HODOI ELEKTRONIKAI
Du texte à l'hypertexte

Plutarque, Oeuvres morales - Sur le grand nombre d'amis

Page 96

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[96] μίση καὶ ὀργὰς (96a) καὶ μεμψιμοιρίας καὶ ὑπονοίας· ἐκεῖνο δὲ μᾶλλον ἡμῖν παραίνει τὸ Πυθαγορικὸν « Μὴ πολλοῖς ἐμβάλλειν δεξιάν, » τουτέστι μὴ πολλοὺς ποιεῖσθαι φίλους μηδὲ πολύκοινον μηδὲ πάνδημον ἀσπάζεσθαι φιλίαν, καὶ πρὸς ἕν´ ἄν τις μετὰ πολλῶν παθῶν εἰσιοῦσα, ὧν τὸ μὴ συναγωνιᾶν καὶ συνάχθεσθαι καὶ συμπονεῖν καὶ συγκινδυνεύειν πάνυ δύσοιστον τοῖς ἐλευθέροις καὶ γενναίοις ἐστίν. Τὸ δὲ τοῦ σοφοῦ Χίλωνος ἀληθές, ὃς πρὸς τὸν εἰπόντα μηδένα ἔχειν ἐχθρόν « Ἔοικας, » ἔφη, « σὺ μηδὲ φίλον ἔχειν. » Αἱ γὰρ ἔχθραι ταῖς φιλίαις εὐθὺς ἐπακολουθοῦσι καὶ συμπλέκονται, (96b) ἐπείπερ οὐκ ἔστι φίλον μὴ συναδικεῖσθαι μηδὲ συναδοξεῖν μηδὲ συναπεχθάνεσθαι· οἱ γὰρ ἐχθροὶ τὸν φίλον εὐθὺς ὑφορῶνταί τε καὶ μισοῦσιν, οἱ δὲ φίλοι πολλάκις φθονοῦσί τε καὶ ζηλοτυποῦσι καὶ περισπῶσιν. Ὥσπερ οὖν τῷ Τιμησίᾳ περὶ τῆς ἀποικίας δοθεὶς χρησμὸς προηγόρευσε Σμῆνα μελισσάων τάχα τοι καὶ σφῆκες ἔσονται, οὕτως οἱ φίλων ζητοῦντες ἑσμὸν ἔλαθον ἐχθρῶν σφηκιαῖς περιπεσόντες. Καὶ οὐκ ἴσον ἄγει σταθμὸν ἐχθροῦ μνησικακία καὶ φίλου χάρις. Ὅρα δὲ τοὺς Φιλώτου καὶ (96c) Παρμενίωνος φίλους καὶ οἰκείους διέθηκεν Ἀλέξανδρος, τοὺς Δίωνος Διονύσιος τοὺς Πλαύτου Νέρων καὶ τοὺς Σηιανοῦ Τιβέριος στρεβλοῦντες καὶ ἀποκτιννύοντες. Ὡς γὰρ τὸν Κρέοντα τῆς θυγατρὸς οὐδὲν χρυσὸς οὐδ´ πέπλος ὠφέλει, τὸ δὲ πῦρ ἀναφθὲν αἰφνιδίως προσδραμόντα καὶ περιπτύξαντα κατέκαυσε καὶ συναπώλεσεν, οὕτως ἔνιοι τῶν φίλων οὐδὲν ἀπολαύσαντες εὐτυχούντων συναπόλλυνται δυστυχοῦσι. Καὶ τοῦτο μάλιστα πάσχουσιν οἱ φιλόσοφοι καὶ χαρίεντες, ὡς Θησεὺς τῷ Πειρίθῳ κολαζομένῳ καὶ δεδεμένῳ Αἰδοῦς ἀχαλκεύτοισιν ἔζευκται πέδαις, (96d) ἐν δὲ τῷ λοιμῷ φησιν Θουκυδίδης τοὺς ἀρετῆς μάλιστα μεταποιουμένους συναπόλλυσθαι τοῖς φίλοις νοσοῦσιν· ἠφείδουν γὰρ σφῶν αὐτῶν ἰόντες παρὰ τοὺς ἐπιτηδείους. Ὅθεν οὕτω τῆς ἀρετῆς ἀφειδεῖν οὐ προσῆκον ἄλλοτ´ ἄλλοις συνδέοντας αὐτὴν καὶ συμπλέκοντας, ἀλλὰ τοῖς ἀξίοις τὴν αὐτὴν κοινωνίαν φυλάττειν, τουτέστι τοῖς ὁμοίως φιλεῖν καὶ κοινωνεῖν δυναμένοις. Καὶ γὰρ δὴ τοῦτο πάντων μέγιστόν ἐστιν ἐναντίωμα πρὸς τὴν πολυφιλίαν, ὅτι τῇ φιλίᾳ γένεσις δι´ ὁμοιότητός ἐστιν. Ὅπου γὰρ καὶ τὰ ἄψυχα τὰς μίξεις πρὸς τὰ ἀνόμοια ποιεῖται μετὰ (96e) βίας ἀναγκαζόμενα καὶ ὀκλάζει καὶ ἀγανακτεῖ φεύγοντα ἀπ´ ἀλλήλων, τοῖς δὲ συγγενέσι καὶ οἰκείοις ὁμοπαθεῖ κεραννύμενα καὶ προσίεται τὴν κοινωνίαν λείως καὶ μετ´ εὐμενείας, πῶς οἷόν τε φιλίαν ἤθεσι διαφόροις ἐγγενέσθαι καὶ πάθεσιν ἀνομοίοις καὶ βίοις ἑτέρας προαιρέσεις ἔχουσιν; μὲν γὰρ περὶ ψαλμοὺς καὶ φόρμιγγας ἁρμονία δι´ ἀντιφώνων ἔχει τὸ σύμφωνον, ὀξύτησι καὶ βαρύτησιν ἁμωσγέπως ὁμοιότητος ἐγγιγνομένης· τῆς δὲ φιλικῆς συμφωνίας ταύτης καὶ ἁρμονίας οὐδὲν ἀνόμοιον οὐδ´ ἀνώμαλον οὐδ´ ἄνισον εἶναι δεῖ μέρος, ἀλλ´ ἐξ ἁπάντων ὁμοίως ἐχόντων (96f) ὁμολογεῖν καὶ ὁμοβουλεῖν καὶ ὁμοδοξεῖν καὶ συνομοπαθεῖν, ὥσπερ μιᾶς ψυχῆς ἐν πλείοσι διῃρημένης σώμασι. Τίς οὖν ἐστιν οὕτως ἐπίπονος καὶ μετάβολος καὶ παντοδαπὸς ἄνθρωπος, ὥστε πολλοῖς ἑαυτὸν ἐξομοιοῦν καὶ προσαρμόττειν καὶ μὴ καταγελᾶν τοῦ Θεόγνιδος παραινοῦντος Πουλύποδος νόον ἴσχε πολυχρόου, ὃς ποτὶ πέτρῃ, τῇ περ ὁμιλήσῃ, τοῖος ἰδεῖν ἐφάνη; καίτοι τοῦ πολύποδος αἱ μεταβολαὶ βάθος οὐκ ἔχουσιν, [96] qu'il faut que les haines, les ressentiments, les plaintes et les soupçons (96a) s'effacent aisément. Proposez-nous plutôt ce précepte de Pythagore : ne donnez pas la main à plusieurs personnes ; c'est-à-dire, ne vous faites pas un grand nombre d'amis ; ne courez pas après ces amitiés communes, et pour ainsi dire banales, qui n'entrent dans le cœur qu'avec une suite nombreuse de passions; car on ne peut se dispenser de prendre part aux peines, aux travaux et aux dangers de ses amis. Encore n'est-ce pas là ce qui coûte le plus, surtout aux âmes généreuses. On reconnaît alors, par sa propre expérience, la vérité de cette parole de Chilon à quelqu'un qui se vantait de n'avoir point d'ennemi : « Vous n'avez donc pas d'ami, » lui dit ce philosophe. En effet, les inimitiés suivent de près les amitiés, et en font comme une dépendance nécessaire. (96b) Il est impossible que nous n'ayons pas notre part des injustices, des affronts qu'on fait à nos amis, et des haines qu'on leur porte. Leurs ennemis nous tiennent pour suspects, et nous regardent de mauvais œil. Leurs amis même nous portent souvent envie, et cherchent par jalousie à nous détacher d'eux. Timésias ayant consulté l'oracle sur une colonie qu'il voulait établir, en reçut cette réponse : "Tu formes un essaim d'abeilles diligentes Qui bientôt deviendront des guêpes malfaisantes". De même, en cherchant une foule d'amis, on tombe souvent, sans y penser, dans un essaim d'ennemis. Or, il s'en faut bien que la bienveillance d'un ami fasse équilibre avec le ressentiment d'un ennemi. Voyez comment les amis de Philotas (96c) et de Parménion furent traités par Alexandre ; ceux de Dion, par Denis le tyran; ceux de Plautus, par Néron ; ceux de Séjan, par Tibère : ils expirèrent tous dans les tourments les plus horribles. L'or qui couvrait Créuse ne fut d'aucune ressource à Créon contre le feu dont elle brûlait, et qui le consuma lui-même, lorsqu'il courut à cette princesse pour la secourir, et qu'il la prit entre ses bras. Il en est souvent de même en amitié : on ne tire aucun avantage de la fortune de ses amis, et l'on se trouve enveloppé dans leurs disgrâces. C'est ce qui arrive surtout aux philosophes et aux gens d'honneur. Tel fut en particulier le sort de Thésée, lorsque Pirithoüs fut enchaîné dans les enfers, en punition de son attentat : "Lui-même dans les fers il se vit retenu". (96d) Thucydide raconte que dans la peste qui désola l'Attique, les citoyens les plus vertueux n'épargnèrent pas leur vie, et qu'en allant voir leurs amis malades, ils périrent eux-mêmes victimes de leur zèle. Il faut ménager autrement la vertu, et au lieu de la livrer indifféremment à tout le monde, en réserver la communication aux personnes qui sont dignes d'elle, c'est-à-dire à ceux qui peuvent mettre autant que nous dans le commerce de l'amitié. Car ce qui s'oppose principalement à ce qu'on ait beaucoup d'amis, (96e) c'est que l'amitié ne se forme que par la conformité des caractères. Nous voyons les animaux eux-mêmes se refuser, avec une sorte d'horreur, aux accouplements avec des espèces différentes. La contrainte seule peut les y amener. Au contraire, ils s'unissent volontiers avec ceux de leur espèce; ils recherchent même cette union. Comment donc l'amitié pourrait-elle s'établir entre des personnes différentes de caractère, d'inclinations et de mœurs? Dans les chœurs de musique, l'harmonie résulte du mélange des sons contraires, les tons graves et les tons aigus concourant à former par leur union des accords parfaits ; mais l'harmonie de l'amitié ne souffre rien d'inégal, de dissonant ou de faux. Elle veut que les discours, les sentiments, les vues et les affections, tout généralement soientt du même ton ; que les amis ne soient qu'une seule âme dans plusieurs corps. (96f) Or, est-il un homme assez mobile et assez changeant, assez susceptible de toutes sortes de formes, pour prendre le caractère et les mœurs d'un grand nombre de personnes? Est-il quelqu'un qui ne trouve ridicule cette maxime de Théognis : "Imitez le polype, et d'un art séducteur De mille objets divers empruntez la couleur". Ces changements de couleur dans le polype ne pénètrent pas au delà de sa surface,


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Dernière mise à jour : 8/05/2008