[1070] Οὐ γὰρ ὥσπερ οἱ τῆς γῆς ἀφαλλόμενοι καὶ καταφερόμενοι πάλιν
ἐπ´ αὐτὴν (1070a) ἐταράττοντο, τὰ αὐτὰ πράγματα ληπτὰ καὶ οὐχ αἱρετὰ καὶ
οἰκεῖα καὶ οὐκ ἀγαθὰ καὶ ἀνωφελῆ μὲν εὔχρηστα δέ, καὶ οὐδὲν μὲν πρὸς ἡμᾶς
ἀρχὰς δὲ τῶν καθηκόντων ὀνομάζοντες, ἀλλ´ οἷος ὁ λόγος, τοιοῦτος ἦν ὁ βίος
τῶν ἀνδρῶν ἐκείνων, ἃ ἔπραττον οἷς ἔλεγον οἰκεῖα καὶ σύμφωνα παρεχόντων. Ἡ
δὲ τούτων αἵρεσις, ὥσπερ ἡ παρ´ Ἀρχιλόχῳ γυνή
« Τῇ μὲν ὕδωρ ἐφόρει δολοφρονέουσα χειρὶ τῇ δὲ πῦρ »,
τοῖς μὲν προσάγεται τὴν φύσιν τοῖς δ´ ἀπωθεῖται δόγμασι· μᾶλλον δὲ τοῖς
μὲν ἔργοις καὶ τοῖς πράγμασιν ὡς αἱρετῶν καὶ ἀγαθῶν ἔχονται τῶν κατὰ
φύσιν, τοῖς δ´ ὀνόμασι καὶ τοῖς ῥήμασιν ὡς ἀδιάφορα (1070b) καὶ ἄχρηστα
καὶ ἀρρεπῆ πρὸς εὐδαιμονίαν ἀναίνονται καὶ προπηλακίζουσιν.
Ἐπεὶ δὲ καθόλου τἀγαθὸν ἅπαντες ἄνθρωποι χαρτὸν νοοῦσιν, εὐκταῖον εὐτυχὲς
ἀξίαν ἔχον τὴν μεγίστην αὔταρκες ἀπροσδεές, ὅρα τὸ τούτων παρατιθεὶς
ἀγαθόν, ἆρά γε χαρτὸν ποιεῖ τὸ φρονίμως τὸν δάκτυλον προτεῖναι; Τί δ´;
Εὐκταῖόν ἐστι φρονίμη στρέβλωσις; Εὐτυχεῖ δ´ ὁ κατακρημνίζων ἑαυτὸν
εὐλόγως; Ἀξίαν δ´ ἔχει τὴν μεγίστην, ὃ πολλάκις αἱρεῖ λόγος ἀντὶ τοῦ μὴ
ἀγαθοῦ προέσθαι; Τέλειον δὲ καὶ αὔταρκές ἐστιν, οὗ {μὴ} παρόντος, ἂν μὴ
τυγχάνωσι τῶν ἀδιαφόρων, οὐχ ὑπομένουσιν οὐδὲ βούλονται ζῆν;
Γέγονε δ´ ἕτερος λόγος, ὑφ´ οὗ μᾶλλον (1070c) ἡ συνήθεια παρανενόμηται,
τὰς μὲν γνησίας ὑφαιροῦντος αὐτοῦ καὶ ἀποσπῶντος ἐννοίας ὥσπερ τέκνα,
νόθας δ´ ὑποβάλλοντος ἑτέρας θηριώδεις καὶ ἀλλοκότους καὶ ταύτας ἀντ´
ἐκείνων ἐκτιθηνεῖσθαι καὶ στέργειν ἀναγκάζοντος; Καὶ ταῦτ´ ἐν τοῖς περὶ
ἀγαθῶν καὶ κακῶν αἱρετῶν τε καὶ φευκτῶν οἰκείων τε καὶ ἀλλοτρίων, ἃ μᾶλλον
ἔδει θερμῶν {τε} καὶ ψυχρῶν λευκῶν τε καὶ μελάνων σαφεστέραν ἔχειν τὴν
ἐνάργειαν· ἐκείνων μὲν γὰρ ἔξωθέν εἰσιν αἱ φαντασίαι ταῖς αἰσθήσεσιν
ἐπεισόδιοι, ταῦτα δ´ ἐκ τῶν ἀρχῶν τῶν ἐν ἡμῖν σύμφυτον ἔχει τὴν γένεσιν;
Οἱ δ´ ὥσπερ εἰς τὸν ψευδόμενον ἢ τὸν κυριεύοντα μετὰ τῆς (1070d)
διαλεκτικῆς ἐμβάλλοντες εἰς τὸν περὶ εὐδαιμονίας τόπον ἔλυσαν μὲν οὐδεμίαν
ἀμφιβολίαν ἐν αὐτῷ μυρίας δ´ ἐποίησαν.
Καὶ μὴν ὅτι δυοῖν ἀγαθῶν, τοῦ μὲν τέλους τοῦ δὲ πρὸς τὸ τέλος, μεῖζόν ἐστι
τὸ τέλος καὶ τελειότερον, ὑπ´ οὐδενὸς ἀγνοεῖται. Γινώσκει δὲ καὶ Χρύσιππος
τὴν διαφοράν, ὡς δῆλόν ἐστιν ἐν τῷ τρίτῳ περὶ Ἀγαθῶν· τοῖς γὰρ τέλος
ἡγουμένοις τὴν ἐπιστήμην ἀνομολογεῖ, καὶ τίθησιν - - - ἔν γε τοῖς περὶ
Δικαιοσύνης· εἰ μέν τις ὑπόθοιτο τὴν ἡδονὴν τέλος, οὐκ οἴεται σῴζεσθαι τὸ
δίκαιον· εἰ δὲ μὴ τέλος ἀλλ´ ἁπλῶς ἀγαθόν, οἴεται· τὰς δὲ λέξεις οὐκ
οἴομαί σε δεῖσθαι νῦν ἀκούειν ἐμοῦ καταλέγοντος· τὸ (1070e) γὰρ τρίτον
περὶ Δικαιοσύνης βιβλίον ἔστι πανταχόθεν λαβεῖν. Ὅταν οὖν αὖθις, ὦ φίλε,
μηθὲν ἀγαθὸν λέγωσι μηθενὸς ἀγαθοῦ μεῖζον εἶναι μηδ´ ἔλαττον ἀλλ´ ἴσον τῷ
τέλει τὸ μὴ τέλος, οὐ ταῖς κοιναῖς μόνον ἐννοίαις ἀλλὰ καὶ τοῖς αὑτῶν
λόγοις φαίνονται μαχόμενοι. Καὶ πάλιν εἰ δυοῖν κακοῖν ὑφ´ οὗ μὲν γινόμεθα
χείρονες, ὅταν παραγένηται, τὸ δὲ βλάπτει μὲν οὐ ποιεῖ δὲ χείρονας, παρὰ
τὴν ἔννοιάν ἐστι μὴ λέγειν ἐκεῖνο μεῖζον εἶναι κακόν, ὑφ´ οὗ γινόμεθα
χείρονες, ὅταν παραγένηται, τοῦ ὃ βλάπτει μὲν οὐ ποιεῖ δὲ χείρονας, μηδὲ
κακίονα βλάβην τὴν κακίονας ἡμᾶς ἀποτελοῦσαν. Ἀλλ´ ὁμολογεῖ γε Χρύσιππος
εἶναί τινας φόβους καὶ λύπας καὶ ἀπάτας, αἳ βλάπτουσι μὲν ἡμᾶς χείρονας δ´
οὐ ποιοῦσιν.
(1070f) Ἔντυχε δὲ τῷ πρώτῳ τῶν πρὸς Πλάτωνα γεγραμμένων περὶ Δικαιοσύνης·
καὶ γὰρ ἄλλων ἕνεκα τὴν ἐκεῖ τοῦ ἀνδρὸς εὑρησιλογίαν ἄξιον ἱστορῆσαι,
πάντων ἁπλῶς πραγμάτων καὶ δογμάτων οἰκείων ὁμοῦ καὶ ἀλλοτρίων ἀφειδοῦσαν.
Παρὰ τὴν ἔννοιάν ἐστι δύο τέλη καὶ σκοποὺς προκεῖσθαι τοῦ βίου καὶ μὴ
πάντων, ὅσα πράττομεν, ἐφ´ ἕν τι γίνεσθαι τὴν ἀναφοράν·
| [1070] Ils n'ont pas fait comme ceux qui s'élèvent un moment de terre
pour y retomber aussitôt ; (1070a) ils n'ont pas tout brouillé,
tout confondu, en disant que les mêmes choses sont à
fuir et à rechercher, qu'elles ont de la conformité avec la nature et
qu'elles ne sont pas bonnes, qu'elles donnent du profit et qu'elles sont
inutiles, qu'elles ne nous intéressent en rien et qu'elles sont les
principes de nos devoirs. La vie de ces philosophes était conforme à leur
langage, et ils avaient grand soin que leurs actions fussent d'accord avec
leurs discours. Mais la secte du Portique, semblable à cette femme rusée
d'Archiloque, qui portait de l'eau dans une main et du feu dans l'autre,
admet la nature dans quelques uns de ses dogmes, et la rejette dans
d'autres. Ou plutôt, dans leurs actions, dans toute leur conduite, ils
s'attachent aux choses qui sont conformes à la nature, parce qu'ils les
croient bonnes et dignes d'être recherchées ; (1070b) mais, dans leur
discours, ils les méprisent, ils les rejettent comme indifférentes, et
comme inutiles à la vertu pour la conduire au bonheur. En général, tous
les hommes regardent le bien comme une source de plaisir; ils le croient
digne de nos vœux, capable de faire notre bonheur, plein de dignité,
tenant lieu de tout et remplissant tous nos besoins. Comparez avec ces
qualités celles que les stoïciens donnent à leur souverain bien.
Croyez-vous que ce soit une source de plaisir, que d'étendre le doigt avec
prudence? Est-ce une chose désirable, qu'une torture appliquée avec
précaution? Est-on heureux quand on se jette, par un motif raisonnable,
dans un précipice ? Quelle grande dignité, dans un bien que la raison
rejette souvent, pour lui préférer ce qui n'est pas au nombre des biens ?
Est-ce là un bien parfait, et qui se suffise à lui-même, quand, malgré
sa jouissance, ces philosophes croient devoir se condamner à mourir s'ils
ne peuvent y joindre des choses indifférentes?
Il existe une autre opinion des stoïciens, (1070c) qui viole ouvertement les
idées reçues, qui détruit les notions naturelles et légitimes pour y en
substituer d'étrangères et d'absurdes, qu'elle veut nous forcer de
recevoir à la place des premières. Cette opinion est celle qui traite
des biens et des maux, des objets à fuir et à rechercher, des choses
analogues ou contraires à la nature, dont cependant les notions doivent
être plus claires et plus frappantes que celles du froid et du chaud, du
noir et du blanc. Car ces dernières perceptions sont introduites du dehors
par les organes des sens, et les autres tirent naturellement leur origine
des biens qui sont en nous. Mais les stoïciens, armés de leur vaine
dialectique, (1070d) ont fait irruption dans le séjour du bonheur, comme
dans le menteur et le dominant; et au lieu de résoudre les
difficultés inhérentes à cette question, ils en ont introduit de
nouvelles. Personne n'ignore qu'entre les deux espèces de bien, dont l'une
est la fin et l'autre le moyen, la première est la plus grande et la plus
parfaite. Chrysippe lui-même reconnaît cette différence, comme on le voit
clairement dans le troisième livre de son traité sur les Biens. Il est de
l'avis de ceux qui croient que la science est une fin pour l'homme,
(1070e) et il le répète dans son traité de la Justice. Il dit que celui
qui fait consister le souverain bien dans la volupté détruit la justice ;
mais il est d'accord avec ceux qui donnent simplement à la volupté la
qualité de bien, et non celle de fin.
Je crois inutile de rapporter ici ses propres expressions,
parce que ce troisième livre de son traité sur les Biens se trouve
partout. Lors donc qu'ils disent, mon cher Lamprias, que nuls biens ne
sont plus ou moins grands que d'autres, et que ceux qui sont la fin de
l'homme égalent ceux qui ne sont que le moyen, ils contredisent non
seulement les notions communes, mais leurs propres assertions. D'ailleurs
de deux maux, dont l'un nous rend pires que nous n'étions, et l'autre nous
nuit, à la vérité, mais ne nous fait pas devenir plus méchants, le premier
est, ce me semble, le plus grand. Or, Chrysippe lui-même avoue qu'il y a
des craintes, des douleurs, et des erreurs qui nous sont nuisibles, mais
qui ne nous rendent pas pires que nous n'étions.
(1070f) Lisez son premier livre sur la Justice, qu'il a composé contre
Platon; car il est utile, pour plusieurs raisons, de connaître les
rêveries de cet homme qui parle sur toutes sortes de matières, qui traite
toutes les questions, soit celles qui sont particulières à sa secte, soit
celles qui lui sont étrangères, et toujours en heurtant les idées
communes. Il dit, par exemple, qu'il y a deux objets et deux fins proposés
à notre vie, et que toutes nos actions ne se rapportent pas à une fin unique.
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