HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales - Sur le grand nombre d'amis

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[95] (95a) Καὶ περὶ τοῦ Ὀδυσσέως Μενέλαος Οὐδέ κεν ἄλλο ἄμμε διέκρινεν φιλέοντέ τε τερπομένω τε, πρίν γ´ ὅτε δὴ θανάτοιο μέλαν νέφος ἀμφεκάλυψε. Τοὐναντίον οὖν ἔοικεν καλουμένη πολυφιλία ποιεῖν. μὲν γὰρ συνάγει καὶ συνίστησι καὶ συνέχει καταπυκνοῦσα ταῖς ὁμιλίαις καὶ φιλοφροσύναις Ὡς δ´ ὅτ´ ὀπὸς γάλα λευκὸν ἐγόμφωσεν καὶ ἔδησε (95b) κατ´ Ἐμπεδοκλέα (τοιαύτην γὰρ φιλία βούλεται ποιεῖν ἑνότητα καὶ σύμπηξιν), δὲ πολυφιλία διίστησι καὶ ἀποσπᾷ καὶ ἀποστρέφει, τῷ μετακαλεῖν καὶ μεταφέρειν ἄλλοτε πρὸς ἄλλον οὐκ ἐῶσα κρᾶσιν οὐδὲ κόλλησιν εὐνοίας ἐν τῇ συνηθείᾳ περιχυθείσῃ καὶ παγείσῃ γενέσθαι. Τοῦτο δ´ εὐθὺς ὑποβάλλει καὶ τὴν περὶ τὰς ὑπουργίας ἀνωμαλίαν καὶ δυσωπίαν· τὰ γὰρ εὔχρηστα τῆς φιλίας δύσχρηστα γίγνεται διὰ τὴν πολυφιλίαν. « Ἄλλον τρόπον » γὰρ « ἄλλων ἐγείρει φροντὶς ἀνθρώπων· » οὔτε γὰρ αἱ φύσεις ἡμῶν ἐπὶ ταὐτὰ ταῖς ὁρμαῖς ῥέπουσιν, οὔτε τύχαις ὁμοτρόποις ἀεὶ σύνεσμεν· οἵ (95c) τε τῶν πράξεων καιροὶ καθάπερ τὰ πνεύματα τοὺς μὲν φέρουσι τοῖς δ´ ἀντιπίπτουσι. Καίτοι κἂν πάντες ἅμα τῶν αὐτῶν οἱ φίλοι δέωνται, χαλεπὸν ἐξαρκέσαι πᾶσι βουλευομένοις πολιτευομένοις φιλοτιμουμένοις ὑποδεχομένοις. Ἂν δ´ ἑνὶ καιρῷ διαφόροις πράγμασι καὶ πάθεσι προστυγχάνοντες ὁμοῦ παρακαλῶσιν μὲν πλέων συναποδημεῖν, δὲ κρινόμενος συνδικεῖν, δὲ κρίνων συνδικάζειν, δὲ πιπράσκων ἀγοράζων συνδιοικεῖν, δὲ γαμῶν συνθύειν, δὲ θάπτων συμπενθεῖν, πόλις δ´ ὁμοῦ μὲν θυμιαμάτων γέμῃ, ὁμοῦ δὲ παιάνων τε καὶ στεναγμάτων (95d) πολυφιλία. Πᾶσι μὲν ἀμήχανον παρεῖναι, μηδενὶ δ´ ἄτοπον, ἑνὶ δ´ ὑπουργοῦντα προσκρούειν πολλοῖς ἀνιαρόν· Οὐδεὶς γὰρ ἀγαπῶν αὐτὸς ἀμελεῖθ´ ἡδέως. Καίτοι τὰς ἀμελείας καὶ ῥᾳθυμίας τῶν φίλων πραότερον φέρουσι, καὶ τὰς τοιαύτας ἀπολογίας ἀμηνίτως δέχονται παρ´ αὐτῶν « Ἐξελαθόμην » « Ἠγνόησα. » δὲ λέγων « Οὐ παρέστην σοι δίκην ἔχοντι, παριστάμην γὰρ ἑτέρῳ φίλῳ, » καὶ « Πυρέττοντά ς´ οὐκ εἶδον, τῷ δεῖνι γὰρ φίλους ἑστιῶντι συνησχολούμην » αἰτίαν τῆς ἀμελείας τὴν ἑτέρων (95e) ἐπιμέλειαν ποιούμενος οὐ λύει τὴν μέμψιν, ἀλλὰ προσεπιβάλλει ζηλοτυπίαν. Ἀλλ´ οἱ πολλοὶ τὰς πολυφιλίας δύνανται παρέχειν μόνον ὡς ἔοικε σκοποῦσιν, δ´ ἀνταπαιτοῦσι παρορῶσι, καὶ οὐ μνημονεύουσιν ὅτι δεῖ τὸν πολλοῖς εἰς δεῖται χρώμενον πολλοῖς δεομένοις ἀνθυπουργεῖν. Ὥσπερ οὖν Βριάρεως ἑκατὸν χερσὶν εἰς πεντήκοντα φορῶν γαστέρας οὐδὲν ἡμῶν πλέον εἶχε τῶν ἀπὸ δυεῖν χεροῖν μίαν κοιλίαν διοικούντων, οὕτως ἐν τῷ φίλοις χρῆσθαι πολλοῖς καὶ τὸ λειτουργεῖν πολλοῖς ἔνεστι καὶ τὸ συναγωνιᾶν καὶ τὸ συνασχολεῖσθαι καὶ συγκάμνειν. Οὐ γὰρ Εὐριπίδῃ πειστέον λέγοντι Χρῆν γὰρ μετρίαν εἰς ἀλλήλους φιλίαν θνητοὺς ἀνακίρνασθαι (95f) καὶ μὴ πρὸς ἄκρον μυελὸν ψυχῆς, εὔλυτα δ´ εἶναι θέλγητρα φρενῶν, ἀπό τ´ ὤσασθαι καὶ ξυντεῖναι, καθάπερ πόδα νεὼς ἐνδιδόντι καὶ προσάγοντι ταῖς χρείαις τὴν φιλίαν. Ἀλλὰ τοῦτο μέν, Εὐριπίδη, μεταθῶμεν ἐπὶ τὰς ἔχθρας, καὶ κελεύωμεν « Μετρίας » ποιεῖσθαι τὰς διαφορὰς καὶ « Μὴ πρὸς ἄκρον μυελὸν ψυχῆς, εὔλυτα δ´ εἶναι » [95] (95a) Ménélas dit d'Ulysse : "De l'étroite amitié qui nous liait tous deux, La mort, la seule mort eût pu rompre les nœuds". Mais avec un grand nombre d'amis, n'est-ce pas tout le contraire? Le but de l'amitié n'est-il pas de nous unir, de nous lier intimement par des conversations fréquentes, par des services assidus, d'enchaîner, de coller, en quelque sorte, les amis l'un à l'autre, Comme l'on voit le lait s'unir en se caillant, (95b) selon l'expression d'Empédocle? Mais la pluralité des amis nous distrait, nous sépare d'eux, et nous transportant sans cesse de l'un à l'autre, elle empêche que nos sentiments ne s'unissent, ne se fondent, pour ainsi dire, ensemble, par cette bienveillance mutuelle qui naît d'un commerce fréquent. De là naît cette inégalité dans les services qu'on doit aux amis, et qu'il est honteux de refuser. Ces bons offices réciproques, si faciles et si doux pour l'amitié, deviennent presque impossibles entre plusieurs amis. "A des soins différents les hommes sont livrés". Nous n'avons pas tous les mêmes inclinations ni les mêmes désirs, nous changeons souvent de situation et de fortune : (95c) les occasions d'agir sont comme les vents, tantôt favorables et tantôt contraires. Si nos amis avaient tous en même temps à consulter sur leurs intérêts personnels, à traiter les affaires publiques, à briguer les charges, à exercer les devoirs de l'hospitalité, et qu'ils nous demandassent à la fois nos services, il serait impossible de les satisfaire. Que serait-ce donc si, livrés chacun à des soins ou à des goûts différents, ils nous appelaient tous ensemble, l'un pour l'accompagner dans un voyage, l'autre pour l'aider de nos conseils dans la poursuite d'une affaire ou dans le jugement d'un procès, celui-ci pour conclure un marché, celui-là pour assister à la célébration d'un mariage ou à des funérailles ? Et ces deux derniers cas sont assez fréquents. "L'encens fume partout sur les autels des dieux : Ici des cris plaintifs, et là des chants joyeux S'unissent dans les airs". (95d) Obliger à la fois cette multitude d'amis, c'est une chose impossible ; les refuser tous ne serait pas supportable ; s'employer pour un seul et mécontenter tous les autres, c'est un parti fâcheux. "Quand on aime, il est dur de se voire négligé". Et toutefois, on supporte encore plus patiemment la négligence et l'oubli de ses amis, que la préférence qu'ils donnent à d'autres sur nous. Cet oubli est peut-être l'excuse qu'on reçoit avec moins de peine ; mais qu'un de nos amis vienne nous dire : Je ne vous ai pas assisté dans votre procès, parce que je rendais ce même service à un autre ; je n'ai pu venir vous voir le jour que vous étiez malade, je dînais chez un de mes amis; qu'il allègue ainsi, pour excuser sa négligence, les soins (95e) qu'il a donnés à d'autres, au lieu d'apaiser les plaintes, il excite la jalousie. Mais la plupart des hommes ne pensent qu'à quelques avantages que peut leur procurer la multitude des amis, et ne voient pas les inconvénients qui en résultent. Ils ne sentent pas qu'en recevant les services des autres, ils contractent l'obligation du retour. Le géant Briarée qui, avec ses cent mains, remplissait cinquante estomacs, n'était pas plus nourri que chacun de nous qui n'en remplissons qu'un avec nos deux mains. Ainsi, l'utilité qu'on retire de la pluralité des amis entraîne l'embarras de rendre plus de services, et de partager leurs peines, leurs travaux et leurs tourments. Gardons-nous d'en croire Euripide, lorsqu'il nous dit : "Du commerce gênant d'une amitié trop tendre L'homme, pour être heureux, doit toujours se défendre. (95f) Des nœuds que le besoin forme et rompt aisément, D'une union commode assurent l'agrément". Il veut qu'on resserre ou qu'on relâche, selon le besoin, les nœuds de l'amitié, comme on fait des voiles d'un navire. Euripide, lui dirais-je, transportons votre maxime à l'inimitié. Disons que les querelles doivent être bornées, et ne jamais pénétrer jusqu'au fond de notre âme;


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Dernière mise à jour : 8/05/2008