HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales, Des notions communes contre les Stoïciens

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[1068] (1068a) τοίνυν λέγων οὐκ ἀχρήστως γεγονέναι τὴν κακίαν ὅρα πάλιν οἷον αὐτὴν ἀποδείκνυσι χρῆμα καὶ κτῆμα τοῖς ἔχουσι, γράφων ἐν τοῖς περὶ Κατορθωμάτων ὡς « φαῦλος οὐδενὸς δεῖται, οὐδενὸς ἔχει χρείαν· οὐθέν ἐστιν αὐτῷ χρήσιμον, οὐθὲν οἰκεῖον, οὐθὲν ἁρμόττον ». Πῶς οὖν εὔχρηστος κακία, μεθ´ ἧς οὐδ´ ὑγίεια χρήσιμον οὐδὲ πλῆθος χρημάτων οὐδὲ προκοπή; Οὐ δεῖται δέ τις ὧν τὰ μὲν προηγμένα καὶ ληπτὰ καὶ νὴ Δί´ εὔχρηστα, τὰ δὲ κατὰ φύσιν, ὡς αὐτοὶ καλοῦσιν; Εἶτα τούτων οὐδεὶς ἔχει χρείαν, ἂν μὴ γένηται σοφός; (1068b) Οὐδὲ τοῦ σοφὸς οὖν γενέσθαι χρείαν ἔχει φαῦλος. Οὐδὲ διψῶσιν οὐδὲ πεινῶσιν ἄνθρωποι, πρὶν σοφοὶ γενέσθαι; Διψῶντες οὖν ὕδατος οὐκ ἔχουσι χρείαν οὐδ´ ἄρτου πεινῶντες. « Ἔστε ξένοισι μειλίχοις ἐοικότες στέγης τε μοῦνον καὶ πυρὸς κεχρημένοις· » οὗτος οὐκ εἶχε χρείαν ὑποδοχῆς; Οὐδὲ χλαίνης ἐκεῖνος λέγων « Δὸς χλαῖναν Ἱππώνακτι· κάρτα γὰρ ῥιγῶ; » Ἀλλὰ βούλει παράδοξον εἰπεῖν τι καὶ περιττὸν καὶ ἴδιον; Λέγε τὸν σοφὸν μηδενὸς ἔχειν χρείαν μηδὲ δεῖσθαί τινος· ἐκεῖνος ὄλβιος, ἐκεῖνος ἀπροσδεής, ἐκεῖνος αὐτάρκης μακάριος τέλειος. (1068c) Νυνὶ δὲ τίς ἴλιγγος οὗτος τὸν μὲν ἀνενδεᾶ δεῖσθαι ὧν ἔχει ἀγαθῶν, τὸν δὲ φαῦλον ἐνδεᾶ μὲν εἶναι πολλῶν δεῖσθαι δὲ μηδενός; Τουτὶ γὰρ λέγει Χρύσιππος, ὡς οὐ δέονται μὲν ἐνδέονται δ´ οἱ φαῦλοι, πεττῶν δίκην δεῦρο κἀκεῖ τὰς κοινὰς ἐννοίας μετατιθείς. Πάντες γὰρ ἄνθρωποι τὸ δεῖσθαι πρότερον εἶναι τοῦ ἐνδεῖσθαι νομίζουσιν, ἡγούμενοι τὸν οὐχ ἑτοίμων οὐδ´ εὐπορίστων δεόμενον ἐνδεῖσθαι. Κεράτων γοῦν καὶ πτερῶν οὐδεὶς ἐνδεὴς ἄνθρωπός ἐστιν, ὅτι μηδὲ δεῖται τούτων· ἀλλ´ ὅπλων ἐνδεεῖς λέγομεν καὶ χρημάτων καὶ ἱματίων, ὅταν ἐν χρείᾳ γενόμενοι μὴ τυγχάνωσι μηδ´ ἔχωσιν. Οἱ δ´ οὕτως ἐπιθυμοῦσιν (1068d) ἀεί τι παρὰ τὰς κοινὰς ἐννοίας φαίνεσθαι λέγοντες, ὥστε πολλάκις ἐξίστασθαι καὶ τῶν ἰδίων ἐπιθυμίᾳ καινολογίας, ὥσπερ ἐνταῦθα. Σκόπει δὲ μικρὸν ἀνωτέρω ἀναγαγὼν ἑαυτόν. Ἕν τι τῶν παρὰ τὰς ἐννοίας λεγομένων ἐστὶ τό « μηδένα φαῦλον ὠφελεῖσθαι ». Καίτοι παιδευόμενοί γε πολλοὶ προκόπτουσι καὶ δουλεύοντες ἐλευθεροῦνται καὶ πολιορκούμενοι σῴζονται καὶ π{λ}ηρούμενοι χειραγωγοῦνται καὶ θεραπεύονται νοσοῦντες· « Ἀλλ´ οὐκ ὠφελοῦνται τούτων τυγχάνοντες οὐδ´ εὖ πάσχουσιν οὐδ´ εὐεργέτας ἔχουσιν οὐδ´ εὐεργετῶν ἀμελοῦσιν. » Οὐ τοίνυν οὐδ´ ἀχαριστοῦσιν οἱ φαῦλοι· καὶ μὴν οὐδ´ οἱ νοῦν ἔχοντες. (1068e) Ἀνύπαρκτον οὖν ἐστι τὸ ἀχάριστον· οἱ μὲν γὰρ οὐκ ἀποστεροῦσι χάριν λαμβάνοντες, οἱ δὲ λαμβάνειν χάριν οὐ πεφύκασιν. Ὅρα δὴ τί πρὸς ταῦτα λέγουσιν· ὅτι « χάρις εἰς τὰ μέσα διατείνει, καὶ τὸ μὲν ὠφελεῖν καὶ ὠφελεῖσθαι σοφῶν ἐστι, χάριτος δὲ καὶ φαῦλοι τυγχάνουσιν. » Εἶθ´ οἷς χάριτος μέτεστι, τούτοις οὐ μέτεστι χρείας; Ὅπου δὲ διατείνει χάρις, ἐκεῖ χρήσιμον οὐθέν ἐστιν οὐδ´ οἰκεῖον; Ἄλλο δέ τι ποιεῖ τὴν ὑπουργίαν χάριν τὸ πρός τι χρήσιμον ὑπάρξαι τῷ δεομένῳ τὸν παρασχόντα; (ΕΤΑΙΡΟΣ) Ταῦτα μὲν οὖν ἄφες. δὲ πολυτίμητος (1068f) ὠφέλεια τίς ἐστιν, ἣν ὡς μέγα τι τοῖς σοφοῖς ἐξαίρετον φυλάσσοντες οὐδ´ ὄνομα λείπουσιν αὐτῆς τοῖς μὴ σοφοῖς; (ΔΙΑΔΟΥΜΕΝΟΣ) Ἂν εἷς σοφὸς ὁπουδήποτε προτείνῃ τὸν δάκτυλον φρονίμως, οἱ κατὰ τὴν οἰκουμένην σοφοὶ πάντες ὠφελοῦνται. Τοῦτο τῆς φιλίας ἔργον αὐτῶν, εἰς τοῦτο τοῖς κοινοῖς ὠφελήμασι τῶν σοφῶν αἱ ἀρεταὶ τελευτῶσιν. [1068] (1068a) Mais voulez-vous voir comment Chrysippe nous dépeint le vice, qu'il prétend n'être pas sans utilité; et de quel usage il le suppose pour l'homme vicieux? Écoutez ce qu'il dit dans son traité des Devoirs. Il y établit que l'homme sujet au vice ne manque et n'a besoin de rien, que rien ne lui est utile ni convenable. Mais comment le vice peut-il être de quelque utilité, puisque avec lui ni la santé, ni la richesse, ni le progrès même dans la vertu, ne servent de rien? Il n'a besoin d'aucune de ces choses dont les unes sont des biens préalables qui méritent qu'on les recherche, et sont même très utiles, et les autres, de leur aveu même, sont conformes à leur nature. Personne ne retirera aucun profit de tous ces biens s'il n'est sage. L'homme vicieux n'a donc pas besoin de devenir sage? (1068b) Et, avant de l'être devenu, les hommes n'ont ni faim ni soif; ou, lorsqu'ils éprouvent ces sensations, ils n'ont besoin ni d'eau ni de pain, semblables à ces hôtes commodes qui ne demandent que le couvert et le feu. De même, sans doute, celai qui disait : "A ce pauvre Hypponax donnez un vêtement, Je suis transi de froid, tout mon corps est tremblant"; n'avait besoin ni de logement ni de manteau. Mais voulez-vous avancer un paradoxe plus singulier et plus étonnant? Dites que le sage ne manque de rien et n'a besoin de rien. Il est fortuné, il n'a point de désir, il se suffit à lui-même, il est heureux, il est parfait. (1068b) Mais quel est donc ce vertige, de vouloir que le sage, à qui rien ne manque, ait besoin des biens qu'il possède, et que le méchant, à qui il manque tant de choses, n'ait besoin de rien? car voilà ce que dit Chrysippe. Selon lui, les gens vicieux manquent de beaucoup de choses, mais ils n'ont besoin de rien ; c'est ainsi qu'il se joue des notions communes, et qu'il les ballotte, pour ainsi dire, de côté et d'autre, comme des osselets. Car tous les hommes croient que la privation d'une chose en précède le besoin; ils estiment que celui-là a des besoins, qui manque des choses qu'il n'a pas sous la main ou qui ne sont pas d'une acquisition facile. On ne peut pas dire qu'un homme manque d'ailes et de cornes, parce qu'elles ne lui sont pas nécessaires; mais nous disons qu'il manque d'armes, d'argent et d'habits, lorsque, en ayant besoin, il n'en a pas et ne peut s'en procurer. (1068b) Mais tel est le goût des stoïciens pour heurter les idées communes, que souvent cette manie de dire des choses nouvelles les fait, comme dans cette occasion, tomber en contradiction avec eux-mêmes. Pour vous en convaincre, rappelez-vous ce que nous avons dit un peu plus haut. C'est une de leurs assertions contraires au sens commun que rien ne profite au méchant. Cependant plusieurs reçoivent avec fruit les instructions qu'on leur donne; d'autres sont affranchis de l'esclavage ou délivrés d'un siège; ceux-ci, privés de la vue, trouvent des guides fidèles ; ceux-là sont guéris de leurs maladies. N'importe, disent les stoïciens, tous ces avantages ne leur servent de rien ; ils ne reçoivent pas de bienfaits, il n'est pas même pour eux de bienfaiteurs, et ils ne peuvent jamais être ingrats. (1068e) Mais les sages ne le sont pas non plus. Il n'existe donc point d'ingratitude, puisque les bons ne manquent pas à la reconnaissance qu'ils doivent, et que les méchants ne sont pas susceptibles de bienfaits. Écoutez-les maintenant. La bienfaisance, disent-ils, est au rang des choses indifférentes; il n'appartient qu'aux sages de donner et de recevoir des bienfaits ; les méchants peuvent bien en recevoir aussi, mais tous ceux qui y ont part n'en partagent point pour cela l'usage. L'utilité et l'agrément ne se trouvent pas partout où s'étend le bienfait. Mais qu'est-ce qui donne à un service le caractère de bienfait, si ce n'est l'utilité qu'envisagé la personne qui le rend en faveur de celui qui le reçoit? (LAMPRIAS) Laissez, je vous prie, ce point-là, mon cher Diadumène, (1068f) et dites-moi en quoi consiste cette utilité dont ils font si grand cas, et qu'ils bornent aux sages seuls, comme le bien le plus désirable, sans vouloir même en laisser le nom aux méchants. (DIADUMÈNE) Si un seul sage, disent-ils, en quelque lieu qu'il soit, ouvre seulement la main à propos, tous les sages qui sont sur la terre en retirent du profit. Tel est l'effet de l'utilité stoïcienne : c'est à s'aider réciproquement que se bornent les vertus de leurs sages.


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Dernière mise à jour : 14/11/2007