[1069] (1069a)
Ἐλήρει δ´ Ἀριστοτέλης, ἐλήρει δὲ Ξενοκράτης, ὠφελεῖσθαι μὲν ἀνθρώπους ὑπὸ
θεῶν ὠφελεῖσθαι δ´ ὑπὸ γονέων ὠφελεῖσθαι δ´ ὑπὸ καθηγητῶν ἀποφαινόμενοι,
τὴν δὲ θαυμαστὴν ἀγνοοῦντες ὠφέλειαν, ἣν οἱ σοφοὶ κινουμένων κατ´ ἀρετὴν
ἀλλήλων ὠφελοῦνται, κἂν μὴ συνῶσι μηδὲ γινώσκοντες τυγχάνωσι.
Καὶ μὴν πάντες ἄνθρωποι τὰς ἐκλογὰς καὶ τὰς τηρήσεις καὶ τὰς οἰκονομίας,
ὅταν χρησίμων ὦσι καὶ ὠφελίμων, τότε χρησίμους καὶ ὠφελίμους
ὑπολαμβάνουσι, καὶ κλεῖδας (1069b) ὠνεῖται καὶ ἀποθήκας φυλάττει
χρηματικὸς ἀνήρ « πλούτου διοίγων θάλαμον ἥδιστον χερί » ,
τὸ δ´ ἐκλέγεσθαι τὰ πρὸς μηδὲν ὠφέλιμα καὶ τηρεῖν ἐπιμελῶς καὶ πολυπόνως
οὐ σεμνὸν οὐδὲ καλὸν ἀλλ´ ἀπειρόκαλον καὶ καταγέλαστόν ἐστιν. Ὁ οὖν
Ὀδυσσεύς, εἰ τὸν δεσμὸν ἐκεῖνον ἐκμαθὼν παρὰ τῆς Κίρκης κατεσημαίνετο δι´
αὐτοῦ μὴ τὰ παρ´ Ἀλκινόου δῶρα, τρίποδας καὶ λέβητας καὶ εἵματα καὶ χρυσὸν
ἀλλὰ συρφετόν τινα καὶ λίθους καὶ - - - συναγαγὼν τὴν περὶ ταῦτα πραγματείαν
καὶ κτῆσιν αὐτῶν καὶ τήρησιν εὐδαιμονικὸν ἔργον ἡγεῖτο καὶ μακάριον, τίς
ἂν ἐζήλωσε τὴν ἀνόητον ταύτην πρόνοιαν καὶ κενόσπουδον ἐπιμέλειαν; (1069c)
Ἀλλὰ μὴν τοῦτο τῆς Στωικῆς ὁμολογίας τὸ καλόν ἐστι καὶ σεμνὸν καὶ
μακάριον, ἕτερον δ´ οὐθὲν ἀλλ´ ἐκλογὴ καὶ τήρησις ἀνωφελῶν πραγμάτων καὶ
ἀδιαφόρων. Τοιαῦτα γὰρ τὰ κατὰ φύσιν καὶ τὰ ἐκτὸς ἔτι μᾶλλον, εἴ γε
κρασπέδοις καὶ ἀμίσι χρυσαῖς καὶ νὴ Δία ληκύθοις, ὅταν τύχωσι,
παραβάλλουσι τὸν μέγιστον πλοῦτον· εἶθ´ ὥσπερ οἱ θεῶν τινων ἢ δαιμόνων
ἱερὰ δόξαντες ὑπερηφάνως καθυβρίσαι καὶ λοιδορῆσαι μετανοήσαντες εὐθὺς
ὑποπίπτουσι καὶ κάθηνται ταπεινοὶ κατευλογοῦντες καὶ μεγαλύνοντες τὸ
θεῖον, οὕτως ἐκεῖνοι νεμέσει τινὶ τῆς μεγαλαυχίας (1069d) ταύτης καὶ
κενολογίας περιπεσόντες αὖθις ἐν τούτοις ἐξετάζονται τοῖς ἀδιαφόροις καὶ
μηδὲν πρὸς αὐτούς, μέγα βοῶντες ὡς ἕν ἐστιν ἀγαθὸν καὶ καλὸν καὶ σεμνόν, ἡ
τούτων ἐκλογὴ καὶ περὶ ταῦτα οἰκονομία, καὶ τούτων μὴ τυγχάνοντας οὐκ
ἄξιόν ἐστι βιοῦν ἀλλ´ ἀποσφάττειν ἑαυτοὺς ἢ ἀποκαρτερεῖν, πολλὰ τῇ ἀρετῇ
χαίρειν φράσαντας. Τὸν τοίνυν Θέογνιν αὐτοὶ παντελῶς ἀγεννῆ καὶ μικρὸν
ἡγοῦνται λέγοντα
« χρὴ πενίην φεύγοντα καὶ ἐς μεγακήτεα πόντον
ῥιπτεῖν καὶ πετρῶν, Κύρνε, κατ´ ἠλιβάτων »,
(1069e) ὡς ἀποδειλιῶντα πρὸς τὴν πενίαν ἀδιάφορον οὖσαν· ἀλλ´ αὐτοί γε
ταὐτὰ πεζῷ λόγῳ παρακελεύονται καὶ λέγουσιν, ὅτι χρὴ νόσον φεύγοντα
μεγάλην καὶ ἀλγηδόνα σύντονον, ἐὰν μὴ παρῇ ξίφος ἢ κώνειον, εἰς θάλατταν
ἀφεῖναι καὶ « κατὰ πετρῶν ῥιπτεῖν » ἑαυτόν· ὧν οὐδέτερον βλαβερὸν οὐδὲ
κακὸν οὐδ´ ἀσύμφορόν ἐστιν, οὐδὲ κακοδαίμονας ποιεῖ τοὺς περιπίπτοντας.
« Πόθεν οὖν » φησίν « ἄρξωμαι; Καὶ τίνα λάβω τοῦ καθήκοντος ἀρχὴν καὶ ὕλην
τῆς ἀρετῆς, ἀφεὶς τὴν φύσιν καὶ τὸ κατὰ φύσιν; »
Πόθεν δ´ Ἀριστοτέλης, ὦ μακάριε, καὶ Θεόφραστος ἄρχονται; Τίνας δὲ
Ξενοκράτης καὶ Πολέμων λαμβάνουσιν ἀρχάς; Οὐχὶ καὶ Ζήνων τούτοις
ἠκολούθησεν (1069f) ὑποτιθεμένοις στοιχεῖα τῆς εὐδαιμονίας τὴν φύσιν καὶ
τὸ κατὰ φύσιν; Ἀλλ´ ἐκεῖνοι μὲν ἐπὶ τούτων ἔμειναν ὡς αἱρετῶν καὶ ἀγαθῶν
καὶ ὠφελίμων, καὶ τὴν ἀρετὴν προσλαβόντες ἐν αὐτοῖς ἐνεργοῦσαν οἰκείως
χρωμένην ἑκάστῳ τέλειον ἐκ τούτων καὶ ὁλόκληρον ᾤοντο συμπληροῦν βίον καὶ
συμπεραίνειν, τὴν ἀληθῶς τῇ φύσει πρόσφορον καὶ συνῳδὸν ὁμολογίαν
ἀποδιδόντες.
| [1069] (1069a) Aristote et Xénocrate ont radoté lorsqu'ils ont dit que les hommes
retiraient de grands avantages des dieux, de leurs parents et de leurs maîtres.
Ils ignoraient cette utilité si admirable que les sages se procurent
mutuellement quand ils agissent d'après leur vertu, quoiqu'ils ne soient
pas ensemble et qu'ils ne se connaissent même pas. Tous les hommes
regardent comme des soins utiles de recueillir les fruits de la terre, de
les conserver, d'en faire une sage dispensation, parce que alors on en
retire du profit et de l'avantage. (1069b) Un bon économe ferme ses
greniers, et, gardant avec soin ses richesses,
"Il en ouvre à propos le dépôt précieux".
Mais de ramasser des choses qui ne sont bonnes à rien, de les conserver
péniblement, ce n'est pas là un soin estimable et utile, c'est se donner
une peine ridicule. Si Ulysse eût employé le nœud dont Circé lui avait
enseigné la forme, à lier, non les trépieds, les vases, les habits,
l'or et lés autres présents qu'il avait reçus d'Alcinoüs, mais des
pierres, des chiffons et d'autres effets d'aussi vil prix ; qu'il eût fait
son bonheur de les considérer, de les garder avec le plus grand soin,
aurait-on pu lui envier une prévoyance si folle et si inutile? (1069c)
Telle est cependant la beauté, la grandeur et la félicité de cette
conformité avec la nature que les stoïciens vantent si fort. Elle n'est
composée que d'un amas de choses inutiles et indifférentes, qu'ils
conservent avec le plus grand soin. Les choses qu'ils regardent comme
conformes à la nature nous sont purement extérieures ; et nos plus grands
biens, ils les regardent comme des franges et des vases d'or destinés aux
plus vils usages, ou même comme de chétives burettes. Mais ensuite,
semblables à ceux qui, après avoir traité avec le dernier mépris
le culte des dieux ou des génies, rentrent en eux-mêmes,
s'humilient, se prosternent et rendent gloire à la Divinité, les
stoïciens, comme châtiés par Némésis de cette vaine et arrogante fierté,
(1069d) s'occupent laborieusement de ces choses indifférentes qui ne les
intéressent nullement; ils crient à pleine tète qu'il est beau, qu'il est
honorable de les amasser et de les conserver avec grand soin; ils veulent
que ceux qui ne peuvent se les procurer cessent de vivre, se laissent
mourir de faim ou se donnent eux-mêmes la mort, en disant un long adieu à
la vertu. Aussi traitent-ils Théognis d'esprit faible et pusillanime,
parcequ'il dit :
"Pour fuir la pauvreté jetez-vous dans la mer,
Ou précipitez-vous du sommet d'un rocher".
(1069e) Ils ne lui pardonnent point de s'être montré si lâche dans ses
vers. Mais eux-mêmes ils disent dans leur prose que pour fuir une grande
maladie, une douleur violente, si on n'a pas sous la main une épée ou de
la ciguë, il faut se jeter dans la mer ou se précipiter du haut d'une
roche, parce que ni l'un ni l'autre de ces partis n'est ni mauvais, ni
nuisible, ni funeste, et qu'il ne rend pas malheureux ceux qui les prennent.
« Par où donc commencerai-je ? demande Chrysippe, quel fondement
donnerai-je aux devoirs, et quelle matière à la vertu? car je laisse et la
nature et ce qui lui est conforme. »
Mais, mon ami, lui répondrai-je, par où ont commencé Aristote et
Théophraste? Quels fondements ont établi Xénocrate et Polémon? Zénon
lui-même n'a-t-il pas suivi les traces de ces philosophes, (1069f) en
posant pour base du bonheur la nature et ce qui lui est conforme? Mais ces
philosophes s'y sont arrêtés comme à des choses désirables, bonnes et
utiles; et, y ajoutant la vertu, qui seule fait de ces biens l'usage le
plus convenable, ils ont cru par là tracer le plan d'une vie parfaite en tout point,
et donner une base solide et constante à cette conformité, à cet accord véritable
avec la nature que vous recommandez tant.
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