[11] ΧΙ. (168) Καὶ οἱ παλαιοὶ δὲ πάντες, οὐκ ἀπείρως ἔχοντες πασῶν τῶν
ἁρμονιῶν, ἐνίαις ἐχρήσαντο. (169) Οὐ γὰρ ἡ ἄγνοια τῆς τοιαύτης στενοχωρίας
καὶ ὀλιγοχορδίας αὐτοῖς αἰτία γεγένηται, οὐδὲ δι´ ἄγνοιαν οἱ περὶ Ὄλυμπον
καὶ Τέρπανδρον καὶ οἱ ἀκολουθήσαντες τῇ τούτων προαιρέσει περιεῖλον τὴν
πολυχορδίαν τε καὶ ποικιλίαν. (170) Μαρτυρεῖ γοῦν τὰ Ὀλύμπου τε καὶ
Τερπάνδρου ποιήματα καὶ τῶν τούτοις ὁμοιοτρόπων πάντων· (171) τρίχορδα
γὰρ ὄντα καὶ ἁπλᾶ, διαφέρει τῶν ποικίλων καὶ πολυχόρδων, ὡς μηδένα
δύνασθαι μιμήσασθαι τὸν Ὀλύμπου τρόπον, ὑστερίζειν δὲ τούτου τοὺς ἐν τῷ
πολυχόρδῳ τε καὶ πολυτρόπῳ καταγιγνομένους.
(172) Ὅτι δ´ οἱ παλαιοὶ οὐ δι´ ἄγνοιαν ἀπείχοντο τῆς τρίτης ἐν τῷ
σπονδειάζοντι τρόπῳ, φανερὸν ποιεῖ ἡ ἐν τῇ κρούσει γινομένη χρῆσις· (173)
οὐ γὰρ ἄν ποτ´ αὐτῇ πρὸς τὴν παρυπάτην κεχρῆσθαι συμφώνως, μὴ γνωρίζοντας
τὴν χρῆσιν, (174) ἀλλὰ δῆλον ὅτι τὸ τοῦ ἤθους κάλλος, ὃ γίγνεται ἐν τῷ
σπονδειακῷ τρόπῳ διὰ τὴν τῆς τρίτης ἐξαίρεσιν, τοῦτ´ ἦν τὸ τὴν αἴσθησιν
αὐτῶν ἐπάγον ἐπὶ τὸ διαβιβάζειν τὸ μέλος ἐπὶ τὴν παρανήτην.
(175) Ὁ αὐτὸς δὲ λόγος καὶ περὶ τῆς νήτης· (176) καὶ γὰρ ταύτῃ κατὰ μὲν
τὴν κροῦσιν ἐχρῶντο, καὶ πρὸς παρανήτην διαφώνως καὶ πρὸς μέσην συμφώνως·
(177) κατὰ δὲ τὸ μέλος οὐκ ἐφαίνετο αὐτοῖς οἰκεία εἶναι τῷ σπονδειακῷ τρόπῳ.
(178) Οὐ μόνον δὲ τούτοις, ἀλλὰ καὶ τῇ συνημμένων νήτῃ οὕτω κέχρηνται
πάντες· (179) κατὰ μὲν γὰρ τὴν κροῦσιν αὐτὴν διεφώνουν πρός τε παρανήτην
καὶ πρὸς παραμέσην **** καὶ πρὸς λιχανόν· (180) κατὰ δὲ τὸ μέλος κἂν
αἰσχυνθῆναι τὸν χρησάμενον ἐπὶ τῷ γιγνομένῳ δι´ αὐτὴν ἤθει. (181) Δῆλον δ´
εἶναι καὶ ἐκ τῶν Φρυγίων ὅτι οὐκ ἠγνόητο ὑπ´ Ὀλύμπου τε καὶ τῶν
ἀκολουθησάντων ἐκείνῳ· (182) ἐχρῶντο γὰρ αὐτῇ οὐ μόνον κατὰ τὴν κροῦσιν,
ἀλλὰ καὶ κατὰ τὸ μέλος ἐν τοῖς Μητρῴοις καὶ ἐν ἄλλοις τισὶ τῶν Φρυγίων.
(183) Δῆλον δὲ καὶ τὸ περὶ τῶν ὑπατῶν, ὅτι οὐ δι´ ἄγνοιαν ἀπείχοντο ἐν
τοῖς Δωρίοις τοῦ τετραχόρδου τούτου· (184) αὐτίκα ἐπὶ τῶν λοιπῶν τόνων
ἐχρῶντο, δηλονότι εἰδότες· (185) διὰ δὲ τὴν τοῦ ἤθους φυλακὴν ἀφῄρουν ἐπὶ
τοῦ Δωρίου τόνου, τιμῶντες τὸ καλὸν αὐτοῦ.
(186) Οἷόν τι καὶ ἐπὶ τῶν τῆς τραγῳδίας ποιητῶν. (187) Τῷ γὰρ χρωματικῷ
γένει καὶ τῷ † ῥυθμῷ τραγῳδία μὲν οὐδέπω καὶ τήμερον κέχρηται,
κιθαρῳδία δέ, πολλαῖς γενεαῖς πρεσβυτέρα τραγῳδίας οὖσα, ἐξ ἀρχῆς
ἐχρήσατο. - (188) Τὸ δὲ χρῶμα ὅτι πρεσβύτερόν ἐστι τῆς ἁρμονίας, σαφές.
(189) Δεῖ γὰρ δηλονότι κατὰ τὴν τῆς ἀνθρωπίνης φύσεως ἔντευξιν καὶ χρῆσιν
τὸ πρεσβύτερον λέγειν· κατὰ γὰρ αὐτὴν τὴν τῶν γενῶν φύσιν οὐκ ἔστιν ἕτερον
ἑτέρου πρεσβύτερον. - (190) Εἰ οὖν τις Αἰσχύλον ἢ Φρύνιχον φαίη δι´
ἄγνοιαν ἀπεσχῆσθαι τοῦ χρώματος, ἆρά γ´ οὐκ ἂν ἄτοπος εἴη; (191) ὁ γὰρ
αὐτὸς καὶ Παγκράτην ἂν εἴποι ἀγνοεῖν τὸ χρωματικὸν γένος. (192) Ἀπείχετο
γὰρ καὶ οὗτος ὡς ἐπὶ τὸ πολὺ τούτου, ἐχρήσατο δ´ ἔν τισιν. (193) Οὐ δι´
ἄγνοιαν οὖν δηλονότι, ἀλλὰ διὰ τὴν προαίρεσιν ἀπείχετο· (194) ἐζήλου γοῦν,
ὡς αὐτὸς ἔφη, τὸν Πινδάρειόν τε καὶ Σιμωνίδειον τρόπον καὶ καθόλου τὸ
ἀρχαῖον καλούμενον ὑπὸ τῶν νῦν.
(195) Ὁ αὐτὸς δὲ λόγος καὶ περὶ Τυρταίου τε τοῦ Μαντινέως καὶ Ἀνδρέα τοῦ
Κορινθίου καὶ Θρασύλλου τοῦ Φλιασίου καὶ ἑτέρων πολλῶν, οὓς πάντας ἴσμεν
διὰ προαίρεσιν ἀπεσχημένους χρώματός τε καὶ μεταβολῆς καὶ πολυχορδίας καὶ
ἄλλων πολλῶν ἐν μέσῳ ὄντων ῥυθμῶν τε καὶ ἁρμονιῶν καὶ λέξεων καὶ
μελοποιίας καὶ ἑρμηνείας. (196) Αὐτίκα Τηλεφάνης ὁ Μεγαρικὸς οὕτως
ἐπολέμησε ταῖς σύριγξιν, ὥστε τοὺς αὐλοποιοὺς οὐδ´ ἐπιθεῖναι πώποτ´ εἴασεν
ἐπὶ τοὺς αὐλούς, ἀλλὰ καὶ τοῦ Πυθικοῦ ἀγῶνος μάλιστα διὰ τοῦτ´ ἀπέστη.
(197) Καθόλου δ´ εἴ τις τῷ μὴ χρῆσθαι τεκμαιρόμενος καταγνώσεται τῶν μὴ
χρωμένων ἄγνοιαν, πολλῶν ἄν τι φθάνοι καὶ τῶν νῦν καταγιγνώσκων, (198)
οἷον τῶν μὲν Δωριωνείων τοῦ Ἀντιγενειδείου τρόπου καταφρονούντων,
ἐπειδήπερ οὐ χρῶνται αὐτῷ, τῶν δ´ Ἀντιγενειδείων τοῦ Δωριωνείου διὰ τὴν
αὐτὴν αἰτίαν, (199) τῶν δὲ κιθαρῳδῶν τοῦ Τιμοθείου τρόπου· σχεδὸν γὰρ
ἀποπεφοιτήκασιν εἴς τε τὰ κατατύμματα καὶ εἰς τὰ Πολυείδου ποιήματα.
(200) πάλιν δ´ αὖ εἴ τις καὶ περὶ τῆς ποικιλίας ὀρθῶς τε καὶ ἐμπείρως
ἐπισκοποίη, τὰ τότε καὶ τὰ νῦν συγκρίνων, εὕροι ἂν ἐν χρήσει οὖσαν καὶ
τότε τὴν ποικιλίαν. (201) τῇ γὰρ περὶ τὰς ῥυθμοποιίας ποικιλίᾳ οὔσῃ
ποικιλωτέρᾳ ἐχρήσαντο οἱ παλαιοί· ἐτίμων γοῦν τὴν ῥυθμικὴν ποικιλίαν -
(202) καὶ τὰ περὶ τὰς κρουσματικὰς δὲ διαλέκτους τότε ποικιλώτερα ἦν·
(203) οἱ μὲν γὰρ νῦν φιλομελεῖς, οἱ δὲ τότε φιλόρρυθμοι.
(204) δῆλον οὖν ὅτι οἱ παλαιοὶ οὐ δι´ ἄγνοιαν, ἀλλὰ διὰ προαίρεσιν
ἀπείχοντο τῶν κεκλασμένων μελῶν. (205) καὶ τί θαυμαστόν; πολλὰ γὰρ καὶ
ἄλλα τῶν κατὰ τὸν βίον ἐπιτηδευμάτων οὐκ ἀγνοεῖται μὲν ὑπὸ τῶν μὴ
χρωμένων, ἀπηλλοτρίωται δ´ αὐτῶν, τῆς χρείας ἀφαιρεθείσης διὰ τὸ εἰς ἔνια
ἀπρεπές.
| [11] XI. — Des formes musicales rejetées par un goût sévère.
«D'une manière générale, si les anciens n'ont fait usage que d'un petit
nombre de modes, ce n'est pas faute de les connaître tous. Ce n'est point
par ignorance qu'ils se sont mis si fort à l'étroit et n'ont employé que
si peu de cordes; ce n'est point par ignorance qu'Olympos, Terpandre et
les sectateurs de leur école ont retranché de leurs chants la multiplicité
des sons et la variété des modulations. J'en ai pour témoin les
compositions mêmes d'Olympos et de Terpandre et de tous les maîtres du
même style. Avec leur nombre exigu de cordes et leur simplicité, elles
l'emportent à tel point sur les compositions variées et multicordes, que
nul ne peut imiter le style d'Olympos et qu'il laisse derrière lui tous
les auteurs d'airs chargés de notes et de modulations.
«Une preuve évidente que ce n'est pas par ignorance que les anciens se
sont abstenus de la trité (Ut) dans le style spondiaque, c'est l'emploi
qu'ils faisaient de cette note dans la partie d'accompagnement : jamais
ils ne l'auraient employée en consonance avec la parhypate (Fa), ... s'ils
ne l'avaient pas connue. Il est clair que la beauté du caractère qui
résulte de la suppression de la trité dans le style spondiaque est la
véritable cause qui a déterminé leur sentiment musical à conduire
directement la mélodie vers la paranète (Ré).
«Même observation en ce qui concerne la nète (Mi 2). Elle aussi était
employée dans l'accompagnement, tantôt en dissonance avec la paranète
{Ré), tantôt en consonance avec la mèse (La) ou la paramèse (Si) ; mais
dans le chant elle ne paraissait pas convenir au style spondiaque.
«Ce n'est pas tout : la trité des conjointes (Si bémol) était employée
par tous de la même façon. Dans l'accompagnement, on s'en servait en
dissonance avec la paranète (Ré) et la lichanos (Sol); dans le chant on
aurait eu honte d'en faire usage, à cause du caractère qui en résulte. Les
airs phrygiens prouvent bien que cette note n'était pas inconnue d'Olympos
et de ses disciples : en effet, elle figure non seulement dans
l'accompagnement, mais encore dans le chant des Métroa et de quelques
autres compositions phrygiennes.
«Enfin, en ce qui concerne le tétracorde des hypates (Si-Mi 1), il est
encore visible que ce n'est pas par ignorance qu'ils s'en abstenaient dans
les airs doriens : en effet, ils s'en servaient dans les autres modes,
preuve qu'ils le connaissaient bien ; mais, pour conserver le caractère
moral, ils le supprimaient dans le mode dorien dont ils respectaient la beauté.
«Il en est de même des poètes tragiques. Aujourd'hui encore la tragédie
s'abstient du genre chromatique, tandis que la cithare, plus ancienne de
plusieurs générations que la tragédie, en a fait usage dès l'origine.
— D'ailleurs, il est clair que le chromatique est plus ancien que
l'enharmonique : plus ancien, bien entendu, par rapport à la découverte et
à l'usage qu'en ont fait les hommes, car, à considérer les genres en
eux-mêmes, selon leur nature, aucun n'est plus ancien que l'autre. — Si
donc on prétendait qu'Eschyle et Phrynichos se sont abstenus du
chromatique faute de le connaître, ne serait-ce pas une absurdité? A ce
compte, on pourrait prétendre que Pancratès aussi ignorait le genre
chromatique; il s'en abstenait, en effet, dans la plupart de ses ouvrages,
mais il s'en est servi dans quelques-uns; son abstention n'était donc pas
ignorance, mais système : il avait pris pour modèle, comme il l'a dit
lui-même, la manière de Pindare et de Simonide, et en général ce qu'on
appelle aujourd'hui «le vieux style».
«Le même raisonnement s'applique à Tyrtée de Mantinée, à André de
Corinthe, à Thrasylle de Phlionte et à beaucoup d'autres, qui tous, nous
le savons, se sont abstenus, par système, du chromatique, des modulations,
de l'abondance des notes, et de bien d'autres procédés d'usage courant,
rythmes, harmonies, mots, mélopées, interprétation. Pareillement
Téléphanès le Mégarique avait une telle aversion pour les syringes qu'il
ne permit même jamais à ses facteurs d'en adapter à ses flûtes : ce fut
aussi la principale raison qui l'empêcha de concourir aux jeux Pythiques.
En général, si du non-usage il fallait toujours conclure à l'ignorance,
beaucoup même de nos contemporains n'échapperaient pas à la censure : par
exemple, les flûtistes de l'école de Dorion qui méprisent la manière
d'Antigénidas puisqu'ils n'en font pas usage, et réciproquement les
Antigénidiens qui traitent de même le style de Dorion ; ou encore les
citharèdes, qui rejettent la manière de Timothée et se sont presque tous
jetés dans les pots-pourris de .... et dans les broderies de Polyeidos.
«Au surplus, si l'on examine avec équité et en connaissance de cause
cette question de la variété, en comparant la musique d'autrefois et celle
d'aujourd'hui, on reconnaîtra que même dans ce temps-là la variété était
en usage. Ce sont les formes de la rythmopée qui présentaient chez les
anciens une variété supérieure à celle d'aujourd'hui — car ils faisaient
grand cas de la variété des rythmes — ainsi que les dessins de
l'instrumentation : les musiciens d'aujourd'hui sont amoureux de mélodies,
ceux d'autrefois l'étaient de rythmes.
«Il est donc clair que c'est par choix, et non par ignorance, que les
anciens se sont abstenus des mélodies brisées. Pourquoi s'en étonner?
Beaucoup d'autres choses auxquelles s'appliquent les hommes sont
repoussées par quelques-uns, non point par ignorance, mais parce que, les
considérant comme inconvenantes à certains égards, ils ont renoncé à s'en
servir.
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