †, τὴν τούτων ἐκλογὴν καὶ μὴ
ταῦτα· (1071b) τέλος μὲν γὰρ τὸ ἐκλέγεσθαι καὶ λαμβάνειν ἐκεῖνα φρονίμως,
ἐκεῖνα δ´ αὐτὰ καὶ τὸ τυγχάνειν αὐτῶν οὐ τέλος, ἀλλ´ ὥσπερ ὕλη τις
ὑπόκειται τὴν ἐκλεκτικὴν ἀξίαν ἔχουσα· τοῦτο γὰρ οἶμαι καὶ τοὔνομα λέγειν
καὶ γράφειν αὐτοὺς ἐνδεικνυμένους τὴν διαφοράν.
(ΕΤΑΙΡΟΣ)
Ἀνδρικῶς μὲν ἀπομεμνημόνευκας καὶ ὃ λέγουσι καὶ ὡς λέγουσι.
(ΔΙΑΔΟΥΜΕΝΟΣ)
Σκόπει δ´ ὅτι ταὐτὸ πάσχουσι τοῖς τὴν σκιὰν ὑπεράλλεσθαι τὴν ἑαυτῶν
ἐφιεμένοις· οὐ γὰρ ἀπολείπουσιν ἀλλὰ συμμεταφέρουσι τὴν ἀτοπίαν τῷ λόγῳ,
πορρωτάτω τῶν ἐννοιῶν ἀφισταμένην. Ὡς γὰρ εἰ τοξεύοντα (1071c) φαίη τις
οὐχὶ πάντα ποιεῖν τὰ παρ´ αὑτὸν ἕνεκα τοῦ βαλεῖν τὸν σκοπὸν ἀλλ´ ἕνεκα τοῦ
πάντα ποιῆσαι τὰ παρ´ αὑτόν, αἰνίγμασιν ὅμοια καὶ τεράστια δόξειεν ἂν
περαίνειν, οὕτως οἱ τριπέμπελοι βιαζόμενοι μὴ τὸ τυγχάνειν τῶν κατὰ φύσιν
τοῦ στοχάζεσθαι τῶν κατὰ φύσιν εἶναι τέλος, ἀλλὰ τὸ λαμβάνειν καὶ
ἐκλέγεσθαι, μηδὲ τὴν ἔφεσιν τῆς ὑγιείας καὶ δίωξιν εἰς τὸ ὑγιαίνειν ἑκάστῳ
τελευτᾶν, ἀλλὰ τοὐναντίον τὸ ὑγιαίνειν ἐπὶ τὴν ἔφεσιν αὐτοῦ καὶ δίωξιν
ἀναφέρεσθαι, περιπάτους τινὰς καὶ ἀναφωνήσεις καὶ τομὰς νὴ Δία καὶ
φαρμακείας εὐλογίστους τέλη ποιούμενοι τῆς ὑγιείας, οὐχὶ τούτων ἐκείνην,
ὅμοια ληροῦσι τῷ λέγοντι
(1071d) « Δειπνῶμεν, ἵνα θύωμεν, ἵνα λουώμεθα » .
Μᾶλλον δ´ ἐκεῖνος εἰωθός τι καὶ νενομισμένον ἀλλάττει καὶ ταράττει τὴν
τάξιν· ἃ δ´ οὗτοι λέγουσι, τὴν πᾶσαν ἔχει τῶν πραγμάτων ἀνατροπὴν καὶ
σύγχυσιν·
« Οὐ σπουδάζομεν εὐκαίρως περιπατεῖν ἕνεκα τοῦ πέττειν τὴν τροφὴν ἀλλὰ
πέττειν τὴν τροφὴν ἕνεκα τοῦ περιπατεῖν εὐκαίρως. »
Ἧπου καὶ τὴν ὑγίειαν ἡ φύσις τοῦ ἐλλεβόρου χάριν πεποίηκεν, οὐ τῆς ὑγιείας
τὸν ἐλλέβορον; Τί γὰρ ἄλλο καταλείπεται αὐτοῖς εἰς ὑπερβολὴν
παραδοξολογίας ἢ τοιαῦτα ληρεῖν; Τί γὰρ διαφέρει τοῦ λέγοντος γεγονέναι
τὴν (1071e) ὑγίειαν τῶν φαρμάκων ἕνεκα, μὴ τὰ φάρμακα τῆς ὑγιείας ὁ τὴν
ἐκλογὴν τὴν περὶ τὰ φάρμακα καὶ σύνθεσιν καὶ χρῆσιν αὐτῶν αἱρετωτέραν
ποιῶν τῆς ὑγιείας, μᾶλλον δὲ τὴν μὲν οὐδ´ ὅλως αἱρετὸν ἡγούμενος, ἐν δὲ τῇ
περὶ ἐκεῖνα πραγματείᾳ τὸ τέλος τιθέμενος καὶ τὴν ἔφεσιν ἀποφαίνων τῆς
τεύξεως τέλος, οὐ τῆς ἐφέσεως τὴν τεῦξιν;
« Τῇ γὰρ ἐφέσει νὴ Δία τὸ εὐλογίστως καὶ τὸ φρονίμως πρόσεστι. »
Πάνυ μὲν οὖν, φήσομεν, ἂν ὡς πρὸς τέλος ὁρᾷ τὴν τεῦξιν ὧν διώκει καὶ τὴν
κτῆσιν· εἰ δὲ μή, τὸ εὐλόγιστον αὐτῆς ἀφαιρεῖται, πάντα ποιούσης ἕνεκα τοῦ
τυχεῖν, οὗ τυχεῖν οὐ σεμνὸν οὐδὲ μακάριόν ἐστι.
(1071f) Ἐπειδὴ δ´ ἐνταῦθα τοῦ λόγου γεγόναμεν, τί ἂν φαίης μᾶλλον
εἶναι παρὰ τὴν ἔννοιαν ἢ τὸ μὴ λαβόντας ἔννοιαν ἀγαθοῦ μηδὲ σχόντας
ἐφίεσθαι τοῦ ἀγαθοῦ καὶ διώκειν; Ὁρᾷς γὰρ ὅτι καὶ Χρύσιππος εἰς ταύτην
{μᾶλλον} συνελαύνει τὸν Ἀρίστωνα τὴν ἀπορίαν, ὡς τῶν πραγμάτων οὐ
διδόντων τὴν πρὸς τὸ μήτ´ ἀγαθὸν μήτε κακὸν ἀδιαφορίαν ἐπινοῆσαι τοῦ
ἀγαθοῦ καὶ τοῦ κακοῦ μὴ προεπινοηθέντων· οὕτως γὰρ αὑτῆς φανεῖσθαι τὴν
ἀδιαφορίαν προϋφισταμένην,
| [1071] (1071a) Mais n'est-il pas encore plus contraire au sens commun de
soutenir qu'il y a une fin qui nous est proposée pour agir; que cependant
nos actions se rapportent à une autre, et qu'il faut nécessairement agir
pour l'une des deux? Car si les choses qui sont les premières selon la
nature ne doivent pas être recherchées pour elles-mêmes, et ne sont pas
notre fin dernière, mais que ce soit plutôt le choix raisonnable que nous
en faisons pour nous y attacher; si chacun doit faire tout ce qui est en
lui pour obtenir ces premiers biens conformes à la nature, et que toutes
nos actions se rapportent à cette fin, je veux dire à acquérir ces
premiers biens naturels; si, dis-je, ils sont dans cette opinion, il faut
que sans désirer d'obtenir ces biens comme fin, ils en aient une autre
à laquelle ils rapportent le choix qu'ils font de ces premières choses naturelles,
et non ces choses elles-mêmes. (1071b)
Or, cette fin sera de les choisir et de les recevoir avec prudence. Mais ces
choses mêmes et leur possession auront peu de prix, et ne seront, pour
ainsi dire, que la matière et le sujet d'un choix qui soit digne de nous.
Il me semble que ce sont là les expressions dont ils se servent pour faire
connaître cette différence.
(LAMPRIAS)
Vous avez retenu à merveille leurs opinions et la manière dont ils les
expriment.
(DIADUMÈNE)
Mais remarquez qu'ils font comme ceux qui veulent sauter par-dessus leur
ombre. Ils ne laissent pas derrière eux l'absurdité de leurs discours, ils
la transportent partout, et font voir la répugnance manifeste qu'ils ont
avec le sens commun. Si quelqu'un venait nous dire qu'un homme qui tire de
l'arc (1071c) ne fait pas tout ce qui est en lui pour atteindre le but,
mais qu'il veut seulement faire tout ce qui est en lui, un pareil discours
serait pour nous une énigme inexplicable. N'en est-il pas de même des
assertions de ces triples radoteurs, lorsqu'ils veulent nous persuader que
ce n'est pas l'acquisition des biens conformes à la nature, mais seulement
leur choix qui est la fin que nous devons avoir en les recherchant ; que
le désir et la poursuite de la santé ne se terminent pas pour chacun de
nous à la santé, mais qu'au contraire c'est la santé qui se rapporte a ce
désir et à cette poursuite ; que les promenades, les lectures à voix
haute, et qui, plus est, les amputations, les remèdes administrés à
propos, sont les fins de la santé et non la santé, la fin de tous ces
moyens? N'est-ce pas là rêver aussi réellement que celui qui dirait :
(1071d) Soupons, afin de sacrifier aux dieux, ou afin de nous baigner? Les
assertions des stoïciens sont encore plus contraires aux idées reçues, et
renversent plus ouvertement l'ordre et les usages établis. Ce n'est donc
pas pour faire la digestion que nous nous promenons dans un
temps favorable, mais nous digérons afin de pouvoir nous promener à
propos. Sans doute que la nature nous aura donné aussi (1071e) la santé à
cause de l'ellébore, et non l'ellébore pour la santé. Car que leur
reste-t-il à dire, pour arriver au comble du paradoxe, que d'avancer de
pareilles sottises? Quelle différence y a-t-il à soutenir que la santé est
faite pour les remèdes, et non les remèdes pour la santé, ou à prétendre
que le choix des remèdes, leur composition et leur usage sont préférables
à la santé? ou plutôt à vouloir que la santé ne soit pas même au rang des
choses désirables, et que le soin qu'exigent les remèdes en soit la fin?
N'affirment-ils pas que la jouissance se rapporte au désir, et non le
désir à la jouissance? Mais, disent-ils, au désir est joint naturellement
le soin d'agir avec raison et avec prudence. Sans doute, leur répondrons
nous, si le désir se rapporte à la jouissance et à la possession de ce
qu'il poursuit. Autrement, c'est ôter à l'homme toute raison, que de
supposer qu'il fait tout pour acquérir des choses qu'il n'est ni honorable
ni heureux de posséder.
(1071f) (LAMPRIAS)
Puisque nous sommes tombés sur cette matière, il me semble que ce qu'il y
a de moins conforme au sens commun, c'est de prétendre qu'on peut désirer
et poursuivre un bien dont on n'a aucune idée. Car vous voyez que
Chrysippe lui-même presse vivement Ariston par l'objection qu'il lui fait
d'avoir supposé qu'avant que nous ayons l'idée du bien et du mal, il
existe des choses indifférentes qui ne sont ni bonnes ni mauvaises.
Comment ces choses indifférentes peuvent-elles subsister?
|